Dossier : Québec-Chili, 1973-2023 : mémoire d’un coup d’État et d’une expérience de solidaritéTémoignages : les Chiliens

Ma tentative de résistance au coup d’État

  • Jorge Guerra

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Cover of Québec-Chili, 1973-2023 : mémoire d’un coup d’État et d’une expérience de solidarité, Volume 31, Number 1-2, Summer–Fall 2023, pp. 7-331, Bulletin d'histoire politique

Je suis né au Cerro Barón, l’une des collines de la ville portuaire de Valparaíso, au Chili, le 2 septembre 1950. Mon père, bien que possédant une formation en commerce qu’il n’a pas terminée, est devenu ouvrier de la Maestranza Barón, où l’on faisait la manutention des trains de passagers et de marchandises. Il était dirigeant mutualiste et délégué syndical. Nous étions cinq enfants dans la famille. J’ai commencé à militer au Parti socialiste (PS) à l’âge de 17 ans, vers la fin de mes études au Lycée Eduardo de la Barra. En 1970, alors que j’étais étudiant à l’Université du Chili à Valparaíso, où je suivais une formation de pédagogie en biologie et sciences, j’ai été élu dirigeant de la jeunesse de ce parti au niveau universitaire, pour la région de Valparaíso. Au début du mois de mars 1971, j’ai commencé à travailler comme inspecteur (chargé de la discipline) au Lycée Guillermo Rivera de Viña del Mar. Lors du tremblement de terre qui a affecté toute la région en 1971, des écoles, des lycées et des universités furent fermés pendant quelques mois et des travaux volontaires furent organisés pour venir en aide aux familles sinistrées. Cette année-là, j’ai dû abandonner mon travail et mes études, car j’ai été atteint de tuberculose pendant que je participais à ces travaux. J’ai été hospitalisé pendant trois mois et, pour empêcher une récidive, j’ai dû suivre un traitement ambulatoire pendant les 18 mois suivants. Une fois sorti de l’hôpital, j’ai repris l’activité politique pendant une courte période au Comité régional de la jeunesse socialiste, et peu après au Comité régional des adultes, devenant membre du département d’éducation politique et du front interne du Parti. Ayant repris mon travail au Lycée, j’ai été chargé de faire la promotion du projet de l’École nationale unifiée (ENU), par lequel le gouvernement Allende voulait réformer le système d’éducation. Je faisais aussi partie du Cordón Industrial, dans le secteur Portales, au moment où l’on sentait de plus en plus que le coup d’État approchait. Devant cette menace, nous avons oeuvré à renforcer les structures de participation populaire et à organiser des structures sectorielles de coordination de production et de défense des industries. De plus, nous renforcions l’éducation politique des cadres populaires et des militants de nos partis politiques de gauche. Nous travaillions afin de développer et d’améliorer les niveaux de surveillance populaire, pour maintenir l’information la plus à jour possible sur les mouvements de troupes et des groupes fascistes. Dans la nuit du 10 au 11 septembre, je marchais du centre-ville jusqu’à chez-moi. J’habitais dans la maison de mes beaux-parents, située au Cerro Alegre, l’une des 40 collines de la ville. Je me rappelle être passé devant l’édifice du journal El Mercurio, bien connu pour son rôle dans l’opposition au gouvernement Allende. Comme il faisait souvent l’objet de manifestations hostiles de la part de la gauche, l’édifice était habituellement surveillé par les carabineros, mais ce soir-là il n’y avait personne, ce qui m’a paru étrange. Pendant la nuit, j’ai été réveillé par le bruit des coups de feu. Je suis parti rejoindre mes camarades. Le lendemain, vers 11 heures, nous avions réussi à regrouper une partie de nos camarades au Cordón Industrial de Portales. Nous avons appris que les putschistes recevaient des armes des navires américains qui participaient à l’opération UNITAS. Nous avons choisi de ne rien faire dans l’immédiat, nous limitant à essayer de rejoindre d’autres groupes de camarades. Par l’entremise de Radio Moscou, de la Radio des travailleurs argentins et de Radio La Havane, nous entendions dire qu’il y avait des actions de résistance …

Appendices