Abstracts
Résumé
Les modifications apportées en 1985 à la Loi sur les Indiens ont entraîné d’importants changements pour les populations des Premières nations. Ce texte législatif a accordé le statut d’Indien inscrit aux personnes radiées du Registre des Indiens en vertu de certaines règles des versions antérieures de la Loi, surtout des femmes, et a permis une « première » inscription de leurs enfants. Les modifications de 1985 ont également établi de nouvelles règles pour le droit à l’inscription au Registre des Indiens de tous les enfants nés à compter du 17 avril 1985, et donné à chaque Première nation la possibilité d’établir ses propres règles d’appartenance à la bande. Dans cette étude, nous nous penchons sur les effets démographiques à court et à long termes de ces changements à la Loi sur les Indiens pour la population des Premières nations du Québec.
Abstract
The 1985 amendments to the Indian Act had significant effects on First Nations populations. This legislation granted the status of registered Indian to persons removed from the Indian Register by virtue of certain rules in earlier versions of the Act, particularly women, and enabled a “first” registration of their children. These amendments also established new rules on the right of registration in the Indian Register of all children born after 17 April 1985, and gave each First Nation the authority to draw up its own rules for band membership. This study examines the short and long term demographic effects of these amendments to the Indian Act for the First Nations population of Quebec.
Article body
Les modifications apportées en 1985 à la Loi sur les Indiens, mieux connues sous le nom de « projet de loi C-31 », ont eu et continueront d’avoir des effets marqués sur la taille et la composition des populations des Premières nations du Canada. Plusieurs auteurs ont étudié les changements démographiques associés au projet de loi C-31 à l’échelle nationale (Wherret, 1990 ; Clatworthy et Smith, 1992 ; Clatworthy, 1994, 2002), mais peu ont examiné les répercussions régionales de ce projet de loi. Cet article vise à évaluer les effets à court terme et à long terme du projet de loi C-31 sur les populations des Premières nations du Québec. On dénombre 39 Premières nations au Québec et en date du 31 décembre 2004 le nombre de membres de l’une ou l’autre de ces Premières nations ayant droit d’être inscrits au Registre des Indiens se chiffrait à environ 70 000, soit 9 % du total canadien[1].
Cet article traite de quatre grandes questions :
Quels sont les changements introduits par le projet de loi C-31 et en quoi la nouvelle loi diffère-t-elle de la version antérieure de la Loi sur les Indiens ?
Quels ont été les effets de ces changements sur la taille et la composition des populations des Premières nations du Québec depuis leur entrée en vigueur ?
En quoi ces changements auront-ils une incidence sur la taille et la composition futures des populations des Premières nations du Québec ?
Quelles seront les répercussions de ces changements sur la composition des bandes, sur l’administration des Premières nations et sur les autres organismes gouvernementaux chargés de la prestation ou de la gestion des services aux collectivités des Premières nations du Québec ?
Modifications apportées en 1985 à la Loi sur les Indiens
Ainsi que l’ont fait remarquer plusieurs observateurs, dont Jamieson (1978) et Smith (1991), la Loi sur les Indiens en vigueur au Canada (Gouvernement du Canada, 2009) a longtemps reposé sur un régime patrilinéaire. Ces dispositions discriminatoires, qui figurent aux articles 11 et 12 de la Loi sur les Indiens de 1951 (modifiée en 1956), ont eu cours jusqu’à l’entrée en vigueur des modifications de 1985. L’article 12 de la Loi sur les Indiens de 1951 (1956) contenait une série de règles excluant certaines personnes du Registre des Indiens ou en commandant la radiation[2] : 1) les Indiennes ayant épousé des non-Indiens ; 2) les descendants de ces mariages ; 3) les enfants illégitimes d’Indiennes et de non-Indiens[3] ; 4) les personnes dont la mère et la grand-mère paternelle étaient toutes deux non-Indiennes (disposition « mère grand-mère »).
Par contre, l’article 11 de cette même Loi accordait la possibilité aux Indiens de sexe masculin, sous réserve de la disposition « mère grand-mère », de transmettre le droit à l’inscription à tous leurs enfants, sans égard au statut de la mère de ces derniers et à la question du mariage. L’article 11 permettait également aux femmes non indiennes mariées à des Indiens de jouir du droit à l’inscription.
Les dispositions des articles 11 et 12 de la Loi sur les Indiens de 1951 (1956), du fait qu’elles étaient discriminatoires envers les femmes, étaient donc source de problèmes d’ordre politique et juridique. Afin de remédier à la situation, la Loi sur les Indiens amendée en 1985 comportait trois nouvelles dispositions qui visaient essentiellement les objectifs suivants :
redonner le statut d’Indien inscrit aux personnes radiées du Registre des Indiens en vertu des règles figurant dans les versions antérieures de la Loi sur les Indiens et permettre la première inscription de leurs enfants ;
établir de nouvelles règles non discriminatoires pour définir le droit à l’inscription au Registre des Indiens de tous les enfants nés le 17 avril 1985 (date d’entrée en vigueur de la Loi sur les Indiens de 1985) ou ultérieurement ;
donner à chaque Première nation la possibilité d’établir ses propres règles d’appartenance à la bande.
Ces modifications, qui sont censées avoir aboli les inégalités en redonnant le statut d’Indien inscrit aux personnes radiées du Registre et en éliminant les dispositions discriminatoires concernant la transmission du droit à l’inscription aux enfants, visaient à rendre la Loi sur les Indiens conforme aux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés concernant l’égalité des sexes. La mesure dans laquelle l’objectif a été atteint demeure une question litigieuse et les débats se poursuivent sur la scène politique et devant les tribunaux. Le conflit découle surtout de l’application des dispositions de réintégration au Registre prévues dans la Loi sur les Indiens de 1985.
Application des dispositions régissant le droit à l’inscription au Registre des Indiens
La Loi sur les Indiens de 1985 a complètement changé les règles déterminant le droit à l’inscription. Aux termes des nouvelles règles, lesquelles figurent à l’article 6 de la Loi, le droit de figurer au Registre des Indiens est devenu un droit acquis à la naissance qui ne peut être obtenu ou perdu par suite d’un mariage ou d’un autre événement. Le droit à l’inscription est uniquement fondé sur les caractéristiques d’inscription des parents. Les personnes peuvent être admissibles au Registre en vertu de l’une ou l’autre des dispositions suivantes :
paragraphe 6(1) : quand les deux parents sont inscrits (ou ont le droit de l’être) ;
paragraphe 6(2) : quand un des deux parents est inscrit (ou a le droit de l’être) en vertu du paragraphe 6(1) et que l’autre parent n’est pas admissible au Registre.
Comme l’indique le tableau 1, les règles qui déterminent le droit à l’inscription ont pour conséquence que les combinaisons d’ascendants auront un effet important sur la future population autorisée à figurer au Registre des Indiens. L’ascendance mixte (un parent indien et un parent non indien) sur deux générations successives aboutit à la perte du droit à l’inscription pour les enfants de la seconde génération.
Pour comprendre comment ont été appliquées les règles prévues à l’article 6, il est utile d’établir une distinction entre trois sous-groupes de la population :
la population pré-C-31 (population antérieure au projet de loi C-31), comprenant toutes les personnes qui, le 16 avril 1985, figuraient au Registre des Indiens (ou avaient le droit d’y être inscrites) ;
la population C-31, comprenant toutes les personnes nées le 16 avril 1985 ou antérieurement et devenues admissibles au Registre des Indiens en vertu de la Loi sur les Indiens de 1985 ;
la population post-C-31 (population postérieure au projet de loi C-31), comprenant toutes les personnes nées après le 16 avril 1985.
Il est important de bien distinguer ces sous-groupes, car les règles d’ascendance (ou règles de transmission) prévues à l’article 6 de la Loi sur les Indiens de 1985 n’ont pas été appliquées à ces sous-groupes de la même manière. Toutes les personnes formant la population pré-C-31 ont obtenu le droit à l’inscription en vertu du paragraphe 6(1)[4]. Pour ce qui est des personnes qui ne pouvaient pas, au 16 avril 1985, figurer au Registre (population C-31), les règles de transmission de l’article 6 ont été mises en pratique. Il en a résulté que certaines personnes sont devenues admissibles au Registre en vertu du paragraphe 6(1) puisque leurs deux parents étaient des Indiens inscrits, que certaines personnes ont obtenu le droit à l’inscription en vertu du paragraphe 6(2) puisqu’un de leurs parents avait le droit de figurer au Registre aux termes du paragraphe 6(1), et que certaines personnes n’ont pu jouir du statut d’Indien inscrit parce que seul un de leurs parents était autorisé à figurer au Registre et c’était aux termes du paragraphe 6(2). Le droit à l’inscription de toutes les personnes nées le 17 avril 1985 ou ultérieurement (population post-C-31) est déterminé en fonction des règles de transmission prévues à l’article 6, plus précisément en fonction du paragraphe 6(1) si les deux parents sont inscrits (ou ont droit de l’être) ou en fonction du paragraphe 6(2) si un des parents est inscrit aux termes du paragraphe 6(1) et que l’autre n’a pas le droit de figurer au Registre. Ainsi, depuis le projet de loi C-31, la population d’Indiens inscrits s’est transformée en un assemblage de personnes possédant des droits d’inscription différents et des capacités différentes de transmission de ce droit à leurs descendants.
Répercussions démographiques du projet de loi C-31 en date du 31 décembre 2004
Les changements introduits par le projet de loi C-31 ont donné lieu à une croissance additionnelle du nombre d’Indiens inscrits (par rapport à la croissance qui aurait été observée si la version antérieure de la Loi avait été conservée). Cette croissance potentielle a quatre grandes sources :
les réintégrations et les inscriptions au Registre des Indiens (autrement dit, les personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31)[5] ;
les enfants nés le 17 avril 1985 ou ultérieurement qui sont admissibles à l’inscription en vertu du projet de loi C-31, mais qui n’y auraient pas été admissibles en vertu des dispositions antérieures de la Loi (p. ex. enfants nés de deux personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31) ;
les Indiennes qui n’ont pas été radiées du Registre après le 16 avril 1985 pour avoir épousé un non-Indien ;
les non-Indiennes qui n’ont pas été inscrites au Registre après le 16 avril 1985 alors qu’elles ont épousé un Indien.
Nous allons maintenant analyser et estimer les changements dans la taille de la population indienne inscrite du Québec associés à chacun de ces quatre facteurs.
Croissance découlant des réintégrations et des inscriptions
La figure 1 illustre le nombre cumulatif de personnes ayant pu se greffer à la population indienne inscrite au Québec grâce aux dispositions de réintégration et d’inscription du projet de loi C-31[6]. Ce nombre était de 11 346 au 31 décembre 2003. La croissance du nombre de personnes inscrites en vertu du projet de loi C-31 a fortement chuté depuis le milieu des années 1990 : entre 2000 et 2003, il oscillait autour de 82 par année, soit un niveau environ huit fois moins élevé que celui enregistré au début des années 1990[7].
L’effectif des personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31 et toujours en vie le 31 décembre 2004 se chiffrait à 10 745, soit près de 15 % du nombre total d’Indiens inscrits au Québec. Puisque les dispositions du projet de loi C-31 à l’égard des réintégrations et des inscriptions ne possèdent aucune contrainte temporelle, on peut s’attendre à ce que la population augmente encore dans l’avenir du fait des réintégrations et des inscriptions en vertu du projet de loi C-31. D’après les récentes prévisions de Statistique Canada (2002) et de Clatworthy (2006), le nombre total (cumulatif) d’inscriptions aux termes du projet de loi C-31 culminera à environ 12 000 dans approximativement deux décennies.
Même si les réintégrations et les inscriptions expliquent la plus grande partie de la croissance de la population québécoise d’Indiens inscrits attribuable au projet de loi C-31, les autres changements aux dispositions régissant le droit à l’inscription introduits par ce projet de loi ont également eu des effets importants sur la croissance de la population entre 1985 et 2004.
Croissance attribuable aux enfants nés après le 16 avril 1985
Comme le Registre des Indiens contient des données sur toutes les personnes inscrites, il est possible d’apparier les enfants à leurs parents, ce qui permet de reconstituer les combinaisons d’ascendants en différenciant les hommes et les femmes ainsi que la population C-31 et la population pré-C-31.
Les données concernant les combinaisons d’ascendants ont été rassemblées pour tous les enfants nés et inscrits du Québec entre l’adoption du projet de loi C-31 (17 avril 1985) et le 31 décembre 2004[8]. Ces combinaisons, synthétisées dans le tableau 2, servent de fondement à l’estimation de la proportion de la croissance secondaire de la population attribuable au projet de loi C-31. Les enfants qui ont acquis le droit de figurer au Registre des Indiens en vertu du projet de loi C-31 mais qui n’y auraient pas eu droit si les règles de la version antérieure de la Loi sur les Indiens étaient demeurées en vigueur présentent un intérêt particulier à cet égard. Parmi ces enfants, notons :
ceux nés de deux parents inscrits en vertu du projet de loi C-31 ;
ceux nés d’un parent inscrit aux termes du paragraphe 6(1) et d’un parent non inscrit ;
ceux issus de l’union d’une femme appartenant à la population pré-C-31 et d’un non-Indien ;
ceux issus de l’union d’une femme appartenant à la population pré-C-31 et d’un homme inscrit en vertu du projet de loi C-31.
Le nombre d’enfants issus de ces diverses combinaisons d’ascendants est indiqué dans les cases ombrées du tableau 2. Au 31 décembre 2004, on estime que 4 844 enfants supplémentaires avaient été autorisés à figurer au Registre des Indiens en vertu des nouvelles règles de la Loi sur les Indiens. Environ 83 % de ces enfants sont nés de mères appartenant à la population pré-C-31 et de pères qui n’auraient pas eu le droit à l’inscription en vertu du projet de loi C-31 ou des règles de l’ancienne Loi. Les 17 % restants sont nés de parents qui ont retrouvé ou acquis le droit à l’inscription grâce au projet de loi C-31.
Croissance résultant de la non-radiation des femmes qui ont épousé des non-Indiens après le 16 avril 1985
Comme le projet de loi C-31 ne permet plus la radiation des femmes du Registre des Indiens pour la raison qu’elles ont épousé un non-Indien, une partie de la croissance démographique enregistrée après le 16 avril 1985 est le résultat de la non-radiation (du Registre) de femmes qui appartenaient à la population pré-C-31 et qui ont conclu un « mariage mixte » le 17 avril 1985 ou ultérieurement. Comme on ne dispose d’aucune donnée sur les schémas de nuptialité réels des Indiens inscrits pour cette période, il est impossible d’établir une estimation précise ou directe du nombre d’Indiennes qui auraient été radiées du Registre (conséquence d’une union avec un non-Indien) n’eût été du projet de loi C-31. On peut toutefois calculer un nombre approximatif en appliquant les estimations de l’indice synthétique de fécondité (ISF) des Indiennes inscrites au nombre d’enfants nés de femmes appartenant à la population pré-C-31 et d’hommes non inscrits (population C-31)[9].
Lors de la production de ces estimations, on a exclu 248 enfants nés d’Indiennes inscrites qui ont demandé et obtenu une exemption des dispositions de l’alinéa 12(1)b) de la version antérieure de la Loi sur les Indiens (selon lequel une Indienne perd son droit à l’inscription lorsqu’elle épouse un non-Indien)[10]. L’application de l’ISF aux 3 774 enfants nés de femmes appartenant à la population pré-C-31 (et d’un non-Indien) au Québec permet d’estimer à 1 457 le nombre de femmes qui n’ont pas été radiées du Registre des Indiens entre 1985 et 2004 par suite de leur union avec un non-Indien.
Les femmes ayant épousé un Indien après le 16 avril 1985 mais n’ayant pas acquis le droit à l’inscription
En vertu du projet de loi C-31, les non-Indiennes ne peuvent plus obtenir le droit de figurer au Registre lorsqu’elles épousent un Indien. Puisque nous n’avions pas accès aux dernières données concernant ces mariages, la méthode reposant sur l’indice synthétique de fécondité décrite ci-dessus a été de nouveau employée pour dégager une estimation du nombre de femmes qui n’ont pas acquis le droit à l’inscription durant la période à l’étude. L’application de l’indice synthétique de fécondité aux 2 276 enfants nés d’hommes appartenant à la population pré-C-31 et de femmes non inscrites permet d’estimer à 879 le nombre de femmes n’ayant pas été ajoutées au Registre après avoir épousé un Indien durant la période à l’étude.
Sommaire de la croissance démographique attribuable au projet de loi C-31
La croissance totale de la population québécoise d’Indiens inscrits attribuable aux changements introduits par le projet de loi C-31 est estimée à 16 169 personnes, dont 10 745 personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31, 4 844 enfants qui n’auraient pas été admissibles au Registre en vertu des anciennes règles et 578 (1 457 – 879) femmes par suite des changements aux dispositions en matière de mariage. Le tableau 3 résume la croissance de la population indienne inscrite au Québec attribuable au projet de loi selon la source et présente des estimations comparables se rapportant à d’autres provinces ou régions.
La croissance démographique attribuable aux changements introduits par le projet de loi C-31 équivaut à 23,2 % de la population totale d’Indiens inscrits au Québec en 2004 et à une augmentation de 30,2 % de la population d’Indiens inscrits par rapport à ce à quoi on aurait pu s’attendre si les dispositions de l’ancienne Loi sur les Indiens étaient demeurées en vigueur entre le 17 avril 1985 et le 31 décembre 2004.
Répartition de la croissance démographique découlant du projet de loi C-31 selon le lieu de résidence
Ainsi que l’ont déjà souligné plusieurs auteurs (Clatworthy et Smith, 1992 ; Clatworthy, 2003), une grande majorité des personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31 vivaient à l’extérieur des réserves, et les analyses réalisées dans le cadre de la présente étude indiquent que la plus grande part des effets du projet de loi sur la croissance de la population québécoise d’Indiens inscrits se sont fait sentir à l’extérieur des réserves. Selon les données du 31 décembre 2004, le projet de loi C-31 s’est traduit par une augmentation du nombre total d’Indiens inscrits résidant dans les réserves de 5 487, ce qui représente 34 % de la croissance attribuable au projet de loi C-31. La croissance découlant du projet de loi C-31 expliquait 13 % de la croissance totale enregistrée dans les réserves entre le 17 avril 1985 et le 31 décembre 2004.
Selon les estimations, on comptait, en date du 31 décembre 2004, 10 862 Indiens inscrits de plus à l’extérieur des réserves du fait de l’adoption du projet de loi C-31, celui-ci ayant permis de doubler la taille de la population indienne inscrite vivant à l’extérieur des réserves.
La croissance de la population québécoise d’Indiens inscrits vivant dans les réserves attribuable au projet de loi C-31 a été d’une proportion similaire à la croissance de la population correspondante pour l’ensemble des Premières nations du Canada. La contribution du projet de loi C-31 à la croissance de la population québécoise d’Indiens inscrits à l’extérieur des réserves (+101 %) était toutefois nettement plus grande que dans la plupart des autres provinces ou régions et de beaucoup supérieure à la moyenne nationale (+70 %) (Clatworthy, 2005).
Structure par âge et sexe de la population C-31
Ainsi que l’indique le tableau 4, les femmes représentent 58 % de la croissance de la population québécoise d’Indiens inscrits attribuable au projet de loi C-31, une proportion similaire à celle estimée pour l’ensemble des Premières nations du Canada. La forte concentration de femmes au sein de cette population s’explique principalement par deux facteurs : l’espérance de vie moyenne plus longue des Indiennes inscrites et les dispositions des versions antérieures de la Loi sur les Indiens selon lesquelles les femmes perdaient leur droit à l’inscription après avoir épousé un non-Indien. Il n’est donc pas surprenant que le groupe des personnes inscrites en vertu du projet de loi C-31 soit majoritairement constitué de femmes. Puisque les dispositions concernant la perte du droit à l’inscription par suite d’une union à un non-Indien ont été abolies après l’adoption du projet de loi C-31, les femmes expliquent aussi la majeure partie de la croissance secondaire attribuable au projet de loi.
Comme nous l’avons déjà précisé, les dispositions des versions antérieures de la Loi sur les Indiens entraînant la perte du droit à l’inscription ont été appliquées pendant des périodes de temps bien précises et ont été entièrement supprimées grâce à l’adoption du projet de loi C-31. Par conséquent, la structure par âge de la population C-31 est largement différente de celle du reste de la population indienne inscrite. La figure 2 illustre l’étendue de ces différences pour la population québécoise d’Indiens inscrits.
La population C-31 compte très peu d’enfants et la distribution est fortement désaxée vers la droite (vers les cohortes plus âgées), tandis que le reste de la population indienne inscrite autre que C-31 est plutôt jeune (les personnes de moins de 20 ans représentent 42 % de la population totale). Au 31 décembre 2004, l’âge moyen de la population C-31 au Québec était de 47 ans, comparativement à 29 ans pour la population autre que C-31. Le fait que la population C-31 du Québec soit beaucoup plus âgée porte à croire que le projet de loi C-31 a contribué au décalage de la structure par âge de la population québécoise d’Indiens inscrits vers les cohortes plus âgées[11] et que la croissance future attribuable au projet de loi C-31 se fera probablement à un rythme beaucoup plus lent, puisque la majorité de la population a déjà dépassé la période de procréation.
Estimation des répercussions démographiques à long terme du projet de loi C-31
Ainsi qu’il a été mentionné ci-dessus, les dispositions de réintégration et d’inscription du projet de loi C-31 devraient, selon les projections, contribuer de moins en moins à la croissance future des effectifs des Premières nations. Toutefois, les règles du projet de loi C-31 régissant le droit à l’inscription au Registre des Indiens auront une incidence importante sur les populations futures des Premières nations. Ces règles, combinées à l’ascendance mixte (ou mariages mixtes), font en sorte que certains descendants ne jouiront pas du droit à l’inscription.
Des modèles de projection ont été élaborés pour explorer les répercussions à long terme des règles du projet de loi C-31 sur la population des membres des Premières nations du Québec ayant droit à l’inscription[12]. La méthode, qui est décrite en détail par Clatworthy et coll. (2007), repose sur un modèle par composantes qui a été adapté afin d’intégrer non seulement les composantes traditionnelles (fécondité, mortalité, migration), mais aussi les règles déterminant le droit à l’inscription au Registre des Indiens (article 6 de la Loi sur les Indiens de 1985) et les combinaisons d’ascendants. Pour ce faire, il a fallu apporter plusieurs modifications au modèle de projection classique. Parmi ces changements, notons :
la répartition de la population en fonction de l’âge et du sexe, mais également selon les modalités du droit à l’inscription (paragraphe 6(1), paragraphe 6(2), et non admissible à l’inscription) ;
l’inclusion d’indices de fécondité pour les hommes et pour les femmes ;
la prise en considération des futurs Indiens inscrits en vertu du projet de loi C-31 ;
l’inclusion d’indicateurs (taux) d’ascendance mixte pour les hommes et pour les femmes.
Les projections (élaborées d’après les données du Registre des Indiens) ont pour point de départ l’année 2004 et couvrent une période de 100 ans allant de 2004 à 2104[13].
Ascendance mixte dans la population québécoise d’Indiens inscrits
Comme nous l’avons mentionné, dans le contexte des règles régissant le droit à l’inscription, les combinaisons d’ascendants joueront un rôle clé dans la détermination de la future population ayant droit de figurer au Registre des Indiens. À cet égard, la fréquence de l’ascendance mixte (c.-à-d. un parent ayant droit à l’inscription et l’autre n’y ayant pas droit) mérite une attention particulière[14].
Les données du Registre des Indiens (tableau 2) servent également à estimer les taux d’ascendance mixte chez les Indiens et Indiennes inscrits du Québec. Comme l’illustre la figure 3, les taux d’ascendance mixte varient grandement selon le sexe et le lieu de résidence : ils sont considérablement plus élevés pour les femmes et pour les Indiens vivant à l’extérieur des réserves. Les écarts de taux selon le lieu de résidence sont particulièrement grands et ils laissent à penser que la population vivant à l’extérieur des réserves subira beaucoup plus les répercussions à long terme des règles déterminant le droit à l’inscription.
Comme le révèle la figure 4, la fréquence de l’ascendance mixte chez les Indiens inscrits n’est pas la même à l’échelle du Québec et à l’échelle du Canada. Le taux associé aux populations vivant dans les réserves du Québec (20 %) est beaucoup plus faible (environ 13 points de pourcentage) que le taux associé aux populations vivant dans les réserves à l’échelle du pays. En revanche, le taux d’ascendance mixte chez les Indiens inscrits vivant à l’extérieur des réserves au Québec (80 %) est beaucoup plus élevé que le taux correspondant pour le Canada. Par rapport à la situation canadienne, on s’attend à ce que les répercussions à long terme des règles régissant le droit à l’inscription soient un peu moins prononcées pour les populations vivant dans les réserves au Québec, mais plus marquées dans le cas des populations vivant à l’extérieur des réserves.
Résultats des projections : droit à l’inscription au Registre des Indiens[15]
La figure 5 illustre la population projetée de membres des Premières nations du Québec ayant droit à l’inscription. La population totale devrait aller croissant pendant environ 45 ans et atteindre un sommet d’environ 93 400 personnes en 2049. Durant les 55 années suivantes, on s’attend à ce que la population ayant droit à l’inscription diminue pour s’établir à environ 69 890 personnes en 2104.
Selon les projections, la population ayant droit à l’inscription dans les réserves augmentera pendant approximativement 60 ans pour culminer à environ 79 410 personnes en 2064. Par la suite, la population vivant dans les réserves déclinera graduellement pour atteindre 66 800 en 2104, soit 24 380 personnes de plus qu’en 2004. On s’attend à ce que la croissance de la population ayant droit à l’inscription à l’extérieur des réserves soit très modeste durant les dix premières années de la période étudiée. Par la suite, la population vivant à l’extérieur des réserves et ayant droit à l’inscription devrait fléchir et s’établir à environ 3 090 personnes à la fin de la période étudiée.
Contrairement à la population admissible au Registre des Indiens, la population de descendants ne jouissant pas de ce droit devrait s’accroître au cours de la période de projection. Comme l’illustre la figure 6, ce segment de la population vivant dans les réserves ne comptait que 365 personnes en 2004 selon les estimations. Près d’une génération plus tard (25 ans), ce nombre devrait avoir plus que triplé pour s’établir à 1 260 personnes. En 2104 (environ quatre générations plus tard), le nombre de descendants vivant dans les réserves et n’ayant pas droit à l’inscription devrait atteindre 4 555, ce qui représentera environ 6 % de la population.
Conséquence des taux d’ascendance mixte beaucoup plus élevés, la population de descendants vivant à l’extérieur des réserves et n’ayant pas droit à l’inscription devrait passer de 9 230 en 2004 à 16 640, une génération plus tard. En 2104, les descendants n’ayant pas droit à l’inscription devraient être au nombre de 33 710 et constituer la vaste majorité (près de 90 %) de la population de survivants et de descendants des Premières nations du Québec vivant à l’extérieur des réserves.
Ainsi que l’illustre la figure 7, le nombre d’enfants non admissibles à l’inscription devrait être en hausse au cours de la période de projection, et ce, tant dans les réserves qu’à l’extérieur des réserves. Dans les réserves, on projette que la proportion de nouveaux-nés ayant droit à l’inscription marquera un recul graduel, passant de 99 % en 2004 à environ 89 % 100 ans plus tard. Selon les projections, en 2054 (environ deux générations plus tard), près de 1 enfant sur 20 enfants nés dans les réserves n’aura pas le droit de figurer au Registre.
À l’extérieur des réserves, la proportion de nouveaux-nés ayant droit à l’inscription devrait passer de 46 % en 2004 à environ 19 % 25 ans (une génération) plus tard, puis décliner encore davantage pour s’établir à moins de 1 % après quatre générations (100 ans). La tendance qui se dégage des projections porte à croire qu’en l’absence de mouvements migratoires des réserves vers d’autres lieux de résidence, le nombre d’enfants nés à l’extérieur des réserves et ayant droit à l’inscription pourrait devenir nul au bout d’une génération supplémentaire.
Appartenance à la bande
Avant l’entrée en vigueur de la Loi sur les Indiens de 1985, les notions de « statut d’Indien inscrit » et « d’appartenance à la bande » étaient pratiquement interchangeables : les membres d’une bande représentaient les personnes, au sein d’une Première nation donnée, inscrites au Registre des Indiens (ou visées par un traité). L’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985 a donné aux Premières nations la possibilité de définir leurs propres règles d’appartenance. Le Registre des Indiens continue de déterminer l’appartenance à la bande uniquement dans les cas où une Première nation n’a pas elle-même adopté de règles d’appartenance[16]. Pour ce qui est des Premières nations ayant adopté des règles d’appartenance en vertu de l’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985, la « liste de bande » est tenue par la Première nation, et ce, de façon tout à fait indépendante du Registre des Indiens[17]. Ainsi, pour certaines Premières nations, la population admissible au sein de la bande est différente de celle ayant le droit de figurer au Registre.
La distinction entre l’inscription au Registre et l’appartenance à la bande est importante, les droits, privilèges et avantages conférés n’étant pas les mêmes dans chaque cas. Par exemple, une personne inscrite n’a pas à payer de taxes ou d’impôts si elle vit dans une réserve, elle est admissible à une aide financière pour poursuivre des études postsecondaires et elle a accès à un vaste éventail de services offerts par Santé Canada dans le cadre du programme des Services de santé non assurés (SSNA). De plus, c’est en fonction du nombre d’Indiens inscrits qu’est déterminé le montant du financement qui est accordé aux Premières nations pour certains programmes et services. De son côté, l’appartenance à la bande donne un sens d’appartenance à la collectivité. Elle confère en outre des droits politiques (par exemple, le droit de voter lors de l’élection du conseil de bande et de poser sa candidature au conseil) et, dans de nombreuses bandes, il s’agit d’un critère d’accès à un large éventail de programmes et de services administrés par la Première nation.
Mais, comme l’ont souligné Clatworthy et Smith (1992), le fait d’établir une distinction entre l’inscription au Registre et l’appartenance à la bande risque de créer des « catégories de citoyens » n’ayant pas tous les mêmes droits et privilèges, les inégalités ainsi créées pouvant susciter des tensions dans les collectivités des Premières nations[18], donner lieu à des poursuites et provoquer des différends entre les gouvernements au sujet des responsabilités de chacun en ce qui concerne la prestation et le financement des services offerts aux différents segments de population des Premières nations.
Dans le cadre de l’étude qu’ils ont réalisée en 1992, Clatworthy et Smith ont examiné toutes les règles d’appartenance adoptées par les Premières nations du Canada et les ont classées en fonction de leurs similitudes eu égard à la population initialement admissible au sein de la bande et de la nature des règles de transmission du droit d’appartenance aux générations futures. Les auteurs ont défini quatre grands types de règles d’appartenance à la bande établies conformément à l’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985[19] :
Règles conditionnelles fondées sur l’appartenance d’un parent (règles équivalant aux dispositions prévues dans la Loi). La personne réclamant l’appartenance à la bande doit elle-même avoir le droit d’être inscrite au Registre des Indiens, et au moins un de ses parents doit appartenir à la bande.
Règles non conditionnelles fondées sur l’appartenance d’un parent. La personne réclamant l’appartenance à la bande ne doit pas nécessairement avoir le droit d’être inscrite au Registre des Indiens, mais au moins un de ses parents doit appartenir à la bande.
Règles fondées sur l’appartenance des deux parents. Les deux parents de la personne réclamant l’appartenance à la bande doivent eux-mêmes appartenir à la bande.
Règles fondées sur un quantum sanguin. Pour jouir de l’appartenance à la bande, la personne doit avoir un minimum de « sang indien ».
Les quatre catégories de règles d’appartenance ont été scindées en sous-catégories définies selon la population initialement admise dans la bande (autrement dit, les règles ayant servi à déterminer les membres initiaux). Ce facteur (membres initiaux) revêt une importance puisque les Premières nations qui ont adopté des règles d’appartenance avant le 28 juin 1987 étaient autorisées à exclure certains groupes de personnes dont les droits (acquis) d’appartenance n’étaient pas protégés en vertu de (l’article 11 de) la Loi sur les Indiens de 1985[20]. De fait, le groupe le plus nombreux à avoir été exclu du groupe initial de membres est celui des enfants issus de l’union matrimoniale entre une Indienne ayant perdu son statut d’Indienne inscrite (aux termes de l’ancienne Loi) et un non-Indien[21].
Règles d’appartenance adoptées par les Premières nations du Québec
En décembre 2002, au Canada, on dénombrait 236 Premières nations ayant adopté des règles d’appartenance conformément à l’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985, dont 84 ayant défini des règles non conditionnelles fondées sur l’appartenance d’un parent, 64 ayant opté pour des règles fondées sur l’appartenance des deux parents, 58 ayant adopté des règles conditionnelles fondées sur l’appartenance d’un parent (règles équivalant aux dispositions prévues dans la Loi) et 26 ayant élaboré des règles fondées sur un quantum sanguin. À cette date, seulement trois Premières nations du Québec (les Abénakis de Wôlinak, les Micmacs de Gaspé et les Malécites de Viger) avaient adopté des règles d’appartenance en vertu de l’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985. Les 37 autres Premières nations du Québec continuent de s’en remettre à l’article 6 de la Loi sur les Indiens de 1985[22]. Pour ces peuples, la population admissible au Registre des Indiens est la même que celle ayant droit d’appartenir à la bande.
Les règles d’appartenance définies par les trois Premières nations du Québec susmentionnées sont en fait des variantes des règles fondées sur l’appartenance d’un parent. Dans le cas des Malécites de Viger, aucune autre condition n’a été posée. Ce type de règle d’appartenance (règle non conditionnelle, fondée sur l’appartenance d’un parent, selon la terminologie de Clatworthy et Smith [1992]) permet l’admission dans la bande de tous les descendants de membres de la Première nation concernée, peu importe que le descendant ait le droit ou non d’être inscrit au Registre des Indiens. La règle fondée sur l’appartenance d’un parent adoptée par les Abénakis de Wôlinak fait également partie de la même catégorie de règles non conditionnelles, mais elle prévoit des dispositions supplémentaires selon lesquelles sont exclues du groupe initial de membres les personnes nées avant le 17 avril 1985 qui sont inscrites au Registre en vertu du paragraphe 6(2). La règle d’appartenance définie par les Micmacs de Gaspé exige également qu’un des deux parents soit membre de la bande, mais elle stipule en plus que la personne réclamant l’appartenance doit avoir le droit de figurer au Registre des Indiens. Cette règle d’appartenance équivaut donc aux dispositions de la Loi sur les Indiens régissant l’appartenance.
Répercussions d’autres règles sur la population ayant droit d’appartenir à la bande
Des règles d’appartenance définies par les Premières nations du Québec, on peut dégager quatre catégories de citoyens :
Indiens inscrits membres de la bande : personnes admissibles au Registre des Indiens et répondant aux critères d’appartenance à la bande ;
Indiens inscrits non membres de la bande : personnes admissibles au Registre des Indiens mais qui ne répondent pas aux critères d’appartenance à la bande ;
Membres de la bande non inscrits comme Indiens : personnes non admissibles au Registre des Indiens mais qui répondent aux critères d’appartenance à la bande ;
Non-membres de la bande ne figurant pas au Registre des Indiens : personnes qui n’ont pas le droit de figurer au Registre des Indiens et qui ne répondent pas aux critères d’appartenance à la bande.
La présence et la taille relative de ces groupes au sein des collectivités des Premières nations dépendront largement de deux facteurs, soit le type de règle d’appartenance en vigueur et le taux d’ascendance mixte.
Afin d’illustrer les répercussions à long terme des différentes règles d’appartenance adoptées par les Premières nations du Québec, on peut recourir aux projections démographiques élaborées par Clatworthy (2005). Les projections sont données pour les deux Premières nations (les Malécites de Viger et les Abénakis de Wôlinak) dont les règles d’appartenance diffèrent des dispositions de la Loi sur les Indiens de même que pour cinq sous-groupes d’autres Premières nations du Québec dont les règles d’appartenance sont fondées sur les dispositions régissant le droit à l’inscription au Registre des Indiens. Ces cinq sous-groupes présentent des différences considérables sur le plan des taux d’ascendance mixte. Ils sont inclus dans l’analyse pour illustrer la gamme de changements démographiques auxquels on pourrait s’attendre au sein des Premières nations du Québec dont les règles d’appartenance sont fondées sur les dispositions de la Loi sur les Indiens. Les projections quant à l’admissibilité au sein d’une bande couvrent une période de 75 ans (environ trois générations) allant de 2002 à 2077.
Appartenance à la bande : Premières nations du Québec appliquant les dispositions de la Loi sur les Indiens
Ainsi qu’il a été précisé ci-dessus, 38 des 40 Premières nations du Québec qui appliquent la Loi sur les Indiens n’ont pas adopté de règles d’appartenance qui leur sont propres ou ont défini des règles équivalentes à celles prévues dans la Loi sur les Indiens. On peut s’attendre à ce que les peuples de ces Premières nations abritent deux catégories de citoyens : les membres de la bande inscrits au Registre des Indiens et les non-membres ne figurant pas au Registre des Indiens. Les projections que nous avons présentées concernant la population québécoise totale d’Indiens inscrits donnaient une vue d’ensemble des changements globaux prévus à long terme. Toutefois, les Premières nations du Québec diffèrent grandement sur le plan des taux d’ascendance mixte et, par conséquent, les répercussions démographiques à long terme de la Loi sur les Indiens de 1985 varieront d’une Première nation à une autre. Chaque groupe étudié est formé de Premières nations affichant des taux d’ascendance mixte similaires.
Le tableau 5 résume les projections associées aux cinq groupes. Elles sont présentées sous forme de proportion (ou de pourcentage) de la population de survivants et de descendants qui auront le droit d’être inscrits au Registre des Indiens et d’appartenir à la bande au cours de la période de 75 ans visée par les projections. La proportion de la population ayant droit de figurer au Registre et d’appartenir à la bande ne fluctuera que très modestement parmi les Premières nations affichant un faible taux d’ascendance mixte (groupe 1). Parmi les autres groupes, la proportion de la population future ayant droit de figurer au Registre des Indiens et d’appartenir à la bande déclinera considérablement au cours de la période de 75 ans. Dans le cas des Premières nations associées à des taux élevés d’ascendance mixte (groupes 4 et 5), on devrait observer une baisse appréciable de la proportion de la population autorisée à figurer au Registre et à appartenir à la bande sur une période de 25 ans (environ une génération).
Appartenance à la bande : les Malécites de Viger
Comme nous l’avons précisé ci-dessus, la règle d’appartenance adoptée par les Malécites de Viger autorise tous les descendants de membres à appartenir à la bande. Cette règle donne lieu à deux catégories de citoyens : les membres de la bande inscrits comme Indiens et les membres de la bande non inscrits comme Indiens. En 2002, on estimait que les Malécites de Viger affichaient un taux d’ascendance mixte d’environ 94 %. Il s’agit d’un des plus hauts taux observés parmi les Premières nations du Canada.
Les projections présentées à la figure 8 donnent à penser que la population des Malécites de Viger subira de profondes transformations au cours de la période de 75 ans étudiée. Même si la population totale de survivants et de descendants devrait s’accroître durant la majeure partie de la période, la population ayant droit de figurer au Registre des Indiens et d’appartenir à la bande (membres inscrits) devrait fléchir à un rythme rapide. Au bout d’environ 40 ans, les membres non inscrits comme Indiens (qui, en 2002, constituaient moins de 10 % de la population totale) devraient représenter la majorité de la population des Malécites de Viger. En 2077 (75 ans ou trois générations plus tard), les membres non inscrits au Registre des Indiens devraient compter pour 80 % de la population ayant droit d’appartenir à la bande.
Appartenance à la bande : les Abénakis de Wôlinak
Les dispositions de la règle d’appartenance définie par les Abénakis de Wôlinak, selon lesquelles les personnes inscrites au Registre en vertu du paragraphe 6(2) sont exclues du groupe des membres initiaux si elles sont nées avant le 17 avril 1985, devraient avoir des répercussions sur la population future, qui compte quatre catégories de citoyens. Cette règle, conjuguée à un taux d’ascendance mixte très élevé (91 % en 2002), devrait également entraîner de profonds changements dans la composition de la population de la Première nation sur une période relativement courte.
Comme l’illustre la figure 9, le taux élevé d’ascendance mixte devrait donner lieu à une diminution marquée de l’effectif de la Première nation ayant droit de figurer au Registre des Indiens. On s’attend à ce que ce groupe, qui comptait 223 personnes en 2002 (138 membres de la bande et 85 non-membres), devienne minoritaire dans la population au bout de deux générations (50 ans) et n’englobe plus que 42 personnes après trois générations. Les personnes ayant le droit d’appartenir à la bande ne devraient constituer qu’une faible majorité de la population tout au long de la période de projection et, au bout de trois générations, la plupart des personnes répondant aux critères d’appartenance à la bande ne devraient pas être admissibles au Registre. À ce moment-là, selon les projections, les personnes n’ayant pas le droit de figurer au Registre et ne répondant pas aux critères d’appartenance à la bande devraient former le plus imposant segment de la population totale de survivants et de descendants.
Implications et conclusions
Cet article a analysé les principaux changements introduits par la Loi sur les Indiens de 1985 (projet de loi C-31) et a exploré certaines des répercussions à court terme et à long terme de ces modifications sur les Premières nations du Québec. Ces changements ont, à court terme, donné lieu à des hausses assez considérables des effectifs des Premières nations du Québec : la croissance de la population attribuable au projet de loi C-31 entre le 17 avril 1985 et le 31 décembre 2004 s’élève à environ 30 %. Près des deux tiers de cette croissance ont été observés au sein des populations à l’extérieur des réserves, lesquelles ont plus que doublé en raison des changements apportés à la Loi sur les Indiens en 1985. Le projet de loi C-31 a également eu des effets appréciables à court terme sur les collectivités des Premières nations vivant dans les réserves : environ 13 % de la croissance attribuable au projet de loi a eu lieu dans les réserves.
La plus grande part de la croissance à court terme des effectifs des Premières nations du Québec attribuable au projet de loi C-31 découle en fait des dispositions à l’égard de la réintégration et de l’inscription au Registre des Indiens. L’importance de ces sources de croissance devrait largement diminuer au fil du temps. À long terme, les populations des Premières nations du Québec subiront davantage les répercussions des dispositions ayant trait au droit à l’inscription et des décisions matrimoniales des membres des Premières nations. Ces facteurs devraient donner lieu à un nombre élevé et croissant de descendants des Premières nations non admissibles au Registre des Indiens.
Selon les projections, en une génération, la proportion de descendants n’ayant pas le droit de figurer au Registre devrait s’accentuer au sein des populations vivant à l’extérieur des réserves. Après quatre générations (environ 100 ans), les projections indiquent que seulement un enfant sur 100 enfants nés de membres des Premières nations à l’extérieur des réserves sera admissible au Registre des Indiens. La perte du droit à l’inscription parmi les descendants des membres des Premières nations dans les réserves devrait suivre un rythme beaucoup moins rapide. Néanmoins, après deux générations, près de 1 enfant sur 20 enfants nés dans les réserves des Premières nations du Québec ne devrait pas avoir le droit de s’inscrire au Registre.
Les résultats de l’étude donnent également à penser que la composition des populations de la plupart des Premières nations du Québec subira de profonds changements à l’avenir. Ainsi les populations des Premières nations, jusqu’à maintenant largement composées de personnes ayant à la fois le droit d’être inscrites au Registre et d’appartenir à la bande, en viendront-elles à compter de plus en plus de citoyens n’ayant pas le droit d’être inscrits ou d’appartenir à la bande. Ces changements dans la composition de la population sont déjà marqués à l’extérieur des réserves et il est à prévoir qu’ils le deviendront aussi dans bon nombre de réserves au cours de la prochaine génération. Dans une génération, la plupart des collectivités des Premières nations du Québec seront composées de différentes catégories de citoyens jouissant de droits et privilèges différents. Cette « transition démographique » sera plus prononcée chez les Premières nations affichant des taux élevés d’ascendance mixte et chez celles ayant adopté des règles d’appartenance qui diffèrent des règles déterminant l’admissibilité au Registre.
Les changements qui commencent à s’opérer dans l’effectif des Premières nations du Québec soulèvent des questions complexes et revêtant de multiples dimensions (politique, juridique, sociale, culturelle et économique). Les Premières nations et les autres ordres de gouvernement vont sans doute subir des pressions de plus en plus fortes en vue de fournir un large éventail de services à des groupes de citoyens qui, dans le passé, n’ont jamais constitué une part importante de leur clientèle (descendants n’étant pas admissibles au Registre ou n’ayant pas le droit d’appartenir à la bande). La façon dont les autorités des Premières nations et les autres gouvernements réagiront à cette évolution de la clientèle et de la demande aura sans doute des effets profonds, non seulement sur les particuliers, mais aussi sur de nombreux aspects de la vie dans les collectivités des Premières nations.
Appendices
Notes
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[1]
Cette estimation repose sur les données du Registre des Indiens au 31 décembre 2004, et elle a été ajustée en fonction des naissances et des décès déclarés tardivement. Consulter Affaires indiennes et du Nord Canada (AINC, 2007) pour une analyse des méthodes employées pour ajuster les données du Registre des Indiens.
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[2]
Le Registre des Indiens a été créé par suite de l’adoption de la Loi sur les Indiens de 1951. Il renferme des renseignements sur toutes les personnes inscrites comme Indien en vertu de la Loi sur les Indiens (p. ex. nom, date de naissance, appartenance à une bande).
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[3]
L’enfant illégitime d’une Indienne peut se voir retirer son statut d’Indien si son inscription au Registre fait l’objet d’une protestation de la part de la bande ou d’une personne dans les douze mois suivant l’inscription de l’enfant.
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[4]
Le paragraphe 6(1) de la Loi sur les Indiens de 1985 comporte en fait six dispositions (6(1)a) à 6(1)f)). Les membres de la population pré-C-31 ont obtenu le droit à l’inscription en vertu de l’alinéa 6(1)a). Les membres de la population C-31 qui avaient perdu leur droit d’inscription aux termes des versions antérieures de la Loi ont retrouvé leur droit en vertu des alinéas 6(1)c) à 6(1)e), selon qu’ils avaient perdu leur droit à l’inscription en raison de leur union (ou de l’union de leur mère) avec un non-Indien (alinéa 6(1)c)), de leur émancipation « volontaire » (alinéa 6(1)d)), ou parce qu’ils avaient résidé à l’extérieur du Canada pendant plus de cinq ans avant 1951 ou qu’ils avaient exercé une profession ou obtenu un diplôme universitaire avant 1920 (alinéa 6(1)e)).
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[5]
Le terme « réintégration » est souvent (incorrectement) utilisé pour désigner l’ensemble des Indiens inscrits aux termes du projet de loi C-31. Dans le cadre de la présente étude, il est réservé aux personnes qui ont été radiées du Registre des Indiens avant le 17 avril 1985 et qui ont retrouvé leur droit à l’inscription conformément à la Loi sur les Indiens de 1985. L’expression « personnes inscrites aux termes du projet de loi C-31 » désigne ici l’ensemble de la population indienne inscrite à la suite du projet de loi C-31 : ceux qui ont recouvré leur droit à l’inscription et ceux qui sont devenus admissibles au Registre pour la première fois.
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[6]
Le nombre réel de personnes inscrites en vertu du projet de loi C-31 au 31 décembre 2004 est légèrement supérieur à 11 346. Un petit nombre d’Indiens inscrits au Registre par suite de l’adoption du projet de loi C-31 se sont prévalus de leur droit à l’inscription conformément à l’alinéa 6(1)a) et, de ce fait, ils avaient droit de figurer au Registre selon les règles de l’ancienne version de la Loi sur les Indiens. Quelques autres personnes étaient considérées comme membres de la population C-31, mais elles sont décédées avant d’être ajoutées au Registre des Indiens. Dans le cadre de cette étude, ces deux groupes de personnes n’ont pas été considérés comme des inscriptions attribuables au projet de loi C-31.
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[7]
Les données du Registre des Indiens utilisées ici n’englobent pas les réintégrations et les inscriptions en vertu du projet de loi C-31 qui ont eu lieu en 2004. De fait, les estimations de la taille de la population C-31 mentionnées dans le présent article se rapportent au 31 décembre 2003 et sous-estiment probablement la population C-31 réelle en date du 31 décembre 2004 dans une proportion d’environ 1 % (de 80 à 100 personnes).
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[8]
Le Registre des Indiens n’englobe pas tous les enfants nés de parents inscrits. En effet, les enfants dont seulement un des deux parents est inscrit, cette inscription relevant du paragraphe 6(2), ne figurent pas au Registre des Indiens puisqu’ils n’y sont pas admissibles en vertu des dispositions du projet de loi C-31. On observe également certains retards dans l’enregistrement des naissances dans le Registre des Indiens. Les données du Registre ont été ajustées pour tenir compte des naissances et des décès déclarés tardivement.
-
[9]
Les estimations de l’indice synthétique de fécondité utilisées ici découlent des récentes recherches menées par Statistique Canada dans le cadre de l’établissement des projections de la population indienne inscrite fondées sur les données de 2001 (préparées pour Affaires indiennes et du Nord Canada). Les taux de fécondité estimés pour les Indiennes inscrites du Québec ont été employés pour estimer le nombre de femmes ayant eu des enfants durant la période à l’étude.
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[10]
Par décret, les Premières nations pouvaient demander une exemption du sous-alinéa 12(1)a)(iv) (communément appelé la disposition « mère grand-mère ») et de l’alinéa 12(1)b) (perte du droit à l’inscription après avoir épousé un non-Indien) au début des années 1980.
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[11]
Les différences d’âge entre la population québécoise C-31 et la population québécoise autre que C-31 sont similaires à celles observées ailleurs au Canada. Dans les autres provinces ou régions du Canada, l’âge moyen était estimé à 43 ans pour la population C-31 et à 25 ans pour la population autre que C-31.
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[12]
Les projections présentées dans l’article s’appuient sur une méthodologie développée par Clatworthy et Smith (1992) puis peaufinée par Clatworthy (1994, 1999, 2001 et 2005). Pour connaître les détails de la méthodologie, consulter Clatworthy et coll. (2007).
-
[13]
Les projections élaborées ici quant au nombre de personnes ayant le droit de figurer au Registre des Indiens supposent une diminution graduelle de la fécondité des Indiens inscrits et une amélioration graduelle de l’espérance de vie (sur une période de plus de 40 ans) atteignant les niveaux observés en 2004 dans la population québécoise non inscrite au Registre. Les projections reposent aussi sur l’hypothèse d’une modeste migration nette vers les réserves (taux enregistrés entre 2001 et 2006, selon les données du recensement de 2006). On suppose que les taux de migration nette vont décliner à un rythme constant et vont atteindre le seuil zéro après 40 ans. Au-delà de cette période, la migration ne constitue plus un facteur dont il faille tenir compte pour établir les projections.
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[14]
Les taux d’ascendance mixte mentionnés ici prennent la forme de probabilités conditionnelles. À titre d’exemple, dans le cas des femmes, le taux d’ascendance mixte indique la probabilité qu’un enfant né d’une Indienne inscrite ait un père qui ne soit pas admissible au Registre. Le calcul des taux prend en considération trois groupes de naissances :
les enfants nés d’une Indienne inscrite et d’un père non inscrit (x) ;
les enfants nés d’un Indien inscrit et d’une mère non inscrite (y) ;
les enfants nés de deux parents inscrits au Registre (z).
Les taux d’ascendance mixte sont ainsi calculés :
Femmes x / (x + z)
Hommes y / (y + z)
Hommes et femmes (x + y) / (x + y + z).
-
[15]
Les projections mentionnées ici sont tirées d’une étude nationale réalisée par l’auteur (Clatworthy, 2005). Les projections supposent un déclin graduel de la fécondité par rapport aux niveaux observés pour la population non autochtone du Québec en 2004, une amélioration modeste de l’espérance de vie par rapport aux niveaux observés pour la population non autochtone du Québec en 2004, l’ajout de 527 personnes à la population (à un rythme décroissant) dans les 30 premières années de la période de projection, résultat des dispositions de réintégration de la Loi sur les Indiens de 1985, une migration nette vers les réserves aux taux observés entre 1996 et 2001 (en baisse constante, pour atteindre le seuil zéro après 25 ans) et des taux d’ascendance mixte stables.
-
[16]
Pour les Premières nations n’ayant pas adopté de règles en vertu de l’article 10 de la Loi sur les Indiens, l’appartenance est déterminée en fonction des règles régissant l’inscription au Registre des Indiens (article 6).
-
[17]
C’est également le cas des Premières nations ayant accédé à l’autonomie gouvernementale. Les règles d’appartenance à la bande des Premières nations autonomes ne sont pas examinées dans la présente étude.
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[18]
Différents éléments d’information autorisent à conclure que les règles d’appartenance à la bande suscitent des conflits. Nous pensons aux poursuites engagées par des particuliers contre certaines règles d’appartenance (p. ex. Corbierre, Perron, Starlight [Sawridge] et L’Hirondelle [Tsuu T’ina]). Nous pensons aussi aux différends suscités par ces règles, dans d’autres contextes, entre groupes de citoyens au sein des Premières nations (p. ex. Buffalo Point et Kahnawake).
-
[19]
Plusieurs éléments de certaines règles d’appartenance, bien qu’examinés dans l’étude de Clatworthy et Smith, n’ont pas été retenus dans la typologie de ces derniers. Parmi ces éléments, notons les suivants : 1) critères « discrétionnaires » appliqués à certaines personnes réclamant l’appartenance (p. ex. considérations culturelles ou linguistiques, considérations liées à la personnalité et considérations contextuelles [c’est-à-dire domicile dans la réserve et disponibilité des ressources communautaires]) ; 2) dispositions et conditions portant sur l’admission de personnes « autres que des descendants » ; 3) modalités d’application des règles. À cet égard, Clatworthy et Smith insistent sur le fait que certaines des autres caractéristiques qui n’ont pas été retenues dans la typologie peuvent, selon leurs modalités d’application, avoir des effets considérables sur la population admise dans la bande. Toutefois, les effets de ces caractéristiques sur les populations futures ne peuvent être cernés.
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[20]
Toutes les Premières nations ayant adopté des règles d’appartenance avant le 28 juin 1987 étaient tenues de limiter l’appartenance à la bande à certains groupes de personnes dont le droit à l’appartenance était protégé en vertu de la Loi sur les Indiens de 1985 (personnes possédant un droit acquis), à savoir : 1) toutes les personnes qui, le 17 avril 1985, avaient le droit de figurer sur la liste de bande ; 2) toutes les personnes ayant réintégré l’effectif d’Indiens inscrits en vertu de la Loi sur les Indiens de 1985 et qui avait été radiées du Registre des Indiens avant le 16 avril 1985 en raison de leur mariage (ou du mariage de leur mère) avec un non-Indien ; 3) les personnes dont les parents étaient des membres initiaux ou des membres ayant réintégré la population indienne inscrite et dont l’ascendance indienne leur avait été entièrement transmise par ces membres. Toutes les Premières nations ayant adopté des règles d’appartenance le 28 juin 1987 ou ultérieurement étaient tenues d’accepter dans la bande toutes les personnes ayant droit de figurer au Registre des Indiens à ce moment-là, y compris celles admissibles au Registre en vertu des nouvelles règles de la Loi sur les Indiens de 1985.
-
[21]
Clatworthy et Smith ont établi qu’au moment de leur étude, 85 (environ 36 %) des 236 Premières nations ayant adopté des règles d’appartenance avaient décidé d’exclure ce groupe de descendants de la population des membres initiaux.
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[22]
Seulement 40 Premières nations appliquent la Loi sur les Indiens au Québec. Les autres Premières nations du Québec, dites autonomes, utilisent une législation distincte et ne sont pas prises en considération dans l’examen de l’appartenance aux Premières nations. Il faut également mentionner qu’il est possible que d’autres Premières nations aient adopté des règles d’appartenance qui ne sont pas autorisées en vertu de l’article 10 de la Loi sur les Indiens de 1985. Le fondement juridique de ces règles demeure obscur. La présente analyse des règles d’appartenance adoptées par les Premières nations se limite aux règles autorisées par l’article 10.
Bibliographie
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