Volume 43, Number 1 (127), Fall 2017 Poétiques de la parole. Le parler dans l’écrit Guest-edited by Lucie Bourassa and Laurance Ouellet Tremblay
Table of contents (13 articles)
Dossier
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POÉTIQUES DE LA PAROLE : subjectivation et incarnation
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ÉCRIRE LA PAROLE : entretien avec Mathieu Arsenault et Hervé Bouchard
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ÉCRIRE POUR PARLER LA PAROLE : Ferron, Beaulieu, La Rocque
ANNE ÉLAINE CLICHE
pp. 23–42
AbstractFR:
Jamais détachée de sa performance, qui est aussi sa fonction symbolique, la parole est adressée, elle va de l’un à l’autre quelle que soit la valeur de son dit, indissociable de sa valeur de tessère. La parole a pour destin de passer, de circuler, de faire lien, d’être prise et reprise, répétée, rapportée, détournée. Que la parole soit oralité ne veut pas dire qu’elle s’oppose à la lettre et à l’écrit. Pour la Bible, elle est une écriture qui s’incorpore, comme nous le montrent Ézéchiel et Jean à Patmos. La parole est ce dehors qui se parle en moi. Cet article analyse le statut de la parole chez Gilbert La Rocque en passant rapidement par Jacques Ferron et Victor-Lévy Beaulieu. Dans cette écriture aimantée par la bouche d’ombre du maternel, l’inter-dit est indissociable du dire que le sujet assume contre sa propre mort. Pour La Rocque, les surgissements du passé se donnent à entendre comme des sortes d’îlots prosodiques faisant retour telle une multiplicité du « moi » qui les entend et les raconte. La mémoire ne sauve pas, elle est ce qui, dans la voix qui parle, témoigne de la violence immanente de l’Autre.
EN:
Never detached from its performance (which is also its symbolic function), speech is addressed: it goes from one to the other, regardless of the value of what it says, which cannot be dissociated from its value as tessera. It is the fate of speech to pass, to circulate, to create bonds, to be taken up again and again, to be repeated, reported, distorted. The fact that speech is oral does not mean that it is the opposite of writing or the letter. For the Bible, speech is writing made flesh, as Ezekiel, and John at Patmos, show us. Speech is that outside that speaks itself inside me. After quickly passing over the work of Jacques Ferron and Victor-Lévy Beaulieu, this article analyzes the status of speech in the work of Gilbert La Rocque. In La Rocque’s writing, magnetized by the shadow mouth of the maternal, the “inter-dit”—meaning in French both “what is forbidden” and “said in between”—cannot be dissociated from “le dire,” “the saying,” which the subject takes up against his or her own death. For La Rocque, moments when the past rises up are heard as prosodic islands that return like a multiplicity of the “I” that hears them and relates them. Memory does not save us: it is what, in the speaking voice, bears witness to the immanent violence of the Other.
ES:
Nunca despegada de su prestación, que también es su función simbólica, la palabra va dirigida, yendo de uno a otro, cualquiera que sea el valor de su dicho indisociable de su valor de tésera. La palabra tiene como destino pasar, circular, hacer de vínculo, ser tomada y retomada, repetida, traída de nuevo, desviada. Que la palabra sea oral no quiere decir que se oponga a la letra y a lo escrito. Para la Biblia, es une escritura que se incorpora, como nos lo muestran Ezequiel y Juan en Patmos. La palabra es este exterior que se habla dentro de mí. Este artículo analiza el estatus de la palabra en Gilbert La Rocque, pasando rápidamente por Jacques Ferron y Victor-Lévy Beaulieu. En esta escritura imantada por la boca de sombra de lo materno, lo entredicho es indisociable de lo dicho que asume el sujeto contra su propia muerte. Para La Rocque, lo que emerge del pasado se da a entender como especies de islotes prosódicos que se transforman en una multiplicidad del “yo” que los oye y los narra. La memoria no salva; es lo que, en la voz que habla, demuestra la violencia inmanente del Otro.
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RACCROCHER LE NOM AU CORPS : une fonction de la parole dans Mailloux d’Hervé Bouchard
LOUIS-DANIEL GODIN
pp. 43–56
AbstractFR:
Dans son ouvrage Le nom propre. Fonctions logiques et inconscientes, le psychanalyste Gérard Pommier (grâce à ce que Jacques Lacan met en place avant lui) souligne la dimension du refoulement à l’oeuvre dans tout acte de langage que la linguistique saussurienne ne prend pas en charge. Pour s’énoncer, le sujet doit posséder un patronyme et le refouler constamment. L’écriture littéraire n’est pas soumise à cette même contrainte, et cet article mesure au sein de la poétique bouchardienne le désir de faire apparaître cette absence signifiante. Si un sujet ne peut pas à la fois énoncer « je » et son patronyme, l’écrivain peut en jouer la superposition, ce qui est d’ailleurs un motif récurrent de Mailloux. Mailloux ne dit pas seulement « je », mais plutôt « Mailloux moi », « Je moi Mailloux Jacques » ou « Mailloux Jacques moi » ; il ne tombe pas, il se « renvers[e] tout le Mailloux dessus » ; son corps n’est pas baigné d’urine, « il se noie l’Mailloux ». C’est ainsi que Bouchard tente de ressaisir, par l’écriture, une position infantile : celle d’un temps de l’enfance qui précède la parole, où le nom et le corps ne coïncident pas tout à fait. La voix narrative bouchardienne raccroche constamment le nom propre au corps, comme si le sujet de l’écriture était en voie de se défaire, comme s’il n’était pas dupe du fait que la consubstantialité de l’image du corps et de la parole ne tenait que par le nom (du père).
EN:
In his work Le nom propre. Fonctions logiques et inconscientes, psychoanalyst Gérard Pommier (using what Jacques Lacan had put into place before him) sheds light on the repression that is an aspect of any speech act not in the realm of Saussurian linguistics. To speak himself or herself, the subject must have a patronym and constantly repress it. Literary writing is not subject to the same constraint, and this article analyzes the desire, within Bouchard’s poetics, to cause this signifying absence to appear. While a subject cannot, at one and the same time, say “I” and his or her patronym, the writer can superimpose the two, and this, in fact, is a recurring motif in Mailloux. Mailloux does not say “je,” but rather “Mailloux moi,” “Je moi Mailloux Jacques,” or “Mailloux Jacques moi;” he does not fall, he “[se] renvers[e] tout le Mailloux dessus;” his body is not bathed in urine, “il se noie l’Mailloux.” In this way, Bouchard attempts to re-appropriate, through writing, an infantile position: that of a time in childhood that comes before speech, and in which name and body do not quite coincide. Bouchard’s narrative voice keeps on re-attaching the proper name to the body, as if the writing subject were coming apart, as if he were not taken in by the fact that consubstantiality between speech and the image of the body is held together only by the name (of the father).
ES:
En su obra Le nom propre. Fonctions logiques et inconscientes (El nombre propio. Funciones lógicas e inconscientes), el psicoanalista Gérard Pommier (gracias a lo que Jacques Lacan plasmó antes que él) pone de relieve la dimensión de la represión presente en todo acto de lenguaje y del cual la lingüística saussuriana no se hace cargo. Para enunciarse, el sujeto ha de poseer un patronímico y reprimirlo constantemente. La escritura literaria no está sometida a esta misma limitación, y en este artículo se mide, en el seno de la poética de Bouchard, el deseo de lograr que aparezca esta ausencia significante. Si bien un sujeto no puede enunciar a la vez “yo” y su patronímico, el escritor puede jugar la superposición de los mismos, lo cual es, por cierto, un motivo recurrente de Mailloux. Mailloux no sólo dice “yo”, sino más bien “Mailloux yo”, “Yo Mailloux Jacques” o “Mailloux Jacques yo”; no se cae, sino que “se le cae todo el Mailloux encima”; su cuerpo no está bañado en orina, sino que “se le aniega el Mailloux”. Es así como Bouchard trata de recuperar, mediante la escritura, una posición infantil: la de un tiempo de la infancia que precede al habla, ahí donde el nombre y el cuerpo no coinciden totalmente. La voz narrativa de Bouchard asocia constantemente el nombre propio al cuerpo, como si el sujeto de la escritura estuviera en vías de deshacerse, como si no fuera víctima del hecho de que la consubstancialidad de la imagen del cuerpo y de la palabra no se mantuviese tan sólo por el nombre (del padre).
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ENTRE LE POCAILLE ET LE POÈTE : la ruse de l’écrivain dans le scénario commenté de La bête lumineuse de Pierre Perrault
LAURANCE OUELLET TREMBLAY
pp. 57–67
AbstractFR:
Au-delà de l’emblématique équipée de chasse à l’orignal qu’elle met en scène, La bête lumineuse de Pierre Perrault raconte surtout l’histoire d’une grande chamaille, celle d’un conflit langagier faisant s’affronter deux ordres de la parole sourds l’un à l’autre ; celui des pocailles, chasseurs d’orignaux rompus au rite de la chasse, et celui du poète Stéphane-Albert, chasseur néophyte et non-initié. Grand amateur de littérature classique, le chasseur-poète décidera effectivement d’écrire et de réciter un poème ayant pour but d’exalter l’expérience vécue en forêt, geste qui ne sera pas sans causer une cassure irréparable au sein de la communauté des chasseurs. Car en plus d’exposer la part latente d’érotisme contenue dans l’acte cynégétique et habituellement sublimée dans le geste du call, l’énonciation de ce poème leur demandera également de révéler les lois tacites régissant le déploiement de la parole pocaille, mélange de hardiesse orale et de pudeur sentimentale. À travers une lecture du scénario commenté de La bête lumineuse, cet article cherche à démontrer que le geste d’écriture de Perrault vient, au sein de cet objet textuel, réconcilier, voire transcender la dichotomie entre parole vive et écriture faisant loi au coeur du film.
EN:
Beyond the iconic adventure of the moose hunt represented in Pierre Perrault’s La bête lumineuse, the film essentially relates the story of a great quarrel—a linguistic conflict between two antagonistic orders of speech that are deaf to each other: the speech of the pocailles, moose hunters steeped in the rite of the hunt, and the speech of the poet Stéphane-Albert, the novice, uninitiated hunter. The poet/hunter, a lover of classical literature, decides to compose and recite a poem that will glorify the hunters’ experience in the forest—an act that leads to an irreparable break within the community of the hunters. For in addition to disclosing the latent eroticism contained in the act of hunting, which is usually sublimated in the “call,” the poem, when it is spoken, also requires them to reveal the unspoken laws governing the deployment of the “pocaille” way of speaking—a mixture of oral boldness and sentimental modesty. Through a reading of the film’s annotated script, this article seeks to demonstrate that Perrault’s act of writing, within this textual object, reconciles or even transcends the dichotomy between spoken word and writing that is enacted as law at the heart of the film.
ES:
Más allá de la emblemática aventura de caza del alce que escenifica, La bête lumineuse (La bestia luminosa), de Pierre Perrault, cuenta sobre todo la historia de una gran pelea, la de un conflicto lingüístico en el cual se enfrentan dos órdenes de la palabra, sordos el uno hacia el otro: el de los pocailles, cazadores de alces experimentados en el rito de la caza, y del poeta Stéphane-Albert, cazador neófito y no iniciado. Gran aficionado a la literatura clásica, el cazador-poeta decide, efectivamente, escribir y recitar un poema cuyo objetivo es exaltar la experiencia vivida en el bosque, gesto que no dejará de causar una ruptura irreparable en el seno de la comunidad de cazadores. Pues además de exponer la parte latente de erotismo contenida en el acto cinegético y habitualmente sublimada en el gesto del reclamo, el enunciado de este poema les pedirá también que revelen las leyes tácitas que rigen el despliegue de lo que denominaré pocaille, mezcla de audacia oral y pudor sentimental. A través de una lectura del argumento comentado de La bête lumineuse, este artículo busca demostrar que el gesto de escritura de Perrault viene, dentro de este objeto textual, a reconciliar, incluso a trascender la dicotomía entre palabra viva y escritura que manda en el corazón de la película.
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RACONTER POUR NE PAS VIEILLIR : La peau d’Élisa de Carole Fréchette
LUCIE ROBERT
pp. 69–78
AbstractFR:
La peau d’Élisa est le résultat d’une commande adressée à Carole Fréchette par le projet Écrire la ville, organisé conjointement par le Centre des auteurs dramatiques de Montréal et l’Atelier Sainte-Anne de Bruxelles. La conception du projet date de 1995, la création de 1998 au Théâtre d’Aujourd’hui. Il y a certes un choix étonnant à ce que ce projet qui vise à « écrire la ville » prenne la forme du souvenir raconté à haute voix, « avec des petits détails qui donnent des frissons », et que ces souvenirs, qu’on emprunte au besoin (« Vous n’auriez pas, comme ça, tout de suite, un souvenir à me prêter ? »), aient aussi pour fonction de protéger la peau du vieillissement. L’article interroge cette étrange relation entre le corps, la parole et la ville, qui engendre la transformation de l’actrice en conteuse, voire en rhapsode, livrant en ses propres mots les souvenirs des autres, pour ne pas avoir à répondre des siens propres, et à ce que, à travers ces souvenirs, ce soit, somme toute, la ville de Bruxelles qui se trouve redessinée.
EN:
La peau d’Élisa is the outcome of a commission given to Carole Fréchette by Écrire la ville, a project jointly organized by the Centre des auteurs dramatiques de Montréal and the Atelier Sainte-Anne in Brussels. The project was conceived in 1995 and first performed in 1998 at the Théâtre d’Aujourd’hui. There is certainly something surprising about the fact that a project intended to “write the city” takes the form of memories related out loud, “avec des petits détails qui donnent des frissons,” and that these memories, which in some cases are borrowed (“Vous n’auriez pas, comme ça, tout de suite, un souvenir à me prêter?” also serve to protect skin from aging. The article questions the strange relationship between the body, speech and the city that causes the actress to become a storyteller, or perhaps even a rhapsodist, conveying in her own words the memories of other people so as to avoid having to answer for her own; strangely, also, in the end, it is the city of Brussels that is redrawn through these memories.
ES:
La peau d’Élisa (La piel de Elisa) es el resultado de un encargo que se dio a Carole Fréchette mediante el proyecto Écrire la ville (Escribir la ciudad), organizado conjuntamente por el Centro de Autores Dramáticos de Montreal y el Taller Sainte-Anne de Bruselas. La concepción del proyecto se remonta a 1995, con la creación de 1998 en el Théâtre d’Aujourd’hui. Lo cierto es que hay una opción extraña para que dicho proyecto, que aspira a “escribir la ciudad”, adopte la forma del recuerdo narrado en voz alta, “con pequeños detalles que dan escalofríos”, y que estos recuerdos a los cuales se recurre cuando haga falta (“¿No podría usted así, ahora mismo, prestarme algún recuerdo?”), tengan también como función proteger la piel del envejecimiento. En este artículo, se interroga uno acerca de esta extraña relación entre el cuerpo, la palabra y la ciudad, que engendra la transformación de la actriz en narradora, incluso en rapsoda, al entregar con sus propias palabras los recuerdos de otros, por no tener que responder de los suyos propios, y acerca de que sea, en suma, a través de dichos recuerdos, la ciudad de Bruselas la que se vuelve a diseñar.
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MOUVANCES IDENTITAIRES ET INFLEXIONS CORPORELLES DE LA PAROLE DANS YUKONSTYLE DE SARAH BERTHIAUME ET NACRE C DE DOMINICK PARENTEAU-LEBEUF
CATHERINE CYR
pp. 79–92
AbstractFR:
« Le corps est le bougé de l’âme », écrit le philosophe Jean-Luc Nancy dans ses 58 indices sur le corps et Extension de l’âme. Au théâtre, cette mouvance d’une intériorité qui affleure sur le corps trouve sur la scène, dans le jeu et la présence de l’acteur, sa pleine incarnation. Or, en amont de celle-ci préexiste souvent au corps de chair un corps de papier. En effet, entre les pages du texte dramatique que préoccupe la corporéité y a-t-il souvent un « déjà-là » du corps qui s’énonce. Tissé de mots, ce corps est à la fois tout entier tendu vers la scène et indépendant de toute actualisation scénique (dont il pourra, néanmoins, se révéler un ressort important). Porteur de différents discours — souvent noués à la question de l’identité —, le corps qui se déploie sur la page se donne à lire à travers différentes poétiques d’énonciation qui, peu à peu, en tracent les contours. Cet article analyse les rapports qui se nouent entre ces poétiques énonciatives et les imaginaires du corps rencontrés dans les pièces Yukonstyle, de Sarah Berthiaume, et Nacre C, de Dominick Parenteau-Lebeuf. Il s’agit d’étudier la dynamique établie entre l’imaginaire corporel et l’énonciation, et de voir comment, par le biais de poétiques énonciatives différentes — mécanique dissociative et narrativité mobile chez Sarah Berthiaume, abolition du « Je » énonciatif chez Parenteau-Lebeuf —, chaque pièce propose, à travers la trajectoire de la parole, un parcours extatique, soit une échappée hors de soi, et parfois hors du monde. Cyr observe comment cette parole, dissociée, inassignable ou fractionnée, rend compte d’un corps désinvesti, provisoirement ou définitivement étranger à lui-même.
EN:
“The body is the shifting of the soul,” as philosopher Jean-Luc Nancy poetically put it in 58 indices sur le corps et Extension de l’âme. On stage, in the theatre, the movement of an interiority that comes to the surface of the body is fully embodied in the actor’s presence and acting. Before that moment, however, a body of paper often predates the body of flesh. In the pages of the dramatic text preoccupied by corporeity, the body’s “already-there” is often uttering itself. Woven of words, this body is at once entirely focused on the stage and independent of any stage actualization (although it may, nonetheless, reveal itself a key element of stage life). Carrying a range of discourses often related to the issue of identity, the body that deploys itself on the page offers itself to be read through a variety of poetics of utterance that gradually trace its contours. In this article, the author analyzes the relationships between these poetics and bodies as imagined in the plays Yukonstyle, by Sarah Berthiaume, and Nacre C, by Dominick Parenteau-Lebeuf. What she finds interesting is not the body as theme but the dynamic established between the bodily imaginary world and utterance. In particular, she examines how, through the use of different poetics of utterance—dissociative mechanics and mobile narrativity in the case of Sarah Berthiaume, abolition of the speaking “I” on the part of Parenteau-Lebeuf—each play proposes, through its trajectory of speech, an ecstatic route: an escape out of oneself, and sometimes out of the world. Cyr observes how this speech, dissociated, unassignable, or fragmented, accounts for a body that is disinvested, temporarily or permanently a stranger to itself.
ES:
“El cuerpo es el moverse del alma”, escribe oportunamente el filósofo Jean-Luc Nancy en sus 58 índices sobre el cuerpo y Extensión del alma. En el teatro, esta influencia de una interioridad que aflora sobre el cuerpo encuentra en el escenario, en el juego y la presencia del actor, su plena encarnación. Ahora bien, antes que ésta, existe con frecuencia en el cuerpo de carne un cuerpo de papel. En efecto, entre las páginas del texto dramático preocupado por la corporeidad, hay frecuentemente un “ya allá” del cuerpo que se enuncia. Tejido con palabras, este cuerpo está a la vez totalmente tendido hacia el escenario e independiente de cualquier actualización escénica (de la cual podrá resultar, no obstante, un impulso importante). Portador de discursos diversos –muchas veces ligados a la cuestión de la identidad–, el cuerpo que se despliega en la página se da a leer a través de diferentes poéticas de enunciación que, poco a poco, delinean los contornos. En el presente artículo, me dedicaré a analizar las relaciones que se tejen entre estas poéticas enunciativas y las imaginarias del cuerpo encontradas en las obras Yukonstyle, de Sarah Berthiaume, y Nacre C (Nácar C) de Dominick Parenteau-Lebeuf. Por lo tanto, lo que me interesa aquí no es el tema del cuerpo, sino más bien la dinámica que se establece entre el imaginario corporal y la enunciación. Estudiaré particularmente cómo, a través de poéticas enunciativas diferentes –mecánica disociadora y narratividad móvil en Sarah Berthiaume, abolición del «Yo» enunciativo en Parenteau-Lebeuf–, proponiendo cada obra, a través de la trayectoria de la palabra, un recorrido extático, esto es, una escapada fuera de sí, y a veces fuera del mundo. Observaré cómo esta palabra, disociada, inasignable o fraccionada, da cuenta, aquí, de un cuerpo desinvertido, provisional o definitivamente extraño a sí mismo.
Étude
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« JE VEUX VIVRE INTENSIVEMENT » : formes, figures et discours de la vie dans la collection « Les Romans de la jeune génération » (1931-1932)
ADRIEN RANNAUD
pp. 95–110
AbstractFR:
Dans cet article, l’auteur met en lumière les innovations poétiques opérées par les quatre textes publiés dans la collection « Les Romans de la jeune génération » (1931-1932). Plus spécifiquement, il montre comment « la vie », vue comme idéal philosophique structurant de l’espace social canadien-français de la décennie 1930, s’infuse dans les formes et les discours romanesques des quatre titres qui composent l’éphémère collection créée par l’éditeur Albert Lévesque : Dans les ombres, d’Éva Senécal ; La chair décevante, de Jovette-Alice Bernier ; Dilettante, de Claude Robillard ; et L’initiatrice, de Rex Desmarchais. Après une présentation des auteurs et du contexte sociolittéraire entourant la création de la collection, Rannaud aborde les textes en isolant trois variables : le genre romanesque, la représentation de la parole écrite ou lue, et les thèmes et discours dominants de la série.
EN:
In this article, the author sheds light on poetic innovations in four texts published in the collection known as “Les romans de la jeune génération” (1931-1932). Specifically, it shows how “life,” seen as a philosophical ideal shaping French-Canadian social space in the 1930s, appears in the novelistic discourses and forms of the four works in the ephemeral collection created by publisher Albert Lévesque: Dans les ombres, by Éva Senécal; La chair décevante, by Jovette-Alice Bernier; Dilettante, by Claude Robillard; and L’initiatrice, by Rex Desmarchais. After presenting the authors and the social and literary context in which the collection was created, the article analyzes the texts, focusing on three variables: the novelistic genre, the representation of speech either written or read, and the themes and discourses that are dominant in the series.
ES:
En este artículo, el autor pone de relieve las innovaciones poéticas que produjeron los cuatro textos publicados en la colección “Les romans de la jeune génération” (“Novelas de la generación joven”) (1931-1932). Más específicamente, muestra cómo “la vida”, vista como ideal filosófico estructurante del espacio social canadiense francés de la década de 1930, se infunde en las formas y los discursos novelescos de los cuatro títulos que integran la efímera colección creada por el editor Albert Lévesque: Dans les ombres (En las sombras), de Éva Senécal; La chair décevante (La carne decepcionante), de Jovette-Alice Bernier; Dilettante (Diletante), de Claude Robillard; y L’initiatrice (La iniciadora), de Rex Desmarchais. Tras la presentación de los autores y del contexto social y literario que rodean la creación de la colección, aborda los textos aislando tres variables: el género novelesco, la representación de la palabra escrita o leída, y los temas y discursos dominantes de la serie.