Abstracts
Résumé
Les études sur la résilience cherchent surtout à déterminer comment et pourquoi, face à un même facteur de stress environnemental, certaines personnes restent en bonne santé, mais d’autres non. Présentement, il n’y a pas de consensus sur la conceptualisation de la résilience. En raison de cette difficulté, il n’y a pas de réponse précise pour expliquer comment améliorer la résilience d’un individu ou d’une collectivité. Bref, il importe de se questionner sur la validité de la résilience comme concept. Ayant privilégié la théorisation enracinée classique de Glaser et Strauss (1967) comme méthodologie, l’objectif de cette recherche était d’établir des pistes théoriques permettant une lecture cohérente des diverses recherches antérieures sur la résilience et de fournir un encadrement pour les recherches et les interventions à venir. La résilience se résume à un terme représentant les discours sur six construits qui sont interconnectés mais distincts : la vulnérabilité, les facteurs de protection, les stratégies de coping, l’adaptabilité, la sensibilité, et la récupération. Au sein de leurs contextes politiques et culturels, ces construits rendent plus claires les pistes d’actions pour intervenir sur la santé, la sécurité et le fonctionnement d’une population.
Mots-clés :
- résilience,
- théorie ancrée,
- adaptabilité,
- récupération,
- contexte culturel
Abstract
Resilience studies focus on how and why, in the face of the same environmental stressor, some people remain healthy while others do not. Currently, there is no consensus on the conceptualization of resilience. Given this issue, there is no clear answer as to how to improve the resilience of an individual or a community. In short, it is important to question resilience as a concept. This paper uses Glaser and Strauss’ (1967) Classical Grounded Theory as a methodology and its goal was to establish a theory allowing for a coherent reading of the diverse body of research on the topic of resilience and to provide a framework for future research and interventions. In the end, resilience is merely a term representing the discourses of six constructs that are interconnected but distinct: vulnerability, protective factors, coping strategies, adaptability, sensitivity, and recovery. Within their political and cultural contexts, these constructs make clearer the courses of action for intervening in area of health, safety and functioning of a population.
Keywords:
- resilience,
- grounded theory,
- adaptability,
- recovery,
- cultural context
Article body
Depuis Antonovsky (1979) et son concept de la salutogenèse, les chercheurs des domaines des sciences humaines ont essayé de déterminer comment et pourquoi, face à un même stress environnemental, certaines personnes restent en bonne santé et d’autres non. La notion de la résilience est devenue une réponse commune à cette question (Garrett, 2016; McCleary et Figley, 2017; Van Breda, 2011, 2018). Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, des réponses concrètes et actionnables à cette question sont nécessaires. Dès le début de cette crise mondiale, il a été reconnu que l’amélioration de la résilience des premiers répondants et des travailleurs des soins de santé est nécessaire à la résilience globale de leurs communautés (Dzau et coll., 2020; Ehrlich et coll., 2021; Heath et coll., 2020; Santarone et coll., 2020). Il est important de noter, par contre, qu’il y a une absence de consensus sur la conceptualisation et de l’opérationnalisation de ce que signifie réellement « la résilience » (McCleary et Figley, 2017; Southwick et coll., 2014). De plus, malgré les publications existantes, les interventions pour améliorer la résilience d’un individu ou d’une collectivité ne sont pas toujours claires. D’abord, l’objectif de cette recherche[1] était de clarifier un cheminement théorique qui permettrait de dégager une interprétation cohérente des recherches antérieures qui portent sur la résilience et qui fournirait ainsi un cadre pour les recherches et les interventions ultérieures.
Cet article décrit l’état actuel de la recherche sur la résilience et explique la méthodologie utilisée pour établir cette nouvelle théorie. Par la suite, les résultats sont présentés en trois sections. La première note la nécessité de remettre en question la validité de la résilience comme concept d’ordre supérieur; la deuxième présente la résilience comme un produit composite; et la troisième fournit des définitions pour chacun des six construits associés à la résilience, ainsi que d’autres informations importantes.
Délimitation de la notion de résilience
La résilience est un terme élaboré dans les sciences naturelles pour décrire la capacité d’une matière de résister à la pression et de se remettre d’une déformation (Lazarus, 1993; McGraw-Hill, 2003; Strumpfer, 1999). Par exemple, pour le terme Modulus de Résilience, c’est « l’énergie mécanique maximale conservée par unité de volume de matériau lorsqu’il est soumis à une pression jusqu’à sa limite élastique » (McGraw-Hill, 2003, p. 360, traduction libre). La résilience est quant à elle définit comme étant « le travail effectué lors de la déformation d’un corps jusqu’à une certaine limite prédéterminée, telle que sa limite élastique ou son point de rupture, divisé par le volume du corps » (McGraw-Hill, 2003, p. 458, traduction libre).
Lorsque le concept de résilience a été introduit dans les domaines des sciences humaines, les chercheurs ont adopté une approche similaire. Étant riches en diversités culturelles et en vécus contextualisés, les humains sont beaucoup plus complexes que les matériaux étudiés dans les sciences naturelles (Barrios, 2016; Hoffman, 2016; Maldonado, 2016). Les êtres humains sont dotés de subjectivité (Diener et coll., 2009), et donc d’autonomie comportementale où la motivation humaine est liée à des raisons intrinsèques et extrinsèques (Howard et coll., 2016; Howard et coll., 2017; Van den Broeck et coll., 2016). Après chaque épreuve, la personne crée des souvenirs qui sont des représentations symboliques de son expérience; la personne donne donc ainsi un sens à son histoire, à son identité et à son futur, et décide d’agir ou non (Cyrulnik, 2013; Cyrulnik et coll., 2019; Giust-Desprairies et coll., 2015; Marquis, 2018; Rongé et Cyrulnik, 2006). Alors, face à cette réalité, il y a une concurrence entre un très grand nombre de définitions, de modèles et de théories de la résilience (Fletcher et Sarkar, 2013).
Des chercheurs concluent que la plupart des définitions décrivent la résilience soit comme étant un trait, un processus et/ou un résultat (Davydov et coll., 2010; Greene et coll., 2012; Van Breda, 2018). Par exemple, « la résilience est un trait de personnalité qui aide les individus à faire face à l’adversité et à parvenir à un bon ajustement et […] qui immunise les individus contre l’impact de l’adversité ou des évènements traumatiques » (Hu et coll., 2015, p. 18, traduction libre). L’American Psychological Association (2012) la définit différemment comme étant à la fois un processus et un résultat; selon celle-ci la résilience consiste à « bien s’adapter face à l’adversité, aux traumatismes, aux tragédies, aux menaces ou aux sources importantes de stress – comme les problèmes familiaux et relationnels, les problèmes de santé graves ou les facteurs de stress professionnels et financiers » (paragr. 4, traduction libre).
Il existe plusieurs modèles de résilience. Un modèle axé sur les traits et le résultat, par exemple, inclut le modèle hypothétique des différences individuelles. Mancini et Bonanno (2009) indiquent que des traits comme « les biais d’autovalorisation, le style d’attachement, le coping répressif, les croyances a priori, la continuité et la complexité de l’identité et les émotions positives » (p. 1806, traduction libre) sont des médiateurs entre des mécanismes de résilience (p. ex., l’évaluation implicite de la gravité de l’évènement et l’utilisation de ressources sociales) et « un résultat [résilient] à la suite d’un évènement très stressant » (p. 1807, traduction libre), comme la perte et le deuil.
Un modèle axé sur le processus et le résultat, par exemple, inclut le modèle de résilience de Richardson et coll. (1990). Pour simplifier, disons que ce modèle indique qu’une personne existe dans un état d’homéostasie biopsychospirituelle et lorsqu’elle est confrontée à l’adversité, elle peut être déséquilibrée (Richardson, 2002). Au fur et à mesure que la personne passe à travers la perturbation vers la réintégration d’un état équilibré, l’un des quatre résultats suivants peut se produire. Le premier est la réintégration dysfonctionnelle, où l’individu persiste dans des comportements autodestructeurs (Richardson, 2002). Le deuxième est la réintégration avec une perte, où l’individu peut à nouveau atteindre l’homéostasie, mais sans les mêmes soutiens, motivations ou ambitions (Richardson, 2002). Le troisième est le retour à l’état homéostatique biopsychospirituel précédent, tandis que le quatrième est la réintégration résiliente, décrite comme une homéostasie améliorée grâce à l’introspection et à la croissance personnelle (Richardson, 2002).
La résilience est également étudiée lorsqu’on cherche à comprendre comment protéger la santé mentale (Chen et Bonanno, 2020; Cleary et coll., 2018) et le fonctionnement psychologique d’une personne ou d’une population malgré des évènements traumatiques (Bezdjian et coll., 2017; Lee et coll., 2013; Wooten, 2012), ou lorsqu’on cherche à promouvoir l’adaptation positive face au stress (Kaurin et coll., 2018; Richardson et Stoneman, 2015). Cela permet à des systèmes d’éviter la défaillance critique et de se rétablir après des dommages, comme pour des infrastructures sociales ou des écosystèmes naturels (Davidson et coll., 2016; Hansel et coll., 2020; Linkov et coll., 2014). Bref, cette notion cherche à souligner la capacité d’action des personnes, en tant qu’agents de changements, plutôt que l’incapacité à répondre à des problèmes (Payne, 2011).
Enfin, même s’ils le présentent comme un trait, un processus, un résultat ou comme une combinaison de ces éléments, les modèles de résilience sont difficilement applicables et ils réduisent l’ampleur de l’expérience humaine.
Méthodologie
La méthodologie privilégiée pour cette étude est la théorisation enracinée classique de Glaser et Strauss (1967). C’est une approche par laquelle le chercheur génère une théorie à partir de données analysées par l’entrejeu de l’induction et la pensée critique (Glaser et Strauss, 1967; Thomas et James, 2006; Urquhart et coll., 2010; Walsh et coll., 2015).
Basée sur un style de codage manuel d’indexation de tranches de données qualitatives utilisé par Walsh (2014), la technique privilégiée a été un codage thématique inductif de tranches de données, à l’aide du programme Microsoft Excel, pour permettre une indexation dynamique où un système de filtrage a facilité l’examen et l’analyse des données. La Figure 1 presente un exemple de l’outil de codage thématique.
Tout au long de la recherche, les thèmes majeurs ont été insérés dans un tableau comparatif, permettant d’établir une synthèse des données et de procéder à une analyse comparative (Glaser, 1965; Glaser et Strauss, 1967; Urquhart et coll., 2010; Walsh, 2014; Walsh et coll., 2015; Weed, 2009). Un exemple de comparaison constante est offert à la Figure 2.
Les résultats des comparaisons ont permis l’émergence des éléments théoriques et leurs propriétés (six construits associés à la résilience) qui ont formé la nouvelle théorie ancrée (Glaser et Strauss, 1967).
À l’aide d’articles scientifiques, de la littérature grise et d’un chapitre de livre, l’échantillon est composé de 31 documents et 752 tranches de données codifiées (liées aux domaines de la sécurité civile, la psychologie et du travail social) qui ont fait émerger des construits de la résilience. Les sources de l’échantillon se trouvent au Tableau 1
En ce qui concerne le principe de l’échantillonnage théorique (Glaser, 1978; Glaser et Strauss, 1967; Urquhart et coll., 2010; Walsh, 2014; Walsh et coll., 2015), la sélection des données s’est basée sur la nécessité d’explorer et d’élargir la compréhension de concepts émergents, et non en vue d’augmenter la taille de l’échantillon (Glaser, 1978; Glaser et Strauss, 1967; Urquhart et coll., 2010; Walsh, 2014; Walsh et coll., 2015; Weed, 2009). De plus, le point de saturation a été atteint lorsque l’inclusion d’autres données n’entraînait plus l’émergence de nouveaux thèmes pertinents (Charmaz, 2006; Walsh, 2014).
Par la suite, pour déterminer la qualité de la théorie, 17 documents (liés au domaine de l’anthropologie) ont été analysés à l’aide de ces six construits (voir le Tableau 2 pour les sources anthropologiques). L’analyse entre les six construits associés à la résilience et les articles anthropologiques a fourni les informations nécessaires pour expliquer la cohésion entre les données. Les principes de « pertinence (fit) » et de « travail (work) » ont été satisfaits (Glaser et Strauss, 1967; Weed, 2009). Selon Glaser et Strauss (1967) : « par la pertinence, nous entendons que les catégories doivent être facilement (et non forcément) applicables aux, et indiquées par, les données » (Glaser et Strauss, 1967, p. 3, traduction libre), ainsi que « par travail, nous entendons que [les construits] doivent être en rapport avec le comportement étudié et être capables de l’expliquer » (Glaser et Strauss, 1967, p. 3, traduction libre).
Référents conceptuels
Pour mieux comprendre les résultats de ce projet de recherche, il est important de faire référence à quelques concepts clés retrouvés dans la littérature. Le terme « élément exposé » représente l’objet à risque de subir l’impact d’une adversité sur sa santé, sa sécurité et/ou son fonctionnement normal. Un élément exposé peut être une personne, un groupe, une communauté, des institutions ou des systèmes, des édifices ou biens matériaux, la nature, et autres (MSPGQ, 2008). Quant à elle, la santé est définie comme « un état de bien-être physique, mental et social complet et non pas seulement l’absence de maladie ou d’infirmité » (Organisation Mondiale de la Santé, 2020, p. 1, traduction libre). Le terme « risque » est conceptualisé comme étant la probabilité d’occurrence d’une adversité, ainsi que la probabilité d’un certain niveau d’impact (MSPGQ, 2008; Sécurité publique Canada, 2017; Wild et coll., 2020). Enfin, « l’adversité » a été conceptualisée comme étant un continuum de circonstances de vie, dont la gravité diffère en fonction du contexte et pouvant provoquer un large éventail de perturbations, affectant la santé, la sécurité et/ou le fonctionnement normal de l’élément exposé (à partir de facteurs de stress normaux de la vie quotidienne jusqu’aux évènements graves et traumatisants) (Davis et coll., 2009; Davydov et coll., 2010; Fletcher et Sarkar, 2013; Neff et Broady, 2011; Sameroff et Rosenblum, 2006).
Résultats
Les résultats de cette recherche ont permis le développement d’une nouvelle théorie ancrée de la résilience qui est à la fois stable et flexible, théorique et pratique, utile pour des chercheurs ainsi que pour des travailleuses sociales et travailleurs sociaux de premières lignes.
Le questionnement de la validité de la résilience
Les professionnels des domaines des sciences sociales cherchent souvent une réponse à la question « l’élément exposé est-il résilient ? », mais posent-ils la bonne question? Selon l’analyse, il semble y avoir suffisamment d’indices pour justifier que la résilience soit remise en question. Les résultats suggèrent la possibilité qu’elle soit un concept ni valide ni fiable; ces résultats suggèrent également qu’elle n’est pas évaluable en soi, par exemple pour déterminer qu’une personne est résiliente tandis qu’une autre ne l’est pas.
Lors d’interventions directes, pour éviter des malentendus, la travailleuse sociale ou le travailleur social a l’habitude de poser des questions de clarification sur les mots ou les idées exprimés par la personne aidée. Par exemple : Qu’entendiez-vous par « violence »? Comprenez-vous la violence uniquement comme quelque chose de physique? Sinon, la travailleuse sociale ou le travailleur social pourrait agir sur la base de fausses suppositions et l’intervention risquerait de ne pas progresser effectivement. La présence de sophismes logiques qui imprègnent les études sur la résilience met en évidence le fait que les professionnels des sciences sociales ont négligé l’importance de cette clarification et commettent des erreurs de définition. Kelley (1927) divise ces types d’arguments fallacieux en deux catégories : harmonieux et dissonants.
Le premier cas est celui où l’on tente d’utiliser une seule étiquette pour décrire deux ou plusieurs construits comme s’ils étaient identiques, alors qu’il existe des différences importantes entre ce qu’ils représentent ou ce qu’ils permettent de mesurer. Le mot « résilience » étant ubiquitaire dans les sciences sociales (Davidson et coll., 2016), et notamment en travail social (Garrett, 2016), tous semblent étudier le même concept. Pourtant, l’existence d’un grand nombre de définitions, de théories et mesures différentes du concept indique la présence d’un sophisme harmonieux. C’est le cas, par exemple, lorsque deux chercheurs prétendent évaluer la résilience d’une collectivité, mais que l’un mesure la capacité de rétablissement d’infrastructure, alors que l’autre mesure la présence ou l’absence de risque d’aléas. S’il n’y a pas de reconnaissance de cette distinction entre eux, ni de clarification des objets mesurés, les chercheurs contribueront toujours au dilemme. Il est probable que leurs méthodes seront valables pour mesurer respectivement le rétablissement d’infrastructure et la présence d’aléas, mais les lecteurs questionneront si les objets mesurés (ou lesquels des objets mesurés) représenteront véritablement et précisément la résilience.
Le second cas est celui où l’on tente de distinguer deux ou plusieurs construits comme s’ils étaient différents, alors qu’ils sont identiques (ou suffisamment similaires) dans ce qu’ils représentent ou permettent de mesurer (Credé et coll., 2017; Gonzalez et coll., 2021). Un sophisme dissonant semble présent lorsqu’il y a des définitions qui rendent la résilience synonyme à un autre concept sans justification scientifique pour cette substitution. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un chercheur étudie l’adaptabilité comportementale et un autre se distingue en indiquant qu’il étudie la résilience, mais enfin leurs résultats sont les mêmes. Les lecteurs questionneront la nécessité d’introduire un nouveau concept (la résilience) lorsqu’il existe déjà un concept (l’adaptabilité) qui rend mesurable et vérifiable les mêmes variables (les comportements).
Il est non seulement nécessaire que les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux maitrisent les subtilités de la communication lors d’interventions, mais aussi qu’ils apprennent l’importance de l’acte de définir et prennent conscience des diverses répercutions qui peuvent résulter d’un manque de précision. Alors, les futures recherches quantitatives doivent déterminer, pour ce qui est de la signifiance statistique, la validité de la résilience comme un construit d’ordre supérieur (unidimensionnel ou multidimensionnel). Si sa validité était réfutée, la résilience ne serait que symbolique des discours de six autres construits d’ordre supérieur Dit autrement, plutôt que d’évaluer et d’intervenir sur la résilience comme-t-elle, il serait plus clair, précis et effectif d’évaluer et d’intervenir sur chacun de ces six construits distincts. De plus, les sophismes harmonieux et dissonants cesseront. Enfin, la résilience pourrait toujours être préservée dans le vocabulaire des sciences sociales à type d’expression ayant un attrait intuitif qui peut être comprise par le grand public, mais non comme un construit scientifique utilisable.
La résilience comme produit composite
Lorsque la santé, la sécurité et le fonctionnement normal d’un individu ou d’une collectivité sont à risque de subir, ou subissent, l’impact d’une adversité, les six construits qui doivent être abordés sont les suivants : (1) la vulnérabilité, (2) les facteurs de protection, (3) les stratégies de coping, (4) l’adaptabilité, (5) la sensibilité et (6) la récupération.
L’élément théorique qui permet de comprendre ces six construits de façon cohésive est la lentille de contextes politiques et culturels relatifs (voir Figure 3). Cette théorie composite de la résilience diffère des théories antérieures puisque la résilience ici n’est pas comprise comme une perspective à partir de laquelle la travailleuse sociale ou le travailleur social observe la personne ou la collectivité. La résilience est plutôt l’objet d’une perspective ancrée dans la relativité de contextes politiques et culturels. Plus précisément, chacun des six construits est un objet qui n’est quantifiable qu’au sein de son contexte.
Le choix du terme « composite » provient de l’analogie d’un matériel composite où différents matériaux sont tissés et le produit final est plus solide que les éléments individuels, tandis que chaque partie conserve toujours son intégrité (voir Figure 4). Une théorie composite signifie que les construits sont reliés et qu’ils peuvent s’influencer les uns les autres, sans perdre ce qui rend chacun conceptuellement distinct. Chacun d’eux décrit des phénomènes différents, ils ont des propriétés uniques et ils sont évaluables en soi.
Ces six construits ne peuvent pas être homogénéisés pour fournir une seule réponse, soit « oui » ou « non », à la question « la personne est-elle résiliente? » La réponse doit être hétérogène et multiforme pour respecter la contribution de chaque composante, ainsi que pour respecter la complexité de l’humain. Une réponse (simplifiée) possible pourrait ressembler à ceci : la personne possède plusieurs facteurs de vulnérabilité, elle a peu de facteurs de protection, mais ses stratégies de coping sont adéquates et elle est capable de s’adapter rapidement à de nouvelles situations, malgré son haut niveau de sensibilité aux changements; elle progresse vers des buts atteignables dans sa récupération (de sa santé, sa sécurité et son fonctionnement social).
Les six composantes de la résilience
Lorsque l’on cherche à améliorer la résilience d’un individu ou d’une collectivité, on cherche en fait l’amélioration de l’état de six construits. Les définitions de chacun d’eux sont présentées dans les sections ci-dessous. Elles ont été élaborées à l’aide de l’outil de codage thématique (voir Figure 1) et l’outil de comparaison constante (voir Figure 2).
(1) Vulnérabilité : Un état affaibli ou un facteur qui augmente le risque de subir un impact négatif sur la santé, la sécurité et/ou le fonctionnement normal d’un élément exposé. Il existe divers types de vulnérabilité (écologique, économique, émotionnel, institutionnel, physique, psychologique, sociologique, systémique, et autres) qui peuvent différer selon les contextes politiques et culturels. Ainsi, la considération des multiples réalités vécues par des populations différentes permettra une meilleure compréhension et une meilleure intervention. Cependant, si des préconstruits au sujet de la vulnérabilité sont imposés, « [i]ls peuvent dépeindre des régions entières du monde comme insécurisées et arriérées, justifiant ainsi des interventions perpétuelles auprès de populations marginales » (Faas, 2016a, p. 9, traduction libre). Ce problème s’est manifesté dans le cas de la rafle des années 1960, où des enfants autochtones ont été retirés à leur famille pour être confiés en adoption à des familles non-autochtones, sous prétexte que le mode de vie autochtone était considéré comme facteur de vulnérabilité (du point de vue de la culture dominante), alors qu’en fait leurs pratiques culturelles étaient des facteurs de protection (Guay et coll., 2014).
Des exemples de facteurs de vulnérabilité retrouvés chez des premiers répondants, et augmentant leurs risques de subir les impacts néfastes du stress, incluent une charge de travail élevée (Van Breda, 2016), le travail par roulement (shift work) et des préoccupations relatives à l’équipement (Constantini et coll., 2010; Rudofossi, 2007), ainsi que des problèmes de soutien organisationnel (Papazoglou et Andersen, 2014). Chez la même population, on observe que des antécédents de traumatisme, des psychopathologies antérieures (Kleim et Westphal, 2011; Smith et coll., 2011; Wild et coll., 2020), le fait d’avoir subi des blessures dues à des évènements potentiellement traumatisants, ainsi que d’avoir connu un nombre élevé d’incidents critiques (Kleim et Westphal, 2011; Marshall et coll., 2010) rendent plus vulnérable au syndrome de stress post-traumatique.
(2) Facteurs de protection : Tout facteur pouvant réduire le risque d’occurrence d’une adversité, réduire ou prévenir l’impact d’une adversité sur la santé, la sécurité et/ou le fonctionnement normal de l’élément exposé. Lors de l’absence d’une adversité, ces facteurs peuvent parfois améliorer le niveau de santé, de sécurité et de fonctionnement de base de l’élément exposé. Étant donné que la qualification des facteurs de protection dépend du contexte de l’élément exposé et de l’adversité vécue, il est impossible d’identifier tous les facteurs de protection. Il est également plausible que, dans certains cas, des ressources, des pratiques sociales ou des comportements individuels puissent être considérés comme des facteurs qui protègent l’élément exposé, alors que dans d’autres cas, ils ne remplissent pas cette fonction.
Dans le cadre de la recherche et d’interventions directes, il est plus pratique de cibler des catégories générales puis, à partir de ces points de référence, explorer des facteurs plus spécifiques.
Quelques exemples de catégories générales pour les facteurs de protection peuvent inclure l’accès à des ressources (Bowen et Martin, 2011; INSPQ, 2020; PeConga et coll., 2020) et à des services (Hansel et coll., 2020; Shakespeare-Finch et Daley, 2017), une stabilité financière (Hansel et coll., 2020; MSPGQ, 2008), un style de vie sain (Bowen et Martin, 2011), ou même des traits de caractère (Bolton et coll., 2016; Fletcher et Sarkar, 2013; Greene et coll., 2012). À partir de ceux-ci, pour déterminer des exemples spécifiques, on peut poser quelques questions exploratoires telles : Quels ressources et services sont importants à rendre plus accessibles? Comment améliorer la participation économique des personnes affectées?
Enfin, l’exemple récurent qui semble le plus protéger l’élément exposé contre plusieurs types d’adversité à travers divers contextes est décrit comme des soutiens sociaux, des manifestations de solidarité ou le capital social (Hoyt et coll., 2010; INSPQ, 2020; Kleim et Westphal, 2011; Lanza et coll., 2018; MSPGQ, 2008; PeConga et coll., 2020; Van Breda, 2016; Wild et coll., 2020).
(3) Stratégies de coping : Des comportements et/ou des cognitions qui aident l’élément exposé à gérer ou légèrement réduire un impact émotionnel, mais qui ne sont pas des solutions aux problèmes causés par une adversité. Des stratégies de coping sont surtout caractérisées par le fait qu’elles ne font que réduire la détresse et amortir légèrement les impacts de l’adversité chez l’élément exposé, permettant le passage du temps. Quelques exemples retrouvés dans la littérature incluent l’activité physique (Hatala, 2011; Wild et coll., 2020), le yoga et la relaxation musculaire progressive (Fitzwater et coll., 2018; Papazoglou et Anderson, 2014), des activités de la pleine conscience (mindfulness) (Kaurin et coll., 2018; Papazoglou et Anderson, 2014; Smith et coll., 2011), des stratégies axées sur les distractions (Crum et coll., 2013), l’autosoin (self-care) (Bolton et coll., 2016; Lanza et coll., 2018) et la spiritualité (Boothroyd et coll., 2019; Hatala, 2011).
Le modèle de coping intitulé BASIC PH de Lahad (2017) offre des savoirs pratiques en classifiant des stratégies (croyance, affect, social, imagination, cognition et physique). Selon ce modèle, les stratégies de coping comblent le besoin de l’humain à créer du sens entre « le moi » et « le monde », ayant comme effet de réduire la détresse (Lahad, 2017).
Enfin, le construit de coping n’exclut pas des stratégies malsaines (Crum et coll., 2013), par exemple, lorsqu’une personne devient dépendante de l’alcool pour gérer ses difficultés émotionnelles (Bower et Martin, 2011; Galatzer-Levy et coll., 2013; Papazoglou et Anderson, 2014; Smith et coll., 2011). C’est à partir de ce type de cas que l’on peut argumenter qu’une stratégie de coping risque de se transformer en vulnérabilité.
(4) Adaptabilité : La capacité (adaptabilité), le processus (adaptation) ainsi que le résultat (adapté) de changements cognitifs et/ou comportementaux, envers une solution ou un résultat favorable en réponse à une adversité. Lorsqu’un changement est requis pour maintenir ou rétablir un niveau de santé sain, de sécurité et/ou de fonctionnement chez un élément exposé, l’adaptabilité est pertinente. La contextualisation est critique pour déterminer et différencier les adaptations saines, vitales et proportionnelles à la situation de ce qui est malsain, inefficace ou extrême (Clauss-Ehlers, 2008; Fletcher et Sarkar, 2013; Hatala, 2011; Kaurin et coll., 2018; Luthar, 2006; Luthar et coll., 2000; Mahoney et Bergman, 2002; Waller, 2001).
Pour améliorer l’adaptabilité d’un élément exposé de façon préventive, il est important de développer un sens de maîtrise et de contrôle sur son environnement (Hunter et coll., 2018; Smith et coll., 2011) et d’augmenter sa perception de sécurité liée à des événements prévisibles et gérables (Lanza et coll., 2018). Ceci est possible par l’entrainement des individus ou des groupes à répondre aux adversités possibles (Kleim et Westphal, 2011) pour qu’ils soient prêts à effectuer les changements nécessaires lorsqu’il est temps. En guise d’exemple, nous suggérons l’entrainement d’un pompier à rentrer dans un édifice enflammé malgré l’instinct de s’enfuir.
L’entrainement visant la flexibilité cognitive peut inclure le développement de la capacité à défier ses propres suppositions à l’aide de preuves ou des faits (Rose et coll., 2013). L’adaptabilité comportementale peut être améliorée par des démonstrations de ses capacités, suivies par la pratique et la rétroaction, dont : l’écoute active, la communication efficace, l’affirmation de soi (Papazoglou et Andersen, 2014; Rose, 2014; Rose et coll., 2013), ou même la réflexion critique sur les succès antérieurs (Galli et Vealey, 2008). Afin d’améliorer sa flexibilité lors de l’analyse d’information et dans ses réactions à la pression ressentie en situation d’adversité, les interventions basées sur la thérapie cognitivo-comportementale sont fortement recommandées (Kleim et Westphal, 2011; Papazoglou et Andersen, 2014; Rose et coll., 2013; Smith et coll., 2011;).
(5) Sensibilité : Le degré auquel un élément exposé peut résister aux impacts d’une adversité, demeurer inchangé en ce qui concerne sa santé et sécurité, et persister dans son fonctionnement normal sans effectuer de changements adaptatifs. Pour faciliter la compréhension de la sensibilité, il serait utile d’emprunter le vocabulaire utilisé par Richardson et coll. (1990) et Richardson (2002) et de la décrire comme le maintien de l’homéostasie. Dit autrement, moins l’élément exposé est sensible, plus il résistera aux impacts d’une adversité et moins il aura besoin d’effectuer de changements adaptifs afin de maintenir l’état de sa santé, sa sécurité et/ou son fonctionnement.
Malgré que ce soit un construit distinct, la sensibilité semble être influencée par les trois premiers construits présentés ci-dessus. Bref, lorsque les vulnérabilités sont minimisées et que les facteurs de protection et les stratégies de coping sont maximisés, il est logique de penser que l’élément exposé voit une réduction de sa sensibilité (Fletcher et Sarkar, 2013; MSPGQ, 2008). La redondance systémique est un exemple, où une agence pourrait avoir de multiples équipes (facteur de protection) qui peuvent prendre la relève et servir la population lorsqu’une autre équipe est perturbée (ayant pour effet de réduire la vulnérabilité de l’agence et de la communauté qu’elle dessert, et d’éviter la nécessité d’effectuer des changements organisationnels) (Van Breda, 2016).
Un élément exposé demeurant insensible à une adversité est parfois décrit par un manque de réaction émotive ou de détresse émotionnelle (Fletcher et Sarkar, 2013), ce qui peut être compris à l’aide de recherches axées sur les fonctions biologiques du cerveau. Ce manque de réaction peut être expliqué, entre autres, par une réduction dans l’activité de l’amygdale face à un stress environnemental (Hunter et coll., 2018). Alors, il semble probable que la sensibilité soit aussi influencée par le construit de l’adaptabilité, car cette désensibilisation s’explique à l’aide de la théorie de l’inoculation par le stress (Rose et coll., 2013). Lorsque l’élément est exposé régulièrement à certains facteurs de stress, il peut s’y habituer (Crum et coll., 2013). Si des adaptations ont été effectuées, il se peut que ses apprentissages, ou les changements, persistent et que l’élément soit moins sensible lorsqu’il est exposé à nouveau aux mêmes adversités (Bolton et coll., 2016).
À l’inverse, si les facteurs de vulnérabilité ne sont pas réduits, si les facteurs de protection ne sont pas maintenus, si les stratégies de coping sont inefficaces et si une adaptation n’est pas accomplie, la sensibilité risque d’augmenter. Si l’élément exposé devient plus sensible, les futures adversités risquent d’être plus déstabilisantes pour l’élément concerné.
(6) Récupération : Lorsque l’impact et les séquelles de l’adversité sont temporaires, la récupération se caractérise par le retour progressif à des niveaux de santé, de sécurité et/ou de fonctionnement sains, ou antérieurs à cette adversité. Lorsque l’impact de celle-ci est permanent, la récupération se caractérise par la gestion efficace de symptômes ou séquelles par une intervention continue. En vue de déterminer les attentes et les limites de la récupération, les résultats de cette étude suggèrent que le rétablissement d’un rôle ou d’une raison d’être peut aider à contextualiser la santé, la sécurité et le fonctionnement (Hess et coll., 2014; U.S. Department of Health and Human Services, 1999, p. 97).
Si, par exemple, quelques aspects de la récupération d’une personne ayant vécu la perte d’un(e) conjoint(e) devaient être discutés, Mancini et Bonanno (2009) affirment que :
les personnes endeuillées qui suivent le modèle de récupération éprouvent des symptômes modérés et des difficultés à accomplir leurs tâches normales au travail ou à s’occuper de leurs proches, mais elles parviennent à surmonter ces tâches et à retourner lentement à leur niveau de fonctionnement antérieur à la perte, généralement sur une période d’un ou deux ans.
p. 1808, traduction libre
Dans le cas de deuil, il n’est pas possible de revenir à un état pré-adversité, mais la récupération est toujours possible. La relation entre cette personne et son partenaire peut avoir fonctionné comme un facteur de protection contre l’impact des stress quotidiens modérés. En rétablissant le rôle de cette personne au sein des soutiens sociaux existants (par exemple, avec des amis, des membres de la famille ou des collègues), il est possible que ces autres relations fonctionnent de manière similaire. En termes d’adaptation, cette personne peut avoir besoin d’acquérir des compétences qui favorisent l’indépendance et lui permettent de fonctionner de manière saine (allant d’activités personnelles de la vie quotidienne à une participation plus complexe au sein de la communauté). Quant à la sensibilité, la récupération pourrait être analysée par le degré de déstabilisation de la personne en réaction à des déclencheurs (triggers) tels que les anniversaires ou autres rappels de la perte.
En outre, la croissance est un terme important lié à la récupération ainsi que la résilience en générale (Kimberlin et coll., 2011; Leipold et Greve, 2009; Paton et coll., 2008; Richardson, 2002). La croissance personnelle est souvent présentée comme un résultat possible lorsque l’individu a surmonté les adversités rencontrées (Crum et coll., 2013; Fletcher et Sarkar, 2013; Galli et Vealey, 2008; Greene et coll., 2012). La rétroaction éveille, chez l’individu, la réflexion sur les expériences vécues, encourage un recadrage de perspectives et mène à la croissance (Crum et coll., 2013; Galli et Vealey, 2008; Hunter et coll., 2018). En particulier, le concept de croissance post-traumatique (Boothroyd et coll., 2019; Hatala, 2011) met en évidence la possibilité que la personne puisse vivre une tragédie ayant des conséquences psychiques graves, passer à travers une période de récupération et dépasser l’état de bien-être pré-traumatique (Papazoglou et Andersen, 2014).
Des changements positifs en ce qui concerne les relations interpersonnelles, l’empathie, la spiritualité et l’espoir pour le futur semblent caractériser la croissance (Boothroyd et coll., 2019; Papazoglou et Andersen, 2014). Par exemple, les termes « croissance » et « résilience » sont fortement associés aux survivants de l’Holocauste qui ont pu créer de nouveaux liens, s’intégrer dans leurs communautés et acquérir un sentiment de transcendance en contribuant à un héritage culturel (Greene et coll., 2012).
Enfin, l’analyse a produit des résultats inattendus et suggère que la croissance est distincte de la récupération et ne fait pas partie de ce construit. La croissance n’est pas un construit d’ordre supérieur, et donc n’est pas un septième construit indépendant. Plutôt, c’est une propriété dépendante qui ne fait sens que lorsqu’elle est contextualisée dans le cadre d’un de ces autres construits. Cette notion peut être utilisée lorsque, dans le cadre des cinq autres construits, l’individu atteint, suite à la période de récupération, un état supérieur à celui pré-adversité. Lorsque l’adversité rencontrée ne permet pas un retour à la « normale » suite à la période de récupération, on vise alors à établir un « nouveau normal » post-adversité. Dans ce cas, la croissance exige des changements aux autres construits et surtout en ce qui a trait à l’acquisition de facteurs de protection et à l’adaptabilité en termes d’une adaptation réussie.
Conclusion
Il est important qu’une théorie démontre une certaine stabilité qui permet la reproduction des études et l’interprétation cohérente ou continue de résultats. En intervention, elle doit être assez flexible pour que l’approche demeure centrée sur la personne ou sur les besoins particuliers de la collectivité. La résilience est un terme commun utilisé par les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux, et d’autres professionnels des sciences humaines, mais il a perdu son efficacité puisqu’il n’y a pas de consensus permettant de le définir, de l’étudier et de l’appliquer. Considérant l’absence de consensus sur la question, le dialogue est essentiel entre professionnels et experts du vécu (les résilients).
Ayant privilégié la théorisation enracinée classique de Glaser et Strauss (1967) comme méthodologie, 31 documents ont été codifiés thématiquement, permettant l’identification de six construits les plus représentatifs des fins désirées à l’égard de la résilience. Ces construits ont été utilisés pour analyser 17 documents d’ordre anthropologique pour satisfaire les principes de « pertinence (fit) » et de « travail (work) » (Glaser et Strauss, 1967 ; Weed, 2009).
L’objectif de cette recherche était d’établir une théorie permettant une lecture cohérente des diverses recherches antérieures sur le sujet de la résilience et de fournir un encadrement pour de futures recherches et interventions. Le résultat de cette recherche est la théorie composite de la résilience. Alors, la résilience n’est qu’un terme représentant les discours sur six construits qui sont interconnectés mais distincts : la vulnérabilité, les facteurs de protection, les stratégies de coping, l’adaptabilité, la sensibilité, et la récupération. Ces construits aident à comprendre les résultats de recherches antérieures de façon cohérente, malgré les diverses définitions opérationnalisées de la résilience. Au sein de leurs contextes politiques et culturels, ils rendent plus claires les pistes d’actions pour intervenir sur la santé, la sécurité et le fonctionnement d’un individu et d’une communauté.
L’idée risque d’être controversée, mais il est temps de revoir la vieille question « comment et pourquoi, face à un même niveau de stress environnemental, certaines personnes restent en bonne santé et d’autres non? » et de chercher des réponses alternatives à la résilience. Cet objectif est atteignable à l’aide d’autres concepts qui ont été identifiés comme importants lors des études sur la résilience.
Appendices
Note biographique
André Sansoucy est travailleur social inscrit et possède un baccalauréat et une maîtrise en service social. Le présent article a terminé au premier rang des soumissions francophones du concours étudiant de 2021.
Note
-
[1]
La théorie composite de la résilience fut créée dans le cadre du projet de recherche Résilience des collectivités. Ce projet a été réalisé sous la direction de Karine St-Denis, Ph.D., professeure associée à l’École de service social, Université Laurentienne en Ontario et rendu possible grâce aux Fonds de recherche de l’Université Laurentienne (FRUL-R, 2020–2021). L’implication d’André Sansoucy, BSS, TSI., étudiant à la maîtrise en service social de l’Université Laurentienne, a été réalisée dans le cadre d’un mandat d’assistant de recherche qui a consisté, notamment, à recenser les écrits en service social, à développer les outils de recherche, à codifier les données et à effectuer les analyses théoriques et épistémologiques. L’implication de Kassandra Barrette, étudiante au baccalauréat du département d’anthropologie de l’Université Laval au Québec, a été réalisée dans le cadre de stage qui a consisté, notamment, à recenser et analyser les écrits anthropologiques.
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