Abstracts
Résumé
L’article a pour objectif d’analyser les jugements littéraires de Voltaire tant dans les Letters concerning the English Nation (1733) que dans les Lettres écrites de Londres sur les Anglais et autres sujets (1734). Les lettres XVIII à XXIV ont pour sujet différents aspects touchant les belles lettres. Notre questionnement portera sur les différences et les analogies entre les deux versions et renverra également aux traductions anglaises modernes qui, par contraste, font ressortir la spécificité du texte anglais paru en 1733. L’activité créatrice du traducteur (en l’occurrence John Lockman) se manifeste comme une prolongation de certaines figures de rhétorique, en particulier celles de la brevitas (concision) et de l’amplificatio (emphase). La traduction anglaise de 1733 a le plus souvent recours à l’emphase qui souligne la force illocutoire du texte. En raison du contexte politique, Voltaire se doit de tenir compte de la censure en France et freine en français son audace qui se donne libre cours dans la version anglaise de 1733. Il juge d’autre part selon les critères du « bon goût » de son époque, et bien qu’il apprécie le génie d’écrivains anglais, il s’exprime souvent en faveur de la retenue de chefs-d’oeuvre français, qui, nés dans le contexte d’une « société de cour » se construisent par le biais d’une parole allusive faite de sous-entendus, alors que les littérateurs anglais ne reculent pas devant l’âpreté de la réalité. La voix énarrative du traducteur de 1733 a tendance à intensifier les jugements de Voltaire dans une mise en énonciation qui s’adresse à un public anglais. Les traductions modernes (Dilworth (1961); Tancock (1981); Steiner (2007), basées sur l’édition Jore/Lanson (1909)) reprennent, en revanche, les appréciations des Lettres philosophiques (1734) dans une mise en énonciation adoucissant la force illocutoire de la version anglaise initiale qui, elle, aiguise la pensée de Voltaire dans ses jugements tant critiques que favorables.
Mots-clés :
- paratopie,
- voix énarrative,
- amplification,
- bon goût,
- mise en scène de l’énonciation
Abstract
This article aims to analyse Voltaire’s literary judgements both in the Letters concerning the English Nation (1733) and in the Lettres écrites de Londres sur les Anglais et autres sujets (1734). Letters XVIII to XXIV deal with various aspects of the fine arts. Our study focuses on the differences and analogies between the two versions and also refers to the modern English translations which, by contrast, bring out the specificity of the English text published in 1733. The creative activity of the translator (in this case John Lockman) manifests itself as an extension of certain figures of rhetoric, in particular those of brevitas (brevity) and amplificatio (emphasis). The English translation of 1733 most often uses emphasis to underline the illocutionary force of the text. Because of the political context, Voltaire had to take into account censorship in France and downplayed the audacity of his message in French, which was given free rein in the 1733 English version. On the other hand, his judgements respected the criteria of what was considered “good taste” at the time. Although he appreciated the genius of English writers, he often spoke in favour of the restraint of French masterpieces, which, born in the context of a “court society,” were constructed through allusive speech and innuendo, in opposition to English writers who did not shy away from expressing the harshness of reality. The enarrative voice of the translator of 1733 tends to intensify Voltaire’s judgments and tailors his expressive choices to an English audience. The modern translations (Dilworth (1961); Tancock (1981); Steiner (2007), based on the Jore/Lanson edition (1909)) remain faithful to the assessments of the Lettres philosophiques (1734) in an enunciation that softens the illocutionary force of the initial English version, in which Voltaire’s thinking with respect to both his critical and favourable judgements was sharpened.
Keywords:
- paratopia,
- enarrative voice,
- amplification,
- “bon goût”,
- communicative framing
Article body
Introduction
La présente contribution tentera de démontrer, à travers le prisme des jugements littéraires de Voltaire, que si les Letters concerning the English Nation, les Lettres écrites de Londres sur les Anglais et les Lettres philosophiques relèvent d’une force illocutoire analogue, elles se différencient toutefois par une mise en énonciation propre à chacune des parutions de ce texte à visages multiples[1]. Une confrontation de l’édition anglaise de 1733 avec des retraductions modernes fera par ailleurs ressortir l’intensité de la version ancienne.
Si l’on considère l’ensemble de ces Lettres dans les deux langues concernées comme un acte de langage, nous savons depuis les études d’Austin, de Searle et d’autres pragmaticiens que le sens du texte ne se réduit pas à son simple contenu linguistique, mais qu’il s’exprime aussi par une « force illocutoire » que Dominique Maingueneau définit comme la façon dont l’acte de langage « doit être reçu par le destinataire ». « L’acte de langage n’est réussi », ajoute-t-il, « que si le destinataire reconnaît l’intention associée conventionnellement à son énonciation » (1990, pp. 6-7). Or il s’agit bien ici de convaincre un public et de l’initier à des idées nouvelles par le biais d’une comparaison implicite, qui, sous le couvert de l’univers anglais, remet en question certains préjugés religieux et politiques de l’absolutisme français. Dans sa célèbre formule où il se distancie de Rousseau en affirmant que, pour lui, écrire c’est agir[2], Voltaire exprime explicitement qu’il mène un combat inscrivant son discours dans une remise en question de la société de l’époque. Et, de fait, les autorités françaises reconnaissent ces intentions discursives qu’elles reçoivent comme subversives ou hétérodoxes et qu’elles dénoncent en réagissant par la censure, l’interdiction, voire l’exil et l’emprisonnement. Les Lettres philosophiques furent brûlées et lacérées le 10 juin 1734, l’imprimeur rouennais Claude Jore fut un temps embastillé et Voltaire trouva refuge à Cirey. Par précaution, il fragmentera ensuite l’ouvrage en le dissimulant dans ses Mélanges. Gustave Lanson en son temps a souligné abondamment cet aspect subversif du texte; il a parlé d’une véritable « bombe » et a affirmé entre autres que « ces insolentes lettres indiquaient tout un programme révolutionnaire » (1909, p.51).
Le discours de Voltaire, qui porte en lui à la fois une composante philosophique et une composante littéraire, procède de ce que Dominique Maingueneau et Frédéric Cossutta appellent « un discours constituant », c’est-à-dire « un discours fondateur qui s’autorise de lui-même, en surplomb de tout autre discours, tout en se posant comme dépendant d’une source légitimante » (1995, p. 113). Dans le cas des Lettres, cette source se dédouble, la part philosophique se réclamant de la Raison, la part littéraire du Bon Goût. Maingueneau précise une caractéristique essentielle du discours constituant, à savoir la problématique du lieu où se situe celui qui parle :
Celui qui énonce à l’intérieur d’un discours constituant ne peut se placer ni à l’extérieur ni à l’intérieur de la société : il est voué à nourrir son oeuvre du caractère radicalement problématique de sa propre appartenance à cette société. Son énonciation se constitue à travers cette impossibilité même de s’assigner une véritable « place ». Localité paradoxale, paratopie, qui n’est pas l’absence de tout lieu, mais une difficile négociation entre le lieu et le non-lieu, une localisation parasitaire, qui vit de l’impossibilité même de se stabiliser.
2004, pp. 52-53
Cette « problématique de l’appartenance à la société » s’exprime dans le cas de Voltaire tant à travers les errances de l’auteur que dans l’édition de ses textes. Voltaire s’exile à Londres, se réfugie en des lieux frontaliers comme Cirey ou Ferney, ou s’établit un temps chez Frédéric II. Non sans proclamer en même temps son affection pour la France, il fuit ainsi le système politique et judiciaire qu’il dénonce. L’aspect paratopique s’inscrit également dans l’appareil péritextuel de ses ouvrages. Dans le cas qui nous occupe, seule la page de titre de l’édition anglaise est transparente. Y figurent les imprimeurs Davis et Lion, Londres comme lieu d’édition et le nom de Voltaire en toutes lettres. L’année suivante, en 1734, Thiriot fait paraître sous une fausse adresse[3] les Lettres anglaises dont le titre précise qu’elles sont écrites « de Londres ». Au même moment, Voltaire charge sur le continent l’imprimeur Claude François Jore de diffuser, à nouveau sous une fausse adresse[4], une deuxième version avec quelques variantes et avec l’ajout de la célèbre vingt-cinquième lettre s’attaquant à Pascal.
Éditions des Lettres anglaises, ensuite Philosophiques
L’enjeu même des lieux s’exprime de façon obvie dans des témoignages qui relèvent de ce que Genette appelle « l’épitexte privé »[5], plus particulièrement dans la Correspondance de Voltaire. Ainsi, dans une lettre du 6 décembre 1732 adressée à Jean Baptiste Formont à propos de John Locke, Voltaire se dit forcé de reformuler la Lettre XIII qu’il consacre au philosophe de l’empirisme : « Je suis obligé de changer tout ce que j’avais écrit à l’occasion de M. Locke, parce qu’après tout je veux vivre en France et qu’il ne m’est pas permis d’être aussi philosophe qu’un Anglais. Il me faut déguiser à Paris ce que je ne pourrai dire trop fortement à Londres » (1963, t. I, p. 345). La paratopie ou l’impossibilité de stabiliser l’endroit d’où émerge la parole agissante manifeste ici un clivage entre Londres et Paris. Londres, l’Angleterre, est le lieu de la pensée et de la liberté d’opinion, l’audace provocatrice peut s’y manifester en plein jour; Paris, la France, en revanche, est le lieu de la feinte, de la clandestinité, de la parole étouffée, mais aussi l’endroit d’un attachement entravé qui contraint à la défiance et qui nécessite pseudonymes et déguisements, anonymat et fuite vers les frontières. Les Lettres, d’abord écrites « de Londres » en deux langues, se font ensuite « philosophiques » en France dans une édition rouennaise qui se donne pour amstellodamoise. C’est en tant que membre reconnu de la République des Lettres que Voltaire s’exprime sur Locke et Newton, sur la tolérance religieuse et les institutions en Angleterre, mais c’est aussi en détenteur du bon goût hérité de la France monarchique qu’il juge et compare les écrivains anglais et français. Le propos est analogue dans les trois textes, à la fois philosophique et littéraire, mais de la localisation et de l’appartenance problématiques émergent bel et bien deux énonciations distinctes, l’une en français et l’autre en anglais.
La scénographie de l’énonciation des deux textes londoniens édités par Thiriot diffère d’emblée par une préface dont l’édition Jore est dépourvue. Y prend la parole un éditeur anonyme (en fait Thiriot) qui évalue le texte et justifie sa publication. L’argumentaire péritextuel des deux versions s’accorde sur une prise de parole qui se fraie un chemin sur le mode de la prétérition : les lettres sont d’ordre privé, elles sont écrites pour un ami, « pas pour être publiques » (Préface, p. i), « not designed for the public » (ibid., p. iii). L’impact préfaciel diffère cependant; la version anglaise, longue de six pages (alors que la française en compte à peine deux), mentionne à sept reprises explicitement le nom de Voltaire dont l’ouvrage méritait la publication entre autres grâce à l’ardeur, « the noble fire » (ibid., p. v) de son style. Le texte français en revanche n’insiste pas sur l’identité de M.D.V***; l’auteur devient dans la préface « une personne fort connue dans le monde » (ibid., p. i) qui a tout fait pour arrêter l’impression d’un livre jugé dangereux. Cette version française se donne par ailleurs comme un original dont le manuscrit a été traduit en anglais[6]. Voltaire dira dans sa Correspondance que « c’est une chose assez plaisante que la copie paraisse avant l’original[7] » (1963, t. I, p. 417). On sait que la thèse de Harcourt Brown selon laquelle Voltaire aurait écrit lui-même une grande partie des Lettres en anglais a été contestée par Patrick Lee et Nicolas Cronk dans des articles qui plaident pour une traduction anglaise due à John Lockman[8].
La voix énarrative
Arrêtons-nous un instant à l’instance traductrice, à la fois réceptrice d’un texte source et émettrice d’un texte cible. L’exposition, l’explication, les précisions qu’apporte le traducteur relèvent toutes de l’énarration. Par enarratio, les Anciens entendaient une lecture explicative qu’exigeaient certaines difficultés textuelles, ce que Quintillien dans son Institution oratoire appelait enarratio poetarum, la lecture commentée. On retrouve ensuite le terme chez saint Jérôme, qui, au sein de son travail de traduction, en fait un instrument d’exégèse, comme l’a démontré Michael Graves (2007)[9]. La voix énarrative peut se lire comme un commentaire qui investit la version originale; elle subsume réception et émission à travers un filtre interprétatif. Tantôt elle prend en surface l’apparence visible d’un texte second dans des préfaces, des notes ou d’autres paratextes en marge, tantôt, comme dans le cas qui nous occupe, elle s’intègre au creux de la traduction, ne se manifestant ainsi qu’à celui qui la confronte au texte original.
La voix énarrative remplit entre autres une fonction argumentative qui est omniprésente dans les traductions de textes philosophiques[10]; elle peut en effet s’insinuer dans le discours en vue d’expliciter le raisonnement, de le rendre plus clair, de le renforcer même, ou elle peut au contraire le tempérer, voire le contester. Les Lumières établissent les structures d’un savoir qui remet en cause les fondements religieux et philosophiques sur lesquels s’appuyaient les autorités politiques de la société occidentale. La traduction diffuse ces idées nouvelles par une voix argumentative qui s’articule selon deux modes différents, celui de l’amplification et celui de la réticence.
Dans son ouvrage The Spread of Novels, Helen McMurran (2011)[11] a démontré dans le domaine du roman combien la traduction au XVIIIe relève de ce que les Anciens appelaient l’inventio, une activité créatrice qui permet d’interpréter les interventions des traducteurs comme une prolongation de certaines figures de rhétorique. Ainsi les suppressions et les ajouts sont conformes aux procédés de la brevitas (concision) et de l’amplificatio (emphase). Cela vaut aussi pour les textes philosophiques. Les libertés prises, loin d’être gratuites, font apparaître en filigrane des pratiques culturelles qui font sens. Certaines traductions, comme celle de L’homme machine de La Mettrie en anglais, renforcent par l’entremise de l’emphase le projet illocutoire du texte original, alors que d’autres traductions, comme celles de textes de Hume en français, portent en elles la marque d’une parole s’exprimant au contraire dans la réticence ou la contrainte à l’ombre d’une censure qui fait apparaître en négatif la subversion d’un discours interdit[12].
Voltaire consacre dans ses Questions sur l’Encyclopédie un chapitre à l’amplification, qu’il considère comme un défaut rhétorique, un « art d’être diffus », écrit-il, « une extrême intempérance » (2019 [1770-1772], p. 215). Cela vaut pour les oeuvres poétiques, où élégance et clarté sont depuis le Grand Siècle considérées comme les garantes du beau style. Lorsqu’il s’agit cependant de combattre l’infâme, la superstition et l’intolérance, le langage de la raison épouse volontiers l’expressivité polémique d’une philosophie militante. Dans l’article « Gens de Lettres » que Voltaire rédige pour l’Encyclopédie, il précise que, pour lui, « c’est cet esprit philosophique qui semble constituer le caractère des gens de lettres; & quand il se joint au bon goût, il forme un littérateur accompli » (Encyclopédie, 1757, vol. VII, p. 599). Les Lettres philosophiques présentent dans toute la partie qui traite de la situation religieuse, politique, institutionnelle et scientifique en Angleterre cette parole véhémente, propre à la philosophie, qui en France doit cependant être contenue en raison des risques qu’elle comprend. La défense du bon goût se manifeste dans les Lettres XVIII à XXIV qui contiennent des jugements sur les belles lettres. Dans la version anglaise des Letters concerning the English Nation, le discours voltairien, qui n’est pas bridé par la prudence, peut partout donner libre cours à la véhémence de l’argumentation et la voix énarrative dit fortement à Londres ce qu’il faut déguiser à Paris. Les retraductions anglaises récentes en revanche, qui suivent toutes le texte de Lanson et reprennent donc l’édition Jore, sont bien plus tempérées que la traduction de Lockman. Dans les exemples qui suivent nous comparerons la version des Lettres anglaises à celle des English Letters et confronterons celles-ci à trois traductions modernes dues respectivement à Ernest Dilworth, Leonard Tancock et Prudence Steiner. Nous présenterons les extraits selon un schéma récurrent comprenant d’abord le texte de l’édition française des Lettres écrites de Londres (1734)[13], suivi du texte anglais de 1733 dans l’édition de Nicholas Cronk, et des trois traductions anglaises récentes, comme suit :
Ayant consacré récemment avec Lieve Jooken un article sur l’amplification dans les passages « philosophiques » des Lettres (Rooryck et Jooken, 2019), je me bornerai ici à mentionner un seul exemple représentatif. Dans la lettre XIV, où Voltaire évoque Newton pour l’opposer à Descartes, la voix énarrative argumente de façon bien plus appuyée que dans le texte français. Dans les éditions modernes en revanche la traduction se rapproche de la version française initiale plus tempérée.
Les 40 mots du texte français passent à 72 dans la version de Lockman. « Fuir les hommes » est rendu par « to fly from the Society of his Fellow Creatures »; « pour philosopher en liberté » devient « in order to enjoy the Happiness of cultivating his philosophical Studies in full Liberty »; « il avait raison » est traduit par « he was very right »; le point-virgule est explicité par la préposition « for »; « éclaircir » s’accompagne d’un synonyme et d’un complément (« to improve and enlighten his Understanding ») et « lui nuire » est rallongé en « giving him Uneasiness ». Les mots « Understanding » et « Uneasiness » évoquent par ailleurs un vocabulaire lockien, « uneasiness » étant un terme que Pierre Coste avait eu du mal à reproduire en français. Faute de mieux, il s’était rabattu sur « inquiétude » (Jooken et Rooryck, 2010). Le contraste avec les traductions anglaises modernes est saisissant. Dans ces dernières, en effet, la voix énarrative est bien plus neutre, elle reste au plus près du texte français dont elle reprend la retenue et s’éloigne ainsi de la force illocutoire du discours voltairien qui agit sur son environnement en dénonçant les obstacles qui nuisent à la liberté de penser. « To philosophize freely » ou « to meditate in freedom » reprennent « philosopher en liberté » et sont loin d’avoir l’impact de « in order to enjoy the Happiness of cultivating his philosophical Studies in full Liberty ». « [G]iving him Uneasiness » disparaît au profit du verbe « to harm, « nuire ».
L’emphase dans les Letters concerning the English Nation
Reste à savoir si ces procédés d’éclaircissement, d’explicitation et de renforcement, omniprésents dans toute la partie des Letters concerning the English Nation qui exprime de façon sous-jacente une critique de la société française, se retrouvent également dans la partie de l’ouvrage que Voltaire a consacrée à la littérature. Dans un article sur les Lettres anglaises, Nicholas Cronk (1997) souligne la double nature du texte, qui est « destiné aux lecteurs des deux côtés de la Manche[14] ». Il insiste par ailleurs sur une des différences essentielles entre les versions françaises et la version en anglais, à savoir que cette dernière imprime les textes anglais originaux au-dessus ou en-dessous des traductions que Voltaire a entrepris de donner de certains fragments d’oeuvres anglaises, ce qui permet au lecteur d’outre-Manche qui est bilingue de mieux saisir la façon dont Voltaire traite les extraits qu’il commente[15]. Ces ajouts relèvent pleinement de l’amplification et du renforcement du sens. Sans nous attarder ici sur ces traductions voltairiennes dont Cronk démontre qu’il s’agit d’imitations dans l’esprit néoclassique de l’époque, remarquons toutefois que les trois versions modernes les intègrent de façon différente.
Dilworth reproduit à quelques variantes près l’édition des Letters concering the English Nation en ajoutant les originaux, Tancock n’en donne aucun et se contente des textes français, Prudence Steiner, quant à elle, est la plus explicite, puisqu’elle ajoute non seulement les originaux mais retraduit en outre à quatre reprises elle-même en anglais les versions libres de Voltaire.
Quoi qu’il en soit, les lecteurs anglais de 1733 étaient à même de procéder à des recoupements et de constater entre autres comment Voltaire avait ajouté dans ses traductions d’extraits de Shakespeare, de Lord Hervey, de Rochester et de Pope des invectives anticléricales qui sont absentes des textes originaux auxquels les lecteurs français de 1734 n’avaient pas directement accès. En voici quelques exemples en guise d’illustration :
(LXVIII) Shakespeare, extrait de Hamlet (1734, p. 163)
Qui pourrait sans toi [sans la mort] supporter cette vie,
De nos prêtres menteurs bénir l’hypocrisie
(LXX) [Lord Hervey (qui n’est pas mentionné explicitement)], extrait du poème Vers sur l’Italie (1734, p. 182)
L’extravagante comédie
Que souvent l’Inquisition
Veut qu’on nomme religion;
Mais qu’ici nous nommons folie
(LXXI) Rochester, extrait de Satire against Man (1734, pp. 187-188; comparaison avec Boileau)
Ce mystique encloîtré, fier de son indolence,
Tranquille au sein de Dieu, qu’y peut-il faire? Il pense.
Non, tu ne penses point, misérable, tu dors.
(LXXII) Pope, extrait du poème The Rape of the Lock (1734, p. 199)
En chansonnant les gens l’Evangile à la main
Dans les Lettres XVIII à XXIV, la version anglaise amplifie, explicite et concrétise davantage le propos que le texte français, qui en regard présente une écriture plus contenue. Prenons par exemple ce jugement à propos de Shakespeare :
Les trois traductions modernes reprennent le phrasé français, un seul verbe gère toute la phrase « il avait un génie plein de... » (he had a genius full of...), alors que la version de 1733 s’articule autour de quatre verbes (to boast [se prévaloir], to be, to have et to know) et concrétise le propos en ajoutant que Shakespeare dédaignait « one Rule of the Drama ». L’absence de bon goût (« good taste ») est un fil rouge dans le discours voltairien sur les hommes de lettres. Ce discours a pour origine ce que Norbert Elias a appelé la « Société de cour » (1974) qui pour lui est l’émanation suprême d’une civilisation française trouvant son apogée sous Louis XIV. Dans son ouvrage Entre les langues, le philosophe Heinz Wismann précise que :
À la Cour, l’élitisme des courtisans consistait à donner à penser qu’ils comprenaient à demi-mot. Rien n’était jamais dit. Ainsi, peu à peu la langue française s’est-elle rétrécie. Néanmoins et pour cette raison même, elle est devenue incomparable pour un autre exercice littéraire. Le fait que cette langue peut à tout moment être chargée de tant de sous-entendus lui confère une richesse implicite infinie [...]. Le français est une langue allusive; on dit plus ou moins.
2012, pp. 80-81
L’exemple à imiter venait d’en haut. Saint-Simon, qui lui-même écrivait ses Mémoires en cachette, insiste sur un Louis XIV qui est avare en paroles : « Jamais personne ne vendit mieux ses paroles, son souris [sourire] même, jusqu’à ses regards. Il rendit tout précieux par le choix et la majesté, à quoi la rareté et la brèveté [brièveté] de ses paroles ajoutait beaucoup » (1985, t. V, p. 527). Le linguiste Karl Vossler affirme dans son livre devenu un classique sur l’histoire du français littéraire que « le dogme du bon goût s’est élaboré sur le terrain courtois de l’aristocratie de l’esprit » (1923, p. 294). Le traducteur des Voyages de Gulliver de Swift, l’abbé Desfontaines, s’accorde ainsi le droit de supprimer « des choses qui rendues littéralement en français auraient révolté le bon goût qui règne en France » (1728, pp. xv-xvi). Le sous-entendu, l’allusion, la litote, la brièveté du propos sont garants de ce bon goût qui répugne à l’explicite, à l’emphase et à la grossièreté. Desfontaines raille ainsi dans sa Préface le Pantagruel de Rabelais, que Voltaire dénigre lui aussi dans une comparaison dont Swift sort gagnant :
Ici encore le texte anglais renforce les effets, parle du génie de Swift, concrétise l’« extrême gaieté » en parlant de « most gay strokes of humour », remplace la coordination « et » par « but with at the same time », ajoute l’adverbe « vastly » et renforce les « volumes de sottises » en « the expence of whole volumes of nonsense ». Adjectifs et substantifs sont régulièrement dédoublés par des synonymes, comme dans l’exemple suivant où sont mentionnées les qualités des comédies de trois auteurs anglais appréciés par Voltaire :
« Gay » se voit dédoublé par « humourous » et « force » par « spirit », alors que les traductions modernes se contentent à chaque fois d’un seul mot, comme en français. Les tragédies anglaises « sont presque toutes barbares », estime Voltaire, mais « elles ont des lueurs étonnantes ». Le verbe « to dart » (jeter) concrétise la métaphore et « étonnantes » est rendu par le triple « resplendent », « amaze » et « astonish » :
À la « beauté des vers » de la tragédie Caton d’Addison s’ajoute en anglais l’harmonie : « the beauty and harmony of the numbers » :
Et les tragédies auxquelles assiste le spectateur Voltaire sont « froides » en dépit de leur succès, « flat and insipid » dit le texte anglais qui compte 23 mots, soit 13 de plus que dans la version française qui n’en a que 10 :
Cette amplification assumée par une voix énarrative qui se complaît à renforcer l’argumentation se retrouve partout dans le texte, lui donnant ainsi une densité plus cohérente que celle des versions françaises. Nicholas Cronk (1997) a remarqué que, dans ces dernières, la section consacrée à la littérature anglaise, en raison même de sa critique explicite, fournissait une sorte de contrepoids à la première partie qui tend implicitement à dénoncer les faiblesses de la société française[16]. Le lectorat anglais de 1733 découvre en revanche dans les Letters un ensemble descriptif et critique de la nation britannique de l’époque auquel il peut globalement adhérer, y compris pour ce qui est des jugements littéraires. Cronk insiste sur le fait que les réflexions de Voltaire sur les belles lettres n’apparaissent pas nécessairement comme émanant d’un visiteur étranger; elles reflètent une opinion qui pourrait tout aussi bien avoir été formulée par un écrivain anglais[17]. Voltaire et Pope se rejoignent par exemple sur la manière de traduire et plaident tous deux pour rendre l’esprit plutôt que la lettre. Voltaire, dans la polémique autour de la traduction d’Homère, dernier soubresaut de la Querelle des Anciens et des Modernes, apprécie le travail de Pope, comme en témoigne entre autres cet extrait au sein d’un fragment qui tente de démontrer que les écrivains anglais sont davantage respectés en Angleterre qu’en France.
La traduction d’Homère est qualifiée d’excellente dans le texte anglais dont la voix énarrative souligne l’argumentation que les traductions modernes modèrent en demeurant systématiquement plus proches de la version française. Le texte anglais de 1733 renforce la portée du discours constituant; l’emphase nourrit tous les aspects du texte et émet avec la même vigueur certaines critiques portant également sur des auteurs français comme Rabelais, Molière ou Voiture, mais aussi sur l’Académie, par exemple dans ce passage à propos des éloges prononcés par les Académiciens :
Le contraste avec les retraductions modernes ne saurait être plus significatif : « ennuyer le public », « to bore the public », devient dans la version anglaise de 1733 « the Publick should be indulg’d from Time to Time the sullen satisfaction of yawning over these Productions » (le public se voit gratifié de temps à autre du triste plaisir de bâiller à ces productions); « ils ont parlé sans penser » est allongé en « they deliver’d themselves without thinking at all », et les « recherches [qui] ne sont plus que pour la curiosité » se métamorphosent en « Researches [which] serve to no other Purpose than merely to delight an inquisitive Mind ».
Conclusion
Les Lettres anglaises, mais aussi les Lettres philosophiques, éditées sous de fausses adresses, jugulent une parole qui se sait interdite; cette retenue est fidèlement reprise dans les versions anglaises modernes et articule une expression qui en même temps qu’elle se divulgue s’étouffe par prudence dans l’éviction. Tout discours littéraire est « radicalement contextualisé », affirme Dominique Maingueneau (2016, p. 5). Le contexte des Lettres anglaises est celui d’une époque où l’Angleterre et la France occupent une place prépondérante dans la remise en question de la société. Si les deux pays diffèrent dans leur mode de diffusion des idées, ils n’en partagent pas moins cette « simultanéité historique » dont parle la traductologue Annie Brisset (2004, p. 49). Il en découle que le texte anglais de 1733 et les originaux français partagent des codes culturels qui sont absents des retraductions modernes. Dans la version anglaise contemporaine de Voltaire, les infidélités au texte premier font remonter à la surface les préoccupations et les questionnements des Lumières. Dans cette optique, les Lettres anglaises s’abreuvent à plusieurs sources. Celle de la version anglaise de 1733 rend compte d’un exil qui s’assume dans une parole libre : « j’étais à Londres quand j’écrivais ces bagatelles il y a six ans, je ne pensais pas plus à la France qu’au Monomotapa », écrit Voltaire au comte de Maurepas en quémandant sa protection contre la lettre de cachet qui le menace suite à la parution en France des Lettres philosophiques en avril 1734. « J’ai fait humainement ce que j’ai pu pour prévenir le débit de ce scandaleux ouvrage », ajoute-t-il encore dans sa lettre au ministre (1963, t. I, pp. 475-476). Voltaire inscrit son discours constituant dans un espace problématique qui se manifeste en particulier dans l’appareil paratextuel des Lettres (préfaces et correspondance), mais aussi lorsqu’on confronte la version anglaise et les versions françaises. Cet espace est celui d’une paratopie qui dit son appartenance et sa non-appartenance à une France où tout philosophe qui prend la parole se doit en même temps de prétendre qu’elle se diffuse malgré lui. « Je commence à croire trop hardi ce qu’on ne trouvera à Londres que simple et ordinaire », confie Voltaire à son ami Pierre Cideville (ibid., p. 396). Le texte français exprime des jugements dans une retenue que reproduisent les retraductions anglaises récentes. Tandis que Voltaire disséminera les Lettres dans les Mélanges (1761), camouflant une parole que l’espace français interdit, les nombreuses rééditions anglaises de l’époque[18] font entendre une voix énarrative qui, par le bais de l’emphase, clame haut et fort un discours s’incorporant dans une société où Raison et Bon Goût se discutent à l’unisson, en toute liberté. En cela, l’original français trouve son accomplissement dans l’énonciation anglaise de Lockman qui fait pleinement entendre ce que Voltaire s’oblige à masquer ou à tempérer.
Appendices
Note biographique
Guy Rooryck est professeur à l’université de Gand (Belgique) où il dirige la section de français du département de Traduction, interprétation et communication. Il enseigne la pratique de la traduction, la littérature et l’histoire de la civilisation françaises. Il a publié une thèse sur les Mémoires de Saint-Simon (Droz) et est traducteur littéraire (néerlandais > français), entre autres de romans d’auteurs flamands comme Joseph Pearce ou Peter Terrin. Ses travaux plus récents portent sur les rapports interculturels entre la France et la Grande Bretagne à l’époque des Lumières. Il a fait paraître en collaboration avec Lieve Jooken des articles sur les traductions de Locke, La Mettrie, Luzac, Voltaire et Rousseau.
Notes
-
[1]
V. aussi Rooryck et Jooken (2019) où sont analysées les lettres philosophiques consacrées à Descartes et Locke. La présente contribution approfondit certains arguments à partir d’un angle pragmatique et s’arrête aux passages consacrés à la littérature.
-
[2]
Voir la lettre à Jacob Vernes d’avril 1767 : « Jean-Jacques n’écrit que pour écrire et moi j’écris pour agir » (Correspondance, 1983, t. VI, p. 1084).
-
[3]
La page de titre mentionne « A Basle » sans éditeur. En réalité l’ouvrage a été publié à Londres chez William Bowyer.
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[4]
Amsterdam au lieu de Rouen.
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[5]
Dans Seuils, Genette définit l’épitexte privé par la présence d’« un destinataire premier [...] à qui l’auteur s’adresse [...] fût-ce avec l’arrière-pensée de prendre ultérieurement le public à témoin de cette intervention » (1987, p. 341).
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[6]
« Deux Anglais traduisirent [ces Lettres] en 1732; l’une fut imprimée aussitôt et connut un débit prodigieux » (Préface, p. i).
-
[7]
Lettre de Voltaire à Jacques-François de Sade du 29 août 1733.
-
[8]
V. Harcourt Brown (1967), Nicholas Cronk (2001) et J. Patrick Lee (2001). John Lockman avait déjà traduit la Henriade en anglais : Henriade. An epick poem in ten canto’s (London, C. Davis, 1732).
-
[9]
« More advanced exegesis [...] belonged to the sphere of enarratio. Jerome’s greatest emphasis as a Hebraist lay in the area of enarratio: the exposition of the text, the explanation of difficulties, linguistic analyses, and the precision of background information » (Graves, 2007, p. 33).
-
[10]
Ma collègue Lieve Jooken et moi avons étudié les différentes fonctions de la voix énarrative dans certaines traductions de textes philosophiques au temps des Lumières (v. Rooryck et Jooken, 2013, 2018).
-
[11]
L’auteure voit entre le traducteur et l’auteur « [a] creative relationship » (2011, p. 75).
-
[12]
Le traducteur anonyme de L’homme machine de La Mettrie (Man a machine, London, 1748) amplifie le caractère pamphlétaire du texte original et renforce sa teneur polémique (v. Jooken et Rooryck, 2011), alors que quand Samuel Formey édite en les préfaçant les Essais philosophiques sur l’entendement humain de Hume dans une traduction de Jean-Bernard Mérian, tout le discours paratextuel se contorsionne sur le mode de la prétérition : « Le fonds général de pyrrhonisme qui règne [dans ces Essais] et le peu de ménagement avec lequel les vérités de la religion [...] y sont attaquées, semblent engager à dérober plutôt qu’à répandre la connaissance de cet ouvrage » (Hume, 1758, p. xiv).
-
[13]
Dans tous les exemples cités ici le texte des Lettres écrites de Londres est identique à celui des Lettres philosophiques.
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[14]
« The ‘Lettres anglaises’ are thus a bifocal text (or cluster of texts), aimed at readers on both sides of the Chanel » (Cronk, 1997, p. 102).
-
[15]
« In the Lettres philosophiques, as in the Lettres de Londres sur les Anglais, the extracts from the authors discussed in Letters XVIII, XX, XXI and XXII appear in French only; in the Letters concerning the English nation, the literary extracts appear (with one exception) both in the English original and in French translation; the two texts are printed sequentially, giving the four letters an entirely distinctive appearance » (Cronk, 1997, p. 103).
-
[16]
« If we wish to define a strategic function for the letters on literature in the Lettres philosophiques, we could argue that they include a partial criticism of English culture calculated to make the French reader more receptive to praise of the English elsewhere in the book. [...] In this view, the section on English literature becomes part of a balancing act in which some explicit criticism of the English provides a counter-weight to implicit criticism of the French elsewhere in the book » (Cronk, 1997, p. 100).
-
[17]
« English readers of 1733 would not have read Voltaire’s letters on literature simply as the critique of a foreigner: they would have recognised rather the expression of opinions which were current in England at the time. […] Voltaire’s views on English literature in the “Lettres anglaises” reflect those of many English writers » (Cronk, 1997, p. 105).
-
[18]
Dès 1733 parut une deuxième édition (London & Dublin, reprinted by and for George Faulkner). Les Letters concerning the English Nation by Mr. de Voltaire sont ensuite rééditées en 1740 (Dublin, by George Faulkner), 1741 (London, printed for C. Davis), 1759 (Glasgow, printed by R. Urie), 1760 (London, printed for L. Davis and C. Reymers) et 1778 (London, sold by J. and R. Tonson, D. Midwinter, M. Cooper and J. Hodges).
Bibliographie
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- Rooryck, Guy et Lieve Jooken (2013b). « Elie Luzac et L’homme plus que machine (1748) ». Cadernos de Tradução, 38, 1, pp. 197-225.
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- Wismann, Heinz (2012). Entre les langues. Paris, Albin Michel.
Ouvrages de Voltaire
Autres références
List of figures
Éditions des Lettres anglaises, ensuite Philosophiques