Abstracts
Résumé
L’identification des composantes de la Constitution du Canada est un exercice controversé. C’est dans ce contexte que les tribunaux se sont récemment penchés sur l’existence et le statut contemporains de l’Acte de Québec de 1774. L’auteur aborde cette question afin de mieux circonscrire la place de cet acte dans le paysage juridique et constitutionnel d’aujourd’hui. Il conclut, dans un premier temps, que plusieurs de ses dispositions demeurent en vigueur. Dans un deuxième temps, il soutient que certains de ces articles, relatifs au libre exercice de la religion et à la liberté testamentaire, font partie de la Constitution du Canada et l’emportent sur les lois ordinaires qui leur sont contraires. Loin de n’être qu’une relique du passé, l’Acte de Québec joue donc le rôle d’une charte contemporaine qui conserve toute sa pertinence en ces deux matières.
Abstract
Identifying the components of the Constitution of Canada is a controversial exercise, and it is in that context that courts have recently examined the contemporary existence and status of the Quebec Act, 1774. This is the question explored by this article in order to better understand the place of the Act in today’s legal and constitutional landscape. The author first concludes that several of its sections remain in force. Secondly, he argues that some of these sections, dealing with the free exercise of religion and testamentary freedom, form part of the Constitution of Canada and therefore take precedence over conflicting ordinary legislation. Far from being a relic of the past, the Quebec Act is therefore a contemporary charter that remains relevant in those two matters.
Resumen
Identificar los componentes de la Constitución canadiense es un ejercicio controvertido, y es en este contexto, en el que los tribunales han examinado recientemente la existencia y el estatus contemporáneo del Acte de Québec de 1774. Este artículo aborda esta cuestión para circunscribirla mejor en el ámbito del campo jurídico y constitucional de hoy en día. Inicialmente, el autor plantea que varias de sus disposiciones están aún vigentes y posteriormente sostiene que algunos de estos artículos, vinculados con la libre práctica de la religión y con la libertad sucesoral, forman parte de la Constitución de Canadá, por lo tanto, tienen prevalencia sobre leyes ordinarias que les son contrarias. Lejos de ser una simple reliquia del pasado, el Acte de Québec es, por consiguiente, una carta contemporánea en la que toda su relevancia prevalece en estos ámbitos.
Article body
L’identification des composantes de la Constitution du Canada fait l’objet de vifs débats, tant dans le monde universitaire que devant les tribunaux. Il est bien établi que ces composantes sont à la fois écrites et non écrites et qu’elles proviennent de sources multiples. La Constitution canadienne est exprimée au premier chef dans les dispositions écrites de la Loi constitutionnelle de 1982, des documents énumérés à son annexe et de leurs modifications[1], mais elle ne s’y limite pas, ainsi que la Cour suprême du Canada l’a confirmé dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat[2]. Au fil du temps, quelques doctrines comme le privilège parlementaire s’y sont ajoutées par le truchement du préambule de la Loi constitutionnelle de 1867[3]. En outre, la Constitution « suppose l’existence de certains principes sous-jacents », dont la force normative reste toutefois incertaine[4].
Au-delà de ces quelques balises, il demeure difficile de préciser avec certitude l’ensemble des éléments qui composent la Constitution du Canada[5]. L’une des facettes de ce débat concerne la possibilité que d’autres textes que ceux qui sont énumérés à l’article 52 (2) de la Loi constitutionnelle de 1982 et à son annexe fassent partie de la Constitution. La Cour suprême n’a pas voulu « écarter complètement » cette option[6]. Plusieurs auteurs abondent dans le même sens, parfois avec une certaine ouverture[7] mais souvent avec une réticence marquée, considérant que tout texte qui fait formellement partie de la Constitution du Canada devient dès lors supérieur aux lois ordinaires et assujetti à une procédure de modification souvent plus restrictive[8]. Dans tous les cas, encore faut-il discerner les textes qui peuvent se prêter à une telle reconnaissance.
Dans le présent article, nous soutenons que les dispositions de l’Acte de Québec de 1774[9] qui consacrent la liberté testamentaire et le libre exercice de la religion sont toujours en vigueur et sont intégrées dans la Constitution du Canada. Il ne fait aucun doute que ces dispositions étaient constitutionnelles et supralégislatives au moment de leur adoption. Or, rien n’a altéré ce statut au fil du temps, pas même le Statut de Westminster de 1931[10]. En outre, l’Acte de Québec cadre tout à fait avec les paramètres établis par les tribunaux afin de définir la « Constitution du Canada » aux termes de l’article 52 (2) de la Loi constitutionnelle de 1982.
La reconnaissance de l’intégration de certaines dispositions de l’Acte de Québec à la Constitution aurait des conséquences juridiques bien réelles. En effet, si cet acte est rarement invoqué devant les tribunaux, il peut tout de même jouer un rôle important dans certains dossiers, notamment lorsque le législateur choisit de déroger à la liberté de religion garantie par la Charte canadienne des droits et libertés et par la Charte des droits et libertés de la personne au Québec[11]. Dans cette veine, l’Acte de Québec a récemment été utilisé afin de contester la validité constitutionnelle de la Loi sur la laïcité de l’État[12], laquelle recourt aux clauses de dérogation pour interdire à plusieurs employés des secteurs public et parapublic québécois de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions[13]. Certaines parties en demande ont plaidé que l’Acte de Québec est encore constitutionnel et qu’il consacre donc une certaine forme de liberté de religion hors des chartes. Contestée par le Procureur général du Québec[14], entre autres intervenants, cette position n’a été retenue que partiellement par la Cour supérieure, laquelle a conclu que certaines dispositions de l’Acte de Québec demeurent effectivement en vigueur, mais qu’elles n’ont aucun statut constitutionnel particulier[15]. Le dossier se trouve désormais en appel où la question sera explorée une nouvelle fois.
Peu importe le sort de ce dossier précis, nous visons, par l’analyse proposée ici à contribuer aux débats plus larges sur la portée de la Constitution. Le cas de l’Acte de Québec teste le cadre d’analyse établi par les tribunaux afin de préciser ses composantes, particulièrement celles qui sont écrites, mais ne se trouvent pas dans la Loi constitutionnelle de 1982. Inévitablement, ces débats ont aussi une teneur politique, puisque la suprématie et l’enchâssement qui se rattachent à ces éléments limitent considérablement le champ d’action législatif, tant au fédéral que dans les provinces. Sans ignorer cette dimension politique, nous mettrons plutôt l’accent sur les sources de droit qui régissent la question et sur l’interprétation qui doit leur être donnée.
Notre analyse se décline en trois parties. La première rappelle brièvement le contexte entourant l’adoption de l’Acte de Québec (1). La deuxième conclut que plusieurs de ses articles n’ont jamais été abrogés, que ce soit de façon expresse ou tacite, et qu’ils demeurent donc en vigueur aujourd’hui (2). Enfin, la troisième et dernière partie soutient que deux de ces articles qui portent sur le libre exercice de la religion et la liberté testamentaire font partie de la Constitution et qu’ils ont donc préséance sur toute loi ordinaire incompatible (3).
1 Le contexte et l’importance de l’Acte de Québec de 1774
Nous ne comptons pas détailler dans les pages qui suivent le contexte historique ayant mené à l’adoption de l’Acte de Québec. D’autres ouvrages l’ont déjà fait avec une grande précision[16]. Quelques éléments contextuels demeurent toutefois utiles afin d’asseoir l’analyse proposée dans les sections suivantes. Ce sont ces éléments que nous explorons dans la présente section, en insistant sur les étapes juridiques qui ont mené à l’adoption de l’Acte de Québec, surtout en ce qui concerne le libre exercice de la religion.
Notre point de départ est la guerre de Sept Ans, qui fait rage de 1756 à 1763. Mettant notamment en scène la Grande-Bretagne, dont l’un des objectifs est d’évincer la France de ses possessions coloniales[17], cette guerre se solde par une victoire britannique qui changera à jamais le visage du Canada. Trois événements nous semblent particulièrement importants ici en raison de leurs conséquences juridiques qui se répercuteront plus tard sur l’Acte de Québec. Dans un premier temps, le 13 septembre 1759, les forces britanniques infligent une défaite aux Français sur les plaines d’Abraham, à Québec. Quelques jours plus tard, le 18 septembre, les représentants des deux puissances signent les Articles de capitulation de Québec[18], par lesquels la ville de Québec se rend à la Grande-Bretagne. Dans un deuxième temps, le 8 septembre 1760, le gouverneur Vaudreuil négocie avec le major-général Amherst la reddition de la ville de Montréal, laquelle se concrétise par la signature des Articles de capitulation de Montréal[19]. En pratique, cette reddition sonne le glas de la résistance française au Canada et signifie que la Nouvelle-France passera aux mains des Britanniques. Ce n’est toutefois que dans un troisième temps, en 1763, que cette cession est officialisée par la Grande-Bretagne, la France et l’Espagne dans le Traité de Paris[20], lequel met un terme à la guerre qui les oppose.
Au-delà de leur dimension politique et historique, ces trois documents — les deux capitulations et le Traité de Paris — sont des instruments juridiques qui emportent des conséquences concrètes pour les habitants de la colonie nouvellement conquise. Si la plupart des garanties qu’ils leur octroient sont de nature militaire[21], quelques-unes concernent plutôt leurs droits civils[22], notamment en matière de liberté de religion. La capitulation de Québec protège ainsi le « libre Exercice de la Religion Romaine […] jusqu’à ce que la possession du Canada a[i]t été décidée[23] ». La capitulation de Montréal garantit aussi ce droit, sans toutefois l’assortir de la même limite et en y ajoutant le droit du clergé de percevoir la dîme et de continuer à assumer ses fonctions[24]. Même le Traité de Paris, dont l’objectif est avant tout de régler les relations entre États, garantit « aux Habitan[t]s du Canada la Liberté de la R[e]ligion Catholique[25] ». Cette dernière garantie n’est toutefois accordée qu’« en tant que le permettent les Loi[s] de la Grande-Bretagne[26] », ce qui en limite la portée[27]. Malgré tout, les garanties ainsi données revêtent une grande importance, Lord Mansfield — alors juge en chef de la Cour du banc du Roi — les qualifiant en particulier de « sacré[e]s et inviolables quant à leur esprit et à leur portée véritables[28] ».
Le 7 octobre 1763, quelques mois après la signature du Traité de Paris, le roi Georges III édicte la Proclamation royale de 1763[29] afin d’organiser ses nouvelles colonies d’Amérique. Ce texte prévoit, entre autres, que les lois anglaises s’y appliqueront à l’avenir[30]. Or, en matière de religion, ces lois excluent les catholiques des postes d’importance[31], puisqu’elles exigent que les personnes qui y sont nommées répudient certains aspects fondamentaux de leur foi[32]. La rigueur apparente de ces lois est toutefois tempérée en pratique par une application souple correspondant davantage aux réalités de la province[33]. En effet, le gouverneur James Murray ne peut risquer de s’aliéner les Canadiens français catholiques, qui représentent alors plus de 95 p. 100 de la population[34]. Cette politique de conciliation relative se poursuit sous l’égide de Guy Carleton, qui succède à Murray[35].
Au début des années 1770, la pression s’accentue pour que les dispositions problématiques de la Proclamation royale de 1763 soient remplacées par une politique plus conciliante au Québec[36]. Le gouvernement de Lord North saisit l’occasion et présente, en 1774, un projet de loi qui deviendra l’Acte de Québec[37]. Les débats parlementaires opposent alors deux factions. La première est d’avis que cet acte enlèvera aux Anglais établis au Québec les quelques privilèges qu’il leur reste[38], alors que la seconde met plutôt l’accent sur la situation intenable qui règne dans la colonie, où l’application théorique des lois anglaises se bute en pratique à une grande confusion[39]. En définitive, les arguments de ce dernier camp prévalent, et l’Acte de Québec est adopté le 22 juin 1774, son entrée en vigueur étant fixée au 1er mai 1775[40].
Deux éléments de contexte sont particulièrement importants à retenir ici. D’une part, bien que l’Acte de Québec soit né d’un compromis pragmatique rendu nécessaire notamment par le maintien de la population canadienne française au Québec, il visait tout de même à garantir des droits aux habitants de la province. D’autre part, ces garanties n’étaient pas entièrement nouvelles, mais puisaient plutôt leur source dans certains instruments juridiques antérieurs — dont les capitulations et le Traité de Paris — malgré des modalités et des termes différents[41]. On constate donc toute l’importance que revêtait l’Acte de Québec à l’époque.
2 Les dispositions toujours en vigueur de l’Acte de Québec de 1774
Ce retour sur quelques éléments de contexte nous mène à notre première question, à savoir si l’Acte de Québec existe toujours et, si oui, dans quelle mesure. Sur ce point, il est clair pour certains auteurs que des dispositions de l’Acte de Québec sont encore en vigueur[42]. Comme nous l’avons indiqué précédemment, la Cour supérieure est d’ailleurs parvenue à cette conclusion en ce qui concerne l’article v relatif au libre exercice de la religion[43]. Malgré tout, le Procureur général du Québec a récemment soutenu que l’Acte de Québec aurait été abrogé avec le temps, que ce soit de façon expresse ou tacite[44]. Nous proposons donc d’examiner ici dans quelle mesure le contenu initial de l’Acte de Québec (2.1) a survécu au passage du temps (2.2). Cette analyse révélera que, si plusieurs dispositions de cet acte ont effectivement été abolies au long des époques, d’autres demeurent bel et bien en vigueur.
2.1 Le contenu initial
Au moment de son adoption, l’Acte de Québec contient dix-huit articles qui peuvent être regroupés en cinq catégories : l’établissement de nouvelles frontières ; la révocation de la Proclamation royale de 1763 pour le Québec ; l’aménagement des religions ; la réintroduction du droit civil ; et l’octroi de certains pouvoirs au Conseil législatif.
Dans un premier temps, l’Acte de Québec élargit les frontières de la province, sans toutefois modifier celles des autres colonies britanniques ni nuire aux droits de propriété qui existent alors sur ces terres[45]. Dans un deuxième temps, il abroge la Proclamation royale en ce qui concerne le Québec — mais pas en ce qui a trait aux peuples autochtones — ainsi que toutes les ordonnances et commissions adoptées en vertu de celle-ci[46].
Dans un troisième temps, l’Acte de Québec vise l’aménagement des religions. Trois avantages importants sont consentis aux catholiques. L’Acte de Québec prévoit d’abord qu’ils « peuvent avoir, conserver et jouir du libre exercice de la Religion de l’Église de Rome, soumise à la Suprématie du Roi, déclarée et établie par un acte fait dans la première année du règne de la Reine Elisabeth[47] ». Cette mention de la suprématie du roi réfère à l’Act of Supremacy de 1558, qui rejette toute autorité politique ou spirituelle du pape catholique sur les territoires britanniques et rétablit les liens entre la Couronne et l’Église anglicane[48]. Ce n’est donc qu’une limite institutionnelle qui ne restreint en rien l’exercice individuel de la religion catholique au Québec[49]. Ensuite, l’Acte de Québec affirme le droit du clergé catholique de percevoir légalement la dîme auprès de ses fidèles[50]. Enfin, il instaure un nouveau serment de fidélité qui ne demande plus aux catholiques de répudier leur foi pour accéder à certaines fonctions[51]. Cet accommodement donne aux catholiques des droits inédits dans l’Empire britannique, et aussi en Grande-Bretagne où ce n’est qu’en 1829 que les mêmes serments seront abolis[52]. Pour contrebalancer ces avantages et soutenir les Anglais se trouvant au Québec, l’Acte de Québec indique du reste que le résidu de la dîme perçue par le clergé catholique pourra être utilisé « pour l’encouragement de la Religion Protestante, et pour le maintien et subsistance d’un Clergé Protestant[53] ».
Dans un quatrième temps, l’Acte de Québec compte quatre dispositions qui réintroduisent le droit antérieur dans la province, avec certaines exceptions. Le droit ainsi réinséré n’est pas à strictement parler le droit français, mais plutôt les « loi[s] du Canada », qui sont fondées sur la Coutume de Paris avec certains aménagements propres au Québec[54]. Trois exceptions sont toutefois prévues. D’abord, les « terres qui ont été concédées par sa Majesté, ou qui le seront […] en franc et commun Soccage » sont exclues de l’application du droit civil[55]. Par cette disposition, on vise notamment à éviter que les terres concédées aux Anglais soient soumises au régime seigneurial, qui était toujours en vigueur au Québec. Ensuite, une exception permet à toute personne qui peut aliéner des immeubles, des meubles ou des intérêts de son vivant « de les tester et léguer à sa mort par testament et acte de dernière volonté, nonobstant toutes loi[s], usages et coutumes […] contraires[56] ». Cette disposition sert à mettre en place une liberté testamentaire caractéristique du droit anglais en évitant que le régime plus limitatif alors en vigueur en droit français ne soit introduit dans la province[57]. Enfin, il est prévu que les « loi[s] criminelles d’Angleterre […] continueront à être administrées » au Québec[58].
Dans un cinquième et dernier temps, l’Acte de Québec établit un Conseil législatif. Il n’est pas utile de s’attarder sur le sujet ici, mais notons que ce conseil — constitué de 17 à 23 membres — a alors le pouvoir de faire des ordonnances, sauf en ce qui a trait aux taxes ou aux impôts provinciaux, et que celles-ci sont sujettes à désaveu par le roi ou, dans certains cas spécifiques comme en matière de religion, à son approbation préalable[59].
2.2 L’évolution au fil du temps : abrogations, modifications et contenu actuel
Que reste-t-il de ces dispositions ? Notre analyse débute par la présentation d’un principe fondamental, celui de la pérennité des lois. Ce principe, qui n’est nulle part consacré dans la Constitution au Canada, ni même dans les lois du pays, est à peine mentionné par les auteurs[60]. Il découle de la nature même des lois, lesquelles ont vocation à s’appliquer jusqu’à ce qu’elles soient modifiées ou abrogées. C’est ce principe que reprend la professeure Ruth Sullivan dans son traité sur l’interprétation des lois lorsqu’elle affirme qu’une « loi n’est pas abrogée, non plus qu’elle expire, par le passage du temps ou en raison de sa non-utilisation ou de son obsolescence. À moins que la législature [n’]ait fixé une limite à sa durée, elle demeure en vigueur jusqu’à ce qu’elle soit abrogée[61] ». Ce principe n’est d’ailleurs pas propre aux juridictions de common law. Il existe aussi en France, où le Conseil d’État a noté qu’un article qui « n’a été abrogé expressément ou implicitement par aucune disposition législative […] [doit] dès lors […] être regardé comme étant toujours en vigueur[62] ». Le même principe trouve aussi sa place dans les théories de certains philosophes du droit bien connus[63].
Dans le cas qui nous occupe, ce principe signifie que l’Acte de Québec reste en vigueur à moins qu’il n’ait été invalidé en tout ou en partie au fil du temps. De telles abrogations peuvent se faire expressément par disposition législative, mais aussi de façon tacite. En effet, une présomption en matière d’interprétation des lois veut qu’une loi ait préséance sur toute loi antérieure de même niveau qui lui serait incompatible[64]. Dans de telles circonstances, la loi antérieure est considérée comme révoquée (ou inopérante[65]). Toutefois, ainsi que le note le professeur Pierre-André Côté dans son traité sur l’interprétation des lois, « les tribunaux sont d’une extrême réticence lorsqu’il s’agit de conclure à la contradiction entre deux textes » et donc à l’abrogation implicite du plus ancien[66]. Le simple fait, par exemple, que deux lois traitent de la même matière ne fait pas en sorte qu’elles entrent en conflit : il faut plutôt « que l’application de l’une exclue, explicitement ou implicitement, celle de l’autre » et qu’elles soient donc « à ce point incompatibles ou contraires qu’elles ne puissent coexister »[67]. Enfin, ces règles n’interviennent que dans la mesure où les dispositions en cause ont le même statut, puisqu’une disposition ordinaire ne peut abolir une disposition constitutionnelle[68].
Plusieurs dispositions de l’Acte de Québec ont été abrogées par d’autres lois du Parlement britannique. Dans un premier temps, l’Acte constitutionnel de 1791[69] a invalidé les articles xii à xvii de l’Acte de Québec relatifs au Conseil législatif et à ses pouvoirs, puisque l’un de ses principaux objectifs était d’établir des assemblées législatives dans les nouvelles provinces du Haut-Canada et du Bas-Canada[70]. Dans un deuxième temps, une loi de 1872 a abrogé plusieurs autres dispositions de l’Acte de Québec. À cette époque-là, en préparation d’une refonte de ses lois, le Parlement britannique a mis de l’ordre dans son corpus législatif en abrogeant certaines dispositions « considérées [comme] périmées ou qui [avaient] cessé d’avoir effet autrement que par une abrogation expresse et spécifique, ou qui, par le passage du temps et le changement de circonstances, [étaient] devenues inutiles[71] ». Parmi ces dispositions se trouvent les articles iii et iv (par lesquels l’Acte de Québec avait abrogé la Proclamation royale de 1763 en ce qui concernait la province)[72], vi (relatif à l’encouragement de la religion protestante), vii (édictant un serment d’allégeance repris et modifié par des lois constitutionnelles subséquentes), xi in fine (relatif au pouvoir de la province de modifier le droit criminel, lequel a été octroyé au Parlement du Canada en 1867) et xii à xvii (relatifs au Conseil législatif et déjà abolis par l’Acte constitutionnel de 1791). À notre connaissance, aucune autre disposition de l’Acte de Québec n’a été abrogée expressément.
Pour ce qui est de l’abrogation tacite des dispositions restantes, les articles i et ii établissant les frontières de la province ne peuvent plus être en vigueur aujourd’hui, car les lois constitutionnelles adoptées par le Parlement impérial au long des années ont modifié ces frontières à plusieurs reprises[73]. Hormis cet aspect, les dispositions restantes de l’Acte de Québec ne semblent pas avoir été abrogées de façon tacite par quelque loi subséquente du Parlement impérial. Le Procureur général du Québec a certes soutenu, dans le contexte de l’affaire Hak c. Procureur général du Québec, que la Charte canadienne, et plus précisément sa disposition qui garantit à tous la liberté de religion, aurait révoqué tacitement l’article v, qui ne s’applique en apparence qu’aux catholiques. Cette thèse doit toutefois être écartée à la lumière de l’article 26 de la Charte, qui prévoit explicitement que « [l]e fait [qu’elle] garantit certains droits et libertés ne constitue pas une négation des autres droits ou libertés qui existent au Canada[74] ». Autrement dit, les droits protégés par la Charte canadienne, y compris la liberté de religion, s’ajoutent à ceux qui existaient avant son adoption, et ils n’ont pas pour effet de les abroger, que ce soit de façon expresse ou tacite.
Si ce qui précède est juste, alors certaines dispositions de l’Acte de Québec demeurent toujours en vigueur, à savoir l’article v relatif au libre exercice de la religion catholique, l’article viii concernant le droit civil en vigueur dans la province, l’article ix protégeant les terres en franc et commun soccage, l’article x garantissant la liberté testamentaire, et, enfin, la première partie de l’article xi, laquelle prévoit l’application des lois anglaises en matières criminelles. Les tribunaux sont d’ailleurs parvenus à la même conclusion relativement à certaines de ces dispositions. Mis à part la récente décision de la Cour supérieure relative à l’article v, déjà discutée[75], la Cour d’appel a suggéré que l’article viii de l’Acte de Québec relatif au droit civil est toujours en vigueur. Dans le premier renvoi sur les valeurs mobilières, elle a en effet examiné en détail la portée de la compétence provinciale en matière de propriété et de droits civils, prévue dans l’article 92 (13) de la Loi constitutionnelle de 1867[76]. Or, en décrivant son historique, le juge en chef Robert a bien pris soin de noter que cette compétence s’inscrivait « dans la continuité de [l’A]cte [de Québec][77] ». Selon les principes énoncés plus haut, une telle continuité ne peut entraîner une abrogation implicite de l’article viii de l’Acte de Québec, bien au contraire.
3 Le statut actuel de l’Acte de Québec de 1774 : texte constitutionnel ou loi ordinaire ?
Se pose dès lors la question du statut des dispositions de l’Acte de Québec qui sont toujours en vigueur. Plus précisément, est-il question de dispositions législatives ordinaires, qui peuvent en conséquence être remplacées, modifiées ou abrogées par d’autres lois de même nature, ou plutôt de dispositions faisant partie de la Constitution du Canada, qui limitent le pouvoir législatif du Parlement du Canada et des législatures provinciales ?
La réponse à cette question passe d’abord par un examen du statut initial des dispositions de l’Acte de Québec. Certaines d’entre elles, étant expressément sujettes à modification par de simples lois, ne peuvent avoir de statut supralégislatif (3.1). Quant aux autres, il ne fait aucun doute qu’elles avaient un statut constitutionnel et supralégislatif au moment de leur adoption (3.2). Une interprétation plausible des lois constitutionnelles subséquentes (3.3) ainsi que de la notion de « Constitution du Canada » contenue à la Loi constitutionnelle de 1982 (3.4) suggère que ce statut ne s’est jamais éteint.
3.1 Des dispositions sujettes à modification selon leur propre libellé
L’Acte de Québec contient certaines dispositions qui, selon leur libellé, peuvent être modifiées par loi ordinaire. Celles-ci ne peuvent donc pas avoir un statut supralégislatif, en ce sens qu’elles ne peuvent faire échec à des lois valides adoptées depuis lors.
Au premier chef, la réintroduction du droit civil dans la province ne donne pas à ce dernier un statut supralégislatif. L’article viii de l’Acte de Québec prévoit plutôt que les « loi[s] et coutumes du Canada » ainsi réintroduites ne s’appliqueront que « jusqu’à ce qu’elles soient changées ou altérées »[78] par des lois de la province. C’est grâce à cette disposition et à celles, qui sont similaires, de lois constitutionnelles subséquentes que la province a pu adopter, par exemple, le Code civil du Bas Canada. Cette disposition a d’ailleurs été reprise par la Loi constitutionnelle de 1867 qui réserve aux provinces le pouvoir de légiférer en matière de propriété et de droits civils[79].
De même, l’article xi de l’Acte de Québec prévoit que le droit criminel anglais appliqué dans la province sera sujet à « tels changements et corrections[80] » que les lois provinciales lui apporteront éventuellement. En 1867, cette compétence législative est toutefois transférée au nouveau Parlement du Canada[81], ce qui justifie que la partie finale de l’article xi de l’Acte de Québec (qui donnait plutôt cette compétence à la province de Québec) a été officiellement abrogée par le Parlement impérial en 1872, comme nous l’avons noté précédemment[82].
L’article ix de l’Acte de Québec — qui traite du droit applicable aux terres concédées en franc et commun soccage — ne prévoit pas lui-même qu’il puisse être modifié par loi ordinaire. En revanche, l’Acte constitutionnel de 1791 permet des « altérations, eu égard à la nature et les conséquences de [la] tenure en Franc et Commun Soccage, qui pourront être établies par aucune Loi ou Loi[s][83] » de l’une des deux provinces. Dans l’un de ses articles, John E.C. Brierley retrace d’ailleurs la coexistence des systèmes anglais et français de propriété qui s’est poursuivie au-delà de 1791, ainsi que leur évolution commune vers une uniformisation éventuelle au Québec au cours des années 1850[84].
Enfin, le même type de raisonnement s’applique à la seconde partie de l’article v de l’Acte de Québec, relative à la perception de la dîme par le clergé catholique, ainsi qu’à l’article vi prévoyant l’utilisation de son résidu pour l’encouragement de la religion protestante. En effet, par l’article xxxv de l’Acte constitutionnel de 1791, le Parlement impérial énonce que ces deux dispositions continueront d’avoir effet, mais seulement jusqu’à ce qu’elles soient « expressément varié[e]s ou rappelées par » des lois provinciales. Ces dispositions sont donc sujettes à modification par simple loi ordinaire[85].
Bref, ces quelques articles de l’Acte de Québec, bien qu’ils demeurent en vigueur, ont une pertinence limitée dans le paysage juridique contemporain. Leur propre libellé, ou celui de dispositions constitutionnelles subséquentes, prévoit que les droits qu’ils mettent en oeuvre peuvent être modifiés par loi ordinaire. Cette possibilité n’est toutefois pas prévue pour deux articles toujours en vigueur de l’Acte de Québec, soit la partie de l’article v garantissant le libre exercice de la religion, ainsi que l’article x protégeant la liberté testamentaire. C’est la question du statut de ces deux dispositions qui se pose avec le plus d’acuité de nos jours.
3.2 Le statut initial : l’Acte de Québec de 1774, première loi constitutionnelle pour la province
Ces deux dispositions, comme du reste les autres parties de l’Acte de Québec, avaient sans équivoque un statut constitutionnel au moment de leur adoption, lequel leur donnait préséance sur tout instrument législatif ou réglementaire adopté par la province.
Cette qualification du statut de l’Acte de Québec était largement répandue parmi les juristes et les acteurs politiques de l’époque. Pour les parlementaires britanniques qui débattaient de son adoption, qu’ils la soutiennent ou qu’ils s’y opposent, il ne faisait aucun doute que l’exercice visait à donner une nouvelle constitution à la province de Québec[86]. C’était aussi de cette façon que l’entendaient d’autres acteurs politiques tant au Québec qu’à Londres[87]. Au-delà d’un siècle plus tard, les juristes et les historiens relataient encore toute l’importance constitutionnelle de ce moment, où ils décrivaient l’Acte de Québec comme une grande « charte britannique[88] » pour la province. En 1891, Gerald E. Hart affirmait même qu’aucun autre jour depuis la Conquête n’avait été investi d’une importance constitutionnelle aussi grande[89].
D’un point de vue juridique, le statut supralégislatif de l’Acte de Québec découlait avant tout du fait que c’était une loi impériale. Ce vocable désigne les lois du Parlement britannique qui avaient vocation à s’appliquer précisément dans une ou plusieurs colonies, au contraire des lois britanniques d’application générale qui, bien qu’elles puissent être reçues dans les colonies, n’étaient pas conçues expressément pour elles[90]. Or, comme toute autre loi impériale, l’Acte de Québec ne pouvait être modifié ou abrogé que par une autre loi impériale et non par simple loi coloniale. Ce principe de suprématie des lois impériales, confirmé dès 1774 dans l’affaire Campbell c. Hall[91], a été réitéré en 1865 dans la Colonial Laws Validity Act qui prévoyait en particulier que toute loi coloniale contraire à une loi impériale était nulle dans la mesure de cette incompatibilité[92]. Comme le notent plusieurs auteurs, ces mêmes principes faisaient en sorte que l’Acte de Québec ait préséance sur toute loi ou ordonnance contraire de l’administration de la province[93]. La Cour supérieure du Québec a d’ailleurs confirmé cette interprétation, indiquant que, dès son adoption, l’Acte de Québec jouissait du « statut supralégislatif dont bénéficiaient les lois impériales par rapport aux lois coloniales[94] ».
3.3 L’écueil apparent du Statut de Westminster de 1931
Le statut supralégislatif des dispositions restantes de l’Acte de Québec est-il toujours en vigueur, de sorte qu’elles ont encore préséance sur les lois ordinaires du Canada ? Soulignons d’abord que rien dans les lois impériales adoptées de 1791 à 1930 n’a semblé altérer ce statut. Si l’Acte constitutionnel de 1791 mentionné plus haut abrogeait certaines parties de l’Acte de Québec, il ne prétendait pas modifier ses autres parties ni changer leur statut. D’ailleurs, il est clair dans l’esprit des juristes et des historiens que cet instrument n’a rien apporté de nouveau au contenu et à la force de l’Acte de Québec, à l’exception des parties qu’il révoquait expressément[95]. En 2014, la Cour d’appel de l’Ontario a elle aussi confirmé que, si l’Acte constitutionnel de 1791 « repealed portions of the Quebec Act […] [o]ther portions of the Quebec Act, such as that respecting the oath, were not repealed[96] ».
De même, l’Acte d’Union de 1840[97], qui réunissait le Haut-Canada et le Bas-Canada en un seul Canada-Uni et lui donnait de nouvelles institutions politiques, ne contenait aucune disposition en vue de modifier le contenu et le statut de l’Acte de Québec. Il en a été de même pour la Loi constitutionnelle de 1867, qui n’influait en rien sur l’Acte de Québec et prévoyait au contraire, à son article 129, que les lois en vigueur pourraient être révoquées, abolies ou modifiées selon le partage des compétences précisé dans ses articles 91 et 92, sauf dans les « cas prévus par des lois du parlement de la Grande-Bretagne ou du parlement du Royaume-Uni[98] ». Cet article affirmait la continuité et l’application ex proprio vigore des lois impériales telles que l’Acte de Québec.
Il est vrai que l’article 92 (1) de la Loi constitutionnelle de 1867 donnait aux législatures provinciales le pouvoir exclusif de modifier, « nonobstant toute disposition contraire [de la Loi constitutionnelle de 1867,] la constitution de la province, sauf les dispositions relatives à la charge de lieutenant-gouverneur[99] ». On pourrait penser que cet article permettait dès lors à la législature québécoise de changer les dispositions toujours en vigueur de l’Acte de Québec. Deux obstacles s’opposent toutefois à cette conclusion. D’une part, au moment de son adoption, l’Acte de Québec s’étendait à l’ensemble de la colonie de l’époque, qui incluait des parties de l’Ontario et de Terre-Neuve-et-Labrador, et non seulement à ce qui constitue désormais le Québec[100]. Sa portée territoriale n’a pas été réduite par les instruments constitutionnels subséquents, de sorte que l’Acte de Québec doit logiquement s’appliquer non seulement au Québec mais aussi à tout le moins au niveau fédéral, et qu’il ne peut faire simplement partie de la constitution de la province[101]. D’autre part, l’article 92 (1) de la Loi constitutionnelle de 1867 et son équivalent contemporain, l’article 45 de la Loi constitutionnelle de 1982, ont été interprétés de façon à n’inclure que ce qui « porte essentiellement sur l’organisation et le fonctionnement des institutions de la province[102] ». Bien que la portée de ces articles puisse toujours faire l’objet de débats, dans l’état actuel des choses il serait hasardeux d’y inclure les dispositions de l’Acte de Québec qui ne portent pas sur les institutions provinciales, mais plutôt sur la garantie de droits individuels tels que le libre exercice de la religion catholique et la liberté testamentaire.
Les tribunaux et les auteurs ont d’ailleurs confirmé que la Loi constitutionnelle de 1867 ne changeait rien au statut ou à l’existence de l’Acte de Québec et que celui-ci s’imposait alors à l’extérieur de la province, notamment au Parlement du Canada. En plus de l’arrêt de la Cour d’appel dans le premier renvoi sur les valeurs mobilières, dont nous avons parlé plus haut, Pierre-Basile Mignault notait en 1895 que « l’Acte de Québec de 1774 n’a jamais été abrogé » et que les nouvelles compétences législatives données au Parlement du Canada en 1867 ne pouvaient être « exerc[ées] contrairement aux lois impériales qui sont en vigueur [y compris l’Acte de Québec][103] ».
L’événement qui pose en apparence le plus grand écueil à la continuité du statut constitutionnel de l’Acte de Québec est l’adoption du Statut de Westminster de 1931. Cette autre loi impériale, rédigée après de vastes consultations avec plusieurs colonies britanniques, dont le Canada, devait répondre à leur désir d’autonomie. Son article 2 abrogeait la Colonial Laws Validity Act et autorisait dès lors les législatures des dominions britanniques à modifier certaines lois impériales. Son article 7 ménageait toutefois une exception pour les Lois de 1867 à 1930 sur l’Amérique du Nord britannique (British North America Acts, 1867 to 1930), afin d’éviter que celles-ci puissent être modifiées unilatéralement par une loi provinciale ou fédérale :
Une interprétation littérale de cet article peut mener à la conclusion que toutes les lois impériales qui n’y sont pas exactement mentionnées, y compris l’Acte de Québec, devenaient dès lors sujettes à être modifiées ou abrogées par de simples lois ordinaires adoptées par une province ou par le Parlement du Canada selon leurs compétences respectives. C’est d’ailleurs cette conclusion que la Cour supérieure a entérinée dans l’affaire Hak : puisque le Statut de Westminster permettait la modification, au Canada de toute loi impériale, sauf celles qui y étaient expressément mentionnées, l’Acte de Québec perdait dès lors son statut supralégislatif[104].
Cette interprétation n’est toutefois pas la seule. Une autre avance plutôt que la possibilité donnée au Parlement du Canada et aux législatures provinciales de modifier les lois impériales s’appliquant au pays visait seulement celles qui s’inscrivaient déjà dans leurs champs de compétence respectifs, comme le précisait l’article 7 (3) :
Dans la mesure où l’Acte de Québec, adopté précisément pour établir la Constitution de la colonie, avait justement pour objectif de délimiter ces compétences législatives, le Statut de Westminster n’aurait pas permis aux provinces, ni au Parlement du Canada, de modifier ses dispositions.
Selon cette interprétation, le Statut de Westminster visait plutôt à permettre aux législatures canadiennes de modifier des lois impériales qui, contrairement à l’Acte de Québec, étaient d’application générale, et n’avaient pas exactement pour objet d’établir la Constitution du pays. Pensons notamment aux droits d’appel prévus auprès du Conseil privé à Londres[105], aux lois réservant des actes précis à certains corps professionnels[106], à une loi relative à l’habeas corpus[107] ou encore même à la magna carta[108], toutes des lois d’application générale que les législatures canadiennes ont pu changer grâce au Statut de Westminster. Cette interprétation nuancée ne réduit pas à néant la portée de ce statut, puisqu’elle préserve la possibilité qu’il donne aux législatures canadiennes de transformer la grande majorité des lois impériales, tout en reconnaissant que certaines lois fondamentales — même au-delà de celles qui sont énumérées à l’article 7 (1) — continuaient d’être protégées d’une modification unilatérale par loi fédérale ou provinciale.
Cette interprétation est appuyée par le fait qu’une interprétation littérale du Statut de Westminster, et plus particulièrement de son article 7 (1), mènerait à des incongruités. Les termes « British North America Acts, 1867 to 1930 » employés dans cet article sont une expression définie dans l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1930[109]. Or, cette expression n’inclut pas toutes les lois constitutionnelles adoptées pendant cette période, mais seulement certaines d’entre elles. En effet, la définition ajoute la loi de 1930 aux « British North America Acts, 1867 to 1916 », expression qui avait elle-même inséré la loi constitutionnelle de 1916 dans la définition des « British North America Acts, 1867 to 1915[110] », laquelle ajoutait à son tour la loi de 1915 à la définition des « British North America Acts, 1867 to 1886[111] » qui comprenait uniquement les lois de 1867, 1871 et 1886[112]. Bref, la définition adoptée dans l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1930 et reprise dans le Statut de Westminster ne visait que les lois constitutionnelles de 1867, 1871, 1886, 1915, 1916 et 1930, et écartait notamment une modification à la Loi constitutionnelle de 1867 adoptée en 1875 ainsi que l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1907[113].
Il découle de ce qui précède que, si seules les lois expressément mentionnées à l’article 7 (1) du Statut de Westminster étaient protégées d’une modification unilatérale par une province ou par le Parlement du Canada, alors l’un de ces deux paliers de gouvernement aurait eu, dès 1931, le pouvoir de modifier unilatéralement la loi de 1907. Cette conclusion apparaît illogique, puisque cette loi visait précisément à enchâsser, hors de portée des provinces et du Parlement du Canada, une nouvelle formule de calcul des transferts fédéraux aux provinces[114]. Ce serait là une conséquence pour le moins incongrue de la première interprétation du Statut de Westminster proposée plus haut et retenue par la Cour supérieure du Québec.
Pour cette raison, deux principaux auteurs, à savoir Paul Gérin-Lajoie et Kenneth Clinton Wheare, affirment qu’il faut donner une interprétation plus nuancée à l’article 7 (1) du Statut de Westminster[115]. Selon eux, l’intention derrière cet article était de laisser intacts l’ensemble des textes constitutionnels canadiens en vigueur à l’époque. Afin de respecter cette intention, il faudrait interpréter l’article 7 du Statut de Westminster comme protégeant d’une modification unilatérale non seulement les lois constitutionnelles qui y sont précisément mentionnées, mais aussi toute autre « loi fondamentale » n’entrant ni dans les champs de compétence des provinces ni dans ceux du Parlement du Canada. D’après Gérin-Lajoie, cette conclusion découle de l’article 7 (3), qui « n’empêche pas simplement Ottawa et les provinces d’utiliser leurs nouveaux pouvoirs pour empiéter sur leurs compétences respectives [mais] limite [en outre] ces pouvoirs aux matières qui “sont” de leurs compétences […] ce qui les limite aussi aux termes de la Constitution, c’est-à-dire des Actes de l’Amérique du Nord britannique, 1867 à 1930, et de tout autre document qui peut être considéré comme ayant le statut de “loi fondamentale”[116] ». L’Acte de Québec, vu son importance et le fait qu’il a été adopté spécialement pour la colonie, comme toutes les autres lois constitutionnelles précitées, devrait, à notre avis, être inclus parmi ces lois fondamentales.
Cette seconde interprétation voulant que le Statut de Westminster n’ait pas relégué l’Acte de Québec au rang de loi ordinaire trouve écho dans certains arrêts de la Cour suprême. Même après 1931, celle-ci a continué de faire référence à l’article v de cet acte en tant que disposition constitutionnelle ayant préséance sur les lois ordinaires[117]. Mentionnons, entre autres, l’arrêt Saumur c. Ville de Québec, dans lequel un témoin de Jéhovah contestait la validité d’un règlement municipal qui l’empêchait de distribuer des circulaires. La Cour suprême a ultimement jugé que le règlement était ultra vires, car il relevait des chefs de compétence du Parlement du Canada, mais deux juges ont également fondé leur décision sur le droit au libre exercice de la religion garanti à l’Acte de Québec, qu’ils ont qualifié de « principe de droit public » de « caractère fondamental »[118].
De même, dans l’arrêt Henry Birks & Sons Montreal Ltd. c. Ville de Montréal, la Cour suprême devait se prononcer sur la validité d’une loi provinciale qui autorisait les conseils municipaux à obliger la fermeture des commerces durant certaines fêtes religieuses. Une fois encore, la majorité s’est fondée sur le partage des compétences pour invalider la loi, et elle a aussi souligné, sous la plume du juge Fauteux, que l’Acte de Québec est « suspensif de l’opération de toute loi passée ou à venir, dont l’objet serait d’entraver ou gêner le libre exercice de cette religion[119] ». Dans ces passages, l’Acte de Québec — plus précisément son article v relatif au libre exercice de la religion — n’est pas décrit comme un simple élément de contexte historique, mais bien plutôt comme un document constitutionnel exécutoire.
Plus récemment, la Cour suprême a noté que les affaires Saumur et Henry Birks ont « reconnu l’existence au Canada de “la plus entière liberté de penser en matière religieuse” », et ce, même avant l’adoption de la Charte canadienne[120]. Ces arrêts, qui prennent appui, entre autres, sur l’Acte de Québec, suggèrent que même après 1931 celui-ci conservait son statut constitutionnel et supralégislatif. En ce sens, et en ligne directe avec les analyses de Gérin-Lajoie et de Wheare, le Statut de Westminster ne serait pas un obstacle aussi important qu’il ne peut le sembler à première vue.
3.4 Statut actuel : partie intégrante de la Constitution du Canada
Même si l’on acceptait l’idée que l’Acte de Québec soit devenu une simple loi ordinaire en 1931 par l’effet du Statut de Westminster, l’analyse devrait se poursuivre. Lors du rapatriement de la Constitution en 1982, il a été décidé de donner une nouvelle définition à la « Constitution du Canada » et de l’enchâsser dans l’article 52 (2) de la Loi constitutionnelle de 1982, afin notamment d’accorder un caractère suprême à ses éléments constitutifs. En d’autres termes, si l’analyse historique de la continuité du statut constitutionnel de l’Acte de Québec est utile, son statut actuel et son intégration formelle à la Constitution du Canada doivent aussi s’apprécier à la lumière de la définition courante de cette notion.
Cette définition « comprend : a) la Loi de 1982 sur le Canada, y compris la [Loi constitutionnelle de 1982] ; b) les textes législatifs et les décrets figurant à l’annexe ; [et] c) les modifications des textes législatifs et des décrets mentionnés aux alinéas a) ou b)[121] ». Au premier chef, donc, la Constitution canadienne est composée des textes expressément énumérés en annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, parmi lesquels ne figure pas l’Acte de Québec. Or, comme l’a conclu la Cour suprême, et ainsi que nous l’avons mentionné en introduction, le terme « comprend » employé à l’article 52 (2) de cette loi dénote le caractère ouvert de la « Constitution du Canada » qui ne se limite pas à ces textes énumérés, mais inclut aussi un ensemble organique d’autres textes constitutionnels, de conventions, de normes et de principes[122].
Si la Cour suprême s’est montrée réticente à ajouter d’autres textes à la liste figurant en annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, elle n’a pas pour autant fermé la porte à cette éventualité[123]. En fait, dans le Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, elle a conclu en 1994 que « [l]es caractéristiques essentielles de la Cour sont protégées par la partie V de la » Loi constitutionnelle de 1982[124]. Ce faisant, elle a essentiellement incorporé à la Constitution du Canada certaines dispositions de la Loi sur la Cour suprême qui, pourtant, n’est qu’une loi ordinaire du Parlement du Canada. Ainsi, il n’est pas exclu que d’autres lois comme l’Acte de Québec, même dans le cas de lois ordinaires, puissent, elles aussi, faire partie de la Constitution canadienne au sens formel.
Comment alors reconnaître ces autres lois qui peuvent être insérées dans la Constitution du Canada ? Dans le Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, le plus haut tribunal du pays a adopté une approche historique qui lui a permis de déceler certains indices montrant toute l’importance de ses éléments constitutifs dans l’architecture du pays[125]. Dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat, la Cour suprême a par ailleurs indiqué certaines caractéristiques des composantes de la Constitution du Canada, à savoir qu’elles « défini[ssen]t les pouvoirs des éléments constitutifs du régime gouvernemental canadien […], régi[ssen]t aussi la relation de l’État avec le citoyen » et établissent des normes auxquelles le pouvoir gouvernemental doit se conformer pour être « exercé légalement »[126]. Il n’existe pas de test précis permettant de déterminer les textes qui, malgré leur absence de l’annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, sont eux aussi intégrés dans la Constitution du Canada, mais ces quelques jalons posés par la Cour suprême fournissent un point de départ pour mener cette analyse.
À la lumière de leur historique, de leur évolution et de leur importance particulière dans l’architecture constitutionnelle du Canada, nous pourrions tout à fait soutenir que les articles toujours en vigueur de l’Acte de Québec s’inscrivent également dans la Constitution canadienne, bien que cet élément soit ultimement une question d’appréciation judiciaire. Première loi impériale adoptée pour le Québec[127], l’Acte de Québec régit les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire en établissant leurs compétences respectives ; il trace en outre les paramètres de la relation de l’État avec les citoyens, en enchâssant certaines garanties, notamment en matière de propriété, de droits civils et de religion. Ces quelques indices semblent correspondre aux facteurs énumérés par la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat.
D’autres indices suggèrent au surplus que les dispositions restantes de l’Acte de Québec se rattachent bel et bien à la Constitution. Au premier chef, la Commission de révision des lois du Canada inclut l’Acte de Québec dans la liste de documents qui figurent dans la « Constitution du Canada », laquelle est annexée aux Lois révisées du Canada de 1985[128]. Cette opinion de la Commission de révision n’est pas contraignante et elle ne peut à elle seule modifier le contenu de la Constitution. Elle fournit tout de même un indice additionnel de la persistance du statut constitutionnel de l’Acte de Québec. D’ailleurs, les tribunaux ontariens ont eu recours à une liste similaire annexée aux Lois refondues de l’Ontario comme un indice du statut constitutionnel de certaines lois autres que celles qui sont mentionnées dans la Loi constitutionnelle de 1982. Dans l’affaire O’Donoghue c. La Reine[129], ils étaient appelés à se pencher sur la validité constitutionnelle de certaines dispositions de l’Act of Settlement de 1701[130] en regard de la Charte canadienne. Ils ont plutôt conclu que les dispositions en cause, étant elles-mêmes intégrées à la Constitution du Canada, ne pouvaient être assujetties à un contrôle de constitutionnalité, les tribunaux étant aussi parvenus à cette conclusion, particulièrement en raison de l’inclusion de l’Act of Settlement dans la liste des lois constitutionnelles nommées dans les Lois refondues de la province[131].
La possibilité que la Constitution du Canada soit composée d’autres éléments que ceux qui sont énumérés en annexe de la Loi constitutionnelle de 1982 est renforcée en matière de droits et libertés de la personne par l’article 26 de la Charte canadienne, qui prévoit que « [l]e fait que la présente charte garantit certains droits et libertés ne constitue pas une négation des autres droits ou libertés qui existent au Canada[132] ». Évidemment, cette disposition peut protéger des droits et libertés garantis par simple loi ordinaire[133] mais, dans la mesure où d’autres droits font partie de la Constitution du Canada, elle peut servir à les protéger de la même façon. Comme la Cour suprême le soulignait dans l’arrêt Singh c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, elle permet en fait à divers « instruments constitutionnels ou quasi constitutionnels » de « conserve[r] toute [leur] force et [leur] effet » afin de « produire des effets cumulatifs assurant une meilleure protection des droits et libertés »[134]. Cette décision laisse transparaître la possibilité constitutionnelle que les garanties s’accumulent ou se chevauchent sans que la plus récente évince les précédentes. Ce raisonnement pourrait s’appliquer à la protection de la liberté de religion prévue par l’article v de l’Acte de Québec.
Bref, même si les tribunaux ne l’ont pas encore reconnu à ce jour, il est possible de soutenir que la première partie de l’article v et l’article x de l’Acte de Québec sont inclus dans la Constitution du Canada, de la même façon que d’autres lois qui ne sont pas mentionnées dans la Loi constitutionnelle de 1982.
Conclusion
En somme, tout laisse croire que la partie de l’article v de l’Acte de Québec relative au libre exercice de la religion et son article x relatif à la liberté testamentaire demeurent en vigueur. Puisque leur libellé ne prévoit pas leur modification par loi ordinaire, la question de leur statut contemporain se pose avec une grande acuité. Dans le présent article, nous avons soutenu que ces dispositions sont partie intégrante de la Constitution du Canada et ont donc préséance sur les lois ordinaires. En effet, le statut constitutionnel et supralégislatif que l’Acte de Québec avait au moment de son adoption s’est maintenu au travers des lois constitutionnelles adoptées en 1791, en 1840 et en 1867. Par ailleurs, selon l’interprétation que l’on donne au Statut de Westminster, celui-ci ne s’est pas non plus éteint en 1931. D’autre part, et de façon distincte, l’Acte de Québec peut tout à fait entrer dans la définition de la « Constitution du Canada » établie par la Cour suprême à partir de l’article 52 (2) de la Loi constitutionnelle de 1982, à l’instar d’autres lois tant ordinaires qu’impériales. Si ces interprétations devaient éventuellement être retenues par les tribunaux, ses dispositions toujours en vigueur devraient donc bénéficier de la suprématie prévue dans l’article 52 (1) de la même loi.
Si notre conclusion est juste, un autre débat peut s’enclencher en vue de déterminer la procédure qui permettrait de modifier ou d’abroger les dispositions en question[135]. Dans tous les cas, il est fort probable qu’une seule législature ne puisse le faire à elle seule, de sorte qu’il faudra atteindre un consensus plus large pour altérer ces dispositions fondamentales de notre paysage constitutionnel historique et contemporain. Si, à l’inverse, les dispositions toujours en vigueur de l’Acte de Québec n’ont plus de statut constitutionnel, il importe tout de même de considérer le rôle qu’elles peuvent jouer, à l’heure actuelle, dans l’ordonnancement juridique du Canada. À titre d’exemple, elles pourraient être considérées comme des dispositions législatives fédérales qui auraient alors préséance sur toute loi provinciale contraire en vertu de la doctrine de la prépondérance fédérale[136]. En effet, les tribunaux ont déjà conclu, à quelques reprises, que des lois impériales d’application générale qui s’inscrivaient dans les champs de compétence du Parlement du Canada étaient devenues des lois fédérales à la suite de l’adoption du Statut de Westminster[137]. Or, si les dispositions toujours en vigueur de l’Acte de Québec devaient être qualifiées de la même façon, comme le soutiennent certains auteurs[138], elles auraient alors prépondérance sur toute disposition provinciale incompatible, dans la mesure du conflit. À tout le moins, si cette analyse était écartée, les dispositions toujours en vigueur de l’Acte de Québec demeureraient des lois ordinaires à considérer dans tout dossier mettant en cause les matières qu’elles concernent.
Dans tous les cas, ces dispositions ne peuvent être balayées du revers de la main. D’un point de vue constitutionnel, elles testent les limites du cadre d’analyse élaboré par la Cour suprême pour établir les composantes de la Constitution du Canada, dont les contours exacts seront probablement précisés dans le contexte du débat judiciaire au sujet de la Loi sur la laïcité de l’État. Plus fondamentalement, notre analyse pose la question de savoir si la protection des droits des minorités doit se limiter aux garanties précises adoptées en 1982 dans la Charte canadienne ou si les autres droits qui leur étaient garantis auparavant conservent toujours leur pertinence. Si cette dernière option risque d’être perçue avec méfiance par ceux qui conçoivent ces garanties comme une limite à l’utilisation des clauses dérogatoires prévues par l’article 33 de cette charte, il faut pourtant rappeler qu’il est question de protections historiques pour lesquelles la population québécoise s’est fièrement battue et qui conservent, de nos jours encore, toute leur importance.
Appendices
Remerciements
Je tiens à remercier la Fondation Pierre Elliott Trudeau et la bourse d’études supérieures du Canada Vanier pour leur soutien financier. Pour leurs précieux commentaires sur des versions antérieures de ce texte, je remercie Azim Hussain, Robert Leckey, ainsi que les participants à une formation du Barreau de Laval et au colloque « Les lieux du droit » organisé par le Groupe de recherche sur les humanités juridiques dans le contexte du 88e congrès de l’ACFAS. Enfin, je note que j’ai eu l’occasion de plaider certains arguments exposés dans le présent article devant la Cour supérieure du Québec, dans le contexte de la contestation constitutionnelle de la Loi sur la laïcité de l’État, RLRQ, c. L-0.3 : Lauzon c. Québec (Procureur général), C.S.M. no 500-17-109731-193, ayant mené à la décision Hak c. Procureur général du Québec, 2021 QCCS 1466 (présentement en appel). Je remercie l’équipe pour leur travail et leurs commentaires sur certains de ces arguments. Le présent article est rédigé à titre personnel et je demeure responsable de toute erreur ou omission.
Notes
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[1 ]
Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c. 11 (R.-U.), art. 52(2) (ci-après dans les notes « LC 1982 »).
-
[2 ]
Renvoi relatif à la réforme du sénat, 2014 CSC 32, par. 24. Voir aussi l’arrêt New Brunswick Broadcasting Co. c. Nouvelle‑Écosse (Président de l’Assemblée législative), [1993] 1 R.C.S. 319.
-
[3 ]
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., c. 3 (R.-U.), préambule (ci-après dans les notes « LC 1867 »). Voir aussi l’arrêt New Brunswick Broadcasting Co. c. Nouvelle-Écosse, préc., note 2.
-
[4 ]
Toronto (Cité) c. Ontario (Procureur général), 2021 CSC 34, par. 49-63.
-
[5 ]
Voir notamment : David Schneiderman, « Unwritten Constitutional Principles in Canada : Genuine or Strategic ? », dans Rosalind Dixon et Adrienne Stone (dir.), The Invisible Constitution in Comparative Perspective, Cambridge, Cambridge University Press, 2018, p. 517, à la page 540 ; Howard Kislowicz, « Law, Faith, and Canada’s Unwritten Constitution », (2020) 25 R. études const. 19 ; Maxime St-Hilaire, Patrick F. Baud et Elena S. Drouin, « The Constitution of Canada as Supreme Law : A New Definition », (2019) 28-1 Forum const. 7 ; (Alyn) James Johnson, « The Judges Reference and the Secession Reference at Twenty : Reassessing the Supreme Court of Canada’s Unfinished Unwritten Constitutional Principles Project », (2019) 56 Alta. L. Rev. 1077 ; Malcolm Rowe et Nicolas Déplanche, « Canada’s Unwritten Constitutional Order : Conventions and Structural Analysis », (2020) 98 R. du B. can. 430 ; Vanessa A. MacDonnell, « Rethinking the Invisible Constitution : How Unwritten Constitutional Principles Shape Political Decision-Making », (2019) 65 R.D. McGill 175 ; Peter C. Oliver, « “A Constitution Similar in Principle to That of the United Kingdom” : The Preamble, Constitutional Principles, and a Sustainable Jurisprudence », (2019) 65 R.D. McGill 207.
-
[6 ]
Colombie‑Britannique (Procureur général) c. Canada (Procureur général) ; Acte concernant le chemin de fer de l’Île de Vancouver (Re), [1994] 2 R.C.S. 41, 94. D’ailleurs, la décision de la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6, 2014 CSC 21, a eu pour effet d’incorporer dans la Constitution du Canada certaines dispositions de la Loi sur la Cour suprême, L.R.C. 1985, c. S-26. Relativement au Renvoi relatif à la réforme du Sénat, préc., note 2, voir notamment Catherine Mathieu et Patrick Taillon, « Le fédéralisme comme principe matriciel dans l’interprétation de la procédure de modification constitutionnelle », (2015) 60 R.D. McGill 763, 772-776.
-
[7 ]
Voir, par exemple, Patrick Monahan et Byron T. Shaw, Constitutional Law, 5e éd., Toronto, Irwin Law, 2017, p. 191-193 (notant que cette possibilité permet de rendre plus flexible l’évolution de la Constitution canadienne).
-
[8 ]
LC 1982, art. 52 (1) et 52 (3) ; voir par exemple : Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada, 5e éd., feuilles mobiles, Toronto, Thomson Reuters, 2021, c. 1.4 ; Henri Brun, Guy Tremblay et Eugénie Brouillet, Droit constitutionnel, 6e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014, no I.23.
-
[9 ]
Acte de Québec de 1774, 14 Geo. III, c. 83 (R.-U.) (ci-après « Acte de Québec »).
-
[10]
Statut de Westminster de 1931, 22 Geo. V, c. 4 (R.-U.) (ci-après « Statut de Westminster »).
-
[11]
Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la LC 1982, (ci-après « Charte canadienne ») ; Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12.
-
[12]
Loi sur la laïcité de l’État, RLRQ, c. L-0.3 ; voir l’arrêt Hak c. Procureur général du Québec, 2021 QCCS 1466 (déclaration d’appel, C.A., 2021-05-31, 500‑09‑029539‑210) (ci-après « affaire Hak »).
-
[13]
Loi sur la laïcité de l’État, art. 6, 33 et 34.
-
[14]
Hak, préc., note 12, par. 440 et 441, 449 et 450, 465 et 466.
-
[15]
Id., par. 517 et 522.
-
[16]
On consultera notamment en plus des articles et des ouvrages cités dans la présente section : Reginald Coupland, The Quebec Act : A Study in Statesmanship, Oxford, Clarendon, 1968 ; Hilda Neatby, Quebec : The Revolutionary Age, 1760-1791, Toronto, McClelland and Stewart, 1966 ; Hilda Neatby, The Quebec Act : Protest and Policy, Scarborough, Prentice-Hall of Canada, 1972 ; Pierre Tousignant, « L’incorporation de la province de Québec dans l’Empire britannique, 1763-1791 », dans Dictionnaire biographique du Canada, t. iv, Québec, Presses de l’Université Laval, p. xxxiv-lii ; Philip Lawson, The Imperial Challenge : Quebec and Britain in the Age of the American Revolution, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 1989 ; Jacques-Yvan Morin et José Woehrling, Les constitutions du Canada et du Québec : du régime français à nos jours, t. 1, Montréal, Éditions Thémis, 1994 ; Michel Morin, « Les changements de régimes juridiques consécutifs à la Conquête de 1760 », (1997) 57 R. du B. 689 ; Michel Morin, « La découverte du droit constitutionnel britannique dans une colonie francophone : la Gazette de Québec, 1764-1774 », (2013) 47 R.J.T.U.M. 319 ; Michel Morin, « Les débats concernant le droit français et le droit anglais antérieurement à l’adoption de l’Acte de Québec de 1774 », (2014) 44 R.D.U.S. 259 ; Philip Girard, Jim Phillips et R. Blake Brown, A History of Law in Canada, coll. « Osgoode Society for Canadian Legal History », Toronto, University of Toronto Press, 2018, p. 175-202, 218-224 et 324-337.
-
[17]
Voir, par exemple, Daniel Baugh, The Global Seven Years War, 1754-1763 : Britain and France in a Great Power Contest, 2e éd., Londres, Routledge, 2021, p. 88-89.
-
[18]
Articles de capitulation de Québec, 18 septembre 1759 (ci-après « Capitulation de Québec »), reproduits dans Adam Shortt et Arthur G. Doughty, Documents relatifs à l’histoire constitutionnelle du Canada, 1759-1791, 2e éd., 1re partie, Ottawa, Thomas Mulvey, 1921, p. 1 et suiv.
-
[19]
Articles de capitulation de Montréal, 8 septembre 1760 (ci-après « Capitulation de Montréal »), reproduits dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 5 et suiv.
-
[20]
Traité de Paris, 10 février 1763, reproduit dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 83 et suiv. (voir l’article 4 pour la cession du Canada à la Grande-Bretagne).
-
[21]
Les textes prévoient par exemple que les troupes françaises pourront retourner en France, tout comme les officiers civils ; que les habitants ne pourront être emprisonnés pour avoir porté les armes ; que les armes et certaines marchandises seront remises ; que les blessés seront traités correctement ; et que les prisonniers de guerre seront libérés. Voir : Capitulation de Québec, préc., note 18, art. 1, 3 et 7 ; Capitulation de Montréal, préc., note 19, art. 4, 7, 8, 12-14, 21 et 25 ; Traité de Paris, préc., note 20, art. 3.
-
[22]
Les instruments garantissent notamment aux habitants leurs biens, les autorisent à demeurer sur place ou à retourner en France et leur permettent de poursuivre le commerce ; voir : Capitulation de Québec, préc., note 18, art. 2, 4 et 5 ; Capitulation de Montréal, préc., note 19, art. 36, 37 et 46 ; le Traité de Paris, préc., note 20, prévoit à cet égard une période de 18 mois pendant laquelle les sujets français peuvent émigrer sans être inquiétés (art. 4).
-
[23]
Capitulation de Québec, préc., note 18, art. 6.
-
[24]
Capitulation de Montréal, préc., note 19, art. 27-29 et 32. Leurs possessions étaient aussi protégées, et leur retour en France était permis (art. 34 et 35). Notons que les autochtones se voient aussi garantir la liberté de religion (art. 40), mais le droit à la dîme est assujetti à la « volonté du Roi » (art. 27). Enfin, la Capitulation de Montréal ne liait pas les peuples autochtones, mais seulement les Français.
-
[25]
Traité de Paris, préc., note 20, art. 4 : la Couronne s’engage en outre à prendre les dispositions nécessaires pour que les habitants « puissent professer le Culte de leur Religion, selon le Rit[e] de l’Église Romaine ».
-
[26]
Id.
-
[27]
Comme le relève Michel Morin, « De la reconnaissance officielle à la tolérance des religions : l’État civil et les empêchements de mariage de 1628 à nos jours », dans Jean-François Gaudreault-Desbiens (dir.), Le droit, la religion et le « raisonnable » : le fait religieux entre monisme étatique et pluralisme juridique, Montréal, Éditions Thémis, 2009, p. 53, aux p. 60 et 61 (cette disposition « constitue purement et simplement une contradiction dans les termes »).
-
[28]
Campbell c. Hall, (1774) 1 Cowp. 204, 98 E.R. 1048 (B.R.), traduction tirée de A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 506, à la p. 509.
-
[29]
Proclamation royale de 1763, 3 Geo. III (R.-U.), reproduite dans L.R.C. 1985, app. II, no 1.
-
[30]
Id., où l’on spécifie que ces lois anglaises s’appliqueront, entre autres, au Québec, que les lois coloniales devront leur être conformes « autant que possible » et que les tribunaux qui y seront créés devront juger « suivant la loi et l’équité, conformément autant que possible aux lois anglaises ».
-
[31]
Selon certaines interprétations, les serments anti-catholiques devaient être prêtés pour accéder à des postes tels que conseiller législatif, juge, avocat, procureur, médecin, apothicaire, fonctionnaire, greffier, secrétaire du conseil municipal ou officier militaire : voir, par exemple, Représentation du jury d’accusation de Québec, 16 octobre 1764, reproduite dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 187, à la p. 190.
-
[32]
Le serment à l’encontre de la transsubstantiation est prévu dans An Act for Preventing Dangers which May Happen from Popish Recusants, 1673, 25 Car. II, c. 2 (R.-U.). Trois autres serments (de fidélité, d’abjuration de la puissance du pape et de rejet des prétentions catholiques sur la Couronne britannique) sont prévus dans une loi de 1714 : An Act for the further security of His Majesty’s Person and Government, and the Succession of the Crown in Heirs of the late Princess Sophia, being Protestants ; and for extinguishing the hopes of the pretended Prince of Wales, and his open and secret Abettors, 1714, Geo. I, c. 13 (R.-U.). Le gouverneur James Murray reçoit d’ailleurs précisément l’instruction de faire prêter ces serments au Québec : Commission de capitaine général et gouverneur en chef de la Province de Québec, 21 novembre 1763, reproduite dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 146 et suiv. Toutefois, certains postes de greffiers, d’huissiers et d’aides de camp, notamment, ont été occupés par des catholiques pendant la période 1763-1775, signe de l’application plus souple des lois en cause : Donald Fyson, « Les Canadiens et le Serment du Test », dans Sophie Imbeault, Denis Vaugeois et Laurent Veyssière (dir.), 1763. Le traité de Paris bouleverse l’Amérique, Québec, Septentrion, 2013, p. 272, aux p. 274 et 275.
-
[33]
Voir notamment M. Morin, « Les changements de régimes juridiques consécutifs à la Conquête de 1760 », préc., note 16, p. 695-698.
-
[34]
Jacques Lacoursière, Jean Provencher et Denis Vaugeois, Canada, Québec – Synthèse historique 1534-2015, Québec, Septentrion, 2015, p. 155 et 156 ; M. Morin, « Les débats concernant le droit français et le droit anglais antérieurement à l’adoption de l’Acte de Québec de 1774 », préc., note 16, p. 264 ; R. Coupland, préc., note 16, p. 194 et 195.
-
[35]
Carleton à Shelburne, 24 décembre 1767, reproduit dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 262, aux p. 263 et 264 ; J. Lacoursière, J. Provencher et D. Vaugeois, préc., note 34, p. 175. La politique aurait notamment, quoique pas seulement, eu pour objet de consolider la situation dans la province à la lumière des soulèvements qui avaient cours dans les colonies britanniques plus au sud : voir notamment Duncan McArthur, « The New Régime », dans Adam Shortt et Arthur G. Doughty (dir.), Canada and its Provinces, t. III, Toronto, Glasgow Brook & Company, 1914, p. 19, à la p. 45.
-
[36]
À titre d’exemple, vers 1770, une pétition de plusieurs Canadiens français demande le rétablissement des lois et coutumes françaises : Pétition pour obtenir le rétablissement des lois et coutumes françaises, vers 1770, reproduite dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 399. En 1773, un groupe de 65 Canadiens français prétendant représenter plus de 100 000 de leurs pairs fait de même, en demandant aussi que le Conseil législatif de la province soit élargi pour les inclure et qu’ils puissent occuper n’importe quel autre poste : Gerald E. Hart, Quebec Act 1774, Montréal, Gazette Print, 1891, p. 10 et 11 ; M. Morin, « Les débats concernant le droit français et le droit anglais antérieurement à l’adoption de l’Acte de Québec de 1774 », préc., note 16, p. 273 ; la pétition est reproduite dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 490-494.
-
[37]
G.E. Hart, préc., note 36, p. 11.
-
[38]
John Wright, Debates of the House of Commons in the year 1774, on the Bill for Making More Effectual Provision for the Government of the Province of Quebec : Drawn up from the Notes of the Right Honourable Sir Henry Cavendish, bart., Member for Lostwithiel, Londres, Ridgway Piccadilly, 1839, p. 21 et 23 (extraits du discours de M. Dunning).
-
[39]
Id., p. 32 (extraits du discours du procureur général Edward Thurlow).
-
[40]
Pour la même raison, l’entrée en vigueur de l’Acte de Québec est marquée par la controverse. Au matin du 1er mai 1775, le buste du roi Georges III qui trône sur la place d’Armes de Montréal est vandalisé, un acte que plusieurs auteurs attribuent aux marchands anglais insatisfaits des concessions octroyées aux Canadiens français : Joan Coutu, « Philanthropy and Propaganda : The Bust of George III in Montréal », (1992) 19 Revue d’art canadienne 59, 65 ; Pierre-Georges Roy, Recherches historiques : bulletin d’archéologie, d’histoire, de biographie, de bibliographie, de numismatique, etc., etc., t. 8, Lévis, 1902, p. 21 ; G.E. Hart, préc., note 36, 1891, p. 5.
-
[41]
Sur ce point, voir notamment H. Neatby, The Quebec Act : Protest and Policy, préc., note 16, p. 140.
-
[42]
Voir notamment H. Brun, G. Tremblay et E. Brouillet, préc., note 8, no I.33 : « Font d’abord partie du droit constitutionnel canadien les lois adoptées par le Parlement impérial spécifiquement en fonction du Québec ou du Canada. Pensons, par exemple à l’Acte de Québec de 1774 » (l’italique est de nous).
-
[43]
Hak, préc., note 12, par. 517.
-
[44]
Id., par. 465 et 466.
-
[45]
Acte de Québec, préc., note 9, art. i-iii.
-
[46]
Id., art. iv. Cette disposition vise notamment à régulariser la situation juridique au Québec, puisque certains affirment que les ordonnances adoptées en vertu de la Proclamation royale de 1763 seraient de toute façon invalides, n’ayant pas été adoptées par une assemblée législative comme le requiert la Proclamation elle-même. En effet, si cette dernière permettait au Conseil législatif d’adopter des ordonnances, certains dont Pierre-Basile Mignault ont souligné qu’elle « exigeait pour l’introduction des lois anglaises, le consentement du gouverneur, du conseil et de l’assemblée » (l’italique est de nous) : Pierre-Basile Mignault, Droit civil canadien, t. 1, Montréal, Whiteford & Théoret, 1895, p. 25. C’est d’ailleurs cette question qui a fait l’objet de l’affaire Campbell c. Hall, préc., note 28 (rendue au sujet d’une autre colonie).
-
[47]
Acte de Québec, préc., note 9, art. v.
-
[48]
Act of Supremacy de 1558, 1 Eliz., c. 1 (R.-U.) : voir plus précisément l’article vii. Cette loi réagissait au règne de Marie Ire, qui avait tenté de renverser les réformes protestantes entamées par son père, Henri VIII, et de rétablir l’Église catholique en Angleterre. Comme le note la Cour suprême, « [t]he design was, while allowing the fullest liberty of worship according to the rites of the Church of Rome, to preserve scrupulously the Prerogative of the Sovereign as the head of the Church » : In re Marriage Laws, (1912) 46 R.C.S. 132, 414-418 (l’italique est de nous).
-
[49]
En ce sens, voir M. Morin, préc., note 27, aux p. 62 et 63, pour qui « le rappel de la loi de 1558 est implicitement confiné aux questions temporelles ».
-
[50]
Acte de Québec, préc., note 9, art. v in fine.
-
[51]
Id., art. vii.
-
[52]
Roman Catholic Relief Act de 1829, 10 Geo. IV, c. 7 (R.-U.). Deux autrices notent que même en 1776, juste avant de déclarer leur indépendance, les Treize Colonies maintenaient toujours des restrictions contre les catholiques, qui les excluaient des postes d’importance, et que de telles restrictions ont même été conservées par certains États après l’entrée en vigueur du premier amendement à la Constitution américaine (garantissant la liberté de religion) en décembre 1791 : Sheldon J. Godfrey et Judith C. Godfrey, Search out the Land – The Jews and the Growth of Equality in British Colonial America, 1740-1867, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 1995, p. 136.
-
[53]
Acte de Québec, préc., note 9, art. vi.
-
[54]
Id., art. viii.
-
[55]
Id., art. ix.
-
[56]
Id., art. x.
-
[57]
À ce sujet, voir notamment Alexandra Popovici et Lionel Smith, « Freedom of Testation and Family Claims in Canada » dans Kenneth G.C. Reid, Marius J. de Waal et Reinhard Zimmermann (dir.), Comparative Succession Law, t. 3, Oxford, Oxford University Press, 2020, p. 507, aux p. 508-509. Voir aussi : Christine Morin, « La liberté de tester : évolution et révolution dans les représentations de la doctrine québécoise », (2008) 38 R.D.U.S. 339, 344-346 ; André Morel, Les limites de la liberté testamentaire dans le droit civil de la province de Québec, Paris, L.G.D.J., 1960.
-
[58]
Acte de Québec, préc., note 9, art. xi.
-
[59]
Id., art. xii-xv.
-
[60]
Voir Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 7e éd., Toronto, LexisNexis, 2022, no 24.01 (Lexis Advance Quicklaw).
-
[61]
Id., no 24.04 (notre traduction).
-
[62]
Cons. d’État 13 mai 1949, Sieur Bourgoin, Rec. Cons. d’Ét., p. 214.
-
[63]
Voir, par exemple, Joseph Raz, The Authority of Law, 2e éd., Oxford, Oxford University Press, 2009, p. 88.
-
[64]
Pierre-André Côté et Mathieu Devinat, Interprétation des lois, 5e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2021, no 1261. Ce n’est toutefois qu’une présomption que d’autres principes et présomptions peuvent repousser, comme la préséance présumée des lois spécifiques sur les générales.
-
[65]
Id., no 1219, sur ce point ; R. Sullivan, préc., note 60, no 24.04.
-
[66]
P.-A. Côté et M. Devinat, préc., note 64, no 1219.
-
[67]
Id., nos 1224 et 1232, citant notamment l’arrêt Daniels c. White, [1968] R.C.S. 517, 526. Voir, au même effet, R. Sullivan, préc., note 60, no 24.04.
-
[68]
Une disposition ordinaire ne peut abroger une disposition constitutionnelle en raison de la suprématie constitutionnelle établie par l’article 52 (1) de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c. 11 (R.-U.).
-
[69]
Acte constitutionnel de 1791, 31 Geo. III, c. 31 (R.-U.), reproduit dans L.R.C. 1985, app. II, no 3.
-
[70]
Id., art. ii.
-
[71]
Statute Law Revision Act de 1872, 35 & 36 Vict., c. 63 (R.-U.), préambule (notre traduction). On pourrait soutenir que cette reconnaissance, dans une loi britannique, du fait que certaines lois ont cessé d’avoir effet sans abrogation expresse remet en question l’idée que les lois non abrogées continuent d’être en vigueur. Or, le fait que le Royaume-Uni a néanmoins jugé nécessaire d’abroger expressément les dispositions en question montre que le simple passage du temps n’était pas suffisant pour leur enlever leur force normative.
-
[72]
Notons ici que la Proclamation royale de 1763 n’a évidemment pas été abrogée en ce qui concerne les peuples autochtones, qui l’ont d’ailleurs utilisée dans plusieurs contestations judiciaires : voir, par exemple, l’arrêt Calder c. Procureur général de la Colombie-Britannique, [1973] R.C.S. 313, 322 et 323. Voir aussi l’arrêt R. c. Marshall, [2005] 2 R.C.S 220, par. 86.
-
[73]
Pour un historique de cette évolution, voir, par exemple, Henri Brun, « Le territoire du Québec : à la jonction de l’histoire et du droit constitutionnel », (1992) 33 C. de D. 927.
-
[74]
Charte canadienne, préc., note 11, art. 26.
-
[75]
Hak, préc., note 12, par. 517 et 521 : « En 1867, comme aujourd’hui, l’Acte de Québec conserve son statut de loi impériale. »
-
[76]
Rappelons que le renvoi découlait de la volonté annoncée du gouvernement fédéral de faire adopter une loi ayant pour effet d’uniformiser, pour l’ensemble du Canada, certains aspects du droit régissant les valeurs mobilières.
-
[77]
Québec (P.G.) c. Canada (P.G.), 2011 QCCA 591, par. 125, confirmé en substance dans le Renvoi relatif à la Loi sur les valeurs mobilières, [2011] 3 R.C.S. 837.
-
[78]
Acte de Québec, préc., note 9, art. viii.
-
[79]
LC 1867, préc., note 3, art. 92 (13).
-
[80]
Acte de Québec, préc., note 9, art. xi.
-
[81]
LC 1867, préc., note 3, art. 91 (27).
-
[82]
Statute Law Revision Act, préc., note 71.
-
[83]
Acte constitutionnel de 1791, préc., note 69, art. xliii.
-
[84]
John E.C. Brierley, « The Co-existence of Legal Systems in Quebec : “Free and Common Socage” in Canada’s “pays de droit civil” », (1979) 20 C. de D. 277, 287, où l’auteur explique d’ailleurs que, si le droit anglais de la propriété a été aboli durant les années 1850, cette abolition « stopped short of an abolition of the form of tenure in free and common socage itself which still is, in an unstated manner, part of the law of Quebec today ». Voir en outre : An Act to provide for the Extinction of Feudal and Seigniorial Rights and Burthens on Lands held à Titre de Fief and à Titre de Cens, in the Province of Lower-Canada ; and for the gradual Conversion of those Tenures into the Tenure of Free and Common Soccage ; and for other Purposes relating to the said Province de 1825, 6 Geo. IV, c. 59 (R.-U.), art. viii ; Acte pour l’abolition des droits et devoirs féodaux dans le Bas-Canada de 1854, 18 Vict., c. 3 ; Acte pour fixer la loi relativement aux terres tenues en franc et commun soccage dans le Bas-Canada, S.C. 1857, 20 Vict., c. 45.
-
[85]
Acte constitutionnel de 1791, préc., note 69, art. xliii. Notons toutefois que l’article xlii prévoyait que les lois relatives à certaines matières ne prendraient effet qu’après avoir reçu la sanction royale, laquelle ne pouvait être donnée qu’après une période de 30 jours suivant leur présentation aux deux chambres du Parlement britannique. Cette procédure dérogeait de celle qui s’appliquait aux autres lois coloniales, lesquelles entraient en vigueur dès leur sanction par le gouverneur, sous réserve d’un possible désaveu (art. ii, xxx et xxxi).
-
[86]
J. Wright, préc., note 38, p. 15, 23 et 35. M. Dunning affirmait ce qui suit à ce chapitre : « Its [l’Acte de Québec] direct object is to take from a large number of the King’s subjects that constitution which was given to them ten years ago [par la Proclamation royale de 1763] ; to take that constitution from them, and to give them another in the place of it ». M. Thurlow, pour sa part, reconnaissait que le but de l’Acte était « to give them a more active constitution ».
-
[87]
Voir, par exemple, Cramahé à Dartmouth, 22 juin 1773, reproduit dans A. Shortt et A.G. Doughty, préc., note 18, p. 469 : « la constitution civile et les autres mesures nécessaires concernant cette province étaient présentement soumises à l’étude du Conseil privé de Sa Majesté ».
-
[88]
Voir Thomas Chapais, Cours d’histoire du Canada, t. I, Québec, Garneau, 1919-1934, p. 168. Voir aussi : Lionel Groulx, Histoire du Canada français depuis la découverte, t. II, 4e éd., Montréal, Éditions Fides, 1960, p. 61 ; Reference re Education Act of Ontario and Minority Language Education Rights, 1984 CanLII 1832, par. 17 (Ont. C.A.) ; Pierre du Calvet, Appel à la justice de l’État, Londres, 1784, p. 279 ; Edmond Lareau, Histoire du droit canadien, vol. II, Montréal, A. Périard Libraire-Éditeur, 1889, p. 146.
-
[89]
G.E. Hart, préc., note 36, p. 6.
-
[90]
L’Acte de Québec, en fait, ne pouvait pas être adopté autrement que par une loi impériale. En promettant dans la Proclamation royale de 1763 d’établir dans ses colonies d’Amérique – y compris le Québec – des assemblées législatives, le roi avait perdu sa prérogative d’adopter et de modifier par simple proclamation le droit qui y était en vigueur ; dès lors, il devait nécessairement passer par le Parlement impérial pour effectuer de telles modifications : P.W. Hogg, préc., note 8, c. 2.5.
-
[91]
Campbell c. Hall, préc., note 28.
-
[92]
Colonial Laws Validity Act 1865, 28 & 29 Vict., c. 63 (R.-U.).
-
[93]
P.-B. Mignault, préc., note 46, p. 556-558 ; J.E. Read, « The Early Provincial Constitutions », (1948) 26 R. du B. can. 621, 632 ; P.W. Hogg, préc., note 8, c. 2.13 : « Imperial statutes, unlike received statute law or common law, could not be amended by the colonial legislature ». Relativement aux testaments, certains auteurs ont expliqué l’absence de restrictions imposées à la liberté de tester avant 1930 par le statut constitutionnel de l’Acte de Québec : voir Chr. Morin, préc., note 57, 368.
-
[94]
Hak, préc., note 12, par. 517-518.
-
[95]
Voir par exemple : Th. Chapais, préc., note 88, t. II, p. 15 ; J. Lacoursière, J. Provencher et D. Vaugeois, préc., note 34, p. 198.
-
[96]
McAteer c. Canada (P.G.), 2014 ONCA 578, par. 38.
-
[97]
Acte d’Union de 1840, 3 & 4 Vict., c. 35 (R.-U.).
-
[98]
LC 1867, préc., note 3, art. 129.
-
[99]
Id., art. 92 (1). On trouve l’équivalent de cet article dans la Loi constitutionnelle de 1982, préc., note 1, art. 45.
-
[100]
Pour une représentation visuelle des frontières de la province de Québec en 1774, voir Encyclopaedia Britannica, « Quebec Act », Encyclopaedia Britannica, 2016, [En ligne], [www.britannica.com/event/Quebec-Act] (19 juin 2022).
-
[101]
L’Acte de Québec s’appliquerait aussi logiquement à d’autres provinces, à tout le moins l’Ontario et Terre-Neuve-et-Labrador, puisque – au fil de l’évolution du territoire de la province de Québec – les lois qui y étaient en vigueur ont été continuées par l’Acte constitutionnel de 1791, préc., note 69, art. xxxiii, l’Acte d’Union, préc., note 97, art. xlvi, et la Loi constitutionnelle de 1867, préc., note 3, art. 129.
-
[102]
H. Brun, G. Tremblay et E. Brouillet, préc., note 8, no IV.121. Voir aussi l’arrêt Procureur général de l’Ontario c. SEFPO, [1987] 2 R.C.S. 2, par. 93.
-
[103]
P.-B. Mignault, préc., note 46, p. 556-558.
-
[104]
Hak, préc., note 12, par. 517-522.
-
[105]
British Coal Corp. c. R., [1935] AC 500 (C.J.C.P.) ; Avis sur les appels au Conseil privé, [1947] AC 127 (C.J.C.P.).
-
[106]
R. c. De Banou, [1968] 2 D.L.R. (3d) 424 (B.C. C.A.), où un physiothérapeute invoquait une loi anglaise sur l’herbalisme pour prescrire des médicaments.
-
[107]
R. c. Chapman, [1971] 1 O.R. 601 (Ont. D.C.), 607.
-
[108]
R. c. Ganapathi, [1973] 11 CCC (2d) 173 (B.C. C.S.), 184 et 185.
-
[109]
Acte d’Amérique du Nord britannique de 1930, 20 & 21 Geo. V., c. 26 (R.-U.), art. 3 : « This Act may be cited as the British North America Act, 1930, and the British North America Acts, 1867 to 1916, and this Act may be cited together as the British North America Acts, 1867 to 1930 » ; voir : Paul Gérin-Lajoie, Constitutional Amendment in Canada, Toronto, University of Toronto Press, 1950, p. 9 et 10 ; K.C. Wheare, The Statute of Westminster and Dominion Status, 5e éd., Oxford, Oxford University Press, 1953, p. 187-188.
-
[110]
Acte d’Amérique du Nord britannique de 1916, 6 & 7 Geo. V, c. 19 (R.-U.), art. 2 (ci-après « LC 1916 »).
-
[111]
Acte de l‘Amérique du Nord britannique de 1915, 5 & 6 Geo. V, c. 45 (R.-U.), art. 3 (ci-après « LC 1915 »).
-
[112]
Acte d’Amérique du Nord britannique de 1886, 49 & 50 Vict., c. 35 (R.-U.), art. 3 (ci-après « LC 1886 »).
-
[113]
LC 1867, préc., note 3 ; Acte d’Amérique du Nord britannique de 1871, 34 & 35 Vict., c. 28 (R.-U.) ; LC 1886, préc., note 112 ; LC 1915, préc., note 111 ; LC 1916, préc., note 110 ; Acte d’Amérique du Nord britannique de 1930, préc., note 109 ; Loi de 1875 sur le Parlement du Canada, 38 & 39 Vict., c. 38 (R.-U.) ; Acte d’Amérique du Nord britannique de 1907, 7 Ed. VII, c. 11 (R.-U.) (ci-après « LC 1907 »).
-
[114]
LC 1907, préc., note 113, art. 1.
-
[115]
P. Gérin-Lajoie, préc., note 109, p. 8, 13 et 217 ; K.C. Wheare, préc., note 109, p. 160, 181 et 182.
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[116]
P. Gérin-Lajoie, préc., note 109, p. 13 (notre traduction ; l’italique est de nous).
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[117]
Ces affaires s’inscrivaient d’ailleurs dans la lignée d’autres décisions judiciaires qui, avant 1931, avaient suggéré que certaines dispositions de l’Acte de Québec avaient un caractère supralégislatif. Voir par exemple : Renaud c. Lamothe, (1902) 32 R.C.S. 357, 358-359 et 363 ; In re Marriage Laws, préc., note 48, 243 et 244 ; Despatie c. Tremblay, [1921] 1 AC 702 (C.J.C.P.), 714 : « the effect of Canada passing under British sovereignty so far as the religious liberty of its Catholic inhabitants is concerned, is authoritatively expressed in the Quebec Act […] The religious position in the Province of Quebec in 1774, was therefore that every individual had the right to profess and practise the Catholic religion without let or hindrance ».
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[118]
Saumur c. Ville de Québec, [1953] 2 R.C.S. 299, 327 et 342 (notre traduction) (ci-après « arrêt Saumur »).
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[119]
Henry Birks & Sons (Montreal) Ltd. c. Ville de Montréal, [1955] R.C.S. 799, 809 (ci-après « arrêt Henry Birks »).
-
[120]
R. c. Big M Drug Mart Ltd., [1985] 1 R.C.S. 295 (par. 67), 326, 347 et 348. La Cour suprême affirme en relation avec la liberté de religion que, « avant l’adoption de la Charte, ce principe était assujetti aux lois ordinaires » mais, citant l’arrêt Saumur, elle soutient qu’il existait un certain « périmètre » protégé et que « [c]e qui est fixé [par loi ordinaire], c’est la façon de compartimenter ce qu’il y a à l’intérieur de ce périmètre » (p. 348). De même, si la Cour précise dans l’arrêt Dupond c. Ville de Montréal, [1978] 2 R.C.S. 770, 796, qu’« aucune des libertés mentionnées n’a été consacrée par la constitution », c’est en réponse à un argument fondé sur l’incorporation de libertés fondamentales dans la Loi constitutionnelle de 1867 par l’entremise de son préambule ; en réalité, la Cour suprême n’examine pas l’Acte de Québec.
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[121]
LC 1982, préc., note 1, art. 52(2).
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[122]
Renvoi relatif à la réforme du Sénat, préc., note 2, par. 24. Voir aussi le Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217, par. 32.
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[123]
Voir notamment l’arrêt Colombie‑Britannique (Procureur général) c. Canada (Procureur général) ; Acte concernant le chemin de fer de l’Île de Vancouver (Re), préc., note 6, 94, où l’on refuse « d’écarter complètement la possibilité que des documents non énumérés à l’art. 52(2) de la [Loi constitutionnelle de 1982] puissent quand même être considérés comme constitutionnels dans certains contextes ».
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[124]
Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, préc., note 6, par. 74. Voir aussi P.W. Hogg, préc., note 8, c. 1.4, note 13.
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[125]
Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, préc., note 6, par. 75-95.
-
[126]
Renvoi relatif à la réforme du Sénat, préc., note 2, par. 23.
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[127]
Le « Québec » englobait à l’époque ce que sont actuellement les provinces de Québec, de l’Ontario et une partie de Terre-Neuve-et-Labrador.
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[128]
Lois révisées du Canada, L.R.C. 1985, app. II, avertissement : « Les lois constitutionnelles abrogées par celle de 1982 figurent pour mémoire dans le recueil, sous leur titre Acte de l’Amérique du Nord britannique et en italique. Ont été également conservés les textes qui, sans être mentionnés à l’annexe de la loi de 1982, font partie de la Constitution du Canada en vertu de l’article 52 de cette loi » (l’italique est de nous).
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[129]
O’Donohue c. La Reine, 2003 CanLII 41404 (Ont. C.S.), conf. par 2005 CanLII 6369 (Ont. C.A.).
-
[130]
Act of Settlement of 1701, 12 & 13 Will. 3, c. 2.
-
[131]
O’Donohue c. La Reine, préc., note 129, par. 35 : « The fact that the Act of Settlement was indexed among the constitutional acts is a further indication that, despite the fact that it was not listed in the Schedule to the Constitution Act, 1982, the Act of Settlement was intended to be a component of our constitutional enactments. » Voir toutefois l’interprétation quelque peu différente proposée dans l’arrêt Motard c. Procureur général du Canada, 2019 QCCA 1826, par. 54-56.
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[132]
Charte canadienne, préc., note 11, art. 26.
-
[133]
Par exemple, elle pourra protéger les droits et libertés garantis par la Déclaration canadienne des droits, L.C. 1960, c. 44.
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[134]
Singh c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration, [1985] 1 R.C.S. 177, par. 84 et 85 (l’italique est de nous).
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[135]
Si l’Acte de Québec est considéré s’appliquer à l’ensemble du Canada, on peut penser qu’il faudra l’assentiment du Parlement du Canada et des législatures de sept provinces représentant au minimum 50 p. 100 de la population canadienne. Autrement, on devrait obtenir au moins l’assentiment du Parlement du Canada et de la province visée, selon l’article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982. Pour qu’une province prétende modifier ces dispositions de façon unilatérale, il s’imposerait d’adopter une perspective démesurément large de ce qui entre dans la « constitution de la province » aux termes de l’article 45 de la Loi constitutionnelle de 1982, laquelle se limite plutôt à ce qui « porte essentiellement sur l’organisation et le fonctionnement des institutions de la province » : LC 1982, préc., note 1, art. 38, 43 et 45 ; H. Brun, G. Tremblay et E. Brouillet, préc., note 8, no IV.121.
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[136]
Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada Inc., 2019 CSC 58, par. 99-100.
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[137]
Voir notamment : Hellens c. Densmore, [1957] S.C.R. 768, p. 784 (motifs concurrents du juge Rand, non contredits par la majorité sur ce point) ; Broddy c. Alberta (Director of Vital Statistics), [1982] 142 D.L.R. (3d) 151, par. 26.
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[138]
Voir notamment : Ivan C. Rand, « Some Aspects of Canadian Constitutionalism », (1960) 38 R. du B. can. 135, p. 154 ; Francis R. Scott, Civil Liberties and Canadian Federalism, Toronto, University of Toronto Press, 1959, p. 16. Voir contra l’affaire Hak, préc., note 12, par. 521.