Abstracts
Résumé
L’article a pour objectif d’analyser les jugements littéraires de Voltaire tant dans les Letters concerning the English Nation (1733) que dans les Lettres écrites de Londres sur les Anglais et autres sujets (1734). Les lettres XVIII à XXIV ont pour sujet différents aspects touchant les belles lettres. Notre questionnement portera sur les différences et les analogies entre les deux versions et renverra également aux traductions anglaises modernes qui, par contraste, font ressortir la spécificité du texte anglais paru en 1733. L’activité créatrice du traducteur (en l’occurrence John Lockman) se manifeste comme une prolongation de certaines figures de rhétorique, en particulier celles de la brevitas (concision) et de l’amplificatio (emphase). La traduction anglaise de 1733 a le plus souvent recours à l’emphase qui souligne la force illocutoire du texte. En raison du contexte politique, Voltaire se doit de tenir compte de la censure en France et freine en français son audace qui se donne libre cours dans la version anglaise de 1733. Il juge d’autre part selon les critères du « bon goût » de son époque, et bien qu’il apprécie le génie d’écrivains anglais, il s’exprime souvent en faveur de la retenue de chefs-d’oeuvre français, qui, nés dans le contexte d’une « société de cour » se construisent par le biais d’une parole allusive faite de sous-entendus, alors que les littérateurs anglais ne reculent pas devant l’âpreté de la réalité. La voix énarrative du traducteur de 1733 a tendance à intensifier les jugements de Voltaire dans une mise en énonciation qui s’adresse à un public anglais. Les traductions modernes (Dilworth (1961); Tancock (1981); Steiner (2007), basées sur l’édition Jore/Lanson (1909)) reprennent, en revanche, les appréciations des Lettres philosophiques (1734) dans une mise en énonciation adoucissant la force illocutoire de la version anglaise initiale qui, elle, aiguise la pensée de Voltaire dans ses jugements tant critiques que favorables.
Mots-clés :
- paratopie,
- voix énarrative,
- amplification,
- bon goût,
- mise en scène de l’énonciation
Abstract
This article aims to analyse Voltaire’s literary judgements both in the Letters concerning the English Nation (1733) and in the Lettres écrites de Londres sur les Anglais et autres sujets (1734). Letters XVIII to XXIV deal with various aspects of the fine arts. Our study focuses on the differences and analogies between the two versions and also refers to the modern English translations which, by contrast, bring out the specificity of the English text published in 1733. The creative activity of the translator (in this case John Lockman) manifests itself as an extension of certain figures of rhetoric, in particular those of brevitas (brevity) and amplificatio (emphasis). The English translation of 1733 most often uses emphasis to underline the illocutionary force of the text. Because of the political context, Voltaire had to take into account censorship in France and downplayed the audacity of his message in French, which was given free rein in the 1733 English version. On the other hand, his judgements respected the criteria of what was considered “good taste” at the time. Although he appreciated the genius of English writers, he often spoke in favour of the restraint of French masterpieces, which, born in the context of a “court society,” were constructed through allusive speech and innuendo, in opposition to English writers who did not shy away from expressing the harshness of reality. The enarrative voice of the translator of 1733 tends to intensify Voltaire’s judgments and tailors his expressive choices to an English audience. The modern translations (Dilworth (1961); Tancock (1981); Steiner (2007), based on the Jore/Lanson edition (1909)) remain faithful to the assessments of the Lettres philosophiques (1734) in an enunciation that softens the illocutionary force of the initial English version, in which Voltaire’s thinking with respect to both his critical and favourable judgements was sharpened.
Keywords:
- paratopia,
- enarrative voice,
- amplification,
- “bon goût”,
- communicative framing
Appendices
Bibliographie
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