Abstracts
Résumé
Dans le présent article, l’auteure s’intéresse à certains problèmes soulevés par les moyens permettant de signaler les droits intellectuels aux tiers. Le Canada et les États-Unis tiennent des registres de publicité volontaires pour les marques de commerce et les droits d’auteur, mais des registres obligatoires pour les brevets et les dessins industriels. Par ailleurs, les pratiques de marquage (copyright, tous droits réservés : © ; marque déposée : MD ou ®, etc.) n’y sont que partiellement encadrées. Par contraste, la France ne tient aucun registre de publicité pour les droits d’auteur, mais l’enregistrement des brevets, des dessins et modèles puis des marques y est requis. Le marquage semble ne pas y avoir de portée juridique. Or, le droit de la propriété intellectuelle est complexe et même réputé pour la lourdeur des litiges qui l’animent. L’auteure soutient que la prévention des litiges et le principe de l’effet erga omnes des protections seraient beaucoup mieux servis par un encadrement plus rigoureux des moyens permettant d’informer les tiers.
Abstract
This article looks at some of the issues raised by the means available to let third parties know of intellectual property rights (IPRs). Canada and the United States keep voluntary public registers for trademarks and copyrights, and mandatory public registers for patents and industrial designs. However, the marking practices (©, ®, etc.) used in those countries are only partially regulated. In France, by way of comparison, there are no public registers for copyrights, but the registration of patents, designs and trademarks is required. Marking practices, although present, do not seem to carry any legal effect. At the same time, intellectual property law is complex and renowned for its burdensome litigation. The author argues that the prevention of disputes and the erga omnes nature of IPRs would be better served by a more rigorous framework to publicize the rights concerned.
Article body
Les protections rattachées à la propriété intellectuelle se sont développées au fil du temps dans une perspective commerciale. Elles ont pour objet de rassurer le titulaire quant à l’exclusivité d’exploitation de sa création intellectuelle et de l’encourager à une forme de partage contrôlé de ses talents, de ses connaissances ou de ses nouvelles façons de faire avec autrui[1]. Le titulaire qui s’intéresse au commerce, particulièrement, peut devenir plus enclin à mettre en marché un bien ou un service. De fait, cette mise en marché n’entraîne normalement pas un transfert ou une dilution du droit de propriété intellectuelle. Le consommateur visitant un établissement de la célèbre chaîne Starbucks Coffee® ne saurait justifier une quelconque prétention à l’égard du procédé de préparation de la boisson qu’il a achetée[2], ni d’ailleurs à l’égard de la marque de commerce apposée sur le gobelet avec lequel il repart[3].
Le droit de propriété intellectuelle réserve l’exploitation de la valeur économique d’une création à son titulaire. Le faisceau d’actes exclusifs qui reviennent à ce dernier comprend, par exemple, la traduction de son oeuvre littéraire[4], le droit de fabriquer l’objet de son invention[5] ou le droit d’importer à des fins commerciales une marchandise ou un produit fini pour lequel il a enregistré un dessin industriel[6]. Le titre de propriété intellectuelle reste intact malgré la commercialisation de biens ou de services alliant la création protégée, car la propriété intellectuelle n’est typiquement pas assimilable à sa fixation matérielle[7].
Forgeant à même l’intangible une exclusivité opposable à tous, le droit de propriété intellectuelle suppose néanmoins un équilibre entre les intérêts qu’il défend et ceux des tiers. Il s’agit d’une difficulté récurrente, car ces intérêts s’entrecroisent continuellement dans les différentes sphères de l’activité humaine, notamment celles de l’industrie et du commerce, de la politique, de l’éducation, puis du divertissement et des loisirs. Le droit de la propriété intellectuelle régit donc quotidiennement un ensemble de rapports entre le titulaire protégé et les tiers.
Or, ces tiers se conduisent selon une compréhension très aléatoire des exclusivités rattachées aux créations protégées. L’entendement incertain du droit de la propriété intellectuelle peut être attribué à deux grandes difficultés. D’une part, le domaine est marqué par un fort dynamisme et une complexité accrue, tant en ce qui concerne les objets protégés que les protections elles-mêmes. D’autre part, les moyens traditionnels permettant de signaler l’existence des droits de propriété intellectuelle ne sont pas encadrés de manière à assurer la diffusion d’informations utiles aux tiers.
Concernant la première difficulté, les droits de propriété intellectuelle renvoient à une grande variété de régimes de protection, dont les plus importants sont ceux du brevet, du dessin industriel, de la marque de commerce et du droit d’auteur. La réception de ces types de propriété intellectuelle en droit international permet de leur rattacher des créations propres :
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Le brevet concerne les inventions (dont les réalisations, les produits ou les procédés) issues de « tous les domaines technologiques, à condition qu’elle[s] soi[ent] nouvelle[s], qu’elle[s] implique[nt] une activité inventive et qu’elle[s] soi[ent] susceptible[s] d’application industrielle[8] » ;
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Le dessin ou modèle industriel s’attache à l’aspect ornemental ou esthétique d’un objet utilitaire. Il peut toucher des « éléments tridimensionnels, tels que la forme ou la texture d’un objet ou [des] éléments bidimensionnels, tels que les motifs, les lignes ou la couleur[9] » ;
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La marque de commerce protège « [t]out signe, ou toute combinaison de signes, propre à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises[10] » ;
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Le droit d’auteur intéresse les oeuvres littéraires, artistiques, musicales ou dramatiques telles qu’elles sont définies dans la Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886 :
[T]outes les productions du domaine littéraire, scientifique et artistique, quel qu’en soit le mode ou la forme d’expression, telles que : les livres, brochures et autres écrits ; les conférences, allocutions, sermons et autres oeuvres de même nature ; les oeuvres dramatiques ou dramatico-musicales ; les oeuvres chorégraphiques et les pantomimes ; les compositions musicales avec ou sans paroles ; les oeuvres cinématographiques […] ; les oeuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ; les oeuvres photographiques […] ; les oeuvres des arts appliqués ; les illustrations, les cartes géographiques ; les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture ou aux sciences[11].
Les créations protégées présentent donc des degrés divers de sophistication, de nouveauté ou d’originalité, selon le régime de protection visé.
Ensuite, ces droits fonctionnent de manière autonome. Leurs conditions d’existence, les modalités de leur maintien en état, les actes exclusifs qui en découlent, les recours possibles en cas de leur violation et même leur fondement sont pratiquement séparés. Les protections connaissent également des aménagements subtils, sans compter qu’une création peut parfois se qualifier au titre de plusieurs protections simultanément[12]. En outre, le domaine connaît une certaine harmonisation à l’international, mais aucune uniformisation. Les droits intellectuels opèrent ainsi selon un principe strict de territorialité[13], lequel conduit à un morcellement des protections en fonction des territoires où elles sont revendiquées.
Il en résulte une double fragmentation, selon le type de propriété intellectuelle revendiquée et selon l’aménagement des protections sur le territoire où le titulaire entend faire jouer ses droits. Certainement, les différentes propriétés intellectuelles représentent « un pluriel bien singulier[14] ».
Les protections connaissent bien quelques principes communs, néanmoins, dont leur effet erga omnes. Ainsi, généralement, toute personne qui porte atteinte à l’exclusivité conférée par titre de propriété intellectuelle voit sa responsabilité engagée sans égard à son ignorance. La responsabilité se raccorde à l’acte, et non à une quelconque intention ou préméditation. Il s’agit possiblement de la réduction d’un problème fort complexe de mise en preuve et de réparation du préjudice. Elle semble toutefois opérer dans une logique à sens unique : celle d’une protection résolument attachée au titulaire de la propriété intellectuelle. Faudrait-il donc adhérer à la prémisse suivant laquelle les droits intellectuels sont manifestes dès lors qu’ils existent ?
Ce principe étonne, d’autant que les moyens pour faire connaître le droit de propriété intellectuelle connaissent des faiblesses importantes. C’est là la seconde difficulté qui influe sur le niveau de compréhension selon lequel le commun des mortels évolue dans ses rapports avec la propriété intellectuelle d’autrui. Notre réflexion s’attache justement à cette difficulté.
Le titulaire du droit intellectuel ne peut se tenir au fait de toutes les relations qui en viennent à exister entre la création protégée et les tiers. Ces rapports varient en importance et leur prédiction systématique serait impossible. Pensons seulement à toutes les transactions de vente et de revente ayant pour objet des marchandises porteuses de marques de commerce. Comment les titulaires des marques pourraient-ils rester au courant des mouvements des marchandises ? Et à supposer qu’ils aient adopté un système permettant de suivre ces marchandises, l’énergie investie serait-elle seulement raisonnable ?
Mieux vaut porter la réservation des droits à la connaissance d’autrui d’une manière beaucoup plus générale et miser sur la prévention de l’atteinte à la propriété intellectuelle, assurément. Le titulaire dispose alors de deux voies. Il peut s’assurer de l’inscription du droit intellectuel dans le registre territorial de publicité des droits approprié et du marquage des supports physiques de sa création afin de signaler qu’une composante de ceux-ci est visée par une exclusivité territoriale (les célèbres symboles ©, MD ou TM, etc., lui seront alors particulièrement utiles).
Ces moyens permettant de signaler les droits (partie 1) présentent toutefois des lacunes importantes. Les registres de publicité des droits n’existent pas pour toutes les protections et, lorsqu’ils existent, ne sont pas tous obligatoires. Le marquage des supports physiques, pour sa part, est typiquement facultatif et manque souvent de clarté quant à l’aspect de propriété intellectuelle qui est effectivement incorporé dans l’objet. En fait, dans l’état actuel de leur encadrement juridique, ces moyens de faire connaître la réservation aux tiers révèlent une utilité aléatoire (partie 2). Notamment, l’exclusion qu’ils pourraient entraîner d’une défense fondée sur l’ignorance du contrefacteur n’est pas pleinement affirmée et leur caractère optionnel ne favorise pas la prévention des litiges de propriété intellectuelle.
Ces indices d’incohérence nous préoccupent particulièrement au regard des quatre types de propriété intellectuelle dominants, soit le droit d’auteur, la marque de commerce, le brevet et le dessin industriel. Les perspectives du droit canadien, du droit américain et du droit français[15] seront ici explorées pour en tirer certains exemples clés démontrant que le tiers qui voyage au pays de la propriété intellectuelle s’expose à des risques difficilement prévisibles.
1 Les moyens permettant de signaler les droits de propriété intellectuelle
Les droits de propriété intellectuelle ne font pas l’objet d’un encadrement commun uniforme en matière de publicité des droits et de pratique du marquage. Ces moyens, propres à porter à la connaissance d’autrui l’existence même d’une protection, sont parfois imposés, parfois facultatifs. L’obligation ou la liberté de signaler les droits intellectuels sera donc considérée en ce qui a trait à l’enregistrement du droit (1.1), puis au marquage des supports physiques (1.2).
1.1 L’enregistrement des droits
Les droits de propriété intellectuelle ne naissent pas tous de la même façon. Trois possibilités sont en fait à distinguer :
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Certains naissent automatiquement, du seul fait de la production d’une création : c’est le cas du droit d’auteur, qui se constitue instantanément du simple fait de la fixation matérielle d’une oeuvre originale[16] ;
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Certains requièrent l’usage de la création, comme la marque de commerce : celle-ci peut effectivement bénéficier d’une protection sans enregistrement en juridiction de common law[17], pourvu qu’elle ait fait l’objet d’un emploi commercial soutenu, de manière à justifier son caractère distinctif quant à la provenance des marchandises auxquelles elle est associée[18] ;
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D’autres droits intellectuels, enfin, ne peuvent exister qu’au terme d’une procédure d’enregistrement et de validation auprès d’une autorité territoriale compétente : le dessin industriel et le brevet appartiennent à cette catégorie.
À l’instar de ces possibilités variées quant au mode d’acquisition des droits intellectuels, leur publicité connaît des moyens qui ne sont pas uniformes. Le registre de publicité des droits n’existe parfois pas. D’autres fois, lorsqu’il existe, son utilisation n’est que facultative. Le caractère obligatoire du registre est typiquement associé aux droits qui ne peuvent être accordés que par l’État, au terme d’un processus d’évaluation et d’approbation.
Pour apprécier l’utilité des registres de publicité des droits intellectuels, il convient de traiter de chacune des trois catégories précédemment distinguées séparément. Nous aborderons donc ci-dessous les cas du droit d’auteur (1.1.1), de la marque de commerce (1.1.2) puis du dessin industriel et du brevet (1.1.3).
1.1.1 Les registres de publicité pour les droits d’auteur
Le droit d’auteur représente le seul droit de propriété intellectuelle qui s’acquiert instantanément, peu importe l’intention ou, au contraire, l’ignorance de l’auteur quant à l’accès à la protection. C’est d’ailleurs ce qui explique que certains États (dont la France[19]) et même l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) ne tiennent pas de registres publics pour les oeuvres protégées par droit d’auteur. Cela n’étonne pas, car la Convention de Berne consacre justement le principe de l’absence de formalisme[20]. Il suffit qu’une oeuvre originale soit créée pour générer la protection. Qui plus est, cette protection immédiate couvre tous les États membres de l’Union de Berne. Pour ces 166 États, la protection ne requiert donc ni dépôt auprès de l’office territorial compétent, ni enregistrement.
Cependant, le Canada et les États-Unis, tout en adhérant à cette conception du droit d’auteur, offrent l’inscription sur un registre public spécifique. Pour le premier, l’enregistrement est prévu aux articles 54 et suivants de la Loi sur le droit d’auteur[21]. L’automatisme de la protection est par ailleurs confirmé à l’article 5 de la même loi, en ce sens que l’enregistrement du droit ne figure pas au nombre de ses conditions d’existence[22]. L’enregistrement du droit est donc entièrement optionnel[23]. Pour les États-Unis, l’encadrement législatif est sensiblement au même effet. L’article 17 U.S.C. § 705 régit l’enregistrement et son caractère facultatif découle du paragraphe 17 U.S.C. § 102 (a)[24].
Le Canada et les États-Unis ont cependant longtemps imposé des formalités particulières à la naissance d’un droit d’auteur ou à l’exercice d’une action en contrefaçon (notamment l’enregistrement du droit[25]). La décision d’adhérer à la Convention de Berne (pour le Canada, en 1928, et pour les États-Unis, beaucoup plus tard, en 1988) a amené une évolution marquante des régimes.
Quoi qu’il en soit, l’information rendue publique par les registres actuels n’est certainement pas exhaustive[26], puisque toutes les réservations d’oeuvres ne se trouvent pas dénoncées. Les tiers cherchant à se renseigner sur de telles réservations sont néanmoins beaucoup mieux servis au Canada ou aux États-Unis que sur les territoires où aucun registre de ce type n’est tenu[27]. La connaissance du droit d’auteur qui pourrait être imputée à autrui mérite donc que nous y mettions un premier bémol.
1.1.2 Les registres de publicité pour les marques de commerce
La marque de commerce connaît des modes de réservation variés selon les droits internes compétents. Rappelons que la common law reconnaît le droit de propriété intellectuelle concernant une marque, de par son seul usage commercial. Cette protection automatique est notamment en vigueur au Canada et aux États-Unis.
La marque de commerce est d’ailleurs définie par la Loi sur les marques de commerce comme signifiant notamment une « marque employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d’autres[28] ». Il n’est alors pas question d’une marque enregistrée, cette dernière étant soit désignée « marque déposée[29] », soit autrement traitée précisément dans le contexte de dispositions qui s’attachent à l’enregistrement d’une marque[30].
De la même façon, la loi américaine prévoit le caractère optionnel du registre de publicité en ces mots : « The owner of a trademark used in commerce may request registration of its trademark on the principal register[31]. » La marque de commerce peut donc effectivement bénéficier d’une protection par le droit de la propriété intellectuelle, sans être enregistrée[32].
L’appréhension par le droit des marques n’est toutefois pas immédiate, dès la première fixation matérielle du symbole[33]. L’emploi de ce dernier, soit un emploi dans la pratique normale du commerce, doit permettre de développer son caractère distinctif quant aux marchandises qu’il désigne, et ce, par rapport aux autres marchandises concurrentes offertes sur le marché. C’est cet emploi fondant le caractère distinctif qui permet aux droits canadien et américain d’appréhender le symbole en cause au titre de marque de commerce[34].
L’enregistrement reste tout à fait possible pour une marque canadienne, mais sur une base strictement volontaire[35]. L’enregistrement accepté se voit nécessairement consigné dans le registre public pertinent[36]. Il en va de même aux États-Unis[37].
La protection offerte par le droit de la propriété intellectuelle canadien et américain est en outre complétée par l’action en concurrence déloyale. Cette dernière relève cependant du droit des provinces, pour le premier pays, et du droit des États, pour le second[38]. Connaissant un fondement distinct, elle ne relève pas du droit des marques. En définitive, l’existence de ce recours ne facilite en rien l’évaluation des risques d’atteinte à la marque d’autrui.
En France, par contre, l’enregistrement de la marque est requis, tel que l’affirme l’article L. 712-1 du Code de la propriété intellectuelle (Cpi) : « La propriété de la marque s’acquiert par l’enregistrement. » La publicité des marques ainsi déposées au registre territorial découle automatiquement du processus d’acquisition du titre intellectuel[39].
Toutefois, par le jeu de l’article L. 614-31 du CPI et de l’article 6bis de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle[40], la marque non déposée mais notoirement connue sur le territoire français bénéficie de la protection de l’action en contrefaçon[41]. L’absence de cette marque d’usage au sein du registre est sans doute largement compensée par la notoriété de son exploitation. Quant à la marque d’usage qui n’est pas notoire, cependant, le professeur Passa explique ceci :
[L]a marque d’usage est ignorée du droit des marques et son exploitant est dépourvu de toute protection par l’action en contrefaçon. Mais celui-ci peut néanmoins bénéficier du secours de l’action en concurrence déloyale. En effet, celui qui, en raison des circonstances de l’usage d’un signe identique ou similaire à la marque d’usage, crée un risque de confusion avec les produits ou services ou l’entreprise du premier usager, commet un acte de concurrence déloyale. Une jurisprudence constante et très étoffée considère que le fait de créer, fût-ce par imprudence ou négligence, un risque de confusion avec des produits ou services ou sur leur provenance, est constitutif de concurrence déloyale[42].
L’action ouverte à la marque d’usage se fonde sur le régime général de la responsabilité civile[43] et permet de sanctionner l’utilisation de procédés déloyaux dans la concurrence. Le droit des marques de commerce n’est donc pas en cause. Aussi, l’action en concurrence déloyale est entièrement distincte et autonome de la protection offerte par l’action en contrefaçon réservée aux marques de commerce déposées[44]. En dépit du fait que les actions puissent être cumulées par le demandeur, la réception de chacune d’entre elles requiert des fautes distinctes[45]. La prévention des différends découlant de l’atteinte à une marque d’usage en France paraît donc délicate.
En définitive, en l’absence d’une exigence internationale uniforme de publier le droit dans une marque, il appert que les États où la marque peut être acquise par simple emploi commercial n’offrent aucune garantie de complétude. La connaissance des marques protégées qui pourrait être imputée à autrui devrait aussi être conséquemment tempérée.
1.1.3 Les registres de publicité pour les dessins industriels et les brevets
Par contraste avec le droit d’auteur et la marque de commerce, l’obligation d’enregistrer le dessin industriel et le brevet est envisagée de manière plus uniforme par les droits internes.
En matière de dessin industriel, d’abord, l’enregistrement est de rigueur au Canada[46], aux États-Unis[47] et en France[48]. Signalons toutefois qu’un certain recoupement des protections par dessin industriel, par marque de commerce et par droit d’auteur est possible[49]. Les conditions d’enregistrement pour les protections cumulées avec celle du dessin industriel demeurent cependant inchangées. Sur la question du cumul précisément, il est donc possible d’observer une disparité au sein des trois droits internes considérés, disparité que nous illustrons au tableau 1 :
La logique de prévention de l’atteinte aux droits intellectuels militerait en faveur de registres de publicité obligatoires, peu importe le droit en cause. L’absence de registre concernant le droit d’auteur en France tout comme le caractère facultatif des registres en matière de marques au Canada et aux États-Unis pourraient, depuis ce strict point de vue, être remis en question. Toutefois, l’admission d’un cumul des protections, alors même que les conditions de publicité ne sont pas coordonnées, présente une incohérence difficilement justifiable.
Quant au brevet, il s’avère le seul droit intellectuel de notre échantillon qui ne peut être cumulé avec le droit d’auteur, la marque de commerce ou le dessin industriel. Son champ de protection est incompatible avec celui des autres droits. Son enregistrement est, par ailleurs, obligatoire au Canada[50], aux États-Unis[51] et en France[52].
Le brevet découle exclusivement de la décision de l’autorité territoriale compétente. De ce fait, la consultation des registres pertinents présente un meilleur gage de prévention. L’optique d’une vérification efficace est toutefois affaiblie par la complexité du domaine des brevets. Une double compétence dans la technique concernée ou l’art visé par l’invention, d’une part, et dans la protection juridique des inventions sur le territoire de recherche, d’autre part, est souvent nécessaire pour saisir la portée de la réservation[53].
1.2 Le marquage des supports physiques
Outre les registres de publicité des droits, l’existence du droit intellectuel peut être signalée par marquage apposé directement sur les supports de la création. L’information ainsi accessible relève d’une abréviation ou d’un petit symbole, selon la ou les formes standardisées pour chaque droit de propriété intellectuelle. Le tableau 2 présente les formes les plus connues de marquage.
Notons qu’en France ces pratiques ne font pas l’objet de dispositions législatives, l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) signalant même que le recours à ces lettres a une signification précise dans les pays anglo-saxons, mais que leur emploi n’a aucune portée juridique en France[55]. Ces marquages y sont néanmoins pratiqués, sous l’influence probable des échanges internationaux.
Par ailleurs, il faut observer que ce mode d’information présente à la fois des avantages et des inconvénients. La pratique du marquage remédie partiellement aux lacunes des registres de publicité des droits. Les informations sont offertes à quiconque entre en contact avec les objets marqués et, au-delà de la pertinence reconnue par les ordres juridiques à cette pratique, il reste que le marquage représente un moyen pratique, simple et économique de favoriser la prévention des litiges et peut-être même de décourager la contrefaçon.
Toutefois, la connaissance qui peut être tirée des normes de marquage reste incertaine. Le marquage ne dit pas tout. Comme en fait foi le tableau 2, plusieurs symboles ne signalent pas le nom du titulaire, le ou les pays de protection ou encore le numéro d’enregistrement. Le possesseur d’un support marqué doit donc examiner les diverses composantes de celui-ci et s’adresser aux autorités territoriales compétentes pour vérifier la réservation de droits intellectuels. Cette approche implique de sa part un lourd travail. Elle renvoie, au demeurant, aux registres territoriaux de publicité des droits, qui sont, l’avons-nous constaté, d’une efficacité limitée.
En présence de marquage sur une marchandise ou sur son emballage, il s’agit donc de repérer et de reconnaître le symbole. Il faut ensuite déterminer à quelle composante physique de l’objet il se rattache, une information que le marquage ne signale typiquement pas. Cette identification peut se révéler particulièrement difficile en matière de brevet, puisque ce dernier implique souvent une technique précise et complexe. Si toutefois le numéro du brevet est précisé, la prétention d’ignorance ou de méprise devient moins vraisemblable. La tâche est également délicate en matière de marque de commerce, car l’ensemble de la signature visuelle d’un produit n’est pas nécessairement protégé. Le marquage se rapporte-t-il alors au dessin (marque graphique), au lettrage du nom du produit, aux agencements de couleurs et au logo (marque figurative) ou simplement aux mots composant le nom du produit (marque verbale) ? Et qu’en est-il du façonnement du produit ou de son emballage (signe distinctif) ? Le marquage d’une prétention à une marque pourrait ainsi générer plus de questions qu’il n’est à même de fournir de réponses. Quant au droit d’auteur, la tâche est un peu moins complexe, mais elle requiert tout de même une connaissance de toutes ces réalisations qui peuvent relever du concept d’oeuvre artistique, d’oeuvre dramatique, d’oeuvre littéraire ou d’oeuvre musicale, sans compter que des droits voisins peuvent être en cause.
Ces difficultés sont décuplées par le possible chevauchement des protections sur une même création — une possibilité qui, rappelons-le, intéresse particulièrement le droit des marques, le droit des dessins industriels et le droit d’auteur. Au surplus, le possesseur du support doit se préoccuper de la portée juridique territoriale de l’exclusivité annoncée.
Le marquage doit donc nécessairement être complété par une vérification des registres territoriaux pertinents. Cette mission, confiée aux personnes qui entrent en contact avec les supports physiques, qui consiste à comprendre et à connaître la réservation n’assure en rien les résultats de l’enquête menée par ces tiers (si tant est seulement qu’ils enquêtent). Il faudrait donc, pour se gouverner en harmonie avec l’effet erga omnes des droits intellectuels, s’adonner à des vérifications d’une lourdeur particulière, mais à des vérifications dont l’efficacité est réduite par l’emploi inconstant et non obligatoire du marquage[56], par l’inexistence de registres de publicité des droits intellectuels sur certains territoires ou par leur caractère volontaire[57] et, enfin, par la variété des règles propres à chaque droit intellectuel, règles qui demeurent de facture nationale. Comment donc justifier l’opposabilité à tous d’un droit qui porte sur les biens incorporels et qui se rend difficilement vérifiable par les tiers ?
Le droit fédéral américain impose toutefois une obligation de signaler au public l’existence d’un brevet en apposant sur le produit ou son emballage le mot « Patent » (ou son abréviation « Pat. »), accompagné du numéro du brevet[58]. Cette contrainte s’impose à trois types de personnes, soit :
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le breveté ;
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les personnes qui, pour lui ou sous son contrôle, fabriquent, offrent en vente ou vendent sur le territoire américain tout produit breveté ; et
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l’importateur de produits brevetés[59].
La loi atteint ainsi le plus grand nombre d’opérateurs possible, tant et si bien que les titulaires de licence de même que toutes les autres personnes autorisées à accomplir les gestes énumérés plus haut sont visés par l’obligation[60].
À défaut de signaler l’existence du brevet de la manière prévue, la réclamation de dommages dans le contexte d’une action en contrefaçon se voit bloquée[61]. La preuve que l’atteinte au droit intellectuel a été notifiée au contrefacteur suffirait cependant à se dérober à cette mesure[62]. Le contrefacteur qui poursuivrait ses actes illégaux après réception de la notification s’exposerait à la charge du dédommagement malgré l’absence de marquage, étant entendu que seuls les actes accomplis à compter de la réception de l’avis seraient pris en considération aux fins de l’appréciation du quantum. Les dommages ne sauraient viser la période précédente, ce qui laisse croire à un objectif d’information poursuivi par le marquage. Ainsi, le contrefacteur n’est pas censé avoir connu l’existence du brevet en l’absence d’avertissement sur l’objet échangé, bien que le droit ait été publié au registre. Serait-ce donc que le registre obligatoire ne suffit pas à proprement informer autrui ? Il est permis de l’affirmer, car, selon des décisions rendues en application de cette mesure, l’objectif du droit fédéral américain est essentiellement d’informer le public et d’éviter la contrefaçon innocente[63].
Toutefois, il faut observer que la prétendue obligation de marquer les objets n’en est pas véritablement une. La mesure n’opère qu’à propos des dommages qui sont en jeu et ne concerne aucunement les autres droits du titulaire.
En général, la technique du marquage présente l’intérêt patent pour le titulaire du droit intellectuel d’annoncer à tous ceux qui entreront en contact avec un support de création l’existence du droit[64] ou d’une prétention à un tel droit — car, dans les cas de droits qui s’acquièrent autrement que par enregistrement, il peut tout à fait s’agir d’une simple prétention qui ne convaincrait pas un tribunal. En retour, le marquage propose au possesseur d’un objet de prendre acte du droit ou de la prétention, l’informe quant au type de droit revendiqué et lui permet de procéder à la vérification dudit droit. En somme, le marquage offre au possesseur de l’objet les moyens d’accomplir des gestes préventifs afin d’éviter le litige de propriété intellectuelle. Le possesseur (qu’il soit propriétaire, mandataire ou autre), désormais aiguillé, peut tenter de négocier une entente avec le titulaire du droit intellectuel ou carrément éviter les territoires où le droit peut lui être opposé.
Le marquage pourrait donc s’avérer une meilleure stratégie pour informer les tiers, pourvu que sa pratique inclue des renseignements plus complets (par exemple le nom du titulaire, ses coordonnées et le numéro d’enregistrement, si cela est pertinent).
2 L’utilité limitée des moyens permettant de signaler les droits de propriété intellectuelle
Les moyens pour assurer la publicité et le marquage des droits intellectuels présentent certaines faiblesses, qui contribuent à l’incertitude et à l’imprévisibilité des protections en vigueur sur un territoire donné. Le mélange d’obligations et de libertés, qui varient selon les droits internes et selon les créations intellectuelles impliquées, fait qu’il est peu probable qu’une personne puisse se renseigner pleinement quant aux droits effectivement en vigueur sur un territoire. Le constat se heurte contre le principe de la responsabilité stricte, qui est constituée par l’acte, et non par l’intention ou la connaissance.
Il y a plus. La complexité des protections représente une autre dimension qui ajoute à l’insécurité juridique des tiers. Le droit de la propriété intellectuelle étend ses ramifications dans toutes les sphères de l’activité humaine. Il opère comme un catalyseur socioéconomique, en justifiant des réservations et des répits contre la concurrence, mais il génère encore beaucoup de prétentions, d’incertitudes et de conflits. La compréhension des différents types de protections requiert un bagage de connaissances spécifiques, qui seul permettra de repérer efficacement les propriétés intellectuelles (déjà réservées ou potentielles), là où une personne ne percevrait autrement rien de si particulier.
La complexité des protections prend diverses formes, notamment les difficultés que nous avons déjà mentionnées au sujet du chevauchement entre les droits d’auteur, les marques de commerce et les dessins industriels. Une autre forme s’observe dans les zones grises qui entourent la délimitation des protections rattachées aux créations, une difficulté qui nuit à la prévisibilité des règles applicables du point de vue des tiers.
En leur état actuel, les registres publics et le marquage ne sauraient pleinement relater le jeu subtil des protections (2.2). Cependant, il nous faut d’abord repérer et décrire quelques brèches qui concernent le principe de la responsabilité stricte. Plus ou moins organisées dans les droits internes qui nous intéressent, elles résultent d’une défense d’ignorance soulevée par le contrefacteur, qui réussit parfois. Nous nous pencherons donc sur l’effet d’une inscription sur le registre public et du marquage des supports sur ce moyen de défense et, incidemment, sur le recouvrement de dommages (2.1).
2.1 L’effet d’une inscription sur le registre et du marquage à l’encontre de la défense d’ignorance du contrefacteur
Le principe voulant que la responsabilité pour atteinte au droit intellectuel soit stricte connaît certaines exceptions qui se regroupent sous un moyen de défense fréquemment désigné « innocent infringer ». Ce moyen reçoit des applications diverses, en fonction des protections et des droits internes. En ce qui concerne le droit canadien, le professeur Vaver explique d’ailleurs ce qui suit :
The fact that an infringer does not know his acts constitute infringement is usually irrelevant to his liability or to the grant of an injunction. Monetary relief may, however, sometimes be withheld – for example, for moral rights infringements and trade-mark dilution, where awards are specifically made discretionary. Similarly, no monetary remedy is available to an industrial design infringer who « was not aware, and had no reasonable grounds to suspect, that the design was registered » ; but an encircled « D » with the design owner’s name marked on most goods automatically removes the defence. The design infringer must in other cases still act prudently ; innocence may be pleaded by someone who markets an independently produced design, but less plausibly by someone who copies a design without legal advice or a designs register search[65].
Le moyen de défense joue donc par rapport aux dommages qui pourraient autrement être réclamés par le titulaire du droit intellectuel.
Les lois canadiennes sur la propriété intellectuelle ne régissent le marquage des produits qu’à deux occasions : la première, justement mentionnée par le professeur Vaver, réside dans la Loi sur les dessins industriels[66] et elle éclipse la défense fondée sur l’ignorance ; la seconde se trouve à l’article 75 (c) de la Loi sur les brevets[67] : cette disposition se limite à une seule dimension du marquage, soit celui qui est jugé illégal. Elle qualifie d’acte criminel le fait d’exposer en vente, comme breveté au Canada, un article qui ne l’est pas dans le dessein de tromper le public.
La législation américaine relative aux brevets contient une disposition analogue à celle du droit canadien qui assimile à un acte criminel le faux marquage de produits[68]. Par contre, elle renferme également un encouragement aux titulaires afin qu’ils signalent en bonne et due forme leurs droits sur les biens qu’ils commercialisent et qui sont visés par un brevet[69]. En matière de dessins industriels (design patents), la même règle de marquage est en vigueur que pour les brevets : le titulaire doit marquer clairement son droit en prenant soin d’indiquer le numéro d’enregistrement, faute de quoi il ne pourra récupérer ses dommages à l’occasion d’une action en contrefaçon[70].
S’ajoute à ces occurrences une mention quelque peu timide à l’article 39 (1) de la Loi sur le droit d’auteur : « dans le cas de procédures engagées pour violation du droit d’auteur, le demandeur ne peut obtenir qu’une injonction à l’égard de cette violation si le défendeur prouve que, au moment de la commettre, il ne savait pas et n’avait aucun motif raisonnable de soupçonner que l’oeuvre ou tout autre objet du droit d’auteur était protégé par la présente loi[71] ». Or, l’article 39 (2) précise que cette défense ne tient plus s’il est établi que, au moment de la violation du droit d’auteur, le titre intellectuel était dûment enregistré conformément à la cette loi. Il s’agit de l’unique cas de figure envisagé par la loi. Il faut cependant constater que rien dans la formulation du législateur n’exclut l’effet similaire que peut produire le marquage des supports physiques[72].
À propos de l’obtention de dommages-intérêts en conséquence d’une atteinte à un droit intellectuel ainsi que du moyen de défense fondé sur l’ignorance de ce droit, les professeurs Bently et Sherman écrivent ceci :
In some cases, damages will not be available where the defendant’s infringement was innocent. More specifically, damages will not be awarded in an action for infringement of a registered design or a patent where the defendant proves that at the date of infringement they were not aware and had no reasonable grounds for supposing that the design was registered or the patent existed. In either case, a person will not be deemed to have been aware or have had reasonable grounds for supposing that the design was registered or patent existed merely because the article is marked « registered » or « patented ». This does not apply, however, where the marking is accompanied by the registration or patent number. In the case of copyright, rights in performances, and unregistered design right, the legislation provides that damages will not be awarded in an action for infringement where it is shown that at the time of the infringement the defendant did not know, and had no reason to believe, that copyright (etc.) subsisted in the work to which the action relates. In certain cases of infringement of performers’ rights by a person who « innocently acquired » an illicit recording, the only remedy available is damages « not exceeding a reasonable royalty in respect of the act complained of ». In contrast, in the case of trade mark infringement and passing off, it seems that damages will be awarded even against an innocent defendant. It is difficult to conceive of any rational basis for such inconsistent approaches[73].
En droit français, les possibilités pour une défense fondée sur la bonne foi du contrefacteur sont resserrées, car la règle traditionnelle veut que la bonne foi soit indifférente en matière civile. De plus, en ce qui concerne le droit des marques, si une imitation pour des marchandises similaires et un risque de confusion sont en cause, la bonne foi de l’imitateur n’est pas pertinente[74]. Cependant, « la bonne foi de l’utilisateur de la marque est prise en compte de façon exceptionnelle à l’article L. 713-6 a) pour permettre à un homonyme de bonne foi d’utiliser son patronyme comme dénomination sociale, nom commercial ou enseigne[75] ». Le marquage des supports pour signaler la réservation de la marque ne semble donc pas influer sur les droits que peut faire valoir le titulaire.
En principe, il en va de même en matière de droit d’auteur, où il est généralement établi que la bonne foi est toujours indifférente[76]. Les professeurs Vivant et Bruguière estiment toutefois que ce principe est critiqué par plusieurs[77]. Ils expliquent que le reproche se fonde sur l’occultation de la « distinction faite par Roubier […] entre les sanctions “restitutives” et les sanctions “réparatrices” toutes orientées vers l’indemnisation du dommage et qui relèveraient du droit commun de la responsabilité civile[78] ». Ils ajoutent ce qui suit :
La critique est troublante et il est vrai qu’on peut trouver choquant de condamner quelqu’un à verser des dommages-intérêts tout en ne le jugeant pas fautif. Nous ne sommes pas certains, cependant, qu’elle suffise à condamner cette jurisprudence. L’analyse de la Cour de cassation cadre, en effet, parfaitement avec la nature réelle du droit d’auteur, droit réel opposable erga omnes[79].
Pour ce qui est du droit des brevets, en revanche, il existe une distinction entre les contrefacteurs directs et les contrefacteurs indirects qui permet d’entrevoir une utilité particulière au marquage. Les fabricants de produits contrefaits, les utilisateurs non autorisés d’un procédé protégé de même que les importateurs de produits copiés sont assimilés à la première catégorie des contrefacteurs directs. Ils sont condamnés pour leur violation du droit intellectuel sans égard au fait qu’ils aient agi sciemment ou pas[80]. Quant aux autres opérateurs qui ne sont pas visés par la première catégorie, mais qui commercialisent, exploitent ou détiennent les produits contrefaits, leur responsabilité tient au fait qu’ils tirent profit d’une contrefaçon déjà réalisée. Ce sont des contrefacteurs dits indirects, pour lesquels la connaissance de cause doit être démontrée[81]. Puisque le brevet ne peut exister qu’au terme d’une procédure d’enregistrement, c’est donc que la publicité du titre intellectuel ne suffit pas à établir la connaissance de cause. La présence de marquage sur les supports pourrait ainsi vraisemblablement jouer un rôle dans l’appréciation de la connaissance de cause du contrefacteur indirect.
Il semble donc que les moyens permettant de signaler les droits intellectuels ne parviennent pas à raffermir systématiquement le principe de la responsabilité stricte. Les brèches percées par la défense d’ignorance du contrefacteur supposent bien une démonstration d’absence de motif raisonnable portant à croire à un droit intellectuel. Or, la démonstration peut réussir malgré l’enregistrement et même, parfois, malgré le marquage des supports — une possibilité relatée par les professeurs Bently et Sherman[82] et qui concerne l’omission du numéro d’enregistrement.
2.2 L’impossibilité d’informer systématiquement et parfaitement les tiers
Les protections appréhendent habituellement une création immatérielle, strictement, mais elles envisagent parfois un peu plus que la création. Elles peuvent ainsi s’étendre pour assurer l’efficacité de l’exclusivité devant la menace d’une concurrence trop approchante. Ce phénomène est observable le plus significativement en matière de droit des brevets (2.2.1), de droit des marques de commerce (2.2.2) et de droit d’auteur (2.2.3). Nous qualifions ces zones grises de protections « périphériques » des créations visées, étant entendu qu’elles relèvent bien des droits en cause.
La préoccupation se déplace donc depuis l’emplacement ou la source de la publicité du titre intellectuel, quelles que soient ses imperfections, vers la prévisibilité de l’étendue de sa protection. Il ne s’agit aucunement de s’accrocher au concept de contrefaçon à proprement parler, mais plutôt de vérifier la compréhension utile des protections. Cette compréhension fonde, d’une part, la détermination des paramètres d’une vérification diligente des droits intellectuels et, d’autre part, la qualité de l’information qui est offerte par les registres de publicité et les normes de marquage.
2.2.1 L’exemple de la protection périphérique du brevet
Les conditions de brevetabilité d’une invention sont particulièrement rigoureuses et concernent sa nouveauté, son utilité et l’apport inventif qu’elle représente par rapport à la technique ou à l’art antérieur[83]. La protection par brevet se rapporte directement aux revendications rédigées par le requérant dans la demande de brevet, telles qu’elles sont acceptées par l’autorité territoriale compétente[84]. La formulation de ces revendications s’avère donc déterminante quant à l’exclusivité convoitée. Inévitablement, le champ essentiel du brevet, soit la portée de la protection, s’établit grâce à l’interprétation de ces revendications.
Au Canada, la méthode téléologique est privilégiée[85]. Les tribunaux favorisent ainsi le respect de la teneur des revendications, l’équité et la prévisibilité[86]. Ils hésitent donc à assimiler les équivalents possibles aux simples mots employés dans une revendication, mais ils peuvent le faire dans certaines circonstances. Il doit alors s’agir d’équivalents manifestes[87]. Les principes applicables à l’interprétation du brevet ont été exposés par la Cour suprême du Canada en 2000 :
Les revendications d’un brevet sont souvent comparées à des « clôtures » et à des « frontières » qui délimiteraient clairement les « champs » faisant l’objet du monopole. Ainsi, dans la décision Minerals Separation North American Corp. c. Noranda Mines, Ltd., [1947] R.C. de l’É. 306, le président Thorson s’exprime dans les termes suivants, à la p. 352 :
[traduction] En formulant ses revendications, l’inventeur érige une clôture autour des champs de son monopole et met le public en garde contre toute violation de sa propriété. La délimitation doit être claire afin de donner l’avertissement nécessaire, et seule la propriété de l’inventeur doit être clôturée. La teneur d’une revendication doit être exempte de toute ambiguïté ou obscurité pouvant être évitée, et sa portée ne doit pas être flexible ; elle doit être claire et précise de façon que le public puisse savoir non seulement où il lui est interdit de passer, mais aussi où il peut passer sans risque.
En réalité, les « clôtures » sont souvent constituées d’une superposition complexe de définitions de différents éléments (ou « composants » ou « caractéristiques » ou « parties intégrantes ») dont la complexité, l’interchangeabilité et l’ingéniosité sont variables. Un ensemble de mots et d’expressions définit le monopole, met le public en garde et piège le contrefacteur. Dans certains cas, les éléments précis de la « clôture » peuvent être cruciaux ou « essentiels » au fonctionnement de l’invention revendiquée ; dans d’autres, l’inventeur peut envisager que des variantes puissent aisément être employées ou substituées sans que cela ne modifie substantiellement le fonctionnement de l’invention, et la personne versée dans l’art qui prend connaissance de la teneur de la revendication peut le constater. Il incombe au tribunal appelé à interpréter des revendications de distinguer les cas les uns des autres, de départager l’essentiel et le non-essentiel et d’accorder au « champ » délimité dans un cas appartenant à la première catégorie la protection juridique à laquelle a droit le titulaire d’un brevet valide[88].
Dans une autre décision de la même année, le plus haut tribunal du pays explique ceci :
L’analyse faite dans l’arrêt Catnic ne s’écartait donc pas de la jurisprudence antérieure du Royaume-Uni ou de notre pays. Il n’est pas irrespectueux envers lord Diplock d’affirmer qu’il a présenté dans un nouvel emballage un bon vieux produit qu’il a habilement amélioré et auquel il a apposé l’étiquette encore plus claire [traduction] « interprétation téléologique ». Dans l’arrêt Catnic, comme dans la jurisprudence antérieure, ce sont les revendications écrites qui précisent la portée du monopole, mais comme auparavant, on obtient la souplesse et l’équité en différenciant les caractéristiques essentielles (« l’essence ») de celles qui ne sont pas essentielles, au moyen d’une lecture éclairée de l’ensemble du mémoire descriptif par la personne versée dans l’art à qui il s’adresse plutôt qu’au moyen du « genre d’analyse terminologique méticuleuse que les avocats sont trop souvent tentés de faire en raison de leur formation (Catnic, précité, à la p. 243)[89].
La formulation des revendications est donc de la plus haute importance. En revanche, il faut rejeter l’interprétation basée sur le dictionnaire, la grammaire ou l’étymologie[90]. Les revendications s’adressent aux personnes compétentes dans l’art ou la technique dont relève le brevet, pour être en mesure de comprendre la nature et la description de l’invention[91]. En outre, la Cour suprême a présenté, toujours en 2000, une liste de règles d’interprétation du brevet dont l’objectif spécifique est d’établir son champ essentiel :
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La Loi sur les brevets favorise le respect de la teneur des revendications.
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Le respect de la teneur des revendications favorise à son tour tant l’équité que la prévisibilité.
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La teneur d’une revendication doit toutefois être interprétée de façon éclairée et en fonction de l’objet.
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Ainsi interprétée, la teneur des revendications définit le monopole. On ne peut s’en remettre à des notions imprécises comme « l’esprit de l’invention » pour en accroître l’étendue.
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Suivant une interprétation téléologique, il ressort de la teneur des revendications que certains éléments de l’invention sont essentiels, alors que d’autres ne le sont pas. Les éléments essentiels et les éléments non essentiels sont déterminés :
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en fonction des connaissances usuelles d’un travailleur versé dans l’art dont relève l’invention ;
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à la date à laquelle le brevet est publié ;
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selon qu’il était ou non manifeste, pour un lecteur averti, au moment où le brevet a été publié, que l’emploi d’une variante d’un composant donné ne modifierait pas le fonctionnement de l’invention, ou
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conformément à l’intention de l’inventeur, expresse ou inférée des revendications, qu’un composant en particulier soit essentiel, peu importe son effet en pratique ;
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mais indépendamment de toute preuve extrinsèque de l’intention de l’inventeur.
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Il n’y a pas de contrefaçon lorsqu’un élément essentiel est différent ou omis. Il peut toutefois y avoir contrefaçon lorsque des éléments non essentiels sont substitués ou omis[92].
-
La Cour suprême en est arrivée conséquemment à réduire à deux conditions alternatives l’élargissement du champ du brevet pour inclure dans la protection la composante expressément visée, puis ses équivalents manifestes :
Pour qu’un élément soit jugé non essentiel et, partant, remplaçable, il faut établir que (i), suivant une interprétation téléologique des termes employés dans la revendication, l’inventeur n’a manifestement pas voulu qu’il soit essentiel, ou que (ii), à la date de la publication du brevet, le destinataire versé dans l’art aurait constaté qu’un élément donné pouvait être substitué sans que cela ne modifie le fonctionnement de l’invention, c.-à-d. que, si le travailleur versé dans l’art avait alors été informé de l’élément décrit dans la revendication et de la variante et [TRADUCTION] « qu’on lui avait demandé de déterminer si la variante pouvait manifestement fonctionner de la même manière », sa réponse aurait été affirmative : Improver Corp. c. Remington […] Dans ce contexte, je crois qu’il faut entendre par « fonctionner de la même manière » que la variante (ou le composant) accomplirait essentiellement la même fonction, d’une manière essentiellement identique pour obtenir essentiellement le même résultat[93].
C’est une manière d’éviter que soit perdu l’esprit du brevet en permettant à quiconque d’outrepasser la réservation en accomplissant un acte légèrement différent de celui ou de ceux qui sont expressément décrits.
Les tribunaux de nombreux pays ont ainsi développé ce qu’il convient d’appeler la « théorie des équivalents ». L’objectif commun consiste à ne pas limiter excessivement la portée du brevet ni à lui procurer une extension indue. La dose de flexibilité applicable varie dans les États qui connaissent cette théorie.
La France est l’un de ces États. Son application de la théorie se fonde premièrement sur l’existence de moyens techniquement équivalents, c’est-à-dire qu’ils doivent remplir la même fonction et procurer un résultat identique ou de même nature[94]. L’équivalence s’apprécie selon la revendication en cause et son contexte, mais uniquement par rapport à cette revendication, et non en considérant l’ensemble de l’invention. La fonction s’entend ici de l’effet direct[95]. Évidemment, il ne s’agit pas de moyens identiques. Ils doivent donc avoir des formes ou des structures distinctes[96]. Le moyen initialement protégé doit en outre constituer une caractéristique essentielle de l’invention[97].
De plus, l’extension de la portée d’une revendication ne sera possible que si elle n’a pas été rédigée de manière à limiter sa portée à la définition particulière du moyen auquel elle faisait référence à l’origine[98]. La revendication doit s’attacher à la fonction des moyens, de telle sorte que celui d’origine et son équivalent sont interchangeables.
Une dernière condition requiert que l’équivalent qu’une personne cherche à rapatrier dans le giron du brevet ait été brevetable à la date du dépôt de la demande de protection : « si la fonction du moyen n’est pas nouvelle et si, par conséquent, le brevet ne la protège pas, un moyen de forme d’exécution différente exerçant la même fonction que le moyen breveté ne peut constituer une contrefaçon par équivalence, le résultat n’étant pas à prendre en considération[99] ».
L’approche américaine révèle elle aussi une adaptation propre de la théorie. L’examen de la procédure de délivrance du brevet, dans le contexte d’une action en contrefaçon, y sert à déterminer la portée des revendications d’un brevet et l’application de la théorie des équivalents. La contrefaçon par équivalence est retenue si des différences mineures séparent le moyen de contournement du brevet de la revendication visée (insubstantial differences[100]). La similitude de la fonction ou le fait que le moyen utilisé et le résultat sont sensiblement identiques, par exemple, entrent alors en compte. Le contexte de l’élément contrefait dans la revendication qui l’allègue est central et l’invention dans son ensemble ne doit pas alors être envisagée :
Each element contained in a patent claim is deemed material to defining the scope of the patented invention, and thus the doctrine of equivalents must be applied to individual elements of the claim, not to the invention as a whole. It is important to ensure that the application of the doctrine, even as to an individual element, is not allowed such broad play as to effectively eliminate that element in its entirety[101].
La théorie américaine de la contrefaçon par équivalents connaît toutefois des limites[102]. La revendication doit être rédigée d’une manière telle qu’elle permet l’inclusion de l’équivalent. De même, entre le dépôt de la demande et l’obtention du titre, si le breveté a circonscrit la portée de la revendication pour prendre en considération l’art antérieur, il ne peut plus avoir recours à la théorie pour recouvrer la portée initialement visée dans sa revendication. Toute réduction de ce genre à la portée d’une revendication au cours de la procédure d’octroi du brevet est assimilée à une renonciation par le breveté.
Les réponses fournies par le breveté aux questions de l’examinateur chargé du dossier peuvent également influer sur la portée de la protection. Il n’est alors pas question d’une modification de la demande, mais seulement d’un échange à propos de l’examen de la demande. Or, les explications fournies par le breveté à cette occasion détermineront la portée de la revendication discutée. L’indication de moyens comme caractéristiques essentielles, par exemple, provoquera la restriction de la portée de la revendication à ces moyens et exclura leurs équivalents. Ce sera alors la théorie du prosecution history estoppel qui entrera en jeu[103] : « The doctrine of equivalence is subservient to [prosecution history] estoppel[104]. » Cette théorie repose sur le raisonnement suivant : au cours de la procédure d’examen, le breveté a généré des avis au sein du registre public, notifiant les tiers, le cas échéant, qu’il abandonnait son droit de revendiquer un élément qui entrait auparavant dans la portée de sa demande.
La possibilité de repousser ces présomptions tendant à restreindre la portée de la revendication, qui était admise auparavant, semble avoir été radicalement restreinte depuis une décision de la Cour suprême[105] et deux décisions subséquentes rendues par la Cour du circuit fédéral[106]. L’approche américaine semble donc plus sévère que les approches canadienne et française, mais elle permet tout de même d’étendre la revendication — formulée de manière suffisamment englobante — à des équivalents techniques.
Ainsi, l’information signalée à propos d’un brevet par marquage n’est pas utile en elle-même, sinon pour annoncer qu’une recherche auprès des registres territoriaux doit être entreprise. Le registre, quant à lui, offre l’information technique de base. Les revendications qui y sont publiées doivent encore être évaluées sous l’angle de la théorie des équivalents, ce qui n’est probablement pas à la portée de tous. L’étendue des revendications peut en outre fluctuer selon l’interprétation du droit applicable au brevet, un autre ordre de subtilités qui ne relève pas des connaissances usuelles du commun des mortels…
2.2.2 L’exemple de la protection périphérique de la marque de commerce
La protection de la marque se fonde sur ses deux rôles principaux. S’agissant d’une indication de la source du produit ou du service, le caractère distinctif de la marque est d’abord ciblé. S’agissant ensuite d’un symbole de ralliement de la clientèle, pour qui elle véhicule la qualité de la marchandise ou du service (voire un style de vie), son pouvoir attractif est également visé par la protection.
La marque resterait toutefois trop vulnérable si elle était strictement circonscrite à son expression matérielle. Les concurrents ne doivent pas pouvoir trop se rapprocher, dans la conception de leur signature visuelle, puisque le public pourrait être amené à confondre les sources des produits en cause. Le rôle d’information de la marque originale serait ainsi compromis et l’achalandage qui y est associé se dissiperait. Aussi, le droit des marques conçoit une protection qui s’étend au risque de confusion[107]. La protection peut aussi s’étendre à la dépréciation de l’achalandage et à la concurrence déloyale[108]. Nous limiterons cependant notre analyse à la confusion, puisque les deux autres sujets amènent des considérations touchant des déclarations fausses ou trompeuses qui tendent à dénigrer une entreprise ou à faire passer des marchandises pour ce qu’elles ne sont pas, ou encore des emplois de marques générant la diminution de la valeur de l’achalandage, soit des cas qui excèdent le contexte de notre travail[109].
Au Canada et aux États-Unis, la confusion joue un rôle central dans la vérification de la violation du droit intellectuel. Elle influe sur une marque lorsque l’emploi d’une autre marque ou d’un nom commercial dans une même région est susceptible de faire croire au public que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées et mises en circulation dans le commerce par la même personne, que ces marchandises relèvent ou non de la même catégorie générale[110]. En principe, la double protection de la marque se limite aux catégories de biens et de services qui font effectivement l’objet d’un emploi. Il s’avère particulièrement intéressant de constater que l’interdiction de créer une confusion dans l’esprit du public étend cette protection à toutes catégories d’emploi, peu importe la catégorie de biens et de services dans laquelle elle est appelée à agir. Normalement, la protection qui transcende ces catégories s’attache à la marque notoire[111], soit lorsque l’association mentale entre une marque et la source des produits et services est tellement forte qu’elle amène le public à reconnaître cette source, peu importe le genre de biens ou de services auquel elle se rattache.
En France, conformément à la Directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques[112], le risque de confusion n’occupe pas exactement la même place dans la justification d’une condamnation de la concurrence[113]. Elle est requise pour les cas de reproduction sans autorisation de la marque sur des produits similaires, mais sa démonstration est superflue lorsqu’une telle reproduction s’effectue sur des produits identiques[114]. Les professeurs Schmidt-Szalewski et Pierre ajoutent ceci :
Indépendamment de la réparation du dommage causé par les actes de contrefaçon, ou même en l’absence de contrefaçon, le titulaire de la marque peut obtenir l’indemnisation de celui résultant d’actes de concurrence déloyale ou parasitaire connexes. Encore faut-il que les conditions de pareille action soient réunies. S’agissant de la faute, le demandeur doit faire état de faits distincts de ceux de contrefaçon ; un même fait ne peut être utilisé comme acte de contrefaçon et de concurrence déloyale[115].
La marque n’est donc pas simplement protégée selon les caractéristiques de sa fixation matérielle. Elle est protégée dans la perspective de la réalisation de sa mission d’information. Du point de vue d’un opérateur du commerce international qui vérifie l’impact de l’introduction d’une marchandise portant une marque sur un territoire étranger, il ne s’agit pas de simplement vérifier l’emploi qui y est fait d’un symbole identique pour des marchandises concurrentes. Il doit plutôt prospecter de manière passablement plus large la disponibilité de la marque en envisageant des variations de conception (de lettrage, d’orthographe ou de couleur, par exemple), tout aussi bien que les catégories de marchandises autres que celle qui intéresse l’activité d’importation.
2.2.3 L’exemple de la protection périphérique du droit d’auteur
Le droit d’auteur s’attache à l’oeuvre artistique, dramatique, littéraire ou musicale qui présente le caractère d’originalité et qui, le plus souvent, est fixée matériellement[116]. L’oeuvre est considérée comme originale non pas lorsqu’elle se distingue de tout ce qui a été fait avant ou lorsqu’elle est créative, mais plutôt lorsqu’elle tire ses origines de son auteur[117], que ce dernier ne l’a pas simplement reproduite et qu’il y a investi un travail minimal d’adresse et de jugement, un minimum d’effort intellectuel[118].
La protection conférée concerne l’oeuvre dans son ensemble, mais aussi toute partie importante de celle-ci[119]. L’évaluation de ce qui constitue une partie importante de l’oeuvre se révèle une question difficile à résoudre, d’autant que la création n’a pas à être nouvelle pour justifier sa prise en charge par les règles du droit d’auteur.
Les sources d’inspiration d’une création sont acquises au fil d’une vie, sans que l’auteur sache nécessairement préciser d’où il puise ses idées. Il intègre des connaissances, même involontairement, puis les réinvestit. Personne ne crée en vase clos. Toute création peut être liée à des expériences du passé et est plus ou moins marquée par les réalisations des créateurs antérieurs.
Évidemment, il est plus difficile de justifier l’originalité quand l’oeuvre créée est dérivée que lorsqu’elle est absolument nouvelle. Quoiqu’il ne s’agisse pas d’une condition à sa protection, si l’oeuvre est innovante ou inédite ou encore qu’elle ne ressemble à rien de ce qui existait jusqu’à sa matérialisation, le caractère original s’impose plus aisément. C’est d’ailleurs l’expression matérielle de l’oeuvre qui est appréhendée par le droit d’auteur, soit une fois le filtre personnel de l’auteur posé pour formuler les idées qui l’animent. Ainsi, les peintres qui s’installent côte à côte devant un paysage et qui le rendent sur toile d’une manière similaire mais individuelle peuvent générer, chacun, leur propre droit d’auteur sur leur réalisation. Ces droits coexisteront de manière relativement paisible dans la mesure où il n’y a pas reproduction ni copie par l’un de l’ensemble ou d’une partie importante de l’oeuvre d’un autre[120].
La zone grise qui nous intéresse réside entre l’inspiration qui est permise et la caractérisation de ce qui constitue une partie importante de l’oeuvre et qui bénéficie donc d’une protection au même titre que l’ensemble de l’oeuvre. Il y a violation du droit d’auteur quand ce qui est pris pour créer une oeuvre dérivée dépasse l’idée sous-jacente et consiste en la totalité ou en une partie importante de l’expression protégée initialement[121]. Le droit d’auteur protège effectivement l’expression de l’idée, et non l’idée exprimée ou l’idée sous-jacente[122].
La démonstration qui doit être faite implique la similitude objective entre l’oeuvre dérivée et celle dont elle est inspirée[123] et l’accès à l’oeuvre[124]. L’oeuvre d’origine doit être la source réelle ou présumée, car, s’il est prouvé que la réalisation de la seconde oeuvre s’est faite de manière indépendante, deux droits d’auteur distincts grevant respectivement chacune des oeuvres en cause seront reconnus.
L’utilisation de l’idée sous-jacente et non de son expression, d’une part, et la pure copie de l’intégralité de l’oeuvre, d’autre part, constituent deux extrêmes qui posent moins de problèmes d’application. La zone grise plus sensible reste l’utilisation par un tiers d’une partie importante d’une oeuvre protégée ; elle s’apprécie dans les faits de chaque cas et tient compte davantage de la qualité de l’emprunt que de la quantité d’éléments empruntés[125].
La tâche de comprendre l’étendue des protections rattachées aux droits intellectuels prend ainsi des proportions singulières. Il faut composer avec des paramètres jurisprudentiels flous, qui s’adaptent au cas par cas.
Conclusion
Les moyens conçus pour annoncer à autrui la réservation d’une création intellectuelle font l’objet d’un encadrement éclaté entre les ordres juridiques, puis entre les types de protections possibles. L’inscription sur les registres publics peut être obligatoire, facultative ou impossible. Le marquage des supports physiques reste généralement peu encadré sur le plan législatif ; lorsqu’il l’est, son emploi est exigé uniquement pour permettre le recouvrement de dommages en cas de contrefaçon. Les tribunaux, en parallèle, admettent parfois la défense d’ignorance du contrefacteur, même lorsque le droit intellectuel a fait l’objet d’une publication au registre ou lorsqu’un marquage dénonce le même droit, pourvu que le numéro d’enregistrement du droit ait été omis. Ces occurrences varient en fonction du principe de territorialité et de la spécificité de chaque protection. L’emploi des moyens de communication ne semble donc pas déboucher sur une obligation de prudence ou de vérification des tiers.
Au reste, les moyens conçus pour annoncer à autrui la réservation d’une création intellectuelle ne parviennent pas à assurer la communication d’informations claires et complètes. Toute l’ampleur des protections ne saurait être explicitée dans un registre et encore moins être véhiculée par un marquage. La branche du droit qui justifie ces protections est beaucoup trop complexe et son évolution dépend trop fortement de la progression des créations intellectuelles elles-mêmes. La souplesse des régimes de protection et leur effet utile dans le temps requièrent sûrement que le droit de la propriété intellectuelle ne soit pas ainsi cantonné dans un modèle rigide.
L’évolution constante et la subtilité du domaine[126] ne parviennent toutefois pas, il nous semble, à justifier l’encadrement effacé des moyens permettant de signaler le droit intellectuel aux tiers. En avant-propos de la dernière édition de leur ouvrage sur la propriété intellectuelle, les auteurs William Cornish, David Llewelyn et Tanya Aplin notent même ceci :
Intellectual Property used to be regarded by most judges, lawyers, industrialists, politicians, journalists, civil servants and individual inventors and creators as a recondite specialism that was best left to small bands of people who knew what it was about. Today it is too important and too controversial for such casualness to pass muster. The reach of the various types of protection – by patents, copyright, trademarks and so on – has expanded and at the same time the relevant law has become far more complex than before. Legislation – primary and secondary – streams forth. The decisions of courts form a rising tide[127].
Il serait pour le moins difficile d’envisager d’obliger le recours aux registres pour les droits qui naissent autrement que par enregistrement, certes. Néanmoins, là où le chevauchement des protections est revendiqué, notamment, l’inscription sur les registres appropriés devrait s’imposer uniformément. Qui plus est, le marquage obligatoire de toutes les protections revendiquées présenterait des avantages significatifs et pourrait être envisagé précisément pour les titulaires qui font l’exploitation économique de leurs créations intellectuelles. À cet égard, le nom du titulaire devrait être exigé en vue de faciliter l’accès aux informations pertinentes par les tiers. Le numéro d’enregistrement, lorsqu’il existe, ainsi que les territoires couverts devraient aussi être indiqués.
Le marquage présente l’intérêt d’annoncer à tous ceux qui entreront en contact avec le bien l’existence d’un droit. En retour, le marquage permet à ces derniers de prendre acte du droit, les informe quant au type de protection visée et leur permet de procéder à la vérification dudit droit. En somme, le marquage offre aux tiers les moyens d’accomplir des gestes préventifs pour éviter de porter atteinte aux droits intellectuels. Par ailleurs, contrairement aux registres de publicité des droits, le marquage est moins formaliste et moins coûteux et il intéresse pareillement tous les types de propriété intellectuelle.
La logique des effets erga omnes serait ainsi beaucoup mieux servie. La complexité du domaine commande une meilleure communication, malgré les imperfections qui subsisteraient. Qui plus est, les informations ainsi divulguées favoriseraient la prévention des différends de propriété intellectuelle. Ces différends sont notoires en raison de leur longueur, de leur coût démesuré et de leur niveau de difficulté. Le titulaire tirerait sûrement avantage d’un effet préventif. Il faut, par ailleurs, prendre garde d’oublier la perspective de celui qui est poursuivi pour atteinte à un droit intellectuel. Car, à supposer qu’il soit admis à présenter une défense d’ignorance, certaines conséquences découlant d’un procès ne pourront jamais être réparées.
En matière de droits intellectuels, même les plus acharnés ne peuvent prétendre détenir la clé d’une vérification diligente parfaite. Le constat inquiète. Sans en faire une quête de perfection, nous estimons que l’importance de l’équilibre entre les intérêts des titulaires de droits intellectuels et les intérêts d’autrui commande un encadrement plus ferme des moyens employés pour signaler l’existence de ces droits.
Appendices
Note biographique
Sophie Verville
Professeure, Faculté de droit, Université Laval ; membre du Barreau du Québec.
Notes
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[1]
David Vaver, Intellectual Property Law. Copyright, Patents, Trade-marks, 2e éd., Toronto, Irwin Law, 2011, p. 3 ; Yves Plasseraud et François Savignon, L’État et l’invention. Histoire des brevets, Paris, La Documentation française, 1986, p. 73.
-
[2]
Starbucks Corporation a fait protéger par voie de brevet ce genre de procédé. Entre autres pays où la protection est en vigueur, signalons l’enregistrement no CA 2811121 au Canada (Boissons avec des saveurs et des arômes améliorés et son procédé de réalisation, déposé le 19 février 2009), l’enregistrement no 8,043,645 aux États-Unis (Method of Making Beverages with Enhanced Flavors and Aromas, déposé le 9 juillet 2008) et l’enregistrement no EP2443938 en France (Boisson au café à partir de produits solubles et procédé de fabrication, déposé le 19 février 2009).
-
[3]
La plus récente version du célèbre logo de la sirène est notamment enregistré au Canada (Starbucks Coffee & Design, no LMC704178, produite le 3 juin 2004), aux États-Unis (Starbucks Coffee, no 78254552, produite le 27 mai 2003) et en Europe (Starbucks Coffee, marque communautaire no 2013/044, déposée le 19 septembre 2012).
-
[4]
Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, c. C-42, art. 3 (1) (a) (ci-après « Loi sur le droit d’auteur ») ; Code de la propriété intellectuelle, art. L. 122-4 (ci-après « CPI »). Aux États-Unis, une disposition analogue prévoit que le titulaire du copyright a le droit exclusif de créer des oeuvres dérivées à partir de l’oeuvre protégée, un concept qui inclut les traductions d’une oeuvre (17 U.S.C. § 101 (s.v. « Derivative work ») et § 106 (2) (2012)).
-
[5]
Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, c. P-4, art. 42 (ci-après « Loi sur les brevets ») ; CPI, art. L. 613-3 (a) ; 35 U.S.C. § 271 (a) (2012).
-
[6]
Loi sur les dessins industriels, L.R.C. 1985, c. I-9, art. 11 (1) (a) (ci-après « Loi sur les dessins industriels ») ; CPI, art. L. 513-4. Aux États-Unis, la protection du design d’un objet fonctionnel relève d’un type particulier de brevet nommé « design patent ». La loi américaine (35 USC § 289 (2012)) ne réserve pas formellement le droit d’importation au titulaire et se limite plutôt au droit de fabriquer, d’utiliser et de vendre un produit incorporant le design breveté sur le territoire des États-Unis pendant la durée de la protection.
-
[7]
Le droit appréhende différemment ces objets. De nombreux auteurs se sont intéressés à ce sujet. Voir particulièrement : Denys-Claude Lamontagne, Biens et propriété, 6e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2009, nos 108 et suiv. ; Pierre-Claude Lafond, Précis de droit des biens, 2e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2007, nos 66 et suiv. et nos 457 et suiv. ; Jean-Michel Bruguière, Droits des propriétés intellectuelles, Paris, Ellipses, 2005, p. 106 et 107 ; Sylvio Normand, Introduction au droit des biens, Montréal, Wilson & Lafleur, 2000, p. 49 et suiv. ; Pierre-Emmanuel Moyse, « La nature du droit d’auteur : droit de propriété ou monopole ? », (1998) 43 R.D. McGill 507 ; Michel Vivant (dir.), Les créations immatérielles et le droit, Paris, Ellipses, 1997, p. 14 et suiv. ; Jean-Marc Mousseron, Jacques Raynard et Thierry Revet, « De la propriété comme modèle », dans Mélanges offerts à André Colomer, Paris, Litec, 1993, p. 281.
-
[8]
Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, annexe 1C de l’Accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1869 R.T.N.U. 332, art. 27 (1) (entré en vigueur le 1er janvier 1995) (ci-après « Accord sur les ADPIC »). Dans le texte de cette disposition, une note placée à la fin de la phrase citée (note 5) précise ceci : « Aux fins de cet article, les expressions “activité inventive” et “susceptible d’application industrielle” pourront être considérées par un Membre comme synonymes, respectivement, des termes “non évidente” et “utile”. » Voir aussi Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) (dir.), Introduction to Intellectual Property. Theory and Practice, Londres, Kluwer Law International, 1997, p. 123 et suiv.
-
[9]
OMPI, « Qu’est-ce qu’un dessin ou modèle industriel ? », [En ligne], [www.wipo.int/designs/fr/] (5 mai 2013). Voir aussi OMPI, préc., note 8, p. 221 et suiv.
-
[10]
Accord sur les ADPIC, art. 15 (1). Cette disposition précise que « [d]e tels signes, en particulier les mots, y compris les noms de personne, les lettres, les chiffres, les éléments figuratifs et les combinaisons de couleurs, ainsi que toute combinaison de ces signes, seront susceptibles d’être enregistrés comme marques de fabrique ou de commerce ». Elle prévoit par ailleurs que les pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) peuvent subordonner l’enregistrement de la marque au caractère distinctif qu’elle doit acquérir par son emploi commercial. De même, les pays membres peuvent restreindre le concept aux signes perceptibles visuellement. OMPI, préc., note 8, p. 183 et suiv.
-
[11]
Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886, 14 juillet 1967, 828 R.T.N.U. 221, art. 2 (1) (entrée en vigueur le 29 janvier 1970) (ci-après « Convention de Berne »). Voir aussi OMPI, préc., note 8, p. 151 et suiv.
-
[12]
Cette possibilité intéresse particulièrement les marques, les dessins et modèles ainsi que le droit d’auteur. OMPI, Comité permanent du droit des marques, des dessins et modèles industriels et des indications géographiques, Les marques et leur rapport avec les oeuvres littéraires et artistiques, OMPI SCT/16/5 (13-17 novembre 2006).
-
[13]
Nicolas Bouche, Le principe de territorialité de la propriété intellectuelle, Paris, L’Harmattan, 2002, voir, notamment, p. 35.
-
[14]
Jacques Raynard, « Propriétés incorporelles : un pluriel bien singulier », dans Mélanges offerts à Jean-Jacques Burst, Paris, Litec, 1997, p. 527.
-
[15]
Nous avons choisi le droit français plutôt que le droit européen, car nous souhaitons comparer des États où les quatre droits intellectuels qui nous intéressent sont en vigueur. Le brevet unitaire étant toujours attendu au sein de l’Union européenne, nous préférons utiliser le droit français aux fins de la présente réflexion. Rappelons que la protection du brevet est actuellement fragmentée en Europe. En l’absence d’un brevet unitaire, les demandes doivent être sollicitées auprès des offices nationaux ou auprès de l’Office européen des brevets : Convention sur la délivrance de brevets européens, 5 octobre 1973, 1065 R.T.N.U. 307, art. 75 (entrée en vigueur le 7 octobre 1977). La protection sous brevet européen ne crée pas de titre uniforme de protection, mais elle permet d’obtenir une protection dans autant d’États parties à la Convention que le souhaite par le demandeur (ce type de brevet demeure régi par les différentes lois nationales des pays visés). En revanche, le brevet unitaire aura pour objet de procurer un titre de protection unitaire et autonome pour l’ensemble de l’Union européenne.
-
[16]
L’absence de formalité obligatoire pour la protection du droit d’auteur (autre que le respect des critères d’originalité et de fixation matérielle) est acquise pour les pays membres de l’Union de Berne, car la Convention de Berne se fonde notamment sur le caractère automatique de la protection (art. 5 (2)).
-
[17]
L’article 2 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, c. T-13 (ci-après « Loi sur les marques de commerce ») définit la marque de commerce comme la « marque employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d’autres » (l’italique est de nous). Le législateur fédéral définit de manière distincte la marque déposée comme une marque de commerce qui apparaît au registre (donc, enregistrée). En outre, le juge MacGuigan, de la Cour d’appel fédérale du Canada, rappelait ce qui suit à l’occasion de l’affaire Asbjorn Horgard A/S c. Gibbs/Nortac Industries Ltd., [1987] 3 C.F. 544, par. 25 et 26 (C.A.) :
-
En common law, le droit sur une marque de commerce est donc issu de l’usage d’une marque par une entreprise pour désigner ses produits au public. L’entreprise n’avait pas à déposer sa marque pour protéger son droit de l’utiliser et prévenir l’usage abusif que pourrait en faire une autre entreprise. […]
-
Comme l’a démontré l’historique du juge en chef Laskin dans l’arrêt MacDonald, précité, la Loi canadienne a traditionnellement visé la protection des marques non déposées aussi bien que celle des marques déposées, ce en quoi elle se compare à la Loi sur le droit d’auteur [dans sa version contemporaine au jugement : S.R.C. 1970, chap. C-30], dont le champ d’application dépasse le droit d’auteur enregistré. Dans les deux lois, le rôle de l’enregistrement est d’offrir des avantages en sus de ceux que fournit la common law.
Ces propos ont été repris par le juge LeBel de la Cour suprême dans l’arrêt Kirkbi AG c. Gestions Ritvik Inc., [2005] 3 R.C.S. 302, par. 30. La loi américaine sur les marques de commerce (15 U.S.C. § 1051 et § 1127 (2012)) définit la marque comme un mot, un nom, un symbole, un « device » ou toute combinaison de ces éléments qui est employé par une personne ou qu’une personne a, de bonne foi, l’intention d’employer dans le commerce ou emploie déjà, de bonne foi, dans le commerce. La protection accordée aux marques au Canada et aux États-Unis est donc indépendante de tout enregistrement – l’intérêt de l’enregistrement résidant toutefois en des droits plus étendus.
-
-
[18]
Signalons néanmoins que la France aménage une protection pour les marques d’usages non déposées qui se fonde sur le régime de la concurrence déloyale. Jérôme Passa, J.-Cl. Marques − Dessins et modèles, fasc. 7550, nos 9 et suiv.
-
[19]
« L’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous », selon l’article L. 111-1, al. 1 CPI, tandis que l’article L. 111-2 CPI confirme l’absence de formalisme au déclenchement de la protection : « L’oeuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur. » La France, néanmoins, connaît une procédure de dépôt légal – comme plusieurs autres pays d’ailleurs, dont le Canada et les États-Unis. Cette mesure amène Agnès Robin, maître de conférences à la Faculté de droit et de science politique de l’Université Montpellier 1, à affirmer que, « bien que l’absence de formalité dans la naissance du droit d’auteur soit depuis toujours justifiée par la finalité de celui-ci et exprimée dans le principe selon lequel le droit naît de la création de l’oeuvre, elle a été largement compensée par le développement des procédures de dépôt légal des oeuvres » : Agnès Robin, J.-Cl. Propriété littéraire et artistique, fasc. 1240, n° 35. Cependant, le dépôt légal ne vise que certains types d’oeuvres, et non l’ensemble des créations susceptibles d’être protégées au titre du droit d’auteur. Le dépôt légal permet de ménager une preuve d’antériorité en cas de contestation au sujet de documents imprimés, graphiques, photographiques, sonores, audiovisuels, multimédias (peu importe le procédé de leur production, de leur édition ou de leur diffusion), les logiciels et les bases de données, les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l’objet d’une communication au public par voie électronique (Code du patrimoine, art. L. 131-2). L’objectif de cette procédure de dépôt, selon l’article L. 131-1 du Code du patrimoine, est triple, c’est-à-dire la collecte et la conservation des documents visés (Code du patrimoine, art. L. 131-1, al. 1), la constitution et la diffusion de bibliographies nationales (Code du patrimoine, art. L. 131-1, al. 2) ainsi que la consultation des documents visés dans des conditions conformes à la législation sur la propriété intellectuelle et compatibles avec leur conservation (Code du patrimoine, art. L. 131-1, al. 3). Par ailleurs, signalons que les actes juridiques réalisés sur certaines oeuvres sont également publiés dans des registres spécialisés, comme le Registre public de la cinématographie et de l’audiovisuel, créé par la loi du 22 février 1944 (Loi du 22 févr. 1944 relative à la publicité des actes, conventions et jugements en matière de cinématographie, J.O. 10 mars 1944, p. 729), modifiée par le décret du 22 mai 1987 (Décret n° 87-348 du 22 mai 1987 relatif au registre institué par l’art. 31 du Code de l’industrie cinématographique, J.O. 28 mai 1987, p. 5826). Là encore, les mesures n’embrassent pas l’ensemble du droit d’auteur. Leurs objectifs sont également différents de ceux qui sont servis par un registre public des droits d’auteur. Le professeur Edelman explique d’ailleurs que le Registre public de la cinématographie et de l’audiovisuel représente « une sorte de registre hypothécaire, son rôle étant de garantir la sécurité des relations contractuelles et financières entre les différentes catégories de professionnels du cinéma » : Bernard Edelman, « Droits d’auteur et droits voisins. Commentaire de la loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 », D. 1987.123. La publicité des oeuvres dans le but de répondre au besoin de prévisibilité et de sécurité juridique des tiers n’est donc pas directement en cause. Il serait, en définitive, inapproprié d’assimiler ces possibilités à un registre de publicité du droit d’auteur. Voir aussi Jacques Raynard, « Le tiers au pays du droit d’auteur. Publicité et opposabilité de la propriété littéraire et artistique », J.C.P. 1999.I.138.
-
[20]
Convention de Berne, art. 5. Avant l’entrée en vigueur de cette convention, chaque pays appliquait ses propres règles pour la reconnaissance du droit d’auteur, de sorte qu’un auteur devait accomplir des formalités qui variaient selon les pays où il souhaitait se prévaloir d’une protection.
-
[21]
Loi sur le droit d’auteur, art. 54 et suiv. L’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) fournit un accès au registre des droits publiés sur Internet : OPIC, [En ligne], [opic.ic.gc.ca] (5 mai 2013).
-
[22]
Id., art. 5 (1).
-
[23]
L’article 55 (1) de la Loi sur le droit d’auteur confirme vraisemblablement ce caractère facultatif : « La demande d’enregistrement d’un droit d’auteur sur une oeuvre peut être faite par l’auteur, le titulaire ou le cessionnaire du droit d’auteur, ou le titulaire d’une licence accordant un intérêt dans ce droit, ou en leur nom » (l’italique est de nous).
-
[24]
17 U.S.C. § 705 (2012) et 17 U.S.C. § 102 (a) (2012). L’United States Copyright Office (ci-après « US Copyright Office ») gère ce système et son registre est également accessible sur Internet : US Copyright Office, [En ligne], [www.copyright.gov/records/] (5 mai 2013).
-
[25]
Sur l’histoire du droit d’auteur au Canada, particulièrement les lois édictées avant la loi actuelle, voir Normand Tamaro, Le droit d’auteur. Fondements et principes, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1994, p. 22 et suiv. Pour une analyse historique des formalités américaines entourant les oeuvres, voir : Jane C. Ginsburg, « The U.S. Experience with Mandatory Copyright Formalities : A Love/Hate Relationship », (2009-2010) 33 Colum. J.L. & Arts 311 ; Oren Bracha, « The Adventures of the Statute of Anne in the Land of Unlimited Possibilities : The Life of a Legal Transplant », (2010) 25 Berkeley Tech. L.J. 1427 ; James Gibson, « Once and Future Copyright », (2005) 81 Notre Dame L. Rev. 167 ; Christopher Sprigman, « Reform(aliz)ing Copyright », (2004) 57 Stan. L. Rev. 485.
-
[26]
Concernant les avantages que procure un enregistrement du droit d’auteur, voir D. Vaver, préc., note 1, p. 63 et suiv. ; Sheldon Burshtein, The Corporate Counsel Guide to Intellectual Property Law, Aurora, Canada Law Book, 2000, p. 90 et 91 ; John Tehranian, « The Emperor Has No Copyright : Registration, Cultural Hierarchy, and the Myth of American Copyright Militancy », (2009) 24 Berkeley Tech. L.J. 1399, spécialement 1450 et 1451.
-
[27]
En 2002, plusieurs États membres de l’OMPI ont demandé la réalisation d’une étude sur la question des systèmes d’enregistrement volontaire des droits d’auteur. Certains de ces États y voyaient une occasion qui les aiderait à mieux saisir les questions soulevées et à mieux juger si un système d’enregistrement volontaire pourrait servir leur intérêt national (et, le cas échéant, dans quelle mesure). Certains États y voyaient même possiblement un outil de lutte contre le piratage. C’est ainsi que l’OMPI a réalisé une importante étude de droit comparé : OMPI, Comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes, Enquête sur les législations nationales concernant les systèmes d’enregistrement volontaire du droit d’auteur et des droits connexes, OMPI SCCR/13/2 (21-23 novembre 2005).
-
[28]
Loi sur les marques de commerce, art. 2.
-
[29]
Voir, par exemple, les articles 20 et 22 de la Loi sur les marques de commerce.
-
[30]
Voir, par exemple, les articles 17 à 19 de la Loi sur les marques de commerce. Ainsi, les dispositions de cette loi qui intéressent les « marques de commerce » ou l’« adoption » de marques de commerce peuvent toucher simultanément les marques déposées et les marques non déposées. C’est notamment le cas des articles 7 à 10 de cette loi. Voir aussi : Partlo c. Todd, [1888] 17 R.C.S. 196, 200 ; Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc., [2011] 2 R.C.S. 387, par. 35 et suiv. ; Peter Burn, Guide to Patent, Trade Mark & Copyright Law in Canada, Toronto, Coles, 1977, p. 77 ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 42 et suiv. ; Roger T. Hughes et Toni Polson Ashton, Hughes on Trade Marks, Markham, LexisNexis, 2004, no 17 ; Terrance S. Carter et U. Shen Goh, Branding & Trade Marks Handbook. For Charitable and Not-for-Profit Organizations, Markham, LexisNexis, 2006, p. 59 et suiv.
-
[31]
15 U.S.C. § 1051 (a) (1) (2012) (l’italique est de nous).
-
[32]
Une telle protection est notamment assurée par le paragraphe 15 U.S.C. § 1125 (a) (2012). Voir aussi : United Drug Co. v. Theodore Rectanus Co., 248 U.S. 90 (1918) ; Joshua Meier Co. v. Albany Novelty Mfg. Co., 236 F.2d 144 (2d Cir. 1956) ; Keebler Co. v. Rovira Biscuit Corp., 624 F.2d 366, 376 (1st Cir. 1980) ; General Healthcare Ltd. v. Qashat, 364 F.3d 332, 335 (1st Cir. 2004).
-
[33]
La marque pourrait néanmoins justifier une protection instantanée par le droit d’auteur, si tant est qu’elle corresponde au concept d’oeuvre, c’est-à-dire qu’elle allie originalité et fixation matérielle (Convention de Berne, art. 5). Il s’agirait alors vraisemblablement d’une oeuvre artistique. Un tel chevauchement des protections par droit d’auteur et par marque de commerce est possible en France (CPI, art. L. 711-1) et aux États-Unis (Andrew Beckerman-Rodau, « The Problem with Intellectual Property Rights : Subject Matter Expansion », (2010) 13 Yale J.L. & Tech. 35, 73 et suiv. ; Viva R. Moffat, « Mutant Copyrights and Backdoor Patents : The Problem of Overlapping Intellectual Property Protection », (2004) 19 Berkeley Tech. L.J. 1473). Il est expressément permis au Canada par l’article 64 (3) (b) de la Loi sur le droit d’auteur. Voir aussi : Canadian Tire Corp. c. Retail Clerks Union, Local 1518, (1985) 7 C.P.R. (3d) 415 (C.F.) ; Motel 6 Inc. c. No. 6 Motel Ltd., [1982] 1 C.F. 638 (C.F.). Les critères applicables respectivement à la protection des oeuvres et des marques sont sensiblement différents. Alors qu’une oeuvre est une création originale d’un auteur, une marque doit distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’autres entreprises sur le marché. Les protections se recoupent, en partie, sur certains objets, mais elles restent distinctes et fidèles à leur finalité. Voir aussi OMPI, Comité permanent du droit des marques, des dessins et modèles industriels et des indications géographiques, préc., note 12. Deux affaires jugées au cours des six dernières années au Canada et aux États-Unis illustrent la difficulté du cumul des protections par droit d’auteur et par droit des marques : Euro-Excellence Inc. c. Kraft Canada Inc., [2007] 3 R.C.S. 21 ; Omega S.A. v. Costco Wholesale Corp., 541 F.3d 982, (9th Cir. 2008), et Costco Wholesale Corp. v. Omega, S.A., 131 S. Ct. 565 (2010).
-
[34]
La marque non encore utilisée peut faire l’objet d’un dépôt au titre d’un emploi projeté : Loi sur les marques de commerce, art. 30 ; 15 U.S.C. § 1051 (b) (2012). Toutefois, au terme du processus d’examen de la demande par le registraire, la preuve de l’emploi effectif de la marque sera exigée (Loi sur les marques de commerce, art. 40 (2) ; 15 U.S.C. § 1051 (d) (2012)).
-
[35]
Les tribunaux canadiens ont maintes fois affirmé que le droit dans la marque ne s’acquiert pas par enregistrement, mais que ce dernier confirme la propriété déjà établie en vertu d’un usage fondant son caractère distinctif : Partlo c. Todd, préc., note 30 ; Bergeron, Whissell & Co. c. Jonkopings & Vulcan Tandsticksfabriksaktiebolag, (1914) 15 Ex. C.R. 265, conf. par [1915] R.C.S. 411 ; Jaczynski c. Lemieux, (1951) 15 C.P.R. 57 (Ex. Ct.). Sur les avantages que procure un tel enregistrement : D. Vaver, préc., note 1, p. 430 et suiv. ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 43.
-
[36]
Loi sur les marques de commerce, art. 40. Le registre est accessible gratuitement : OPIC, [En ligne], [opic.ic.gc.ca] (5 mai 2013).
-
[37]
15 U.S.C. § 1051 (2012). United Drug Co. v. Theodore Rectanus Co., préc., note 32 ; Esso, Inc. v. Standard Oil Co., 98 F.2d 1 (8th Cir. 1938). Un service de recherche pour les demandes en instance et les titres accordés, le Trademark Electronic Search System, est offert par l’United States Patent and Trademark Office : [En ligne], [tess2.uspto.gov/] (5 mai 2013).
-
[38]
Un tel recours serait fondé au Québec sur l’article 1457 du Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64. Les recours en concurrence déloyale aménagés dans les provinces de common law et celui qui découle de la responsabilité civile en droit québécois ont d’ailleurs été partiellement codifiés à l’article 7 de la Loi sur les marques de commerce. La constitutionnalité de certains passages de cette disposition est toutefois incertaine. Son alinéa e) a d’ailleurs été jugé inconstitutionnel par la Cour suprême : MacDonald c. Vapor Canada Ltd., [1977] 2 R.C.S. 134. Sur ce sujet, voir notamment D. Vaver, préc., note 1, p. 45 et 46.
-
[39]
Id., art. L. 712-2. Le service de recherche de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) permet d’accéder gratuitement aux informations bibliographiques et légales de même qu’aux logos des marques françaises qui sont entrées en vigueur (mais qui ne le sont peut-être plus) depuis 1976, aux marques communautaires en vigueur et aux marques internationales en vigueur désignant ou non la France. Ce service est consultable sur Internet : INPI, [En ligne], [bases-marques.inpi.fr/] (5 mai 2013).
-
[40]
Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, 20 mars 1883, 828 R.T.N.U. 107, art. 6bis (entrée en vigueur le 4 janvier 1962), (ci-après « Convention de Paris »).
-
[41]
J. Passa, préc., note 18, n° 9.
-
[42]
Id.
-
[43]
Code civil français, art. 1382 et 1383.
-
[44]
Cette question appellerait plusieurs nuances et précisions qui s’étendent bien au-delà de notre propos. Pour une analyse de l’état du droit sur la question, voir J. Passa, préc. note 18, nos 9 et suiv. Signalons néanmoins que le régime de protection français se distingue très nettement de ceux du Canada et des États-Unis. Ces deux derniers intègrent dans le droit des marques à la fois les marques déposées et celles qui ne le sont pas (y compris les marques notoires).
-
[45]
Paris, 18 avr. 1989, Annales de la propriété industrielle, artistique et littéraire 1990.124.187 ; Paris, 14 mai 2003 : Juris-Data n° 220086 ; Propriétés intellectuelles 2004.11.676, obs. Jérôme Passa ; Com. 23 mars 2010, n° 09-65.844, inédit ; n° 09-66.987, inédit ; n° 09-66.522, inédit.
-
[46]
Loi sur les dessins industriels, art. 9.
-
[47]
Cette obligation découle du jeu des dispositions suivantes : 35 U.S.C. § 171 (2012), 37 C.F.R. § 1.151 (2012) et 35 U.S.C. § 111 et suiv. (2012).
-
[48]
CPI, art. L. 511-9.
-
[49]
Nous avons déjà signalé le cumul possible des protections par droit d’auteur et par marque de commerce (supra, note 33). Afin d’ajouter la dimension du dessin industriel, précisons que le chevauchement des trois protections est régi au Canada par l’article 64 (3) de la Loi sur le droit d’auteur. Il est également possible en France en vertu des articles L. 711-1 et L. 513-2 du CPI et aux États-Unis. Pour ce dernier pays, voir : Application of Yardley, 493 F.2d 1389, 181 U.S.P.Q. 331 (recoupement entre le droit d’auteur et le design patent) ; Application of Mogen David Wine Corp., 328 F.2d 925, 140 U.S.P.Q. 575, 51 C.C.P.A. 1260 et 372 F.2d 539, 152 U.S.P.Q. 593, 54 C.C.P.A. 1086 (recoupement entre la marque de commerce et le design patent).
-
[50]
Loi sur les brevets, art. 27 (1) et 42.
-
[51]
35 U.S.C. § 111 et suiv. (2012).
-
[52]
CPI, art. L. 611-1 et suiv.
-
[53]
Cette branche de la propriété intellectuelle justifie d’ailleurs la profession spécialisée d’agent de brevet.
-
[54]
Aux États-Unis, les règles générales relatives au brevet s’appliquent au dessin industriel (design patent), sous réserve de certaines dispositions spécifiques.
-
[55]
Au sujet de la marque de commerce, voir INPI, « Puis-je utiliser les caractères TM ou R sur mes brochures et papiers commerciaux ? », [En ligne], [www.inpi.fr/fr/questions-faq/liste-des-questions/faq_categorie/ autres-questions415.html?cHash=7b73bb32fb] (5 mai 2013). Quant au droit d’auteur, voir INPI, [En ligne], [www.inpi.fr/fr/questions-faq/question/faq_question/lutilisation-du-sigle-c-copyright- est-elle-soumise-a-autorisation-2488.html?cHash=2dd6d5fb3e] (5 mai 2013).
-
[56]
En l’absence de marquage, donc, le propriétaire devrait encore reconnaître les composantes de l’objet qui pourraient être visées par une propriété intellectuelle et s’assurer qu’aucune exclusivité n’existe aux endroits où il entend introduire cet objet.
-
[57]
En outre, la consultation des registres est, dans certains cas, possible par l’entremise d’Internet ; autrement, elle doit être faite en personne aux bureaux de l’autorité territoriale compétente.
-
[58]
35 U.S.C. § 287 (a) (2012).
-
[59]
Id.
-
[60]
Cordance Corp. v. Amazon.com, Inc., 631 F.Supp.2d 484 (D. Del. 2009) ; Maxwell v. J. Baker, Inc., 86 F.3d 1098 (Fed. Cir. 1996).
-
[61]
35 U.S.C. § 287 (a) (2012).
-
[62]
Id. Le fait d’intenter l’action en contrefaçon constitue un avis au sens du droit fédéral américain.
-
[63]
Inline Connection Corp. v. AOL Time Warner Inc., 465 F.Supp.2d 312 (D. Del. 2006) ; Loral Fairchild Corp. v. Victor Co. of Japan, Ltd., 906 F.Supp. 813 (N.Y. Dist. Ct. 1995).
-
[64]
D’ailleurs, la présence de marquage sur un produit facilite parfois les démarches du titulaire pour faire respecter son droit intellectuel. Au-delà de l’exemple du droit des brevets américains qui le requiert, le marquage peut permettre de contrer le moyen de défense fondé sur l’ignorance du droit, lorsqu’un tel moyen est admis, bien sûr.
-
[65]
D. Vaver, préc., note 1, p. 638.
-
[66]
Loi sur les dessins industriels, art. 17 (1) et (2).
-
[67]
Loi sur les brevets, art. 75 (c).
-
[68]
35 U.S.C. § 292 (2012).
-
[69]
35 U.S.C. § 287 (2012).
-
[70]
Nike, Inc. v. Wal-Mart Stores, Inc., 138 F.3d 1437 (Fed. Cir. 1998).
-
[71]
Loi sur le droit d’auteur, art. 39 (1). Signalons aussi que la connaissance réelle ou présumée (« sait ou devrait savoir ») est également une condition dans le contexte d’un recours pour violation du droit d’auteur à une étape ultérieure, selon l’article 27 (2) de la Loi sur le droit d’auteur.
-
[72]
Le professeur Vaver relate même que la défense fonctionne rarement lorsque le titre intellectuel était signalé par marquage sur l’exemplaire original. D. Vaver, préc., note 1, p. 638 et 639, citant l’affaire Fletcher c. Polka Dot Fabrics Ltd., (1993) 51 C.P.R. (3d) 241, 250 (Ont. Sm. Cl. Ct.).
-
[73]
Lionel Bently et Brad Sherman, Intellectual Property Law, 2e éd., Oxford, Oxford University Press, 2004, p. 1101 et 1102.
-
[74]
Frédéric Pollaud-Dulian, Propriété intellectuelle. La propriété industrielle, Paris, Economica, 2011, no 1665.
-
[75]
Id., no 1759.
-
[76]
Civ. 1re, 29 mai 2001 et 26 juin 2001, Propriétés intellectuelles 2001.1.71 (note Sirinelli) ; F. Pollaud-Dulian, préc., note 74, no 1138.
-
[77]
Michel Vivant et Jean-Michel Bruguière, Droit d’auteur, Paris, Dalloz, 2009, notamment no 1074. Ces professeurs citent, entre autres, André Lucas et Henri-Jacques Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, 3e éd., Paris, Litec, 2006, no 979, et Pierre-Yves Gautier, « L’indifférence de la bonne foi dans le procès civil », Propriétés intellectuelles 2002.3.28.
-
[78]
M. Vivant et J.-M. Bruguière, préc., note 77, no 1074.
-
[79]
Id.
-
[80]
CPI, art. L. 615-1, al. 1 et 2. Voir aussi F. Pollaud-Dulian, préc., note 74, nos 751 et 752.
-
[81]
CPI, art. L. 615-1, al. 3. Voir aussi F. Pollaud-Dulian, préc., note 74, nos 751 et 753.
-
[82]
L. Bently et B. Sherman, préc., note 73.
-
[83]
Loi sur les brevets, art. 2, 28 et suiv. ; 35 U.S.C. § 101 et suiv. (2012) (utility patent, cette fois) ; CPI, art. L. 611-10 et suiv.
-
[84]
Loi sur les brevets, art. 42 ; 35 U.S.C. § 112 et § 154 (2012) ; CPI, art. L. 613-2. Voir aussi : D. Vaver, préc., note 1, p. 274 et suiv., puis p. 345 et suiv. ; Joanna Schmidt-Szalewski et Jean-Luc Pierre, Droit de la propriété industrielle, 4e éd., Paris, Litec, 2007, no 162 ; John W. Schlicher, Patent Law, Legal and Economic Principles, 2e éd., vol. 1, West, 2003, feuilles mobiles, p. 7-1 et suiv. ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 30 et 31.
-
[85]
Cette méthode est privilégiée conformément à la décision Catnic Components Ltd. v. Hill & Smith Ltd., [1982] R.P.C. 183 (U.K.H.L. 1980), appliquée au Canada depuis la décision Eli Lilly & Co. c. O’Hara Manufacturing Ltd., (1989) 26 C.P.R. (3d) 1. La Cour suprême (Free World Trust c. Électro Santé inc., [2000] 2 R.C.S. 1024, par. 39) signale que l’arrêt Catnic a été suivi dans d’autres pays. Par contre, elle précise également ceci :
-
La décision Catnic a évidemment ses détracteurs, spécialement parmi ceux qui estiment que son application ultérieure sous le régime de la Convention sur le brevet européen prive le breveté de la protection plus grande accordée aux brevetés dans les pays du continent européen. Pour certains détracteurs, il serait plus opportun d’assimiler les revendications non pas à une « clôture », mais à une « balise ».
-
-
[86]
Cette interprétation est une question de droit et se fixe, dans le temps, au moment où la demande de brevet est rendue accessible au public en vertu de l’article 10 de la Loi sur les brevets. Pour une critique des décisions rendues par la Cour suprême en matière d’interprétation des brevets, voir Mistrale Goudreau, « De la prétendue interprétation téléologique des revendications de brevet : remarques sur les arrêts Whirlpool et Free World Trust », (2005) 2 University of Ottawa Law & Technology Journal 219.
-
[87]
Robert H. Barrigar et Andrew M. Shaughnessy, Canadian Patent Act Annotated, 2e éd., Aurora, Canada Law Book, 1994, feuilles mobiles, p. PA-463 et suiv., (à jour en septembre 2012).
-
[88]
Free World Trust c. Électro Santé inc., préc., note 85, par. 14 et 15 (l’italique est de nous).
-
[89]
Whirlpool Corp. c. Camco inc., [2000] 2 R.C.S. 1067, par. 48 (l’italique est de nous).
-
[90]
Id., par. 52 et 53. Ces propos ont été repris avec approbation dans l’affaire Janssen Pharmaceutica Inc. c. Apotex Inc., [2002] 1 C.F. 393, par. 35. Voir aussi l’affaire Lapierre c. Équipements d’érablière C.D.L. Inc., (2004) 33 C.P.R. (4th) 402 (C.F.), par. 41 et 59.
-
[91]
Harold G. Fox, The Canadian Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions, 4e éd., Toronto, Carswell, 1969, p. 185.
-
[92]
Free World Trust c. Électro Santé inc., préc., note 85, par. 31.
-
[93]
Id., par. 55.
-
[94]
Trib. gr. inst. Paris, 17 mai 2006, D. 2007.336 ; Com. 31 mars 2004, no 02-18.650, inédit ; Paris, 27 mars 2002, P.I.B.D. 2002.750.III.421 ; Jacques Raynard, « L’une des premières affaires de contrefaçon statuant en matière de brevet biologie moléculaire », Propriété industrielle 2007.5.comm.36 ; Jacques Raynard, « Contrefaçon par équivalent et saisie-contrefaçon », Propriété industrielle 2007.10.comm.76 ; Paul Roubier, Le droit de la propriété industrielle, t. 2, Paris, Sirey, 1954, p. 79.
-
[95]
Com. 16 janv. 1996, no 94-13790, inédit ; Paris, 1er déc. 1988 : Juris-Data n° 026553, conf. par Com. 4 déc. 1990, Bull. civ. IV, no 304.
-
[96]
Com. 31 mars 2004, préc., note 94.
-
[97]
Id.
-
[98]
Com. 23 nov. 2010, no 09-15.668, inédit.
-
[99]
Paris, 1er déc. 1988, préc., note 95 ; Com. 31 mars 2004, préc., note 94.
-
[100]
Pall Corp. v. Micron Separations, Inc., 66 F.3d 1211, 1218 (Fed. Cir. 1995) (requête pour autorisation d’appeler rejetée, 520 U.S. 1115, (1997)) ; London v. Carson Pirie Scott & Co., 946 F.2d 1534, 1539 et 1540 (Fed. Cir. 1991) ; Graver Tank & Mfg. Co. v. Linde Air Products Co., 339 U.S. 605, 608 (1950).
-
[101]
Warner-Jenkinson Co., Inc. v. Hilton Davis Chemical Co., 520 U.S. 17, 29 (1997).
-
[102]
Id.
-
[103]
Pharmacia & Upjohn Co. v. Mylan Pharmaceuticals, Inc., 170 F.3d 1373, 1376 et 1377 (Fed. Cir. 1999) ; Charles Greiner & Co. v. Mari-Med Mfg., Inc., 962 F.2d 1031, 1036 (Fed. Cir. 1992).
-
[104]
Autogiro Co. of America v. United States, 384 F.2d 391, 400 (Ct. Cl. 1967).
-
[105]
Warner-Jenkinson Co., Inc. v. Hilton Davis Chemical Co., préc., note 101.
-
[106]
Honeywell Intern. Inc. v. Hamilton Sundstrand Corp., 370 F.3d 1131 (Fed. Cir. 2004) ; Festo Corp. v. Shoketsu Kinzoku Kogyo Kabushiki Co., Ltd., 234 F.3d 558, (Fed. Cir. 2000).
-
[107]
La confusion est interdite au Canada, en vertu de l’article 6 de la Loi sur les marques de commerce, aux États-Unis, en vertu du paragraphe 15 U.S.C. § 1114 (2012), et en France, en vertu de l’article L. 713-3 du CPI. Pour des illustrations jurisprudentielles du concept au Canada, voir : Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., [2006] 1 R.C.S. 772 ; Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot ltée, [2006] 1 R.C.S. 824 ; Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc., préc., note 30. Pour des illustrations équivalentes aux États-Unis, voir : L.E. Waterman Co. v. Gordon, 72 F.2d 272 (2d Cir. 1934) ; Boston Professional Hockey Ass’n, Inc. v. Dallas Cap & Emblem Mfg., Inc., 510 F.2d 1004 (5th Cir. 1975) (requête pour autorisation d’appeler rejetée, 423 U.S. 868, (1975)) ; AMF Inc. v. Sleekcraft Boats, 599 F.2d 341 (9th Cir. 1979). Voir aussi : Thomas McCarthy, McCarthy on Trademarks and Unfair Competition, 4e éd., Deerfield, Clark Boardman Callaghan, 2008, no 2-1 ; Cesar Ramirez-Montes, « A Re-Examination of the Original Foundations of Anglo-American Trademark Law », (2010) 14 Marq. Intell. Prop. L. Rev. 91. Pour des illustrations jurisprudentielles du concept en France, voir : Com. 26 nov. 2003, P.I.B.D. 2004.780.III.100 ; Com. 6 mars 2007, P.I.B.D. 2007.851.III.299 ; Com. 15 décembre 2009, Propriétés intellectuelles 2010.34.112 (note Marc Sabatier). Voir aussi J. Schmidt-Szalewski et J.-L. Pierre, préc., note 84, nos 589-593.
-
[108]
Loi sur les marques de commerce, art. 7 et 22 (voir aussi : Clairol International Corp. c. Thomas Supply & Equipment Co., (1968) 55 C.P.R. 176 (Ex. Ct.) ; MacDonald et al. c. Vapor Canada Ltd., [1977] 2 R.C.S. 134 ; Kelly Gill et R. Scott Jolliffe, Fox on Canadian Law of Trade-Marks and Unfair Competition, 4e éd., Toronto, Carswell, 2002, p. 7-21 et suiv. et p. 12-1 et suiv.) ; 15 U.S.C. § 1125 (2012) (voir aussi : Jantzen Knitting Mills v. Balmuth, Inc., 236 A.D. 685, 257 N.Y.S. 611 (N.Y. Sup. Ct. Ap. Div. 1931) ; Steven Wilf, « The Making of the Post-War Paradigm in American Intellectual Property Law », (2008) 31 Colum.-V.L.A. J. L. & Arts 139) ; CPI, art. L. 713-3, voir aussi : Jacques Larrieu, « Un an de concurrence déloyale », Propriété industrielle, 2009.6.chron.5 ; Mathieu Dhenne, « Appréciation comparée du risque de confusion entre marques en jurisprudence française et communautaire », Propriété industrielle 2007.4.étude.10.
-
[109]
Sur ces sujets, voir : C. Ramirez-Montes, préc., note 107 ; Jacques Azéma et Jean-Christophe Galloux, Droit de la propriété intellectuelle, 6e éd., Paris, Dalloz, 2006 ; J. Larrieu, préc., note 108 ; Jérôme Passa, « Les conditions générales d’une atteinte au droit sur une marque », Propriété industrielle 2005.2.étude.2 ; R.T. Hughes et T. Polson Ashton, préc., note 30, nos 69 et suiv ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 67 et suiv.
-
[110]
Loi sur les marques de commerce, art. 6 ; 15 U.S.C. § 1114 (2012).
-
[111]
Convention de Paris, art. 6bis (1).
-
[112]
CE, Directive 2008/95/CE du Parlement européen et du conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques, [2008] J.O., L. 299/25, art. 5.
-
[113]
Jean-Luc Piotraut, La propriété intellectuelle en droit international et comparé (France, Allemagne, Royaume-Uni, États-Unis), Paris, Tec & Doc Lavoisier, 2007, p. 56 et 57.
-
[114]
De fait, la formulation des interdictions aux tiers s’oppose à celle qui a été retenue au Canada et aux États-Unis. Il est d’abord des actes interdits sans exigence de risque de confusion en vertu de l’article L. 713-2 du CPI (par exemple, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque pour des produits identiques à ceux qui sont désignés dans l’enregistrement) et, ensuite, des actes interdits avec exigence d’un risque de confusion en vertu de l’article L. 713-3 du CPI (par exemple, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque pour des produits analogues à ceux qui sont désignés dans l’enregistrement).
-
[115]
J. Schmidt-Szalewski et J.-L. Pierre, préc., note 84, no 634. Voir aussi : J. Azéma et J.-C. Galloux, préc., note 109, p. 840 et suiv. ; J. Larrieu, préc., note 108.
-
[116]
Loi sur le droit d’auteur, art. 2 et 5 ; 17 U.S.C. § 102 (2012) ; CPI, art. L. 111-1 et suiv.
-
[117]
Le critère de créativité serait trop rigoureux en ce qu’il fait référence à la nouveauté ou à la non-évidence, soit des concepts propres au régime des brevets. Le droit d’auteur s’avère plus souple dans ses conditions d’entrée en jeu et laisse également plus de place à la concurrence, c’est-à-dire à la création d’oeuvres par d’autres. Il doit y avoir investissement d’un effort et d’un travail par l’auteur qui ne sont ni mécaniques ni négligeables. Il doit y avoir un espace pour les choix, conscients ou non, rationnels ou non, un espace créatif (sans qu’il soit question d’imposer une condition de créativité). Voir notamment : D. Vaver, préc., note 1, p. 100 et suiv. ; William R. Cornish, David Llewelyn et Tanya F. Aplin, Intellectual Property. Patents, Copyrights, Trade Marks and Allied Rights, 7e éd., Londres, Sweet & Maxwell, 2010, no 11-04 ; P. Burn, préc., note 30, p. 114 et suiv.
-
[118]
Sur le concept de l’originalité, au Canada : CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut-Canada, [2004] 1 R.C.S. 339, par. 18 et suiv., particulièrement par. 25 ; Ladbroke (Football) Ltd. v. William Hill (Football) Ltd., [1964] 1 All E.R. 465 (U.K.H.L. 1963) ; Daniel J. Gervais et Elizabeth F. Judge, Intellectual Property : The Law in Canada, 2e éd., Toronto, Carswell, 2011, p. 52 et suiv. Sur le même concept en droit américain : Feist Publications, Inc. v. Rural Telephone Service Co., 499 U.S. 340 (1991) ; Daniel J. Gervais, « Feist Goes Global : A Comparative Analysis of the Notion of Originality in Copyright Law », (2002) 49 Journal of the Copyright Society of the USA 949 ; Kregos v. Associated Press, 937 F.2d 700 (2d Cir. 1991) (requête pour autorisation d’appeler rejetée, 510 U.S. 1112 (1994)) ; Italian Book Co. v. Rossi, 27 F.2d 1014 (N.Y. Dist. Ct. S.D. 1928) ; Mary Campbell Wojcik, « The Antithesis of Originality : Bridgeman, Image Licensors, and the Public Domain », (2008) 30 Hastings Comm. & Ent. L.J. 257 ; Ralph S. Brown et Robert C. Denicola, Cases on Copyright. Unfair Competition, and Related Topics Bearing on the Protection of Works of Authorship, 9e éd., New York, Foundation Press, 2005, p. 61 ; Rochelle Cooper Dreyfuss et Roberta Rosenthal Kwall, Intellectual Property. Trademark, Copyright and Patent Law, Westbury, Foundation Press, 1996, p. 243-245. Enfin, en droit français, voir notamment : Civ. 1re, 2 mai 1989, Bull. civ. I, no 180 ; Ass. plén. 7 mars 1986, D. 1986.405 (note Bernard Edelman) ; Civ. 1re, 6 mars 1979, Bull. civ. I, no 82 ; M. Vivant et J.-M. Bruguière, préc., note 77, nos 202 et suiv. ; Pierre-Yves Gautier, Propriété littéraire et artistique, 8e éd., Paris, Presses universitaires de France, 2012, nos 34 et suiv. ; Frédéric Pollaud-Dulian, Le droit d’auteur, Paris, Economica, 2005, nos 127 et suiv.
-
[119]
Loi sur le droit d’auteur, art. 3 (1) ; 17 U.S.C. § 106 (2012) ; CPI, art. L. 122-4.
-
[120]
France Animation, s.a. c. Robinson, 2011 Q.C.C.A. 1361, par. 104 et suiv. ; Christophe Caron, « Clémence pour le contrefacteur malgré lui ! », Communication. Commerce électronique 2006.7.26.
-
[121]
France Animation, s.a. c. Robinson, préc., note 120, par. 57 et suiv. ; D. Vaver, préc., note 1, p. 181 et suiv. ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 98.
-
[122]
CPI, art. L. 111-1 et L. 112-1 ; Paris, 14 juin 2002 : Juris-Data n° 180005 ; Paris, 30 mars 2001 : Juris-Data n° 143893 ; Civ. 1re, 25 mai 1992, Bull. civ. I, no 161 ; Com. 29 nov. 1960, Bull. civ. III, no 389.
-
[123]
À cet égard, la preuve que l’oeuvre dérivée est elle-même objet d’un droit d’auteur est sans pertinence.
-
[124]
Une large diffusion de l’oeuvre d’origine peut générer une présomption d’accès. Voir, par exemple, en droit canadien : Verge c. Imperial Oil Ltd., (1988) 23 C.P.R. (3d) 159 (C.A.F.) ; Gondos c. Hardy, (1982) 64 C.P.R. (2d) 145 (Ont. S.C.) ; Francis Day & Hunter c. Bron, [1963] 2 All E.R. 16 (C.A.). Voir, par exemple, en droit américain : Three Boys Music Corp. v. Bolton, 212 F.3d 477 (9th Cir. 2000) (autorisation de pourvoi à l’United States Supreme Court refusée, 531 U.S. 1126, (2001)) ; Jason v. Fonda, 526 F.Supp. 774 (Cal. Dist. Ct. C.D. 1981) ; Sid & Marty Krofft Television Productions, Inc. v. McDonald’s Corp., 562 F.2d 1157 (9th Cir. 1977). Voir, par exemple, en droit français : Civ. 1re, 16 mai 2006, Bull. civ. I, no 246. Par contre, la Cour d’appel de Paris a établi, en 1999, que la preuve de contrefaçon n’est pas subordonnée à la démonstration précise de l’accès à l’oeuvre, dès lors qu’apparaissent des ressemblances si nombreuses et si significatives qu’elles suffisent à convaincre de l’imitation (Paris, 17 février 1999 : Juris-Data n° 023236).
-
[125]
Voir en droit canadien : CCH Canadienne ltée c. Barreau du Haut-Canada, préc., note 118 ; S. Burshtein, préc., note 26, p. 98 et 99. Voir en droit américain : Three Boys Music Corp. v. Bolton, préc., note 124 ; Fred Fisher, Inc. v. Dillingham, 298 F. 145 (N.Y. Dist. Ct. S.D. 1924) ; Chatterton v. Cave, 3 Ap. Cas. 483 (H.L. 1878). Voir en droit français : M. Vivant et J.-M. Bruguière, préc., note 77, nos 1054 et suiv. et nos 1067 et suiv. ; F. Pollaud-Dulian, préc., note 74, nos 1220 et suiv.
-
[126]
A. Beckerman-Rodau, préc., note 33.
-
[127]
W.R. Cornish, D. Llewelyn et T.F. Aplin, préc., note 117, p. v.