Abstracts
Résumé
Interprétation et fétiches : entre traduction et psychanalyse — Si, comme le démontre George Steiner, la traduction n'est finalement qu'un mode d'interprétation, cela soulève immanquablement la question des critères pertinents et éventuellement applicables à l'évaluation de traductions. Pourtant, ce que l'on constate le mieux avec Steiner lorsqu'il évalue des traductions, c'est toute la complexité des relations entre traducteurs-interprètes et les textes qu'ils traduisent — à la fois au sens qu'elles/ils leur attribuent comme à leurs modes de le signifier. De même, l'évaluation, les jugements que l'on porte sur les traductions en disent long sur celle/celui qui évalue, sur l'importance qu'elle/il attache au sens, voire à la possibilité même de connaître ou de comprendre le monde où nous évoluons.
Tels qu'il les décrit, les premiers cas de fétichisme chez Freud opèrent de façon analogue : ils s'avèrent n'être qu'une série de tentatives d'adaptation à la réalité. Les fétiches servent à la fois à commémorer et à nier une réalité perçue mais inacceptable. Ce genre de paradoxe et les simulacres qui servent à déguiser cette réalité ne sont finalement que le tribut qu'il faut payer en échange de ce sentiment rassurant que le monde est disponible à notre entendement, que les moyens très limités dont nous disposons pour le comprendre sont adéquats. Sans critères absolus pour les évaluer, les traductions fonctionnent comme des fétiches : elles prouvent — mais provisoirement — que nous sommes capables de comprendre et d'interpréter le monde, alors que, par leur imperfection, elles réaffirment le fait que telle compréhension n'est finalement que fragmentaire.
Abstract
Interpretation and Fetishes: Between Translation and Psychoanalysis — If, as George Steiner demonstrates, translation is a form of interpretation, evaluating translations raises the question of knowledge, that of the implicit apprehension of a standard against which any given translation is to be measured. Yet, as Steiner also shows, what translations ultimately reveal most clearly is the intricate relationship the translators as interpreters entertain toward texts, toward their putative meaning and toward their various modes of signifying it. In much the same way, the evaluation of translations reveals the evaluator's own preoccupation with meaning, with the very possibility of knowing or understanding the world.
Freud's earliest cases of fetishism reveal it as a form of adaptation, as an evolving series of attempts to adapt to an unacceptable perception of reality by at once denying and commemorating that perception. Such contradictions and the simulacra which serve to disguise reality are, in the end, the wages paid in exchange for the reassuring sense that the world is knowable, that it is accessible through the very limited means of understanding we have at our disposal. In the absence of any ultimate standard, translations serve the same purposes as fetishes : they at once demonstrate our ability to interpret and understand although, by their inevitable perfectibility, they reiterate the fact that such understanding can only be partial.
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