Abstracts
Résumé
Au regard du discours jurisprudentiel et doctrinal, il y a lieu de croire qu’une catégorie de l’obligation contractuelle émerge à l’heure actuelle : l’obligation essentielle. En effet, une littérature abondante, en France plus qu’au Québec, valorise cette notion en tentant de la définir. Il n’en demeure pas moins que, étant donné l’importance tant quantitative que qualitative des éléments qui distinguent les définitions doctrinales proposées, aucune d’elles ne saurait être reçue à titre autonome. Force est par ailleurs d’admettre que les nombreuses incertitudes et critiques de la notion rendent malaisée la tâche de saisir sa réelle signification. Dans l’article qui suit, après avoir présenté certaines définitions doctrinales et les principales incertitudes qui planent autour de la notion, l’auteure tentera de dégager son véritable sens par l’étude des utilités qui lui sont prêtées. Elle constatera alors que l’obligation essentielle a taillé sa place au sein de l’ensemble de plus en plus ample et recherché des restrictions à la liberté contractuelle.
Abstract
A review of recent jurisprudence and doctrine points to the emergence of a new category of contractual obligation : the essential obligation. An array of texts, more numerous in France than in Québec, highlights and attempts to define the notion. Nevertheless, because of the quantitative and qualitative importance of the elements that characterize each proposed doctrinal definition, none is truly satisfactory. We have no choice but to admit that the number of concerns and criticisms raised in connection with the notion make it difficult to circumscribe its actual meaning. In this article, after setting out some doctrinal definitions and the main uncertainties surrounding the notion, we will try to uncover its true meaning by reviewing the ways in which it is used. We will show that the essential obligation has earned a place in the increasingly broad and specialized set of restrictions on contractual freedom.
Resumen
Con respecto al discurso jurisprudencial y doctrinal, se cree que existe una categoría de la obligación contractual que emerge : la obligación esencial. En Francia (más que en Quebec) existe una literatura abundante que valoriza esta noción al tratar de definirla. No obstante, dada la importancia tanto cuantitativa como cualitativa de los elementos que distinguen las definiciones doctrinales propuestas, ninguna resulta satisfactoria. Sin embargo, hay que admitir que las numerosas incertidumbres y críticas de la noción han complicado la tarea de comprender su verdadero significado. En este artículo, después de haber presentado algunas definiciones doctrinales así como las principales incertidumbres que giran en torno a la noción, intentaremos hallar su verdadero significado a través del estudio de los valores que se le han atribuido. Entonces, constataremos que la obligación esencial ha logrado ocupar un lugar en el seno del conjunto cada vez más grande y buscado de las restricciones de la libertad contractual.
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Les catégories juridiques sont l’oeuvre constante du juriste[1]. Elles permettent de « discipliner le désordre[2] » et d’appréhender l’incertitude des faits, assurant au mieux la sécurité juridique[3]. Le civiliste, tout particulièrement, chérit la catégorisation[4]. L’obligation contractuelle ne faisant pas exception, elle est susceptible d’être catégorisée de nombreuses manières, et cela, loin de n’être que le fruit d’une analyse théorique, produira des effets concrets sur le contrat et sur les parties qui l’ont conclu. Par exemple, on dira de l’obligation qu’elle consiste « à faire ou à ne pas faire », ou encore qu’elle est « à modalité », laquelle sera simple ou complexe, et l’obligation pourra alors éventuellement être considérée comme conjointe, divisible ou indivisible. Au regard du discours jurisprudentiel[5] et doctrinal[6], il y a lieu de croire qu’une autre catégorie de l’obligation contractuelle émerge à l’heure actuelle : l’obligation essentielle.
Définir le concept d’obligation essentielle relève de la gageure. Nombreux sont les auteurs français qui se sont adonnés à cette tâche, et tant la quantité de la littérature que la qualité du dialogue doctrinal qui naît de la notion témoignent de l’évidente difficulté — voire de l’impossibilité — de la circonscrire[7]. Un auteur a dit qu’elle « découlait de la nature des choses » et qu’il y avait, dans chaque contrat, de par son économie propre, une obligation qui en constituait la pièce essentielle[8]. Toutefois, de tous les dictionnaires juridiques consultés[9], aucun ne définit la notion d’obligation essentielle. Nous n’aurons d’autre choix, donc, que de rester modeste, bien que rigoureuse, dans cette entreprise, et celle-ci se conclura peut-être après avoir soulevé plus de questions que de réponses.
Mentionnons d’ores et déjà que la conceptualisation de l’obligation essentielle est nécessairement liée à l’étude de ses fonctions, et cela s’explique par la polyvalence avérée de la notion d’obligation essentielle, alors que sa configuration dépend, semble-t-il, du rôle qui lui est attribué dans un contexte donné. Ainsi, le lecteur sera parfois appelé à une lecture interactive, où, encouragé à se laisser guider par les références aux autres sections de l’article, il participera concrètement à sa propre conception d’une définition efficiente, pondérée et, éventuellement, recevable de la notion étudiée. Nous commencerons l’analyse par une présentation de la notion (1). Nous étudierons ensuite les utilités concrètes qui lui sont prêtées dans le discours jurisprudentiel et doctrinal (2), et nous constaterons alors certainement l’intérêt, mais surtout la fécondité du concept. À terme viendra le passage du désir de comprendre la notion au choix scientifique de contribuer, un tant soit peu, au dialogue doctrinal qui tente d’offrir à la notion d’obligation essentielle une signification qui lui est propre.
1 La notion d’obligation essentielle
1.1 Les définitions doctrinales de la notion
Bien que l’occasion de mieux définir la notion d’obligation essentielle se présente chaque fois qu’elle est mise en avant, ses adeptes restent souvent expéditifs, si ce n’est muets, sur la définition qu’ils lui donnent. Heureusement, des auteurs français, qui ont davantage développé la notion, et quelques auteurs québécois, se sont certaines fois risqués à esquisser une définition autonome de l’obligation essentielle. Il nous paraît pertinent d’en présenter ici quelques-unes.
Soulignons d’abord que le concept d’obligation essentielle n’est pas sans rappeler la distinction que proposait Pothier entre les essentialia, les naturalia et les accidentalia. Il définissait les essentialia comme ceci : « Les choses qui sont de l’essence du contrat sont celles sans lesquelles ce contrat ne peut subsister, faute de l’une de ces choses, ou il n’y a pas du tout de contrat, ou c’est une autre espèce de contrat[10]. »
Pour Picard et Prudhomme, l’obligation essentielle était celle dont l’existence s’avérait nécessaire à la formation du contrat[11]. Ces auteurs mentionnaient en outre que les obligations essentielles au contrat avaient comme fonction de « jouer l’une vis-à-vis de l’autre le rôle d’équivalent juridique, de se faire contrepoids, bref de se servir mutuellement de cause. La notion de cause, voilà dans un contrat synallagmatique le critérium précis de l’obligation essentielle[12]. » Pour eux, donc, il semble que l’obligation essentielle ait été une ramification de la notion de cause, plutôt qu’une notion pleinement autonome.
Plus récemment, Nélia Cardoso-Roulot suggérait dans sa thèse que l’obligation essentielle compte trois caractères principaux : son caractère objectif[13], abstrait[14] et multiple[15]. À ses yeux, l’obligation essentielle est dictée par la nature du contrat (son caractère objectif). Elle s’apprécie, d’autre part, de manière isolée, c’est-à-dire « indépendamment du sujet ou de la personne concernée, ou encore des circonstances, ce qui lui assure une permanence et invariabilité[16] » (son caractère abstrait). Selon cette auteure, le même contrat pourrait renfermer plusieurs obligations essentielles (son caractère multiple). Elle suggère en définitive que l’obligation essentielle est « l’obligation indispensable à la fois à l’existence même dudit contrat, c’est-à-dire en dehors de laquelle il ne saurait y avoir de contrat, en d’autres termes à sa définition, et à sa qualification ou classification, c’est-à-dire en dehors de laquelle il serait un tout autre contrat[17] ».
Pour le professeur Philippe Jestaz qui emploie le vocable d’obligation fondamentale plutôt qu’essentielle[18], « c’est plutôt de la nature des choses que découle l’obligation fondamentale. Il y a dans chaque contrat, de par son économie propre, une obligation qui en constitue la pièce essentielle[19] ». À la différence des autres, cette définition suggère explicitement que chaque contrat comporte au moins une obligation essentielle. Quant aux sources de la qualification, cet auteur considère, contrairement à Nélia Cardoso-Roulot, que l’obligation peut être « fondamentale par nature[20] », mais aussi « fondamentale par la volonté des parties[21] ». Par ailleurs, les deux auteurs s’entendent sur le fait qu’une partie au contrat peut être créancier de plus d’une obligation essentielle[22].
De leur côté, les professeurs Jacques Flour, Jean-Luc Aubert et Éric Savaux parlent d’une « obligation qui commande la qualification de celui-ci [le contrat] ou qui en constitue le particularisme expressément voulu[23] ». Ici, tout comme Philippe Jestaz, mais contrairement à Nélia Cardoso-Roulot, les auteurs, implicitement, envisagent une double source à la qualification de l’obligation essentielle : « l’obligation qui commande la qualification du contrat » se rattache à une source objective, alors que « l’obligation qui en constitue le particularisme expressément voulu » se réfère plutôt à la volonté des parties, une source subjective.
Le professeur Christian Larroumet, pour sa part, mentionne que « certaines obligations font partie de l’essence même du contrat et lui donnent tout son sens. Il est évident qu’on ne saurait les supprimer sans atteindre la raison d’être du contrat[24]. » Cette définition rappelle sans aucun doute la notion de cause, tout comme celle qui a été proposée par Picard et Prudhomme. En effet, dans le sens qu’on lui connaît aujourd’hui, la cause fait référence à « la raison ou [au] motif qui a déterminé le contractant à adhérer à l’engagement contractuel et en justifie l’existence[25] ». Nous remarquons par ailleurs que Larroumet envisage lui aussi la possibilité d’une multitude d’obligations essentielles au sein d’un seul et même contrat, comme le font Nélia Cardoso-Roulot et Philippe Jestaz, mais différemment, nous le verrons dans les lignes qui suivent, du professeur Maurice Tancelin.
Au Québec, le professeur Paul-André Crépeau considérait que la clause essentielle[26] du contrat est celle qui « doit nécessairement s’y trouver[27] ». Pour sa part, le professeur Tancelin parle de l’obligation première du stipulant comme de « [l’]obligation qui transcende toutes les autres et tient à l’essence même du contrat[28] ». Selon lui, il ne semble pouvoir y avoir qu’une obligation essentielle au contrat, ou peut-être une pour chacune des parties contractantes. Quant au professeur Sébastien Grammond, il suggère que ce concept « d’ailleurs mentionné à l’article 1437, semble se référer aux obligations les plus caractéristiques du contrat en cause[29] », alors que, s’intéressant à la qualification des contrats, le professeur Pascal Fréchette considère qu’il s’agit de « l’obligation donnant tout son sens au contrat, sans laquelle la relation contractuelle ne présenterait plus d’intérêt suffisant pour les parties en cause[30] ».
À la lumière de ces commentaires, nous observons que les définitions suggérées par tous ces auteurs se conjuguent aisément à certaines reprises, mais se contredisent par ailleurs, notamment quant aux sources de la qualification de l’obligation essentielle, quant à son caractère unique ou multiple au sein du contrat[31] et quant au fait de savoir si c’est une notion autonome ou si elle constitue plutôt une expression de la notion de cause. Il est nécessaire, croyons-nous, d’être prudent et de nous satisfaire d’une définition abstraite de la notion, d’autant plus qu’il est à présent temps de sonder les incertitudes qui planent autour de celle-ci.
1.2 Les incertitudes et les critiques
S’il est vrai que les définitions doctrinales que nous venons d’étudier divergent à de multiples égards, cela atteste sans contredit qu’un nombre considérable d’incertitudes ou de questions demeurées sans réponse alimentent le dialogue doctrinal qui tente de définir la notion. Voyons maintenant certaines de ces incertitudes et les critiques de l’obligation essentielle, lesquelles ont toutes, nous le constaterons, le risque de l’arbitraire pour commun domicile.
1.2.1 Le caractère polysémique de l’obligation essentielle : concept ou locution ?
Tant en doctrine qu’en jurisprudence, de nombreuses expressions évoquent l’idée qu’il existe certaines obligations au contrat qui seraient hiérarchiquement supérieures aux autres. Ainsi, on peut aisément attribuer à l’obligation essentielle plusieurs synonymes potentiels, sinon des concepts voisins, lesquels sont souvent, semble-t-il, utilisés indistinctement[32]. Nous en avons répertorié quelques-uns : le noyau dur du contrat[33], le socle obligationnel[34], l’essence du contrat[35], l’obligation contractuelle minimale[36], la prestation principale du contrat[37], l’obligation principale[38], le coeur du contrat[39], l’obligation fondamentale[40], l’obligation élémentaire[41], la prestation essentielle au coeur de l’entente[42], la véritable considération[43], l’objet principal du contrat[44], la prestation caractéristique[45] avec, en aval, l’obligation accessoire[46], secondaire[47] ou annexe[48].
Cela étant, il est laborieux et parfois même impossible de savoir si l’« obligation essentielle » est entendue, dans tel ou tel autre contexte, comme ayant une signification qui lui est propre ou si elle l’est plutôt comme faisant référence à la cause — de l’obligation[49] ou du contrat[50] —, notion elle-même incertaine, fuyante et subtile[51], ou encore comme simple synonyme d’« obligation principale », s’opposant nécessairement, dans le dernier cas, aux obligations dites « accessoires » ou « secondaires » du contrat.
L’obligation pour le locataire d’un local dans un centre commercial d’exploiter les lieux loués est selon nous, un exemple qui peut très bien servir à illustrer la distinction éventuelle entre l’obligation principale et l’obligation essentielle du contrat. Dans le bail commercial, l’obligation principale pour le locataire consiste incontestablement dans le paiement du loyer[52]. Mais l’obligation d’exploiter les lieux loués, bien qu’elle ne soit finalement qu’accessoire (puisque l’obligation qui n’est pas principale est nécessairement accessoire), s’avère néanmoins essentielle, puisque, « [e]n vertu d’une convention de ce type, le preneur d’un établissement commercial ne peut cesser son exploitation, même s’il continue à payer le loyer, puisqu’une telle fermeture occasionne une perte substantielle d’achalandage et diminue la valeur locative de la chose[53] ». Nous pourrions en dire autant de l’obligation accessoire — et pourtant essentielle — du mandataire d’agir à l’avantage du mandant ou de la personne gérée. Comme le mentionnait d’ailleurs la Cour d’appel dans une décision récente, puisque cette dernière obligation est de l’essence des contrats de gestion et d’administration de la chose d’autrui, « [c]elui qui détourne la fonction [de gestionnaire ou de mandataire] à son avantage se trouve à vider le contrat d’une obligation fondamentale[54] ».
1.2.2 Les sources incertaines de la qualification
Se pose par ailleurs la question des sources de la qualification de l’obligation essentielle. Nous pouvons en effet nous demander si la qualification de l’obligation essentielle ne peut qu’avoir une source objective ou si elle peut aussi en avoir une qui serait subjective, c’est-à-dire qui découlerait de la volonté des parties. Attribuer une source nécessairement objective à la qualification permet certes une plus grande prévisibilité, puisque les obligations essentielles sont, dans ce contexte, déterminées par la nature même du contrat conclu[55] et sont ainsi statiques, prévisibles.
Qu’arrive-t-il néanmoins si la volonté des parties quant au caractère essentiel ou non d’une obligation à laquelle elles s’engagent ne se juxtapose pas parfaitement aux obligations essentielles qui découlent de la nature objective du contrat qu’elles concluent ? La réponse n’est pas abstraite. Elle dépendra nécessairement de l’utilité attribuée à la notion d’obligation essentielle dans l’analyse.
Par exemple, si la notion n’est mise en avant que pour qualifier le contrat en cause[56], la réponse va de soi : il s’agit simplement d’un autre type de contrat. Toutefois, si l’obligation essentielle est étudiée dans un contexte différent, notamment pour apprécier l’importance de l’inexécution contractuelle dans le but d’en déterminer la sanction[57], la réponse se situe dans une autre dimension et l’intérêt de reconnaître la qualification de source subjective prend alors toute son importance.
1.2.3 La qualification laborieuse dans les contrats composites
D’autre part, s’il peut être relativement aisé de déterminer l’obligation essentielle dans un contrat simple, et à plus forte raison encore si c’est un contrat nommé[58], certains auteurs[59] soulèvent la difficulté de distinguer l’obligation essentielle dans le contexte d’un contrat composite, considérant que l’opération de qualification risque alors rapidement de devenir aléatoire. Prenons l’exemple du contrat qui intervient entre un hôtel et son client. Dans cette convention, l’obligation d’héberger le client constitue une obligation éminemment essentielle, alors que celle de prendre soin de la voiture de ce dernier durant son séjour est certainement accessoire : et pourtant, cette dernière obligation s’inscrit bel et bien dans un contrat, le dépôt, au sein duquel elle est absolument essentielle[60]. Un auteur disait justement que le contrat « mixte » se compose de « plusieurs obligations essentielles dont aucune n’absorbe à elle seule l’utilité économique de la convention[61] ».
1.2.4 L’indivisibilité du contrat : le caractère illusoire de la distinction entre l’essentiel et l’accessoire
Dans un même ordre d’idées, et indépendamment cette fois du caractère composite du contrat, il peut être laborieux, et en définitive totalement illusoire, de distinguer l’obligation essentielle du contrat, puisqu’il est communément admis que celui-ci est un ensemble d’obligations interdépendantes qui ne prennent sens que les unes par rapport aux autres[62]. Dans cette perspective, n’est-il pas artificiel de qualifier une obligation d’accessoire, dans la mesure où son inexécution rendrait impossible l’exécution d’une obligation incontestablement essentielle ? Pensons à l’obligation d’individualiser le bien vendu. Cette obligation, au premier regard accessoire dans le contrat de vente, pourrait, étant donné la nature ou la dimension du bien vendu, être absolument nécessaire pour rendre possible la délivrance du bien à l’acheteur. Le caractère systémique du contrat, et donc dynamique des obligations au sein de celui-ci, ne le rend-il pas indivisible ?
D’autre part, lorsque l’obligation essentielle a été exécutée, mais qu’une obligation à première vue accessoire s’y avère indispensable[63], est-il exact d’affirmer que cette dernière est non essentielle ? À titre d’exemple, dans une affaire française, une partie avait acheté plusieurs ordinateurs afin de les faire fonctionner en réseau. Or, le vendeur refusait de délivrer le modem pour permettre la communication entre les ordinateurs. La Cour de cassation a alors décidé que la délivrance du modem, bien qu’elle soit accessoire dans le cas du contrat de vente d’ordinateurs, « faisait partie de l’ensemble vendu, dont il était indissociable, tant il [était] nécessaire pour assumer l’une des fonctions principales du système[64] ». L’obligation de délivrer le modem, au premier regard accessoire par rapport au contrat de vente, ne devient-elle pas, de ce fait, essentielle ?
Ces exemples annoncent l’embarras suivant, qui est relatif à la tardiveté de la détermination de l’obligation essentielle : alors que cette dernière est susceptible d’apparaître en cours de contrat, certains auteurs déplorent qu’elle ne soit pas toujours déterminable au seuil de l’engagement[65].
1.2.5 La détermination tardive
Le terme « essentiel » n’est qu’un qualificatif de l’obligation qui est, par définition, obligatoire dans tous les cas ; l’obligation n’est pas plus obligatoire du seul fait qu’elle est essentielle, ni d’ailleurs qu’elle ne l’est moins lorsqu’elle est non essentielle. Elle n’est donc, a priori, pas différente des autres quant à son caractère obligatoire, mais elle se révèle plus féconde a posteriori — c’est-à-dire advenant son inexécution — et sa réelle signification ne jaillit souvent qu’au moment de la mise en oeuvre de la notion[66].
Ainsi, lorsque le concept d’obligation essentielle est mis en avant dans le contexte d’une inexécution contractuelle, bien que l’examen objectif d’abord du type et de la nature du contrat, ensuite des obligations qui y sont prévues, et finalement de la volonté des parties puisse certes se faire en amont, cet examen s’accompagnera presque inévitablement d’une appréciation concrète, en aval, du comportement du débiteur de l’obligation violée ainsi que du préjudice que celui-ci cause au créancier. Cela suppose que le caractère essentiel ou non de l’obligation en cause ne sera finalement déterminé qu’après coup[67]. Voilà qui nous mène à penser que, reprenant les propos d’un auteur, « [l]a qualification, qui permet d’identifier l’obligation essentielle, est un exercice à la fois dogmatique et casuistique qui laisse peu de place à la nature des choses. Une qualification se construit en fonction des effets juridiques jugés souhaitables[68]. »
Ce constat permet d’avancer que la notion d’obligation essentielle ne serait peut-être finalement qu’un outil permettant, en désespoir de cause, de conforter la légitimité de la solution juridique retenue.
1.2.6 Un simple instrument technique ?
Peut-être exagérément malléables, donc, la forme et la texture de la notion d’obligation essentielle pourraient en définitive n’être tributaires que de l’utilité qu’on lui prête ; la cerner en tant que concept juridique devient dès lors une sorte de fantaisie. L’obligation essentielle, dans cet esprit, se réduit à un simple instrument technique, sans véritable sens ni fondement propre, et est « appliquée de manière très ponctuelle, un peu comme la solution de la dernière chance laquelle s’impose comme une évidence avec toutefois un certain embarras lorsqu’il s’agit de préciser son fondement juridique[69] ».
Il va sans dire que nous pourrions aisément formuler ou répertorier de nombreuses autres incertitudes quant à la véritable signification de l’obligation essentielle, outre celles que nous avons présentées plus haut et que nous rappelons ici en rafale : le caractère polysémique de l’expression, les sources incertaines de la qualification tout autant que la difficulté qu’implique la qualification de l’obligation essentielle dans les contrats composites, l’indivisibilité du contrat, la détermination tardive de l’obligation essentielle et, finalement, le caractère éminemment instrumental de cette notion.
Certains auteurs vont même jusqu’à prohiber hardiment le recours à l’obligation essentielle, tant elle paraît insaisissable et illusoire[70]. D’ailleurs, au regard de ses applications, on peut avancer que cette notion pourrait éventuellement dans une majorité de cas — et devrait alors[71] — être absorbée par d’autres. Par exemple, en ce qui concerne sa mise en oeuvre dans l’appréciation de l’applicabilité d’une clause d’exonération de responsabilité[72], on peut penser au concept de clause abusive[73], d’absence de cause[74] ou d’économie du contrat[75], ou encore à la théorie des attentes légitimes[76].
À présent que nous avons jeté un regard tant sur la littérature qui valorise la notion d’obligation essentielle en tentant de la définir que sur les incertitudes qui la caractérisent, nous en sommes à nous demander si cette catégorie émergente de l’obligation contractuelle possède une signification qui lui est propre, laquelle serait assise sur ses fonctions distinctives. Voyons à présent les utilités que l’on prête à l’obligation essentielle dans le discours doctrinal et jurisprudentiel.
2 Les fonctions de l’obligation essentielle
2.1 La fonction objective : éclairer le sens de la convention
En premier lieu, la notion d’obligation essentielle est parfois intégrée dans un procédé principalement inductif — du moins en principe[77] —, alors que, dans le but d’éclairer le sens de la convention lors de sa conception, l’obligation essentielle est appréhendée de façon objective, quasi mécanique. La notion sert d’abord à qualifier le contrat conclu (2.1.1), puis on l’utilise afin d’en remettre en question la nature pour interpréter la volonté des parties qui ont contracté (2.1.2) ou pour déterminer les obligations implicites auxquelles ces dernières sont tenues (2.1.3).
2.1.1 La notion utilisée à des fins de qualification du contrat
La notion est d’abord utilisée à des fins de qualification du contrat[78], et cela tombe sous le sens, puisqu’il y a lieu de croire que le législateur établit lui-même ce qu’il entend caractériser d’obligations essentielles dans le contexte des dispositions relatives aux contrats nommés. Mentionnons cependant qu’il faut éviter de confondre les idées d’élément caractéristique et d’obligation essentielle du contrat. Pensons, par exemple, au lien de subordination qui caractérise le contrat de travail dans le Code civil du Québec (art. 2085) et qui le distingue, par exemple, du contrat de service (art. 2098). L’élément de subordination sera déterminant dans la qualification du contrat, mais il n’a absolument rien à voir avec la notion d’obligation essentielle que nous tentons de définir, pour la simple et bonne raison qu’il ne s’agit pas, dans son sens purement technique du moins, d’une obligation[79]. Il arrivera toutefois qu’un élément caractéristique du contrat corresponde à une obligation essentielle.
Par exemple, au regard de l’article 1851 C.c.Q. qui définit le contrat de louage, on peut penser qu’une obligation essentielle pour le locateur s’inscrit dans le fait de fournir la jouissance d’un bien. De la même façon, par rapport à l’article 1708 C.c.Q. qui définit le contrat de vente, on peut aisément concevoir qu’une obligation essentielle pour le vendeur consiste dans le transfert de la propriété du bien vendu. Pour qualifier le contrat, le juge doit donc « déterminer, tantôt le but qui a présidé à la convention, tantôt — en fait, le plus souvent — la prestation essentielle au coeur de l’entente[80] ».
De cette manière, il a été décidé que la convention par laquelle un citoyen s’engage simplement à fournir de l’électricité à son voisin, sans que cet engagement implique de travail de sa part, ne saurait correspondre à un contrat de service. Il s’agit plutôt alors d’un contrat de vente, puisque « [l]a véritable considération du contrat est de mettre de l’énergie à la disposition d’une autre personne pour en retirer un paiement[81] ». Par ailleurs, dans l’affaire Côté c. Sécurité nationale (La), les juges devaient déterminer si les parties avaient ou non conclu un contrat de prêt à usage. Afin de vérifier si les faits juridiques en cause se juxtaposaient aux obligations essentielles de ce type de contrat, ils ont suggéré ceci : « La garde des lieux constitue l’une des obligations essentielles de l’emprunteur, selon l’article 1766 C.c.B.-C.[82]. »
2.1.2 La notion utilisée dans le contexte de l’interprétation du contrat
L’article 1426 C.c.Q. prévoit ce qui suit : « On tient compte, dans l’interprétation du contrat, de sa nature, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l’interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu’il peut avoir reçue, ainsi que des usages. » Or, certains considèrent que la notion de nature du contrat, employée à des fins d’interprétation, se rapproche sérieusement de celle d’obligation essentielle ou fondamentale : « s’il est possible d’affirmer que la nature du contrat de franchise implique pour le franchiseur une obligation d’assistance technique et commerciale, il est tout autant possible de soutenir que “l’une des obligations fondamentales du franchiseur à l’endroit du franchisé est celle d’assistance technique et commerciale”[83] ».
De la même manière, la Cour d’appel a eu à décider si l’interprétation d’un contrat de courtage exclusif empêchait, par sa nature, le vendeur de l’immeuble de conserver la faculté de vendre lui-même ledit immeuble. La Cour d’appel conclua que non : « l’exclusivité du contrat de courtage immobilier se caractérise par la retenue des services d’un intermédiaire exclusif. L’engagement pris par le vendeur de ne pas offrir ou vendre lui-même l’immeuble constitue un élément accessoire à ce type de contrat et non déterminant[84]. »
2.1.3 La notion utilisée pour déterminer le contenu implicite du contrat
La nature du contrat revient de nouveau à l’article 1434 C.c.Q. qui prévoit que les parties s’engagent non seulement pour ce qui est exprimé au contrat, mais également pour les obligations qui découlent de celui-ci « d’après sa nature et suivant les usages, l’équité et la loi[85] ». Le caractère essentiel d’une obligation dans le contrat peut ainsi servir à l’y inclure en tant que contenu implicite[86].
C’est de cette façon que la Cour d’appel considère que, dans le contrat de bail commercial intervenu avec l’exploitant d’un hôtel situé en bordure d’un aéroport, l’une des « considérations principales[87] » du bail était un achalandage suffisant pour garantir un profit raisonnable au locataire : « On ne peut, sans friser la pure argutie, sérieusement soutenir que quelqu’un accepterait d’exploiter un hôtel dans une zone inhabitée tout en pensant que, du jour au lendemain, son locateur peut impunément concentrer […] les vols sur lesquels il compte pour rentabiliser son entreprise[88]. » Ainsi, puisqu’il s’agissait d’une considération principale du bail, et donc que la décision de la défenderesse de rapatrier les vols nolisés à un autre aéroport « vide pratiquement le contrat de sa substance[89] », la Cour d’appel a décidé que le maintien des vols commerciaux courants à l’aéroport en constituait une obligation implicite. Dans le même sens, la Cour supérieure a considéré qu’une obligation implicite, pour le locataire, d’exploiter le local loué dans un centre commercial pouvait se dégager des diverses clauses du bail ainsi que des dispositions explicites du Code civil[90].
Dans l’affaire Union canadienne (L’), compagnie d’assurances c. Mini- entrepôt Longueuil inc., la juge considère également que découle de la nature et des usages du contrat d’entreposage l’obligation essentielle pour l’entreposeur de s’assurer que les biens de ses clients ne seront pas détruits[91]. De même, dans l’affaire Syndicat des employées et employés professionnels et de bureau, le juge mentionne qu’une norme d’assiduité doit être tenue pour implicite à toute relation de travail[92] et, pour appuyer ses propos, il reprend ceux du juge Hilton : « Il tombe sous le sens qu’il ne peut y avoir exécution adéquate et efficace du travail sans une prestation régulière et raisonnable de travail […] la prestation de travail constitue l’une des obligations essentielles du contrat de travail, pour laquelle l’employé reçoit sa rémunération[93]. »
2.2 La fonction subjective : assurer le sens de la convention
Il arrive en second lieu que ce soit en aval, au temps de l’exécution du contrat, que la notion d’obligation essentielle soit appréhendée. Le juge lui octroie alors un rôle manifestement effectif, alors que, suivant à présent un procédé casuistique, elle est utilisée pour orienter les aboutissements du contrat dans une certaine direction, voire introduire une forme d’équité dans le rapport contractuel. De cette manière, l’obligation essentielle servira dans le choix de la sanction appropriée à une inexécution contractuelle (2.2.1), autrement en vue de déterminer le caractère abusif d’une clause du contrat (2.2.2), et sinon dans le but d’apprécier la gravité de la faute commise (2.2.3). Ainsi, le recours à la notion permet non plus seulement d’éclairer le sens de la convention, mais celle-ci sert dorénavant à assurer, et même parfois à provoquer, le sens à lui donner au moment de son exécution.
2.2.1 La notion utilisée pour déterminer la sanction applicable à une inexécution contractuelle
D’abord entendue comme se confondant parfaitement dans l’obligation principale du contrat, l’obligation essentielle se distingue de l’obligation accessoire lorsqu’il est question de décider de la sanction d’une inexécution contractuelle. À cet égard, l’article 1604 al. 2 C.c.Q. prévoit que le créancier n’a pas droit à la résolution ou à la résiliation du contrat lorsque le défaut du débiteur est de peu d’importance. On considère donc généralement que l’inexécution d’une obligation accessoire ne peut entraîner la résolution du contrat, ou sa résiliation dans le cas du contrat à exécution successive[94]. Il y a lieu de penser que la rédaction du deuxième alinéa de l’article 1604 C.c.Q. — qui amène un élément nouveau par rapport à l’ancien article 1065 du Code civil du Bas Canada — s’inspire de l’affaire Rouleau c. Power, dans laquelle le juge Rivard mentionnait ceci : « Quand l’une des parties ne fournit pas à l’autre l’équivalent de son engagement principal, par exemple le prix de la chose vendue, la résolution peut être prononcée ; mais “quant à la violation d’un engagement accessoire, elle n’est pas un motif de résolution, elle est seulement une cause de dommages-intérêts”[95]. » La résolution implique donc une inexécution substantielle, et l’appréciation par le juge du caractère substantiel de l’inexécution se fait à la lumière du contexte, en tenant compte, notamment, de l’importance qualitative du manquement[96].
Dans le même sens — et bien qu’il ne s’agisse pas d’une sanction de l’inexécution à proprement parler — pour ce qui est de l’exception d’inexécution prévue par l’article 1591 C.c.Q., on reconnaît que le créancier qui l’invoque ne peut utiliser le prétexte de l’inexécution d’une obligation secondaire ou accessoire pour refuser d’exécuter son obligation principale[97]. Par exemple, dans l’affaire Midas Canada ltée c. Commission scolaire Jérôme Le Royer, les juges refusent d’appliquer l’exception d’inexécution puisqu’ils considèrent que « [l]’inexécution d’une obligation accessoire […] ne donne pas ouverture à l’exception d’inexécution, surtout lorsque le cocontractant a explicitement renoncé à l’exécution de cette obligation accessoire[98] ».
Cela dit, la signification propre de l’obligation essentielle — entendue autrement que comme correspondant parfaitement à l’obligation principale du contrat — peut ici être attestée. Reprenons en exemple l’affaire Aéroports de Montréal c. Hôtel de l’aéroport de Mirabel inc. Dans cette décision, l’obligation implicite pour la défenderesse de fournir l’achalandage suffisant pour garantir un profit raisonnable au locataire se distingue de l’obligation principale du contrat de louage, laquelle consiste à fournir la jouissance de l’immeuble[99]. L’inexécution de cette obligation implicite et accessoire au bail a néanmoins entraîné la résiliation du contrat, et non simplement l’octroi de dommages, étant donné que celle-ci constituait « une considération principale de l’engagement du locataire[100] » et que la décision de la défenderesse de rapatrier les vols nolisés à un autre aéroport « vide pratiquement le contrat de sa substance[101] ».
Dans une autre affaire[102], une injonction — qui, faut-il le rappeler, constitue un remède draconien à caractère exceptionnel pour l’exécution en nature de l’obligation[103] — a été accordée à une locataire afin de forcer son locateur à continuer de fournir les services de restauration et de bar à eaux pour les clients de celle-ci, comme le prévoyait le contrat de louage commercial qui les liait. La locataire louait un terrain du locateur dans le but d’y construire un spa luxueux adjacent à l’établissement hôtelier de ce dernier. Une fois encore, cette obligation dont l’exécution par le locateur s’est vue forcée, tant elle était essentielle pour la locataire, ne correspond nullement à l’obligation principale du bail commercial en cause, laquelle réside, soulignons-le, dans le fait de fournir la jouissance de l’immeuble.
2.2.2 La notion utilisée pour déclarer une clause abusive
Le législateur prévoit que la clause abusive est notamment celle qui est « si éloignée des obligations essentielles qui découlent des règles gouvernant habituellement le contrat qu’elle dénature celui-ci[104] ». Ainsi, dans certains cas, les magistrats se fondent sur la dérogation aux obligations essentielles du contrat pour déclarer une clause abusive et ainsi refuser son application[105]. À titre d’exemple, dans l’affaire Bélanger c. S.S.Q., société d’assurance-vie inc.[106], le juge a considéré comme abusive une clause d’un contrat d’assurance qui exigeait qu’un traitement dentaire soit terminé dans des délais absolument impossibles à respecter étant donné les circonstances[107], puisque reconnaître sa validité aurait eu l’effet concret, en amont, de réduire à néant l’obligation essentielle de l’assureur (soit celle de fournir une assurance pour les soins dentaires nécessités par l’état de santé de l’assuré) et, en aval, de priver l’assuré des bénéfices de l’assurance à laquelle il avait souscrit.
En outre, en ce qui concerne précisément les clauses d’exonération de responsabilité, de plus en plus nombreux sont ceux qui estiment que celles-ci devraient être rendues inopérantes lorsqu’elles ont l’effet de « paralyser l’obligation essentielle, le coeur même du contrat[108] ». Bien que cette tendance ne s’appuie pas toujours directement sur l’article 1437 C.c.Q. concernant les clauses abusives dans les contrats d’adhésion et de consommation[109], il y a néanmoins lieu de croire que c’est dans cet esprit qu’elle s’inscrit[110]. D’autre part, on le remarquera, elle connaît d’importantes similitudes avec la fundamental breach of contract[111], règle prétorienne de common law, tout autant qu’avec la position adoptée par la jurisprudence française dans l’affaire Chronopost[112].
Ainsi, dans l’affaire Gestions Solvic ltée c. Amusements Daniel inc., relativement à une clause d’exonération de responsabilité contenue dans un bail commercial, le juge Crête a conclu ceci :
De l’avis du tribunal, Solvic ne peut s’exonérer de son obligation essentielle à titre de locateur, soit celle de fournir la jouissance paisible des lieux loués à son locataire, en s’appuyant sur les clauses […] de son bail type. Ces deux clauses, interprétées comme le voudrait bien Solvic, constitueraient à la limite une négation même du contenu essentiel du contrat de bail qu’elle a signé […], à savoir, fournir le local contre le paiement d’un loyer et de garantir le locataire contre l’éviction et les vices cachés[113].
De plus, on peut observer un cas où la notion d’obligation essentielle a justifié la non-application d’une clause d’exonération de responsabilité, alors que l’obligation en cause se distinguait clairement de l’obligation principale du contrat. Dans l’affaire Samen Investments Inc. c. Monit Management Ltd.[114], la Cour d’appel devait déterminer si les défenderesses, dans le cadre d’un contrat de gestion d’immeubles commerciaux, avaient illégalement facturé aux demanderesses — les propriétaires desdits immeubles — des frais de gestion que les contrats qui unissaient les parties n’autorisaient pas. À leur défense, les gestionnaires soutenaient l’application de la clause d’exonération contre toute responsabilité. Or, dans ce contexte, la Cour d’appel a mentionné ce qui suit : « Il est de l’essence des contrats de gestion et d’administration de la chose d’autrui que le mandataire ou le gérant agisse à l’avantage du mandant ou de la personne gérée. Celui qui détourne la fonction [de gestionnaire ou de mandataire] à son avantage se trouve à vider le contrat d’une obligation fondamentale[115] » et a refusé d’appliquer la clause d’exonération de responsabilité. Ici, l’obligation d’agir à l’avantage du mandant ne correspond pas à l’obligation principale de ce type de contrat, qui réside simplement dans la représentation du mandant dans l’accomplissement d’un acte juridique avec un tiers[116], mais son inexécution justifie néanmoins la non-application d’une clause d’exonération de responsabilité, puisque l’appliquer aurait l’effet concret de vider le contrat d’une obligation essentielle.
2.2.3 La notion utilisée pour apprécier la gravité de la faute
En outre, le concept d’obligation essentielle a une incidence concrète lorsqu’il est question de qualifier la faute commise dans le contexte de l’exécution du contrat. Cette utilisation de la notion est critiquable et d’ailleurs vertement critiquée[117] et elle est souvent mise en avant pour déterminer, elle aussi, l’applicabilité d’une clause de limitation ou d’exonération de responsabilité. Cela s’explique facilement du fait que la constatation d’une faute lourde constitue une limite législative explicite à la possibilité d’invoquer une clause d’exonération de responsabilité (art. 1474 C.c.Q.). De plus, conformément à l’article 1613 C.c.Q., si le juge constate que c’est en raison d’une faute lourde que l’obligation contractuelle a été inexécutée, le débiteur pourra être tenu au-delà des dommages-intérêts qui ont été prévus ou que l’on a pu prévoir au moment où l’obligation a été contractée.
Dans cette perspective, la qualification de la faute par le juge dépend essentiellement de l’importance, au sein du contrat, de l’obligation qui fait l’objet de l’inexécution contractuelle. De cette façon, donc, plus l’obligation se trouvera au coeur du contrat (c’est-à-dire plus elle sera essentielle), plus son inexécution aura tendance à être considérée par le juge comme relevant de la faute lourde. S’éloignant de la méthode classique d’appréciation de la faute[118], cette qualification s’opérera avec relativement moins d’égard pour l’importance de l’écart entre le comportement du débiteur de l’obligation inexécutée de celui du débiteur normalement prudent et diligent.
À titre d’exemple, dans l’affaire Monit Management Ltd. c. Samen Investments Inc.[119], directement après avoir nommément déterminé que l’obligation inexécutée (qui était celle d’entretien et de préservation de l’immeuble) constituait l’une des obligations essentielles du contrat de gestion en cause, le juge considère qu’il y a lieu de conclure à la faute lourde du gestionnaire[120]. Aussi, en matière de contrats de service conclus avec des centrales de sécurité et où l’obligation essentielle consiste, pour ces dernières, à communiquer avec la partie cocontractante ou les premiers répondants en cas d’incident dans l’immeuble surveillé, l’inexécution de cette obligation a été considérée, à plus d’une reprise, comme relevant de la faute lourde[121].
Conclusion
Le concept d’obligation essentielle s’avère sans contredit très subtil. Nous avons vu, d’abord, qu’une littérature abondante, en France plus qu’au Québec, valorise l’obligation essentielle en essayant, autant que faire se peut, de définir la notion. Il n’en demeure pas moins que, étant donné l’importance tant quantitative que qualitative des éléments qui distinguent chacune des définitions proposées, aucune d’elles ne saurait être reçue à titre autonome. Au demeurant, force est d’admettre que les nombreuses critiques ou difficultés de conceptualisation de l’obligation essentielle présentées rendent malaisée la tâche de saisir sa réelle signification. Nous constatons à tout le moins que ses fonctions concrètes dans le discours jurisprudentiel et doctrinal s’articulent à partir de deux objectifs clairs.
En premier lieu, le concept d’obligation essentielle est mis en avant pour dégager le sens de la convention lors de sa conception. Le regard sera alors posé sur l’obligation essentielle de façon plus mécanique, théoriquement moins casuistique, pour, notamment, qualifier le contrat conclu[122]. De la même manière, elle servira en outre à étudier la nature du contrat dans le but de dégager, dans un exercice d’interprétation du contrat, la commune intention des parties[123], sinon les engagements implicites auxquels elles sont tenues[124].
En second lieu, le concept d’obligation essentielle est interpellé de façon plus audacieuse, en vue d’assurer le sens de la convention au moment de l’exécution du contrat. L’appel à la notion ne s’inscrit plus dès lors dans un mécanisme simplement inductif, mais dans un procédé intentionné, directif, où le juge intervient activement au contrat afin de l’orienter vers des débouchés estimés plus souhaitables, c’est-à-dire généralement plus équitables pour les parties qui l’ont conclu. C’est ainsi que la notion d’obligation essentielle permettra au juge d’opter pour une sanction plus sévère dans le cas de l’inexécution contractuelle[125], sinon d’invalider une clause au motif qu’elle est abusive[126], ou encore d’accorder des dommages-intérêts au-delà de ceux qui ont été prévus ou encore de ceux que l’on a pu prévoir au moment où l’obligation a été contractée[127]. Le concept d’obligation essentielle a, pour ainsi dire, taillé sa place au sein de l’ensemble de plus en plus ample et recherché des restrictions à la liberté contractuelle, lequel ensemble témoigne de la matérialisation de la nouvelle « moralité contractuelle ».
Au-delà de ses fonctions, nous sommes maintenant à même de percevoir que, s’il est vrai que la notion d’obligation essentielle est utilisée, dans le discours jurisprudentiel et doctrinal, sans distinction soit de l’obligation principale, soit encore de la cause du contrat ou de l’obligation[128], cela s’explique parfaitement du fait qu’elle y est liée de si près, qu’elle s’y fond la plupart du temps dans la réalité. Une notion camouflée donc, subtile, disions-nous plus haut, mais qui apparaît certaines fois de façon saillante. Repensons, entre autres, à l’obligation pour le locataire d’un local dans un centre commercial d’exploiter les lieux loués[129], qui ne correspond ni à l’obligation principale du locataire ni à la cause de l’obligation. Rappelons de la même façon l’obligation d’agir à l’avantage du mandant[130] ainsi que l’obligation d’assistance technique et commerciale dans le contrat de franchise[131], en plus de celle pour la centrale de sécurité de réagir en contactant les premiers répondants en cas d’incident dans l’immeuble pour la surveillance duquel elle a été engagée[132], ou encore celle pour l’entreposeur de s’assurer que les biens entreposés ne seront pas détruits[133]. Dans tous ces cas, il ne s’agit ni de l’obligation principale du contrat ni tout à fait de la cause. C’est là qu’apparaît, selon nous, le véritable sens de l’obligation essentielle.
Au terme de ces différents constats, si, comme plusieurs l’ont fait avant nous, nous tentons à notre tour et à notre manière de donner une signification qui est propre à l’obligation essentielle, elle serait alors l’annexe qui s’attache tantôt à l’obligation principale, tantôt à la cause, et sans laquelle la substance du contrat souffre d’une insuffisance au point de faire perdre à celui-ci l’intérêt nécessaire pour l’une ou l’autre des parties contractantes.
Appendices
Remerciements
Nous tenons à adresser nos sincères remerciements à la professeure Marie Annik Grégoire, notre directrice de mémoire, qui a lu et judicieusement commenté une version initiale du présent article. Merci également au professeur Benoît Moore pour ses relectures attentives et sa générosité habituelle. Nos remerciements vont par ailleurs aux évaluateurs de l’article, ainsi qu’à Hélène Dumais pour son travail précieux et fort apprécié. Merci finalement à Clara et à Jérémie pour l’intérêt amical dont ils ont fait preuve par leur lecture attentionnée. Les propos exprimés dans cet article n’engagent cependant que l’auteure.
Note biographique
Charlotte Deslauriers-Goulet
Avocate, étudiante à la maîtrise et chargée de cours, Faculté de droit, Université de Montréal.
Notes
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[1]
Charles Eisenmann, « Quelques problèmes de méthodologie des définitions et des classifications en science juridique », (1966) 11 Ar. philo. dr. 25, 31 et 32.
-
[2]
Jean-Louis Bergel, Théorie générale du droit, Paris, Dalloz, 2012, no 180, p. 238.
-
[3]
Selon Thomas Piazzon, La sécurité juridique, Paris, Defrénois, 2009, no 48, p. 62, la sécurité juridique se définit comme : « l’idéal de fiabilité d’un droit accessible et compréhensible qui permet aux sujets de droit de prévoir raisonnablement les conséquences juridiques de leurs actes ou comportements, et qui respecte les prévisions légitimes déjà bâties par les sujets de droit dont il favorise la réalisation ».
-
[4]
Nous entendons ici le terme « catégorisation » au sens courant, ce qui peut éventuellement inclure les exercices de classification et de qualification juridique. Voir : Michelle Cumyn, « Les catégories, la classification et la qualification juridiques : réflexions sur la systématicité du droit », (2011) 52 C. de D. 351 ; Michelle Cumyn, « La classification des catégories juridiques en droit comparé – métaphores taxonomiques », (2008) 110 R. du N. 1.
-
[5]
Au total, 624 décisions apparaissent comme résultats d’une recherche dans la catégorie Jurisprudence avec l’expression « obligation essentielle » dans Azimut, en date du 22 juillet 2014.
-
[6]
Nous avons obtenu 36 résultats dans la catégorie Doctrine québécoise dans la banque de données LexisNexis et 74 résultats dans la catégorie Doctrine dans la banque de données La référence, en date du 22 juillet 2014.
-
[7]
Voir notamment : Philippe Jestaz, « L’obligation et la sanction. À la recherche de l’obligation fondamentale », dans Mélanges offerts à Pierre Raynaud, Paris, Dalloz, 1985, p. 273 ; Nélia Cardoso-Roulot, Les obligations essentielles en droit privé des contrats, Paris, L’Harmattan, 2008 ; Ruth Sefton-Green, La notion d’obligation fondamentale : comparaison franco-anglaise, Paris, L.G.D.J., 2000 ; Judith Rochfeld, Cause et type de contrat, Paris, L.G.D.J., 1999 ; Marie-Élodie Ancel, La prestation caractéristique du contrat, Paris, Economica, 2002 ; Xavier Thunis, « Une notion fuyante : l’obligation essentielle du contrat », dans Mélanges offerts à Marcel Fontaine, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 521 ; Marie-Pierre Baudin-Maurin, « Pour une approche empirique de la notion d’obligation essentielle du contrat. (À partir de l’exemple du contrat Chronopost) », R.R.J. 2002.4.1859 ; Robert Joseph Pothier, Traité des obligations, Paris, Masson, 1883, no 6, p. 5 ; Alima Sanogo, L’obligation essentielle dans le contrat, mémoire de maîtrise, master II, Dijon, Université de Bourgogne, 2005 ; Christian Lavabre, « Éléments essentiels et obligation fondamentale du contrat », R.J.D.A. 1997.4.291.
-
[8]
P. Jestaz, préc., note 7, à la page 279.
-
[9]
Centre de recherche en droit privé et comparé du Québec, Dictionnaire de droit privé et lexiques bilingues. Les obligations, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2003 ; Hubert Reid, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 4e éd., Montréal, Éditions Wilson & Lafleur, 2010 ; Catherine Puigelier, Dictionnaire de droit privé, Paris, Centre de publications universitaires, 1999 ; Jean-Pierre Scarano, Dictionnaire de droit des obligations, 2e éd., Paris, Ellipses, 2004 ; Pierre Lerat et J.-L. Sourioux, Dictionnaire juridique. Terminologie du contrat, Paris, Conseil international de la langue française, 1994 ; Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, 10e éd., Paris, Presses universitaires de France, 2014 ; Serge Guinchard et Thierry Debard, Lexique des termes juridiques 2012, 19e éd., Paris, Dalloz, 2012.
-
[10]
R.J. Pothier, préc., note 7, no 6, p. 5.
-
[11]
Maurice Picard et André Prudhomme, « De la résolution judiciaire pour inexécution des obligations », R.T.D. civ. 1912.66.
-
[12]
Id. Pour une présentation de cette conception plus concrète de la notion de cause en droit français (on parle alors souvent de la « cause contrepartie »), voir Jacques Ghestin, La formation du contrat, 4e éd., t. 2 « L’objet et la cause, les nullités », Paris, L.G.D.J., 2013, p. 399.
-
[13]
N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 33.
-
[14]
Id., p. 35.
-
[15]
Id., p. 36.
-
[16]
Id., p. 35.
-
[17]
N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 34.
-
[18]
Nous reviendrons sur l’aspect polysémique de l’obligation essentielle dans la section 1.2.1. Mentionnons pour l’instant que si différentes expressions se trouvent dans le discours doctrinal pour traiter de l’obligation essentielle, il y a néanmoins lieu de croire que ces expressions sont employées indistinctement.
-
[19]
P. Jestaz, préc., note 7, p. 279, poursuit : « Ainsi, dans le bail, celle de mettre le local à disposition ; et par contrecoup ou contrepartie, celle pour le locataire de payer le loyer (car en son absence le bail devient un prêt de logement). »
-
[20]
Id., p. 279.
-
[21]
Id., p. 289.
-
[22]
Id., p. 279 ; N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 36.
-
[23]
Jacques Flour, Jean-Luc Aubert et Éric Savaux, Les obligations, 7e éd., vol. 3 « Le rapport d’obligation », Paris, Dalloz, 2011, no 227, p. 210.
-
[24]
Christian Larroumet (dir.), Droit civil, 6e éd., t. 3 « Les obligations. Le contrat », vol. 2, Paris, Economica, 2007, no 635.
-
[25]
Jean-Louis Baudouin et Pierre-Gabriel Jobin, Les obligations, 7e éd., par P.-G. Jobin et Nathalie Vézina, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2013, no 356, p. 442. Pour une étude poussée de la notion de cause en droit français, voir : Jacques Ghestin, Cause de l’engagement et validité du contrat, Paris, L.G.D.J., 2006.
-
[26]
Cet auteur, dans son texte portant sur le contenu implicite du contrat, emploie l’expression « clause essentielle » plutôt qu’« obligation essentielle », mais il y a lieu, à nos fins, de les entendre de la même façon. Paul-André Crépeau, « Le contenu obligationnel d’un contrat », (1965) 43 R. du B. can. 1, p. 24, mentionne ceci à titre d’exemple :
Le contrat de soins médicaux comporte, à la charge du médecin, un devoir de sécurité à l’égard de son malade. […] Rien n’est dès lors plus raisonnable que le médecin assume, en dehors même de toute stipulation expresse, en raison de la nature même du lien, l’obligation contractuelle de veiller à la sécurité du malade en lui fournissant des soins, non pas quelconques, mais bien […] des « soins consciencieux, attentifs et, réserve faite des circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ».
-
[27]
Id.
-
[28]
Maurice Tancelin, Des obligations en droit mixte du Québec, 7e éd., Montréal, Éditions Wilson & Lafleur, 2009, no 1107, p. 793-795.
-
[29]
Sébastien Grammond, « La règle sur les clauses abusives sous l’éclairage du droit comparé », (2010) 51 C. de D. 83, 108.
-
[30]
Pascal Fréchette, « La qualification des contrats : aspects pratiques », (2010) 51 C. de D. 375, 377.
-
[31]
Il est même légitime de se demander si chaque contrat comporte systématiquement au moins une obligation essentielle.
-
[32]
Voir les précisions terminologiques proposées par N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 25 et suiv.
-
[33]
X. Thunis, préc., note 7.
-
[34]
Denis Mazeaud, « Clauses limitatives de réparation : les quatre saisons », D. 2008.1776, no 5.
-
[35]
François Terré, Philippe Simler et Yves Lequette, Droit civil. Les obligations, 11e éd., Paris, Dalloz, 2013, no 610, p. 660, considèrent que l’expression « essence du contrat » est synonyme d’« obligation essentielle » et d’« obligation fondamentale » ; C. Larroumet, préc., note 24.
-
[36]
Pierre-Gabriel Jobin, « La réforme du droit des obligations. Prospective générale », (1989) 30 C. de D. 557, 574.
-
[37]
Frédéric Lévesque, Précis de droit québécois des obligations, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014, no 494, p. 257.
-
[38]
Ferme Franky 2004 inc. c. 9059-4094 Québec inc. (Alarmes Pierre Fortier), 2012 QCCS 4738, par. 24 et 25 ; 2014 QCCA 848.
-
[39]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 871, p. 1076.
-
[40]
P. Jestaz, préc., note 7 ; R. Sefton-Green, préc., note 7.
-
[41]
9101-5388 Québec inc. (Valade.net) c. Martel Desjardins, s.e.n.c., 2007 QCCS 3213, par. 90 ; Claude Ferron, « Les clauses de non-responsabilité en responsabilité civile contractuelle et délictuelle », (1984) 44 R. du B. 3, 57.
-
[42]
Didier Lluelles et Benoît Moore, Droit des obligations, 2e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2012, no 1733, p. 958.
-
[43]
Ouellette c. Croteau, J.E. 2002-947, par. 29 (C.S.).
-
[44]
Claude Masse, « La responsabilité civile », dans La réforme du Code civil. Obligations, contrats nommés, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 1993, p. 235, à la page 317.
-
[45]
M.-É. Ancel, préc., note 7.
-
[46]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 764, p. 913.
-
[47]
C. Masse, préc., note 44.
-
[48]
P. Jestaz, préc., note 7, p. 280.
-
[49]
Sur la notion de cause de l’obligation (dite cause objective), voir D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1063 et 1064, p. 564 et 566. Ces auteurs suggèrent qu’elle « sert à justifier, objectivement – abstraction faite de toute considération personnelle –, l’obligation assumée par un contractant. Telle une matrice, la cause de l’obligation, notion abstraite, est donc toujours la même, pour chaque type de contrat » (no 1063, p. 564).
-
[50]
Sur la notion de cause du contrat (dite cause subjective), voir D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1065 et suiv., p. 570 :
La cause du contrat est la raison subjective et personnelle qui a poussé les parties à conclure le contrat. Ainsi, la cause du contrat de vente d’un immeuble peut être la volonté du propriétaire de se constituer des liquidités, tandis qu’elle peut être, pour l’acheteur, le désir de s’y loger avec sa famille. La cause des contrats peut donc varier à l’infini, « suivant chaque personne et selon chaque contrat ».
-
[51]
Id., no 1061, p. 562.
-
[52]
Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64, art. 1851.
-
[53]
Steinberg inc. c. Centre d’achat Duberger inc., [1987] R.J.Q. 868 (C.A.), où le juge soulignant que l’inoccupation constitue une « violation fondamentale du bail », accorde au locateur la résiliation du bail. Dans le même sens, voir notamment : Cie de construction Belcourt Ltée c. Golden Griddle Pancake House Ltd., [1988] R.J.Q. 716 (C.S.) (le juge accueille l’injonction permanente pour forcer en nature l’occupation des lieux par le locataire) ; Place Bonaventure inc. c. Imasco R.I. inc., [1993] R.J.Q. 2895 (C.S.) (le juge accueille l’injonction permanente) ; Navarro Investment Co. c. Aimé Mignault inc., [1998] R.D.I. 596 (C.S.) (le juge accueille l’injonction provisoire) ; Centres d’achats Beauward ltée c. Provigo Distribution inc., J.E. 2005-1560 (C.S.) (une ordonnance de sauvegarde oblige la locataire à continuer l’exploitation de son magasin) ; Société en commandite Place Centre-ville d’Amos (1987) c. Provigo Distribution inc., 2007 QCCS 1637 (la locatrice obtient une injonction interlocutoire enjoignant à la locataire de continuer l’exploitation de son commerce).
-
[54]
Samen Investments Inc. c. Monit Management Ltd., 2014 QCCA 826, par. 121.
-
[55]
Voir N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 33. Pour une appréciation critique de l’obligation essentielle par nature, voir R. Sefton-Green, préc., note 7, p. 314 et suiv. Par exemple, selon P.-A. Crépeau, préc., note 26, l’obligation de sécurité découlerait de la nature de certains contrats.
-
[56]
Sur cette utilité particulière, voir supra, section 2.1.1.
-
[57]
Sur cette utilité particulière, voir supra, section 2.2.1.
-
[58]
Il y a lieu de croire que les dispositions concernant les contrats nommés du Code civil du Québec indiquent souvent des obligations essentielles du contrat. Considérons, par exemple, l’article 1851 C.c.Q. qui prévoit que « [l]e louage, aussi appelé bail, est le contrat par lequel une personne, le locateur, s’engage envers une autre personne, le locataire, à lui procurer, moyennant un loyer, la jouissance d’un bien, meuble ou immeuble, pendant un certain temps ».
-
[59]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 871, p. 1076 ; D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 2980, p. 1858 ; P. Fréchette, préc., note 30, 396 et suiv. (l’auteur parle d’une impossibilité de hiérarchiser les obligations dans un contrat mixte).
-
[60]
D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 2980, p. 1858, donnent l’exemple de la convention de restauration dans lequel l’obligation de servir des plats constitue une obligation essentielle, alors que celle de prendre soin des effets personnels du client durant le repas est à première vue accessoire. Voir aussi l’affaire Vourakis c. 144068 Canada Inc., J.E. 2002-1758 (C.Q.), où le juge a considéré que, dans le contexte d’un contrat de forfait vacances, le transport aérien n’était que l’accessoire de l’obligation de fournir l’hébergement choisi. Or, dans le contrat de transport, il en constitue bien évidemment l’obligation essentielle.
-
[61]
Xavier Henry, La technique des qualifications contractuelles, thèse de doctorat, Nancy, Faculté de droit, sciences économiques et gestion, Université de Nancy II, 1992, p. 1347.
-
[62]
Id., p. 86.
-
[63]
Sur cette idée, voir Jean-Baptiste Seube, L’indivisibilité et les actes juridiques, Paris, Litec, 1999, p. 255 et suiv.
-
[64]
Civ. 1re, 19 nov. 1996, J.C.P. 1997.II.22862.
-
[65]
Voir D. Mazeaud, préc., note 34, no 11, où l’auteur mentionne que le moment de la qualification définitive de l’obligation essentielle n’est pas sans contrarier certains auteurs qui considèrent ceci :
Le prétendu minimum contractuel irréductible n’est identifiable qu’a posteriori, alors qu’il devrait pouvoir se définir au seuil de l’engagement. Enfin, si on reprend les différents arrêts rendus depuis 2006, il apparaît clairement que « nul ne peut dire par avance […] si telle obligation est essentielle », tant et si bien que, dans notre domaine, une telle qualification repose, en réalité, sur de purs motifs d’opportunité, ainsi que le révèle suffisamment l’« analyse très compréhensive de la notion d’obligation essentielle ».
-
[66]
Voir R. Sefton-Green, préc., note 7, à la page 340, qui précise que « la source de l’obligation se distingue de sa mise en application, mais une source telle que la volonté des parties n’a pas de réalité sans celle-ci. On peut adresser semblable objection à l’obligation fondamentale par la nature des choses. Comme la dénomination est assez imprécise, celle-ci requiert souvent une clarification par la jurisprudence. »
-
[67]
X. Thunis, préc., note 7, p. 526. Voir aussi D. Mazeaud, préc., note 34, no 11, selon qui le moment de la qualification définitive de l’obligation essentielle n’est pas sans contrarier certains auteurs.
-
[68]
X. Thunis, préc., note 7, p. 539.
-
[69]
N. Cardoso-Roulot, préc., note 7, p. 21.
-
[70]
Voir les commentaires dans D. Mazeaud, préc., note 34, no 11.
-
[71]
Selon la maxime latine « pluralitas non est ponenda sine necessitate », il ne faut pas multiplier les notions juridiques sans nécessité absolue.
-
[72]
Pour des commentaires sur cette fin particulière, voir supra, sections 2.2.2 et 2.2.3.
-
[73]
Art. 1437 C.c.Q. Voir : Benoît Moore, « À la recherche d’une règle générale régissant les clauses abusives en droit québécois », (1994) 28 R.J.T. 177, 221 et suiv., où l’auteur établit le lien entre la notion de clause abusive et les théories de common law du Fundamental breach of contract et des attentes raisonnables ; S. Grammond, préc., note 29.
-
[74]
En France, la littérature sur la cause oscille entre deux conceptions de cette notion. D’une part, selon une conception abstraite – qui est la plus généralement admise –, la cause agit comme condition de validité du contrat. D’autre part existe une conception plus concrète de la cause, qui permet le contrôle de l’équilibre entre les prestations (on parle alors de la « cause contrepartie »). Sur l’évolution des différentes conceptions de la notion de cause, voir J. Ghestin, préc., note 12, p. 351 et suiv. Sur la notion de cause de façon générale, voir J. Ghestin, préc., note 25. Au Québec : D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1061 et suiv., p. 562 ; J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 356 et suiv., p. 442.
-
[75]
Sur l’économie du contrat, voir pour la France Sébastien Pimont, L’économie du contrat, Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille, 2004. Pour le Québec : Ejan Mackaay, « Les apports de l’analyse économique du droit des contrats », Colloque « L’efficacité du contrat », présenté à l’Université Paul Cézanne Aix-Marseille III, 11 juin 2010.
-
[76]
Sur la théorie des attentes légitimes, à titre général, voir Didier Lluelles, « La théorie des “attentes légitimes” (ou “raisonnables”) dans la clarification contractuelle : Est-ce si légitime ? Est-ce bien raisonnable ? », dans Benoît Moore (dir.), Mélanges Jean Pineau, Montréal, Éditions Thémis, 2003, p. 407 ; D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1661 et suiv., p. 562. Selon ces auteurs, la raison d’être de cette théorie dans le droit civil du Québec mérite d’être remise en question.
-
[77]
Selon la conception traditionnelle, les exercices de qualification et d’interprétation du contrat devraient se faire de façon objective, indépendamment des valeurs et des croyances personnelles du juge.
-
[78]
P. Fréchette, préc., note 30, 136 et suiv.
-
[79]
Certains pourraient être tentés ici d’émettre des réserves. Pour une réflexion approfondie du sens à donner à la notion d’obligation, voir Pascal Ancel, « Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat », R.T.D. civ. 1999.771.
-
[80]
D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1733, p. 958.
-
[81]
Ouellette c. Croteau, préc., note 43.
-
[82]
Côté c. Sécurité nationale (La), [1997] R.R.A. 952 (rés.) (C.A.), J.E. 97-1686. Voir aussi l’affaire Entreprises Mière inc. (Syndic de), 2012 QCCA 176, par. 28 et suiv.
-
[83]
Vincent Caron, Jalons pour une théorie pragmatique de l’interprétation du contrat : du temple de la volonté à la pyramide de sens, thèse de doctorat, Montréal, Université de Montréal, 2014, p. 223, à l’appui de ses propos, l’auteur cite l’affaire Provigo Distribution inc. c. Supermarché A.R.G. inc., [1998] R.J.Q. 47 (C.A.), J.E. 98-39.
-
[84]
Chambre immobilière du Grand Montréal c. Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, 2007 QCCA 363, par. 68.
-
[85]
Art. 1434 C.c.Q.
-
[86]
Sur cette idée, voir P.-A. Crépeau, préc., note 26.
-
[87]
Aéroports de Montréal c. Hôtel de l’aéroport de Mirabel inc., J.E. 2003-1606, par. 34 (C.A.).
-
[88]
Id., par. 34.
-
[89]
Id., par. 51.
-
[90]
Léo Boutin ltée c. Provigo Distribution inc., 2007 QCCS 5784, par. 78. La cessation des activités du locataire ou le fait de laisser le local vacant peut se révéler dommageable pour le locateur qui voit son centre commercial perdre une partie de son achalandage. Dans le même sens, voir notamment : Steinberg inc. c. Centre d’achat Duberger inc., préc., note 53 ; Cie de construction Belcourt Ltée c. Golden Griddle Pancake House Ltd., préc., note 53 ; Place Bonaventure inc. c. Imasco R.I. inc., préc., note 53 ; Navarro Investment Co. c. Aimé Mignault inc., préc., note 53 ; Centres d’achats Beauward ltée c. Provigo Distribution inc. préc., note 53 ; Société en commandite Place Centre-ville d’Amos (1987) c. Provigo Distribution inc., préc., note 53.
-
[91]
Union canadienne (L’), compagnie d’assurances c. Mini-entrepôt Longueuil inc., 2011 QCCQ 7058, par. 7-10.
-
[92]
Syndicat des employées et employés professionnels et de bureau, section locale 571, CTC-FTQ (SEPB) c. Barreau du Québec, 2007 QCCA 64, par. 30.
-
[93]
Syndicat des employées et employés de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP-FTQ) c. Hydro-Québec, 2006 QCCA 150, par. 68 ; appel accueilli sur un autre point : Hydro-Québec c. Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP-FTQ), 2008 CSC 43.
-
[94]
À moins, dans le cas du contrat à exécution successive, que le manquement à l’obligation, même accessoire, n’ait un caractère répétitif. Art. 1604 (2) C.c.Q.
-
[95]
Rouleau c. Power, [1927] 42 B.R. 416, 423, no AZ-50293008.
-
[96]
D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 2915, p. 1813.
-
[97]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 821, p. 1020 ; F. Lévesque, préc., note 37, no 759, p. 399.
-
[98]
Midas Canada ltée c. Commission scolaire Jérôme Le Royer, J.E. 98-2084 (C.A.) 1998 CanLII 12486. Voir aussi : Pétroles Tremblay ltée c. Guillemette, [1993] J.E. 94-48 (C.Q.), no AZ-94031014 ; Thériault c. Dumas, [2000] J.E. 2000-1961 (C.Q.), no AZ-00031477 ; Nguyen c. Marin, 2007 QCCQ 13361 ; Dahmé c. Dahmé, 2007 QCCA 851 ; Entreprises MTY Tiki Ming inc. c. McDuff, 2008 QCCS 4898.
-
[99]
Art. 1851 C.c.Q.
-
[100]
Aéroports de Montréal c. Hôtel de l’aéroport de Mirabel inc., préc., note 87, par 36.
-
[101]
Id., par 51.
-
[102]
Spaconcept Bromont inc. c. Château Bromont inc., 2010 QCCS 3629.
-
[103]
Dans l’affaire Service Bérubé ltée c. General Motors du Canada ltée, 2011 QCCA 567, par. 87, le juge mentionne que l’injonction « comporte une mesure d’exécution hors du commun ». Voir aussi les propos du juge LeBel, alors à la Cour d’appel, dans l’affaire Picard c. Johnson & Higgins Willis Faber Ltée, [1988] R.J.Q. 235 (C.A.) : « Qualifiée de recours extraordinaire, l’injonction comporte un ordre sanctionné par des pénalités exceptionnelles. L’on fait appel non pas seulement au mode d’exécution ordinaire des jugements, mais aussi à des peines, en principe, à caractère public, comme l’amende et l’emprisonnement. » Voir finalement les propos du juge Gonthier dans l’affaire A.I.E.S.T., local de scène no 56 c. Société de la Place des Arts de Montréal, [2004] 1 R.C.S. 43.
-
[104]
Art. 1437 (2) C.c.Q. Sur le sens à donner à l’illustration contenue à l’alinéa 2 de cet article, voir D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1858 et suiv., p. 1034.
-
[105]
S. Grammond, préc., note 29, 108 et suiv. Sur la notion de clause abusive, voir, B. Moore, préc., note 73.
-
[106]
Bélanger c. S.S.Q., société d’assurance-vie inc, 2008 QCCQ 10172.
-
[107]
Le traitement médical en question ne pouvait être terminé dans le délai prévu dans le contrat d’assurance, puisqu’il devait, pour des raisons purement médicales et indépendantes de la volonté de l’assuré, être échelonné sur une certaine période de temps. Dans le même sens : Millette c. S.S.Q., société d’assurance-vie inc. [1997] R.R.A. 243 (C.Q.) ; Simard c. Compagnie d’assurance-vie London Life, [1999] R.R.A. 1025 (C.Q.).
-
[108]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 871, p. 1077. Voir aussi : C. Masse, préc., note 44, p. 316 et suiv. ; F. Lévesque, préc., note 37.
-
[109]
Une jurisprudence considérable utilise l’article 1437 C.c.Q. pour rendre inopérantes les clauses d’exonération de responsabilité. Par exemple : Thériault c. Dumas, préc., note 98 ; Huot c. Système de sécurité Nasa Inc., J.E. 2001-1216 (C.Q.).
-
[110]
J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 871, p. 1076. Voir aussi B. Moore, préc., note 73, où l’auteur établit le lien entre la notion de clause abusive et les théories de common law du fundamental breach of contract et des attentes raisonnables.
-
[111]
D. Lluelles et B. Moore, préc., note 42, no 1859, p. 1034, soulignent que l’alinéa 2 de l’article 1437 C.c.Q. invite certains auteurs à penser qu’il s’agit d’un renvoi à la théorie du fundamental breach of contract.
-
[112]
Com. 22 octobre 1996, J.C.P. 1997.I.4002, obs. Fabre-Magnan. Pour une analyse approfondie des motifs de la Cour dans cette affaire ainsi que le sens et la portée de l’arrêt dans la jurisprudence postérieure, voir J. Ghestin, préc., note 12, no 740 et suiv., p. 495.
-
[113]
Gestions Solvic ltée c. Amusements Daniel inc., J.E. 96-298 (C.S.). Voir aussi : Ikea Properties Ltd. c. Banque Nationale de Paris, [2001] R.J.Q. 506 (C.S.), conf. sur un autre point par BNP Paribas (Canada) c. Ikea Property Ltd., 2005 QCCA 297, J.E. 2005-712 (C.A.) ; Ferme Franky 2004 inc. c. 9059-4094 Québec inc. (Alarmes Pierre Fortier), préc., note 38 (en appel).
-
[114]
Samen Investments Inc. c. Monit Management Ltd., préc., note 54.
-
[115]
Id., par. 121.
-
[116]
Art. 2130 C.c.Q.
-
[117]
Pour les critiques formulées en France, voir D. Mazeaud, préc., note 34.
-
[118]
Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 1 « Principes généraux », Montréal, Éditions Yvon Blais, 2014, no 1-183, p. 176 : quant à l’évaluation de la faute contractuelle, ces auteurs mentionnent que : « [c]’est uniquement en comparant la conduite du débiteur avec celle d’un débiteur ayant assumé le même type de devoir que le tribunal peut déterminer s’il y a faute ou non ». Voir aussi F. Lévesque, préc., note 37, no 555 et suiv., p. 291, J.-L. Baudouin et P.-G. Jobin, préc., note 25, no 766, p. 920 (l’italique est de nous)
La preuve requise de la part du contractant victime sera plus exigeante si le défendeur était astreint à une simple obligation de moyens ; le demandeur devra alors démontrer une faute au sens strict du terme, c’est-à-dire un défaut de son cocontractant de se comporter en personne prudente et diligente. En cas d’obligation de résultat, le demandeur pourra se contenter de démontrer que le résultat promis n’a pas été atteint et la responsabilité du défendeur sera retenue s’il ne réussit pas à démontrer que cette situation est attribuable à une force majeure ou une cause étrangère assimilable (art. 1470 C.c.Q.).
-
[119]
Monit Management Ltd. c. Samen Investments Inc., 2012 QCCA 1821.
-
[120]
Id., par. 64-68.
-
[121]
Impact Graphics Ltd. c. B.P.G. Central Security Corp., [1995] J.E. 95-2174 (C.S.), no AZ-95021939 ; Affiliated FM Insurance Company c. Martin Veilleux inc., 2009 QCCS 827. Voir aussi, l’affaire Huot c. Systèmes de sécurité Nasa inc., préc., note 109.
-
[122]
Voir supra, section 2.1.1.
-
[123]
Voir supra, section 2.1.2.
-
[124]
Voir supra, section 2.1.3.
-
[125]
Voir supra, section 2.2.1.
-
[126]
Voir supra, section 2.2.2.
-
[127]
Cela peut être le cas puisqu’une faute lourde est constatée (art. 1613 C.c.Q.). Voir supra, section 2.2.3.
-
[128]
Nous indiquions plus haut que, si la notion d’obligation essentielle semblait parfois être entendue comme ayant une signification qui lui était propre, elle l’était, dans bien d’autres cas, comme synonyme de la cause ou de l’obligation principale du contrat. À cet égard, voir supra, section 1.2.1.
-
[129]
Steinberg inc. c. Centre d’achat Duberger inc., préc., note 53 ; Cie de construction Belcourt Ltée c. Golden Griddle Pancake House Ltd., préc., note 53 ; Place Bonaventure inc. c. Imasco R.I. inc., préc., note 53 ; Navarro Investment Co. c. Aimé Mignault inc., préc., note 53 ; Centres d’achats Beauward ltée c. Provigo Distribution inc., préc., note 53 ; Société en commandite Place Centre-ville d’Amos (1987) c. Provigo Distribution inc., préc., note 53.
-
[130]
Samen Investments Inc. c. Monit Management Ltd., préc., note 54.
-
[131]
Provigo Distribution inc. c. Supermarché A.R.G. inc., préc., note 83, par. 61.
-
[132]
Impact Graphics Ltd. c. B.P.G. Central Security Corp., préc., note 121 ; Affiliated FM Insurance Company c. Martin Veilleux inc., préc., note 121. Voir aussi l’affaire Huot c. Systèmes de sécurité Nasa inc., préc., note 109.
-
[133]
Union canadienne (L’), compagnie d’assurances c. Mini-entrepôt Longueuil inc., préc., note 91.