Abstracts
Résumé
Les politiques d’immigration du Québec et du Canada visent à attirer des candidats très qualifiés. Pourtant, ces migrants font face à de nombreuses barrières sur le marché du travail local. L’expérience des médecins diplômés à l’étranger ayant immigré au Québec est particulière en raison de la complexité du processus de reconnaissance professionnelle. Basé sur une recherche qualitative menée auprès de diplômés internationaux en médecine (DIM) et d’acteurs clés, cet article traite du caractère dynamique et relationnel de ce processus de reconnaissance, influencé par des rapports sociaux témoignant des relations inégalitaires entre certaines populations. Comme les trajectoires d’intégration professionnelle sont différenciées et que certains DIM semblent devoir surmonter plus d’obstacles que d’autres, nous discutons des aspects souvent invisibilisés de mécanismes qui influencent la reconnaissance sociale et professionnelle de médecins tentant de faire carrière au Québec, au-delà des qualités individuelles des DIM concernés.
Mots-clés :
- Médecins diplômés à l’international,
- reconnaissance professionnelle,
- Québec,
- discrimination,
- ressources symboliques
Abstract
Quebec and Canada’s immigration policies aim to attract highly skilled candidates. Yet these migrants face multiple barriers in the labour market. International medical graduates (IMGs) encounter a complex process by which their skills are recognized (or not). Based on a qualitative research with IMGs and key figures in this knowledge & professional skills area, this article discusses the dynamic and relational nature of the recognition process, influenced by social relationships highlighting unequal relations between certain populations. Seeking to understand why some IMGs experience more obstacles than others, beyond factors related to personal characteristics, this article explores how subjective or invisibilized mechanisms at play colour the social and professional recognition of physicians whose aim is to practise medicine in Quebec.
Keywords:
- International Medical Graduate (IMG),
- professional recognition,
- Quebec,
- discrimination,
- symbolic resources
Article body
Introduction
Les ordres [professionnels] doivent éviter le réflexe de considérer ce qui est différent comme étant moins pertinent ou ayant moins de valeur
Commissaire aux plaintes en matière de reconnaissance des compétences professionnelles et al. 2017 : 18
Le phénomène de globalisation et la circulation intensifiée de professionnels hautement qualifiés[2] amènent le Québec et le Canada à se positionner dans un contexte de compétition internationale pour ces « compétences mobiles ». Les politiques d’immigration québécoises et canadiennes visent principalement à attirer des candidats extrêmement compétents, « les meilleurs » (CIC 2011). Ainsi, plus des deux tiers des immigrants sélectionnés par le Québec détiennent un diplôme universitaire, incluant des diplômés internationaux en médecine (DIM)[3] (MIDI 2016b). À l’instar de l’Australie, des États-Unis ou de l’Europe, le Canada s’inscrit dans ce « marché mondial des compétences médicales » (Séchet et Vasilcu 2012). Depuis 2006, en moyenne 250 diplômés en médecine immigrent chaque année au Québec (MIDI 2016a).
Or, depuis trente ans, la diversification de l’immigration a changé le visage du pays et de la province (Statistique Canada 2017), faisant émerger de nouveaux enjeux concernant l’intégration professionnelle des nouveaux arrivants. En effet, malgré leur expérience professionnelle et leur scolarité, leur taux de chômage est supérieur et leur salaire inférieur à ceux des personnes nées au pays, particulièrement au Québec (Boudarbat 2011; Posca 2016). Ce constat touche spécialement les migrants membres de professions réglementées, qui affichent un taux de requalification inférieur aux autres professions, le Québec ayant le taux le plus bas au pays (19 % contre 33 % au Canada) (Zietsma 2010).
Comment expliquer le fait que nous croisions des DIM dans les couloirs d’un hôpital de Montréal alors que parallèlement nous entendons toujours ces récits de médecins devenus chauffeurs de taxi ou préposés aux bénéficiaires? Dans un contexte de mobilité accélérée des personnes où le Québec et le Canada cherchent à se tailler une place avantageuse au sein de la compétition internationale pour « ces talents », comment comprendre la discordance entre des trajectoires professionnelles facilitées pour certains migrants et d’autres, qui relèvent du parcours du combattant afin d’intégrer le marché du travail?
Cet article découle d’une recherche[4] menée auprès de DIM et d’acteurs clés pouvant contribuer à leur intégration socioprofessionnelle au Québec. L’objectif est de soulever les enjeux entourant la reconnaissance professionnelle et les parcours différenciés de ces « médecins mobiles ». Le caractère dynamique et relationnel du processus de reconnaissance y est traité, influencé par des rapports sociaux mettant en exergue des relations inégalitaires entre certaines populations. En tenant compte des trajectoires d’intégration professionnelle différenciées où certains DIM doivent surmonter plus d’obstacles que d’autres, et en cherchant à comprendre ces enjeux au-delà de l’exploration de facteurs explicatifs liés aux caractéristiques personnelles des migrants concernés, cet article montre comment des aspects subjectifs ou rendus invisibles influencent la reconnaissance sociale et professionnelle de ces médecins.
L’existence d’une discrimination systémique freinant les possibilités professionnelles de personnes immigrantes est largement documentée (Blain et al. 2018; Chicha 2012; Eid 2012a, 2012b; Piché et Renaud 2018). Par ailleurs, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse soulève les enjeux spécifiques auxquels certains DIM sont confrontés (CDPDJ 2014, 2013, 2010a, 2010b). En écho à ces travaux et en partant du constat que ce phénomène touche les personnes immigrantes en général, notre analyse rend compte de mécanismes invisibilisés qui ont pour effet une reconnaissance professionnelle accrue des migrants en provenance de pays occidentaux. En complément à ces études, nos résultats mettent en lumière des phénomènes qui peuvent conduire à une racialisation des rapports sociaux. Le processus d’intégration professionnelle est considéré bidirectionnel, où tant la personne immigrante que la société d’accueil et ses institutions jouent un rôle (MIDI 2015; Piché et Renaud 2018; TCRI 2002). L’analyse explore ces deux facettes de l’intégration, en observant, d’une part, des mécanismes relevant de la société d’accueil (reconnaissance/discrimination) et, d’autre part, des mécanismes propres à l’individu (stratégies, adaptations, processus de socialisation à la culture organisationnelle).
Dans cet article, nous présentons d’abord les enjeux éthiques liés à la mobilité professionnelle de ces médecins et le portrait sommaire de leur intégration au marché du travail, pour aborder ensuite notre méthodologie de recherche et la population à l’étude. La présentation des résultats donne à voir des trajectoires d’intégration professionnelle différenciées et ce faisant, deux ensembles de facteurs externes (société d’accueil) et internes (individus) qui modulent ces trajectoires et reflètent la bidirectionnalité de l’intégration. Il s’agit, d’une part, des pratiques mettant en lumière la place des ressources symboliques (processus de légitimation et discrimination; subjectivités au coeur des processus de reconnaissance). D’autre part, il est question des processus d’acquisition par les DIM de normes et de codes informels favorisant la reconnaissance (adaptation, socialisation à la culture organisationnelle). Ce faisant, cet article cherche à mieux comprendre comment des processus de reproduction organisationnelle privilégiant la reproduction de la norme peuvent défavoriser des candidats aux profils différents et de quelle manière les politiques d’immigration et de reconnaissance actuelles peuvent exacerber la reproduction de présupposés quant aux compétences de diplômés non occidentaux.
Problématique
Mobilités internationales et enjeux éthiques
The poor utilization of the skills of IMG [International Medical Graduate] results in a loss to both the health systems of their countries of origin and Canada as their country of destination
Bourgeault et Neiterman 2013: 205
Les mobilités internationales des professionnels de la santé soulèvent des enjeux éthiques à trois niveaux. Premièrement, soulignons la liberté de circulation des individus comme principe éthique dans un monde de plus en plus mobile (Organisation mondiale de la santé [OMS] 2010). Parallèlement, l’OMS est préoccupée par les conséquences de cette fuite des cerveaux (brain drain) sur l’équité de l’accès aux soins, particulièrement dans les pays touchés par une pénurie aiguë de personnel de la santé. En réaction à cet enjeu et en guise de cadre de référence, l’OMS fait la promotion d’un code de bonne pratique vis-à-vis du recrutement de professionnels de la santé – code qui n’est toutefois pas contraignant juridiquement (ibid.). Une fois ces individus mobiles établis dans un nouveau contexte national, un troisième enjeu apparaît, qui n’est pas abordé par l’OMS : celui de leur (non)reconnaissance professionnelle, qui peut occasionner un gaspillage de compétences (brain waste) (Bourgeault et Neiterman 2013; Favell et al. 2007). Pourtant, au Québec et au Canada, ces personnes ont pour la plupart été sélectionnées en fonction de leur « capital humain » (Picot et al. 2014). De fait, l’enjeu éthique lié à la fuite des cerveaux se trouve exacerbé lorsque le pays d’accueil n’offre pas les conditions nécessaires à la reconnaissance des compétences (Blain 2016; Bourgeault et Neiterman 2013; Harris et Guillemin 2015).
Les médecins diplômés à l’étranger et l’intégration au marché du travail
Sous l’apparente universalité des connaissances biomédicales, chaque contexte national a des pratiques et des processus particuliers relatifs à la reconnaissance des compétences des personnes immigrantes (Dauphinee 2003; Dumont et Zurn 2007). Au Canada, ce processus est de juridiction provinciale et sa durée est variable selon chacune des voies d’entrée pour l’accréditation des titres en médecine (externat, résidence, fellowship, permis restrictif comme professeur ou spécialiste), allant de quelques mois à plus de six ans. De fait, cela peut prendre jusqu’à dix ans, si le DIM n’est pas en mesure de passer les examens requis par le Collège des médecins de manière consécutive (souvent en raison des coûts), ou si sa demande d’admission en résidence n’est pas reçue favorablement dès la première tentative (Bardaï 2010; Blain 2016). Le Groupe Ressources humaines en santé (2013) souligne que le gouvernement et les différentes sources d’informations sous-estiment généralement la durée du processus menant à l’obtention du permis d’exercice. Aussi, la fragmentation du processus de reconnaissance professionnelle des DIM à travers différentes instances responsables[5] donne lieu à un parcours d’intégration cloisonné au sein duquel la concertation entre les acteurs impliqués est un enjeu de taille (Belkhodja et al. 2009; Bourgeault et Neiterman 2013; Chicha et Charest 2008).
Quelques statistiques
Bien que le nombre exact de médecins diplômés à l’étranger soit difficilement quantifiable en raison d’une invisibilité statistique[6], nous estimons qu’au moins 6 000 DIM habitent au Québec, et travaillent ou non comme médecin (Blain 2016). Durant les dix dernières années seulement, entre 2006 et 2015, le Québec a reçu plus de 2 600 médecins, dont un peu plus de la moitié sont spécialistes (56 %) et le reste des médecins omnipraticiens (44 %) (MIDI 2016a). Parmi ces nouveaux arrivants, près de 90 % connaissent le français, dont plus des deux tiers sont bilingues (anglais et français). Leurs régions de provenance sont diverses : 43 % viennent de l’Afrique, 21 % de l’Asie, 19 % de l’Europe et 17 % de l’Amérique. Bien que leurs pays d’origine soient très diversifiés, les six principaux (environ 35 % du bassin) sont : l’Algérie, l’Égypte, l’Iran, Haïti, la France et le Liban.
Au total, en 2018, 1 950 médecins diplômés à l’étranger ont leur permis de pratiquer la médecine au Québec (9,4 % du corps médical), soit le taux le plus bas au Canada (moyenne de 22 %) (Canadian Medical Association [CMA] 2018).
Par ailleurs, nous ne savons pas exactement combien d’entre eux se sont réorientés vers d’autres professions. En effet, si les difficultés d’intégration professionnelle des DIM sont bien documentées au Québec (Bardaï 2010; Blain 2016; Blain et al. 2017, 2014) et au Canada (Bourgeault et Neiterman 2013; Dauphinee 2007; Foster 2008), très peu de données statistiques précises portent sur les DIM au Québec. Nous savons que le taux moyen de réussite à l’admission des DIM en résidence au Québec entre 2010 et 2014 a été de 26 %[7], même s’ils ont obtenu au préalable une équivalence de leur diplôme par le Collège des médecins[8]. Selon l’analyse des données du recensement canadien de 2006, 56 % des médecins diplômés à l’étranger travaillent comme médecin, en comparaison à 92 % pour les médecins nés au Canada (Zietsma 2010). La situation des DIM peut également être compliquée du fait que des postes intermédiaires comme ceux d’infirmier(ère) ou de technologue sont aussi réglementés. Cela limite l’accès au marché du travail sans retour aux études ou favorise l’adoption de postes non régis ou relativement plus faciles d’accès, tels que ceux d’assistant(e) de recherche, de gestionnaire de projets en santé publique ou de préposé(e) aux bénéficiaires, voire d’autres emplois hors du domaine de la santé (Baldacchino et Hood 2008; Groupe Ressources humaines en santé 2013; Türegün 2011).
Facteurs en jeu
Pour la population immigrante en général, plusieurs facteurs ou leur cumul peuvent freiner l’obtention d’un emploi correspondant à leurs qualifications. Les diplômés internationaux en santé n’échappent pas à ces tendances. Les facteurs les plus fréquemment cités sont : le genre (être une femme), l’âge (être trop ou pas assez jeune), l’origine nationale (provenir d’un pays non occidental), le fait d’appartenir à une minorité visible, le fait de ne pas maîtriser l’une des langues officielles, la période d’immigration (après 1990 particulièrement), le fait de viser l’exercice d’une profession réglementée (Belkhodja et al. 2009; Boyd 2013; Galarneau et Morissette 2004; Li et al. 2006; Renaud et al. 2003; Zietsma 2010). Pour les DIM, les coûts associés au processus de reconnaissance professionnelle et sa durée sont des freins importants, tandis que les ressources financières limitées et le fait de devoir occuper des emplois de survie durant le processus ont des effets dissuasifs (Bardaï 2010; Chicha 2009; Groupe Ressources humaines en santé 2013; Türegün 2011). De plus, certains vont s’auto-exclure du processus, anticipant un échec ou jugeant que l’investissement de temps et d’énergie n’en vaut pas la peine (Blain 2016; Chicha et Charest 2008; Comité interministériel 2017; Saint-Arnaud 2018).
Aucune étude statistique n’a encore été publiée au Québec concernant les différences d’intégration professionnelle selon le pays dans lequel les DIM ont obtenu leur diplôme. Cependant, des pistes se dégagent des données canadiennes. Il apparaît que les DIM originaires de pays francophones ou anglophones qui ont des « systèmes d’éducation semblables » occuperaient un poste de médecin dans une plus forte proportion que les migrants arrivés après les années 1990 et ceux qui sont originaires de pays en développement, qui éprouveraient davantage de difficultés (Boyd 2013; Zietsma 2010). Par ailleurs, en ce qui concerne l’admission en résidence, les médecins diplômés d’Océanie[9] (46 %) et d’Europe (37 %) semblent favorisés, en comparaison de ceux d’Asie, d’Afrique ou du Moyen-Orient (environ 15 %) et d’Amérique centrale et du Sud (environ 20 %)[10] (Canadian Resident Matching Service [CaRMS] 2017). Comment interpréter ces différences? Ces trajectoires d’intégration différenciées selon les régions du monde s’expliqueraient-elles par des phénomènes de discrimination ou de réceptivité différente selon la provenance des migrants, la qualité perçue des diplômes ou le processus d’adaptation des candidats? Le phénomène est complexe et requiert une lecture multifactorielle.
La manière dont un ensemble de facteurs explicatifs peut relever de la discrimination systémique a été documentée. Ainsi, celle-ci dépend notamment du fonctionnement d’un système qui engendre, par des pratiques, volontaires ou non, neutres en apparence, des écarts entre deux groupes de personnes (Blain et al. 2018; CDPDJ 2008; Chicha 2012; Piché et Renaud 2018). Les groupes visés doivent ainsi en faire plus pour arriver aux mêmes résultats (surinvestissement dans les études, multiplication des stratégies d’insertion, temps d’insertion prolongé, etc.). Comme en témoigne la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec (CDPDJ 2008 : 12) :
La discrimination systémique en matière d’emploi, c’est la discrimination qui résulte simplement de l’application de méthodes établies de recrutement, d’embauche et de promotion, dont ni l’une ni l’autre n’a été nécessairement conçue pour promouvoir la discrimination. […] Elle résulte de pratiques et de politiques établies qui, en fait, ont une incidence négative sur les perspectives d’embauche et d’avancement d’un groupe particulier.
Ces processus de discrimination systémique peuvent se situer en amont (accès au marché du travail) et en aval (intégration et mobilité professionnelle). Dit autrement, Chicha (2009 : 12) précisera :
La discrimination en milieu de travail peut se manifester de façon très ouverte ou de façon subtile, dissimulée derrière des exigences professionnelles apparemment objectives (racisme et sexisme modernes). Elle prend également la forme de pratiques de gestion des ressources humaines dites ‘neutres’, mais qui ont un effet négatif disproportionné en fonction du sexe, de l’origine nationale ou d’autres critères.
La discrimination systémique est très difficile à appréhender de manière qualitative, dans la mesure où il s’agit d’un processus lié à l’accès et au maintien en emploi, qui touche aussi les ressources et les services dédiés aux personnes immigrantes. Ces enjeux peuvent également trouver écho dans la réceptivité des sociétés d’accueil dont les représentations jouent tantôt en faveur, tantôt en défaveur de certains groupes (Bourhis et al. 2008; Juteau 2015; Piché et Renaud 2018, 2002). Ses effets sont toutefois palpables à travers l’analyse statistique, la documentation de l’accessibilité des ressources ainsi que des représentations et des expériences récurrentes. Nous explorons plus loin ces derniers aspects.
Méthodologie
Les résultats sont issus d’une recherche anthropologique réalisée au Québec entre 2009 et 2012, guidée par une approche interactionniste et inspirée par la sociologie organisationnelle et par la sociologie de la santé (Massé 2010; Sainsaulieu 1997). L’objectif principal était de documenter les processus complexes qui orientent les parcours d'intégration professionnelle des DIM, en particulier les stratégies et les ressources utilisées. Une cinquantaine de personnes ont été rencontrées dans le cadre d’entretiens semi-dirigés ou non dirigés.
Les analyses principales se basent sur les récits de vie professionnelle pré- et post-migratoires de 31 DIM (corpus principal). Ces entretiens ont permis d’explorer leurs trajectoires prémigratoires, leurs parcours professionnels au Québec, leurs projets et leurs visions de l’avenir. Le corpus principal a été complété par des entretiens non dirigés auprès de 22 personnes, dont 11 acteurs institutionnels et communautaires (responsables de l’embauche en milieu clinique [2], représentants d’organismes d’aide à l’emploi [5], membres d’associations de DIM [2], consultant en immigration [1], ressource pour les résidents [1]) et 11 DIM très récemment immigrés ou projetant d’immigrer[11]. De façon complémentaire, des observations ethnographiques ponctuelles ont été réalisées (participation à la vie associative de DIM, conférences du Collège des médecins, etc.) afin de mieux comprendre les défis que rencontrent les DIM.
Les entretiens semi-dirigés ont été enregistrés et transcrits, les observations et les entretiens non dirigés annotés dans un cahier. L’analyse interprétative et l’anthropologie critique soutiennent l’approche analytique (Massé 2010; Paillé et Mucchielli 2008). Les récits de vie professionnelle ont été analysés à partir de thèmes préétablis, tandis que d’autres ont émergé durant le terrain. De plus, une typologie des parcours d’insertion a été dégagée et mise en relation avec le contexte politique, les catégories d’immigration et les profils sociodémographiques des répondants (Demazière et Dubar 2004). Les données secondaires nous ont permis de mettre en perspective les analyses principales, en confirmant ou en apportant un éclairage nouveau sur les représentations des DIM.
Description de la population à l’étude
Le corpus principal est composé de 31 DIM, autant d’hommes que de femmes, âgés de 33 à 55 ans et parlant français (langue maternelle ou apprise). Au moment de l’entrevue, tous étaient immigrants reçus (résidents permanents de catégories diverses : travailleurs qualifiés, réunification familiale ou réfugiés) et vivaient au Québec depuis six ans en moyenne. Les lieux d’origine et les pays d’obtention du diplôme de médecine[12] sont très variés. À l’instar du portrait de l’immigration au Québec, la même diversité était souhaitée dans notre étude (voir Tableau 1).
Avant la migration, les deux tiers travaillaient en tant qu’omnipraticiens. Parmi ces derniers, sept travaillaient dans la santé publique ou l’administration. Le dernier tiers était composé de professeurs-chercheurs ou de médecins spécialistes (voir Tableau 2).
Notre objectif était de rencontrer autant de DIM travaillant comme médecins au Québec que d’autres s’étant réorientés au niveau professionnel. Au moment de l’enquête, 15 ont intégré la profession médicale au Québec (ou s’apprêtent à le faire). Ces « requalifiés » ont obtenu des postes de professeurs-chercheurs (5), de médecins spécialistes (2), de médecins de famille (3), étaient en résidence (4) ou en démarches pour obtenir leur permis d’exercice (1). L’autre moitié (16) a changé de carrière et s’est réorientée vers des professions non médicales. À l’exception d’une personne qui s’est dirigée vers des études supérieures en sciences sociales et d’une autre sans expérience professionnelle au Québec, tous se sont réorientés dans le domaine de la santé : soit dans le milieu non clinique au niveau universitaire[13] (cinq sont en poste à la suite d’études supérieures au Québec, six toujours aux études), soit en santé clinique comme techniciens (3). Il est à noter qu’au cours de leurs trajectoires d’intégration professionnelle, les deux tiers (tant réorientés que requalifiés) ont occupé un emploi déqualifié, c’est-à-dire un emploi en deçà de leur niveau de compétences ou d’études, les professeurs-chercheurs faisant majoritairement exception.
Des trajectoires différenciées d’intégration professionnelle
L’analyse des trajectoires d’intégration professionnelle des 31 DIM rencontrés met en lumière des tendances particulières, dont la typologie est résumée dans le tableau 3.
L’observation des trajectoires d’intégration professionnelle permet de constater que les parcours facilités concernent majoritairement des médecins surspécialistes[14], des professeurs et des chercheurs occidentaux, en l’occurrence de la France[15]. Ce sont généralement des spécialistes de pointe. Parmi tous nos répondants, six personnes ont suivi cette trajectoire : trois femmes et trois hommes, soit cinq professeurs-chercheurs et un médecin de famille, tous originaires de France, et détenant tous un permis restrictif. Les points communs de ces trajectoires sont les suivants : une requalification dans un poste similaire à celui qui était occupé avant la migration s’accompagnant parfois d’un sentiment d’avancement professionnel, une durée de requalification plutôt courte (de un à trois ans), un processus facilité (la reconnaissance professionnelle se fait d’emblée ou après quelques démarches, l’envoi d’un CV ou le contact avec une personne clé). En outre, les institutions qui les ont embauchés se sont mobilisées pour les recruter et les retenir. Aussi, leur reconnaissance professionnelle se fait à travers les ressources formelles de la société locale (mainstream), tels un responsable d’embauche d’une institution hospitalière, un doyen universitaire, le Collège des médecins, etc.
Les parcours du combattant sont les trajectoires les plus longues et les plus complexes, d’une durée de trois à dix ans. Ici, ce sont des diplômés de toutes origines, sauf de la France (et des pays occidentaux en général, pourrions-nous dire). Ces répondants (9 sur 31) sont des diplômés d’Europe de l’Est (Roumanie), d’Amérique latine (Colombie, Chili et Argentine), du Maghreb (Algérie), des Antilles (Cuba). Six d’entre eux étaient des omnipraticiens avant leur migration (les parcours les plus longs ont duré au moins six ans) et trois étaient des médecins spécialistes (de trois à six ans, d’Argentine et d’Algérie via le permis restrictif, et de Colombie via la résidence). À la différence des DIM qui accèdent assez rapidement à la pratique et à une reconnaissance professionnelle formelle, ces médecins sont contraints à un parcours de reconnaissance long et exigeant. Ces résultats peuvent être interprétés en concordance avec les données du CaRMs (2017) au Canada, où les parcours sont apparemment plus ardus pour des diplômés de pays non occidentaux. Ces parcours du combattant ont en commun la durée du processus (qui va de plus de trois ans jusqu’à plus de six ans) et la nécessité de multiplier les démarches et les stratégies. Un fort investissement d’argent, de temps et d’énergie est aussi requis dans un contexte caractérisé par l’incertitude du dénouement. La consultation ou l’appui des ressources formelles (Collège des médecins ou Recrutement Santé Québec, par exemple) n’est pas suffisant. La capacité de tracer son chemin dans un parcours complexe et compartimenté requiert des informations stratégiques, alors que les ressources de soutien significatives les plus souvent évoquées sont des ressources de soutien informelles (d’autres DIM, la famille et des associations de DIM). De ces parcours se dégage la nécessité « d’en faire plus » pour arriver au même résultat, ce qui représente un indice de discrimination systémique (Piché et Renaud 2018, 2002).
La troisième trajectoire type est composée de 16 DIM qui ont effectué une réorientation professionnelle. Ceux-ci peuvent avoir entamé, ou non, des démarches d’accréditation comme médecin, leur réorientation professionnelle peut être de niveau technique ou universitaire, leur trajectoire d’emploi peut impliquer ou non une mobilité professionnelle ascendante. Il s’agit essentiellement de ne plus pratiquer la médecine, peu importe le niveau ou le secteur d’emploi. Ils ont des profils et des parcours hétérogènes, il y a autant d’hommes que de femmes. Ils sont diplômés de différents pays, mais, fait à noter, aucun homme diplômé de France n’est réorienté dans notre étude. La plupart (12 sur 16) ont intégré des filières universitaires, trois dans des filières techniques et une n’a pas d’expérience professionnelle au Québec. Les réorientés ont en commun d’avoir opté pour un retour aux études peu de temps après leur arrivée[16], particulièrement à la suite de discours pessimistes d’instances officielles ou après avoir occupé des emplois de survie. Les deux femmes réorientées originaires de la France[17] (niveaux supérieurs, sciences sociales ou santé non clinique) ont par ailleurs été touchées par les discours pessimistes d’instances officielles quant à leurs perspectives de requalification (auto-exclusion du processus, avant l’existence des ARM).
Une reconnaissance professionnelle différenciée?
Comment expliquer ces trajectoires d’intégration professionnelle différenciées? Ces résultats demandent réflexion : en évoquant la comparabilité des systèmes d’éducation, sommes-nous en présence d’un système de reconnaissance qui déclasse d’emblée les compétences de médecins de certaines régions du monde, en particulier des régions non occidentales? Cette section explore des mécanismes invisibilisés pouvant avoir cours, en particulier l’effet des représentations, et ce, à travers une vision de l’intégration conçue comme dynamique et bidirectionnelle où seront abordés : 1) le rôle de la société d’accueil et de ses institutions (reconnaissances/discrimination) et 2) les stratégies de l’individu (adaptation, apprentissage et socialisation au marché du travail).
À la lumière des stratégies déployées afin de réintégrer la profession médicale, des processus de reconnaissance professionnelle différenciés apparaissent : pour certains médecins, le processus est plus ardu que pour d’autres. En effet, pour travailler comme médecin, tous doivent passer par les structures formelles, c’est un passage obligé. Mais certains auront une reconnaissance d’emblée, avec l’impression de n’avoir rien fait de particulier. C’est le cas des DIM requalifiés de la France, en contraste aux DIM de pays non occidentaux pour lesquels les processus sont beaucoup plus complexes. Ces trajectoires sont invisibilisées, dans le sens où ces médecins passent uniquement par les ressources des canaux officiels ou du mainstream (le Collège, un chef de service, un doyen universitaire, etc.). C’est le cas de Pierre qui a simplement envoyé son CV en réponse à une petite annonce qui a circulé dans son réseau :
Donc à la fois, sur le plan professionnel, personnel et puis… la France, particulièrement Paris, je ne me voyais pas vraiment continuer à vivre là, c’était un endroit désagréable. Donc un jour, il y a eu une petite annonce qui a circulé, disant qu’ils cherchaient quelqu’un qui avait exactement mon profil, donc j’ai postulé dans les 30 secondes qui ont suivi et puis après, six mois après, j’étais là
Pierre, professeur, démarches de six mois depuis la France pour la reconnaissance
Ceux qui suivent un parcours du combattant n’ont pas le choix : ils doivent diversifier leurs stratégies. Il s’agit pour eux d’être stratégiques, de frapper à la « bonne porte » et d’avoir les ressources nécessaires. Ces ressources, particulièrement celles de nature financière, sont indispensables afin de compléter l’ensemble du processus de reconnaissance professionnelle qui, rappelons-le, est d’une durée minimale de trois ans et qui requiert un investissement de temps considérable, devenant une activité à temps plein. Ces DIM mettent en branle des stratégies de « surinvestissement » dans les études et développeront le plus souvent un réseau d’appui de pairs DIM afin de connaître les informations informelles de ce parcours d’initiés, comme la nécessité des stages d’observation. Par ailleurs, au cours de ce long processus de requalification, l’incertitude guette les DIM à chacune des étapes. « C’est très dur, les résultats sont imprévisibles » confiera Eduardo (d’Argentine), aujourd’hui médecin spécialiste au Québec après un parcours du combattant de six ans. Les effets concrets de ce travail en silo amènent des possibilités d’incongruence qui peuvent avoir « des conséquences de vie ou de mort professionnelle » comme l’explique un intervenant (notes d’observation, formation auprès de conseillers en emploi 2017). L’incertitude et le stress sont présents tout au long de ce processus qui s’étale sur plusieurs années.
Ressources symboliques et reconnaissance différenciée
Je sens toujours que je suis différente […]. Avec cette vision [de préjugés] vis-à-vis des DHCEU, c’est le vécu qui est difficile – il y a le foulard, il y a le sexe… ça ce n’est pas modifiable
Femme du Maghreb, voilée, résidente en médecine. Notes d’observation, mars 2012
Discrimination et légitimation
L’argument de la qualité surestimée des niveaux de scolarité est porté par des instances officielles, dont le gouvernement du Canada. Selon leurs dires : « La qualité des systèmes d’éducation varie énormément d’un pays à l’autre, de sorte que le niveau de scolarité est susceptible de mener à une surestimation de la qualité des compétences des travailleurs de pays où le système d’éducation est de faible qualité, habituellement les pays pauvres » (Gouvernement du Canada et al. 2008 : 2). Est-ce sa qualité ou bien notre évaluation de sa qualité? Comment reconnaissons-nous cette qualité? Quelle est la part de la (non-)reconnaissance de la qualité de ces diplômes, selon la région du monde?
De fait, certains migrants sont perçus plus favorablement que d’autres (Bourhis et al. 2008; Fortin et al. 2011). Dans notre étude, nous pourrions dire que les porteurs de diplôme et de compétences de certaines régions du monde sont favorisés. Mais le fait que des candidats de pays non occidentaux éprouvent davantage de difficultés s’explique-t-il uniquement par la qualité de leur diplôme? Dans notre enquête, les parcours invisibilisés de candidats de l’Europe de l’Ouest, en contraste avec les parcours du combattant, montrent que les ressources symboliques de ces DIM jouent en leur faveur. Cette reconnaissance symbolique, entendue comme « la reconnaissance sociale du groupe, de la place qu’il occupe et de la valeur de cette place au sein d’un milieu donné » (Fortin et Carle 2007 : 9), est variable et permet de mieux saisir la situation des DIM. Le fait d’être diplômé d’une région favorisée, ou d’avoir la « bonne couleur de peau » diront d’autres, pourraient influencer leurs parcours d’intégration (Coker 2001; Foster 2008).
Bon, je pense d’abord, il y a l’accueil du Collège des médecins, ça, vraiment… (soupir) […] J’ai la bonne couleur de peau, j’ai la bonne langue. Mais. Bon. Mais ça m’a permis de pouvoir concevoir, quand on n’a pas tout à fait la bonne couleur de peau, ni le bon accent, comme ça doit être insupportable. […] Il faut vraiment être très accroché et avoir vraiment très, très envie de faire ça. Parce que… […] J’imagine ce qu’ils doivent passer comme insultes et comme injures que je n’ai pas eu à passer
Monique, de France, professeure-chercheure au Québec
La reconnaissance variable à laquelle sont soumis les DIM reflète le poids des ressources symboliques. Le titre de médecin ne voyage pas de la même manière selon sa provenance et n’a pas la même valeur selon où il va et d’où il vient. Outre les médecins d’Europe de l’Ouest engagés dans des trajectoires prestigieuses et compétitives avant la migration, qui sont toujours en poste lorsqu’ils sont recrutés, les DIM de notre enquête ont presque tous éprouvé des difficultés importantes et ont été exposés à des discours leur suggérant d’avoir des attentes « flexibles », pouvant aller jusqu’au deuil de la carrière en médecine.
Par ailleurs, le poids variable de l’incertitude dans leurs récits de vie professionnelle met en lumière ces rapports de force différenciés. En effet, de façon transversale, à l’exception des médecins requalifiés d’Europe de l’Ouest[18], transparaît un fort degré d’incertitude à toutes les étapes du processus de reconnaissance professionnelle où, jusqu’à la réussite du dernier examen, persiste toujours le doute de se requalifier. Ceci occasionne un stress important et parfois une hypervigilance durant la résidence en médecine :
Je pense que pendant tout, jusqu’à aujourd’hui, il y a plein d’angoisse. Parce que… parce qu’il y a plein d’incertitude pendant tout le processus. Je dirais que pendant les derniers cinq ans… ma vie a été beaucoup moins tranquille qu’en Colombie. Comme… je dors pas de la même façon ici que je dormais en Colombie...
Manuel, de la Colombie, en résidence
Dans d’autres situations, la reconnaissance symbolique prend la forme d’une valeur accordée à ce qui est similaire à « notre norme » (Fortin 2015; Fortin et Maynard 2015; Fortin et al. 2011). Cette situation semble être la démonstration exemplaire des pouvoirs de catégorisation où des étiquettes administratives délimitent qui peut appartenir ou non au groupe, la reconnaissance symbolique délimitant les frontières d’appartenance (Herzfeld 1992; Juteau 2015). L’anthropologue médicale australienne Anna Harris évoque la nature non seulement abstraite, mais aussi les conséquences concrètes de cette catégorisation administrative des DIM : « Classification shapes professional identity and career opportunity with implicit assumptions about quality of medical work and what makes a good doctor » (Harris 2013 : 219). Elle insiste sur la capacité stratégique des DIM de s’identifier autrement et de se tailler une place de façon créative dans le système médical, contrecarrant leur marginalisation.
L’apport de la sociologie organisationnelle permet de souligner l’aspect dynamique du processus d’intégration professionnelle (Sainsaulieu 1997). Il s’agit non seulement d’une question de compétences, mais aussi de pratiques organisationnelles et de gestion des ressources humaines. Ainsi, ces pratiques organisationnelles sont basées sur un principe de légitimation, de reconnaissance professionnelle et de capacité à s’insérer dans une culture organisationnelle donnée. La légitimation est ici comprise comme « des processus sociaux qui permettent l’élaboration d’objectifs légitimes », où « dirigeants, syndicats, corporatisme […] peuvent s’efforcer d’imposer la domination de leurs propres valeurs » (ibid. : 284). La profession médicale représente bien ce phénomène, les modalités d’inclusion des nouveaux membres constituant notamment une voie de légitimation du groupe (Noiriel 2004). Des recherches sur les pratiques d’embauche ont montré que les responsables du recrutement ont tendance à sélectionner des personnes faisant déjà partie de leur réseau de connaissances et appartenant au même groupe social qu’eux (Chicha 2002; Liu 2007). Dans notre enquête, cette légitimation a également trouvé écho dans une certaine idéologie exprimée implicitement ou explicitement, où les compétences du migrant sont le plus souvent considérées inférieures (Blain et al. 2014).
Karola Decker (2001) fait référence à une « ethnic penalty » pour les DIM, où le racisme en milieu médical revêt des formes complexes et requiert la prise en compte d’une perspective historique. La sociologue Danielle Juteau (2015) souligne elle aussi comment la racialisation des rapports sociaux opère de façon subtile, souvent invisibilisée, ancrée dans des dimensions historiques et donnant lieu à des rapports sociaux inégalitaires. Au Québec, le processus de reconnaissance des diplômes est basé sur le pays dans lequel le diplôme a été obtenu (et non sur l’origine ou la nationalité du candidat). Est-ce dire que le processus de reconnaissance professionnelle n’est pas influencé par l’ethnicité ou la culture? Il apparaît que certaines régions du monde sont favorisées par des ententes de reconnaissance bilatérale (en particulier la France), et que parallèlement, les processus de sélection des candidats[19] impliquent l’évaluation de compétences personnelles et relationnelles (soft skills). Est-ce dire que ces modalités de reconnaissance découlant d’ententes administratives et de l’évaluation subjective de qualités individuelles sont susceptibles d’induire une dynamique où des glissements de jugement peuvent s’opérer en fonction de l’origine (et ce, malgré les précautions prises par les différents responsables des évaluations des candidats)? Comme le souligne Decker (2001 : 50) : « Focusing on difficulties of language and cultural adaptation easily blurs the picture and results in “problematising” whole groups ».
La reconnaissance professionnelle : des processus subjectifs au coeur des évaluations
Bon, on sait que vous, les médecins étrangers, vous êtes faibles, et… vous avez beaucoup de problèmes dans la résidence, donc on va vraiment faire plus attention, parce qu’on a beaucoup de problèmes avec les étrangers!
Catiana, du Chili, relatant les propos d’une directrice de programme lors de son entrevue de sélection pour la résidence
D’autres recherches sont requises afin de mieux comprendre les trajectoires d’intégration d’un plus grand nombre de DIM. Certes, notre étude qualitative n’est pas représentative au sens statistique du terme. Elle permet néanmoins de cerner des mécanismes complexes grâce à des analyses croisées et approfondies des témoignages recueillis et de situations observées (non visibles par les enquêtes statistiques à plus grand déploiement). Ainsi, ces tendances nous incitent à nous pencher sur des processus qui se jouent à d’autres niveaux que la seule comparabilité de la scolarité et du capital humain. Par ailleurs, dans le cas des DIM qui doivent appliquer à la résidence en médecine, une fois leurs examens préliminaires du Collège des médecins complétés, les candidats retenus sur la base de leur dossier doivent se soumettre à un processus d’entrevue[20]. Pour les DIM, hormis ceux qui peuvent faire une demande de permis restrictif (spécialité en demande et pratique récente de la médecine clinique[21]), la requalification via la résidence est la norme pour les spécialités moins en demande et pour l’ensemble des omnipraticiens, sauf ceux de la France. Or, comme nous l’avons vu, le taux de réussite des candidats à la résidence en médecine est très bas au Québec, soit de 26 % pour la période de 2010 à 2014 (le taux moyen pour un diplômé du Canada est de 95 %; CaRMS 2017). Ce taux de réussite ne serait pas si alarmant s’il n’était pas accompagné par un nombre important de postes laissés vacants en résidence. En 2017, les facultés de médecine québécoises ont accepté 35 candidats DIM, en ont refusé 61, mais ont laissé en parallèle 95 places vacantes (CaRMS 2017), ce qui représente près de la moitié des postes vacants de l’ensemble du Canada (voir aussi CDPDJ 2014). Comme le rapporte la Commission des droits de la personne, « les facultés de médecine […] répliquèrent qu’elles préféraient laisser les postes vacants, estimant que les médecins DHCEU n’ayant pas été jumelés ne possédaient pas les “qualités requises” » (CDPDJ 2010d : 2).
Mais comment évaluer ces qualités? Les entrevues menées afin de vérifier si le candidat est « résidentiable » laissent une grande place à la subjectivité des évaluateurs, orientés par leurs perceptions relatives à la capacité du candidat de s’intégrer favorablement à l’équipe. En effet, dans ces circonstances, l’évaluation des compétences interpersonnelles des candidats telles que « la facilité de communication, la motivation, le dynamisme » peut représenter « une barrière culturelle qui peut bloquer l’accès » (Chicha 2009 : 49). Par ailleurs, « des comportements différents peuvent être interprétés comme un signe d’incompétence et entraîner l’élimination de candidats immigrés » (ibid.). Ainsi, le fait d’être diplômé d’une région considérée comme ayant un niveau de développement économique moindre peut mener à un jugement négatif sur la qualité des diplômes de la part des évaluateurs : « L’ambiguïté des informations disponibles peut donner prise à des jugements subjectifs, ayant un impact négatif sur l’intégration professionnelle des immigrants (Chicha 2012 : 98). Le témoignage ci-bas illustre cet étiquetage défavorable vis-à-vis des DIM considérés comme « non résidentiables ». Le candidat travaille actuellement dans le domaine de la santé et côtoie régulièrement des cliniciens et des professeurs en médecine :
[En] côtoyant les professeurs des universités, la plupart des médecins, ils disaient la raison pour laquelle le médecin étranger n’est pas accepté, malgré qu’ils laissent des postes vacants, c’est le fait que… les professeurs ont beaucoup de tâches et beaucoup d’engagements pour encadrer leurs résidents [formés] dans des universités canadiennes. [Les] médecins étrangers, on a cette étiquette. On est étiqueté dans le sens que ça leur prend plus d’efforts d’encadrer un médecin étranger qu’un médecin canadien. Et là on parle de quota. On revient à des quotas [informels] qui ne sont pas annoncés dans le site du CaRMs […]. Ils parlent de quota, d’un médecin étranger par unité de médecine familiale ou deux, au maximum. Et ça, je pense que c’est discriminatoire, parce qu’ils ne connaissent pas cette expérience-là, ils ne savent rien de cette personne-là qui a eu ses examens, etc. On ne lui donne pas cette chance de s’affirmer ou de montrer ses compétences. On le juge déjà que, ça va être un infirme, sur le terrain de stage. Donc « je vais pas l’accepter parce que ça va me coûter du temps »
Notes d’observation, activité associative, 2009. Témoignage d’un médecin DIM du Maghreb, à sa 3e tentative pour obtenir un poste en résidence
Une résidente en médecine relate avec détails son expérience d’entrevue pour la résidence. Son propos évoque sinon le déclassement ou la dévaluation de candidats provenant de pays du Sud, au moins un écart entre les références culturelles et les perceptions qui s’ensuivent. Catiana, diplômée du Chili, partage avec nous combien les questions d’entrevue l’ont chavirée émotionnellement. « Moi, j’étais vraiment comme blessée, parce que… non, pas blessée, vexée! »
Quand j’ai passé l’entrevue, c’est comme ça: « OK. Je sais que dans ton pays tropical, tu connais bien les maladies tropicales, dont la malaria… »… Mon pays n’est pas tropical! (rires!) Donc elle [la représentante de la faculté de médecine] me parlait de trucs… heu… J’ai dit : « Écoutez, Madame, en fait, on n’a pas de maladies tropicales au Chili, parce que vous savez, c’est l’Amérique du Sud, Sud, c’est près de l’Antarctique. Donc on n’a pas de climat tropical », « Ah bon? » … (rires!) OK. Ensuite : « Tu dois savoir qu’ici les enfants sont obèses! Hein? La malnutrition n’est pas un problème comme dans ton pays ». Je lui ai dit : « Écoutez, notre problème de santé publique, c’est l’obésité aussi. La malnutrition, ça a été réglé pendant les années 1960 au Chili. […] » Et… alors, j’ai détesté. […] Après ça, je me suis dit : « Je n’irai jamais en médecine familiale! ». (rires!) […] C’est trop de préjugés. C’est trop de préjugés. […] Et quand le CaRMS est venu, c’était une surprise! Je ne m’attendais pas à avoir la place. Et voilà, je l’ai eue!
Catiana, diplômée du Chili, résidente en médecine familiale, dans une autre université différente de l’évaluatrice ci-nommée
La question demeure. Comment rendre le processus d’évaluation des aptitudes des candidats plus objectif? Peut-être en réalisant d’une part que le processus n’est pas aussi objectif qu’il n’y paraît, et, ensuite, mieux accompagner les milieux en contexte de diversité. Comme le soulignait le Commissaire à l’admission aux professions, maître Gariepy :
Les individus impliqués dans les stages, que ce soit le maître de stage ou les personnes oeuvrant dans le milieu en question, sont parfois peu ou mal préparés pour gérer les différences culturelles – quand ils ne sont pas carrément réticents à accueillir des stagiaires issus de l’immigration. […] Peu importe l’ampleur du problème, il touche à une valeur fondamentale de notre société : le droit à l’égalité et à un traitement équitable
Gariepy et al. 2017: 39
Finalement, lors du processus de sélection pour la résidence, les évaluateurs devraient être en mesure de « départager ce qui est essentiel pour l’admission à la profession (compétence professionnelle) de ce qui peut être acquis ou développé en cours de pratique (attentes organisationnelles ou aspects relationnels) » (ibid. : 27). Ceci nous amène à la prochaine section sur le processus d’acquisition de codes et de normes propres au marché du travail et au milieu de la santé.
Processus d’apprentissage de codes et normes formels et informels
Les difficultés d’intégration professionnelle des DIM peuvent être liées au fait qu’ils doivent se familiariser avec les codes et les normes propres au milieu de la santé du Québec. Dans certains cas, les difficultés d’intégration professionnelle peuvent être surmontées grâce au processus d’adaptation et de socialisation au marché du travail des nouveaux arrivants, qui se familiarisent avec la culture locale, en particulier la culture organisationnelle (Piché et Renaud 2002). Notre enquête montre l’importance pour ces DIM d’acquérir des connaissances sur les façons de faire particulières de leur nouveau milieu de travail, grâce au soutien de pairs DIM, en plus des stages d’observation informels qui leur permettent de se familiariser avec le milieu, et ultimement, d’être mieux préparés pour les entrevues de sélection pour la résidence.
Mais là on s’est dit : il faut que tu aies un autre stage; il faut absolument que tu comprennes un peu plus… Parce que c’est une chose de bien étudier et de passer tous les examens, mais il fallait qu’il comprenne comment ça fonctionnait sur place! Déjà, dans son milieu, en Colombie, il n’y a pas [telle] thérapie dans son domaine – donc un élément important : voir comment la dynamique se passe en salle d’opération, bref!
Conjointe d’un DIM, aujourd’hui en résidence en spécialité
Ces stages d’observation permettraient aussi de se préparer au stage d’évaluation pour le permis restrictif.
Pourquoi ne vais-je pas faire un stage d’observation? Avant d’être évalué, pourquoi n’irais-je pas regarder ce qu’ils font? […] Voir un peu… me coller un peu aux résidents… voir un peu comment ça se passe, comment ça fonctionne, quelles sont leurs traditions de travail? […] pour me préparer au stage d’évaluation
Lahcen, Algérie
Pierre (originaire de France) est chef de service et témoigne de l’importance d’avoir un sas entre l’arrivée du candidat et son évaluation. En même temps, à titre de chef de service, sa réflexion glisse entre l’observation et l’évaluation d’un candidat, en opérant une distinction entre les candidats d’Europe de l’Ouest et les autres :
Mais il faut un sas, il faut un endroit où, quand les gens viennent d’un système très différent, ils voient si eux-mêmes seront capables de s’installer là. […] Il faudrait des systèmes où les gens puissent observer un peu ce qui se passe ici, puis qu’ils puissent être observés, puis qu’on voit au bout du compte si ça colle avant de se lancer. […] C’est ce que nous, on préconise pour les fellows étrangers avant de les prendre comme fellows. Pas les fellows […] du système européen qu’on connaît, là, mais ceux qui viendraient d’Afrique, par exemple, ou d’Afrique du Nord, ou des pays de l’Est. […] Il y en a une qui a fait une application du Brésil, on va lui proposer deux mois d’observation. Pour voir si elle, elle est toujours partante et puis si nous, on est toujours partants après avoir interagi avec elle
Pierre, France
Ainsi, l’apprentissage de pratiques organisationnelles particulières et des codes propres au milieu professionnel permet aux personnes immigrantes de se positionner favorablement au cours de processus de recrutement. Néanmoins, cela n’est pas toujours suffisant et la persistance de la discrimination peut s’observer (Piché et Renaud 2018, 2002). Le milieu médical est peu enclin à parler de ce sujet délicat qu’est la discrimination, qui occasionne le plus souvent des polarisations et des replis : « La discrimination c’est une arme à double tranchant… c’est un terrain délicat, mais je pense qu’il y a place [pour en parler], si on regarde plus la question de l’aide au sens large » (acteur clé, médecin apportant un soutien aux résidents durant leur formation, 2011). Le professeur et chercheur en médecine Rodney Crutcher soutient que le processus d’enculturation à la culture médicale lors de la résidence est trop souvent perçu comme un processus unidirectionnel vis-à-vis des DIM et aurait avantage à être reconnu comme un processus bidirectionnel, en particulier dans notre société multiculturelle : « IMGs must learn to manage the expectations placed on physicians in the Canadian system. Their Canadian teachers and colleagues must learn to work with physicians who bring new perspectives to the practice of medicine » (Crutcher et al. 2011 : 76).
Conclusion : des médecins mobiles? De la connaissance à la reconnaissance
Une inégalité considérée comme juste ne se voit guère puisqu’elle est d’emblée évidente et « naturelle »
Dubet 2014 : 10
Les expériences d’intégration au marché du travail de diplômés internationaux en médecine sont très variables. Leurs parcours d’intégration professionnelle et les stratégies qu’ils mobilisent pour se tailler une place au Québec montrent que la transférabilité de leur capital humain est limitée par le poids de la reconnaissance professionnelle. Certains DIM sont confrontés à de véritables parcours du combattant. Et pourtant, le Québec continue à recruter des médecins venus d’ailleurs. Nous avons tenté d’examiner de quelles manières les processus de reproduction organisationnelle, qui privilégient la reproduction de la norme, peuvent jouer en défaveur de candidats aux profils différents. Autrement dit, nous avons voulu voir comment notre système de reconnaissance professionnelle serait à même de reproduire, même non intentionnellement, des biais négatifs, voire des préjugés quant aux compétences de diplômés non occidentaux.
Ces enjeux de reproduction organisationnelle sont d’autant plus sensibles dans un contexte où le « paradigme de la mobilité » (Pellerin 2011) prend de plus en plus d’ampleur au sein des politiques migratoires. De fait, malgré la présence de médecins sur le territoire, médecins qui ne sont pas toujours en mesure de faire valoir leurs compétences, des institutions de la santé continuent de recruter à l’étranger. Dauphinee (2003) souligne à ce sujet les contradictions liées aux politiques actuelles, où des DIM dans les grandes villes canadiennes sont confinés à des rôles non médicaux, même ceux qui ont réussi tous leurs examens pour obtenir leur permis, tandis qu’en région les institutions hospitalières continuent de recruter des médecins à l’étranger. Cette situation exacerbe d’autant plus les enjeux éthiques que représente la fuite des cerveaux couplée au gaspillage des compétences, dans un contexte où des démarches de recrutement perdurent malgré la présence de médecins non reconnus professionnellement au Québec. Certes, la protection de la population est fondamentale. Toutefois, les démarches exigées et les probabilités d’être à même de compléter ces parcours du combattant nous amènent à penser qu’il pourrait y avoir des mécanismes plus favorables afin de valoriser les compétences des DIM. Par ailleurs, il serait intéressant d’analyser les mécanismes de reconnaissance professionnelle sur le plan interprovincial, compte tenu de la forte variation des taux de DIM au sein des effectifs médicaux entre les provinces canadiennes(de 9,4 % à 52 %) (Groupe Ressources humaines en santé 2013; CMA 2018).
Dans un contexte de mondialisation accélérée, les politiques migratoires se sont transformées, laissant de plus en plus de place à la sélection basée sur le capital humain (scolarité, langue, expérience de travail), mais aussi à la sélection de profils spécifiques par l’embauche directe d’employeurs, notamment via des permis de travail temporaires (Pellerin 2011). Cette place de plus en plus prépondérante d’employeurs au coeur des politiques d’immigration peut être vue positivement, permettant un arrimage et une intégration accélérée au marché du travail. Néanmoins, sachant le rôle des ressources sociales et symboliques au cours du processus d’embauche, sachant que les employeurs ont tendance à privilégier de futurs employés qui leur ressemblent, ces mécanismes de reconnaissance pourraient-ils amener à écarter involontairement des candidats de régions du monde moins reconnues, jugés moins favorablement sur le plan de la comparabilité de leurs compétences et de leurs niveaux de scolarité? Permettre aux entreprises de sélectionner des candidats induit une privatisation du processus de sélection selon Reitz (2013), où l’intégrité du système de sélection est remise en cause puisque le processus n’est plus garanti par la responsabilité publique du gouvernement.
Ceci soulève des enjeux éthiques supplémentaires. En effet, le système d’immigration actuel est basé sur le principe du privilège de s’établir au Québec et au Canada. Qu’en est-il du droit des migrants? Pour Victor Piché (2018), les politiques migratoires actuelles devraient se définir davantage à partir de considérations éthiques et morales. Ainsi, en plus du principe éthique reconnu qu’est le droit à la mobilité, des questions éthiques plus larges liées à la reconnaissance et à l’inclusion devraient être insérées et considérées au sein des politiques migratoires et des différents ministères et institutions jouant un rôle dans la reconnaissance et l’intégration socioprofessionnelle des personnes immigrantes.
Les processus de reconnaissance professionnelle des personnes immigrantes appellent à la vigilance par la prise en compte de processus subjectifs sous-jacents, malgré l’apparente objectivité des mécanismes en jeu. En somme, le caractère bidirectionnel de l’intégration interpelle non seulement la capacité des personnes immigrantes, mais aussi l’ensemble des milieux contribuant à l’intégration des diplômés internationaux (employeurs, milieux de l’éducation, corporations, gouvernements, etc.).
Appendices
Notes
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[1]
Nos sincères remerciements à toutes les personnes qui ont généreusement participé. La première auteure tient à remercier le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada, la Fondation du CHU Sainte-Justine et des Étoiles et le département d’anthropologie de l’Université de Montréal. Démarche approuvée par les comités d’éthique à la recherche du CHU Sainte-Justine et de l’Université de Montréal. Finalement, merci aux évaluateurs de la revue Diversité urbaine pour leurs commentaires qui ont permis de bonifier le manuscrit initial, ainsi qu’à Aurélie Hot (Centre de recherche InterActions) pour sa révision linguistique.
-
[2]
L’usage du masculin a pour but d’alléger le texte sans préjudice pour la forme féminine.
-
[3]
Les termes « médecin diplômé à l’étranger », « diplômé international en médecine » (DIM) ou « médecin diplômé hors Canada et États-Unis (DHCEU) » sont utilisés de façon synonyme.
-
[4]
Réalisée par M.-J. Blain (sous la dir. de S. Fortin et F. Alvarez).
-
[5]
Au Québec, il y a au moins six instances officielles liées au processus d’accréditation en médecine : le Collège des médecins, le Collège Royal, Recrutement Santé Québec, le ministère de l’Immigration, le ministère de la Santé et des Services sociaux, les universités, sans compter le Centre d’évaluation des diplômés internationaux en santé, les services d’Emploi-Québec, d’organismes communautaires en employabilité ou d’associations.
-
[6]
Cette invisibilité résulte de plusieurs facteurs concomitants : ce ne sont pas tous les DIM qui ouvrent un dossier auprès du Collège des médecins; il y a de multiples façons d’immigrer au Canada; il peut y avoir des migrations secondaires (c.-à-d. sortie de la province ou pays); et ce ne sont pas tous les immigrants reçus qui ont à déclarer leur profession à leur entrée au pays (notamment le conjoint du requérant principal, le migrant reçu en raison d’une réunification familiale ou un réfugié) (Bourgeault et Neiterman 2013; Groupe Ressources humaines en santé 2013).
-
[7]
Compilation des données du Collège des médecins du Québec, 2010-2014.
-
[8]
La réussite de la résidence en médecine au Québec est obligatoire pour l’obtention du permis régulier de pratique pour les DIM non admissibles au permis restrictif comme spécialiste ou professeur. Les résidents reçoivent un salaire durant leur formation. Les places en résidence sont contingentées, certaines spécialités plus que d’autres. Pour un aperçu critique concernant les postes de résidents laissés vacants, voir : CDPDJ (2010a, 2010b, 2013, 2014).
-
[9]
Taux qui pourrait s’expliquer par la présence de l’Australie.
-
[10]
Moyenne de 23 % admis en résidence au Service canadien de jumelage des résidents – CaRMS (411 acceptés sur 1 811 demandeurs DIM).
-
[11]
Compte tenu du temps de requalification requis, ces migrants très récents (moins de deux ans) sont exclus de notre population principale. Les échanges informels permettaient de recueillir leurs représentations et expériences durant les premiers mois.
-
[12]
Pour trois répondants, le pays de naissance est différent du pays d’obtention du diplôme. Ce dernier a été retenu, alors que le processus de reconnaissance au Québec tient compte du lieu des études.
-
[13]
Ex. : conseiller secteur pharmaceutique, santé et sécurité, bioéthique, professionnel de recherche, etc.
-
[14]
Soit une spécialisation supplémentaire (surspécialité/Fellowship) après leur spécialité en médecine (www.fmsq.org/fr/profession/formation).
-
[15]
Et ce, avant même la mise en application des arrangements de reconnaissance mutuelle France-Québec (ARM). Signée en 2009, cette entente vise à favoriser la mobilité de professionnels entre la France et le Québec en facilitant la reconnaissance des qualifications pour 82 professions et métiers visés, dont la médecine (CMQ et al. 2009).
-
[16]
Sauf un qui avait déjà vécu une réorientation professionnelle avant sa migration.
-
[17]
Des analyses fondées sur le genre mériteraient d’être approfondies dans une recherche ultérieure.
-
[18]
À la nuance près que les femmes professeures-chercheures de ce sous-groupe ont vécu plus d’embûches et d’incertitude que leurs collègues masculins (mais pas autant que les « parcours du combattant »).
-
[19]
Tant pour l’accès à la résidence que pour un poste en milieu hospitalier.
-
[20]
Ce processus de pairage (matching program) est plus complexe, le lecteur excusera la brève explication par souci de synthèse.
-
[21]
Soit une année de pratique de la médecine au cours des deux dernières années : www.cmq.org/hub/fr/permis-restrictif-formation-hors-du-canada-et-des-etats-unis-formation-france.aspx.
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