Théologiques
Revue interdisciplinaire d’études religieuses
Volume 29, Number 1, 2021 Hommage à Gregory Baum Guest-edited by Jean-François Roussel and Patricia G. Kirkpatrick
Table of contents (12 articles)
Liminaire
Thème
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In memoriam Gregory Baum
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Solidarity with the Oppressed, Conversions, Truth in Action: Gregory Baum’s Evolving Theological Horizons
Lee Cormie
pp. 21–51
AbstractEN:
Gregory Baum was not a great theologian like the systematic giants of the mid-20th century. Rather, in a rapidly changing world which no one single person, group or discourse can fully grasp, he was a different kind of theologian, in dialogue with expanding circles of others, exploring new interdisciplinary pathways, forging another kind of theology witnessing to hope that another world is possible.
FR:
Gregory Baum n’était pas un grand théologien comme les géants systématiques du milieu du 20e siècle. Plutôt, dans un monde en évolution rapide qu’aucune personne, aucun groupe ou aucun discours ne peut pleinement saisir, il était un autre type de théologien, en dialogue avec des cercles en expansion d’altérités, explorant de nouvelles voies interdisciplinaires, forgeant un autre type de théologie témoignant de l’espoir qu’un autre monde est possible.
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Gregory Baum’s Contribution to The Ecumenist
Donald Schweitzer
pp. 52–72
AbstractEN:
This article explores Gregory Baum’s contributions both as an editor and as a theologian to the journal The Ecumenist, which he founded in 1962. It explores the original orientation that he set for it of forwarding ecumenism, then how this changed in the 1970s, when The Ecumenist became a journal devoted to critical theology. It then examines the contributions Baum made to this journal through his own writing. This provided a critical Christian witness that sought to keep pace with the changing faces of evil in Western societies and churches and to relate Jesus to these in liberating ways.
FR:
Cet article explore les contributions de Gregory Baum à la fois en tant qu’éditeur et en tant que théologien à la revue The Ecumenist, qu’il a fondée en 1962. Il explore l’orientation originale qu’il lui a donnée afin de faire avancer l’oecuménisme, puis comment cela a changé dans les années 1970, lorsque The Ecumenist est devenu une revue consacrée à la théologie critique. Il examine ensuite les contributions que Baum a apportées à ce journal à travers ses propres écrits. Cela a fourni un témoignage chrétien critique qui a cherché à suivre le rythme des visages changeants du mal dans les sociétés et les églises occidentales et à relier Jésus à ceux-ci de manière libératrice.
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Gregory Baum’s “Effervescent” Hope in the Church: Some reflections on the inclusivity of Gregory Baum’s ecumenism and their bearing on the Church of the Future
Patricia Kirkpatrick
pp. 73–91
AbstractEN:
This essay explores the importance of dialogue in ecumenical relations in the thought and writing of Gregory Baum. To do so it focusses on three of his writings. The first is an interview he gave in 2005 to A. miller in the Journal of Philosophy and scripture. The second is his discussion of ecumenism in his 2005 book Amazing Church. A Catholic Theologian Remembers a Half Century of Change. The third is one of the last writings of Gregory Baum written in 2016 entitled « Interreligious Dialogue Includes Listening to Secular Voices », in the Toronto Journal of Theology. All three of these writings stem from his earlier writing on the second Vatican Council. The three documents which are referred to are Unitatis redintegratio, Nostra aetate, and Gaudium et spes as well as the 1991 document Dialogue and Proclamation. The essay therefore explores Baum’s appreciation of all three forms of ecumenical dialogue, namely that which exists between Christian denominations, inter faith and dialogue with secular thought. These are not exhaustive commentaries on the previous documents and they are certainly not exhaustive in terms of Baum’s theological perspective on ecumenical dialogue. Rather, they will serve as a springboard when asking if his perspectives are still relevant for the church today.
FR:
Cet essai explore l’importance du dialogue dans les relations oecuméniques selon la pensée et l’écriture de Gregory Baum. Pour ce faire, il se concentre sur trois de ses écrits. Le premier est un entretien qu’il a donné en 2005 à A. Miller dans le Journal of Philosophy and Scripture. Le second est sa discussion sur l’oecuménisme dans son livre de 2005, Amazing Church. A catholic theologian remembers 50 years of change. Le troisième est l’un des derniers écrits de Gregory Baum, rédigé en 2016 et intitulé «Interreligious Dialogue includes Listening to Secular Voices», dans le Toronto Journal of Theology. Ces trois écrits proviennent de son oeuvre antérieure sur le Concile Vatican II. Les trois documents auxquels il est fait référence sont Unitatis redintegratio, Nostra aetate et Gaudium et spes, ainsi que le document de 1991, Dialogue and Proclamation. L’essai explorera donc l’appréciation de Baum pour les trois formes de dialogue oecuménique, à savoir ce qui existe entre les confessions chrétiennes, l’interconfessionnel et le dialogue avec la pensée laïque. Ce ne sont pas des commentaires exhaustifs sur les documents précédents et ils ne sont certainement pas exhaustifs en ce qui a trait à la perspective théologique de Baum sur le dialogue oecuménique. Ils serviront plutôt de tremplin pour évaluer si ses perspectives sont toujours pertinentes pour l’église aujourd’hui.
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Gregory Baum et le Québec : un parcours ancré dans le double mouvement d’une spiritualité. Première partie. Un accueil de la société québécoise jusqu’à en prendre « l’accent »
Michel Beaudin
pp. 92–129
AbstractFR:
Dans un essai en deux articles, l’auteur analyse la relation que Gregory Baum a établie avec sa terre d’accueil, le Québec – guidé par l’hypothèse que cette relation serait structurée par la spiritualité de Baum où la gratuité divine implique un mouvement circulaire de la grâce, sous la forme d’un don reçu qui doit être redonné. Dans le premier volet du diptyque, on se penche sur ce que Baum a reçu du Québec et a intégré à sa pensée – à savoir les caractéristiques d’une « société distincte » qui ont toujours étonné le Canada anglais : langue française, passé massivement catholique, nationalisme, politiques culturelles, sécularisation et laïcité récentes et radicales, intellectuels originaux. Sous l’angle ecclésial, jamais dissocié des enjeux de société, Baum a profondément été interpellé par la sécularisation, mais aussi par la désaffection et l’étonnant ressentiment de la population québécoise à l’égard de l’Église catholique. Tant dans l’apprentissage de sa troisième langue, le français, que dans la problématisation de sa réflexion, Baum aura su faire sien « l’accent » québécois (ou les accentuations portées par la culture québécoise).
EN:
In a two-part essay, the author analyzes Gregory Baum's relationship with his host country, Quebec – with the assumption that this relationship is structured by Baum's spirituality in which divine gratuity implies a circular movement of grace, in the form of a gift received that must be given back. The first part of the diptych focuses on what Baum received from Quebec and integrated into his thinking – namely, the characteristics of a "distinct society" that have astonished English Canada: the French language, the overwhelmingly Catholic past, nationalism, cultural policies, recent and radical secularization and secularism, and original intellectuals. From the ecclesial angle, never dissociated from the social issues, Baum has been deeply questioned by secularization but also by the disaffection and the surprising resentment of the Quebec population towards the Catholic Church. In learning his third language, French, as well as in the problematization of his reflection, Baum was able to make the Quebecois "accent" (or the accents carried by Quebec culture) his own.
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Gregory Baum et le Québec : un parcours ancré dans le double mouvement d’une spiritualité. Deuxième partie. Une redevabilité traduite en contributions prophétiques
Michel Beaudin
pp. 130–163
AbstractFR:
Dans un essai en deux articles, l’auteur analyse la relation que Gregory Baum a établie avec sa terre d’accueil, le Québec ─ guidé par l’hypothèse que cette relation serait structurée par la spiritualité de Baum où la gratuité divine implique un mouvement circulaire de la grâce, sous la forme d’un don reçu qui doit être redonné. Dans le second volet du diptyque, on se penche cette fois sur ce que Baum a redonné à sa nouvelle patrie, sous forme d’analyses et d’interpellations prophétiques – aux thèmes multiples mais toujours traités, sociologiquement ou théologiquement, à la « manière Baum » : interventions courageuses dans l’espace public à propos de questions sociales, ecclésiales ou religieuses, accompagnement de la mouvance sociale chrétienne, critique du néolibéralisme (inspirée notamment par l’anthropologue et économiste Karl Polanyi), appel à « oser » faire advenir l’inédit. Comment le christianisme social québécois va-t-il intégrer l’immense héritage de Baum dans son questionnement actuel sur son propre avenir ?
EN:
In a two-part essay, the author analyzes Gregory Baum's relationship with his new home, Quebec – with the assumption that this relationship is structured by Baum's spirituality in which divine gratuity implies a circular movement of grace, in the form of a gift received that must be given back. The second part of the diptych focuses on what Baum gave back to his new homeland, in the form of prophetic analysis and appeals – with multiple themes but always sociologically or theologically treated in the "Baum way" : courageous interventions in the public space about social, ecclesial or religious issues, accompaniment of the Christian social movement, criticism of neo-liberalism (inspired in particular by the anthropologist and economist Karl Polanyi), call to "dare" to make a new future happen. How will Quebec social Christianity deal with Baum's immense legacy, in a time of uncertainty about its own future ?
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Gregory Baum on Nationalism and Ethics: The Case of Quebec
David Seljak
pp. 164–189
AbstractEN:
After moving to Quebec in 1986, Gregory Baum articulated an ethics of nationalism by examining the works of religious thinkers who adopted a critical appreciation of nations and nationalism. Baum argued that, while nationalism could promote chauvinism and even violence, it could also serve as a defense against colonialism and the imperialism of universalizing systems of governance. His sensitivity to the moral ambiguity of nationalism was inspired as much by his experience of nationalism in Germany, Ontario, and, especially, Quebec as by his Critical Theology. Baum’s analysis attempted to provide criteria for acceptable forms of nationalism. He believed that mainstream Quebec nationalism met these criteria. This paper attempts to connect Baum’s biography and social location with his theoretical work and argues that his ethics of nationalism is unthinkable without an understanding of his experience to Quebec.
FR:
Suite à son arrivée au Québec en 1986, le théologien catholique Gregory Baum a articulé une éthique du nationalisme en examinant les oeuvres de penseurs religieux ayant épousé une appréciation critique des nations et du nationalisme. Baum a soutenu que, bien que le nationalisme puisse faire la promotion du chauvinisme et même de la violence, il pouvait aussi servir de mode de défense contre le colonialisme et l’impérialisme des systèmes universalisants de gouvernance. Ce sont les expériences de Baum en Allemagne, en Ontario et surtout au Québec qui, ensemble avec sa théologie critique, l’ont sensibilisé à l’ambigüité morale du nationalisme. Cet article décrit comment celles-ci ont influencé sa critique éthique du nationalisme en général et des projets nationalistes québécois en particulier. L’analyse de Baum a tenté d’établir des critères pour des formes acceptables de nationalisme; selon lui, l’idéologie dominante au Québec satisfaisait ces critères. Dans cet article, nous démontrons que la vie de Baum et son oeuvre théorique sont intimement liées, et qu’il est indispensable de comprendre son expérience du nationalisme, surtout au Québec, afin d’apprécier pleinement son analyse de projets nationalistes.
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Une « École du Québec » ? Le regard de Gregory Baum sur la théologie québécoise
Jean-François Roussel
pp. 190–214
AbstractFR:
Gregory Baum a fréquenté la théologie québécoise à partir du milieu des années 1980 et certains de ses textes ont visé à l’analyser. Son regard permet-il d’identifier le style d’une certaine théologie québécoise ainsi que les problèmes qui l’ont occupée depuis un demi-siècle ? On examinera la manière dont Baum inscrit cette théologie dans la tradition de la théologie catholique européenne, tantôt de manière éclairante, tantôt au risque de malentendus. Puis on traitera de l’importance que Baum accorde à la pensée de Fernand Dumont pour la théologie d’ici. Enfin, le regard de Baum sur cette théologie et sur ses réseaux demeure-t-il pertinent, alors que les conditions de la pratique de la théologie au Québec connaissent un nouveau virage, non moins important que celui qui s’est produit il y a 50 ans ?
EN:
Gregory Baum was involved in Quebec theology from the mid-1980s and he dedicated some of his theological reflections to analyze it. Did he seize the style of a certain Quebec theology as well as the problems that have occupied it for half a century ? We will examine the way in which Baum links this theology with the tradition of European Catholic theology : sometimes in an insightful way, but sometimes at risk of misunderstandings. Then we will discuss how important is Fernand Dumont's theological thought for Baum. Finally, does Baum’s view on this theology and its networks remain relevant today, as the conditions for the practice of theology in Quebec are undergoing a new shift, not less important than that which occurred 50 years ago ?
Hors thème
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Le principe de neutralité comme justification des exemptions religieuses
Karel J. Leyva
pp. 215–241
AbstractFR:
Les défenseurs de la neutralité bienveillante soutiennent qu’un État neutre ne doit accorder aucun type de reconnaissance aux groupes culturels ou religieux. Les multiculturalistes libéraux avancent pour leur part que, en raison de la nature non neutre des institutions publiques, les États démocratiques doivent adopter des politiques visant la reconnaissance et l’accommodement des besoins distinctifs des groupes ethnoculturels. Cet article examine une manière différente de concevoir le principe de neutralité. Dans cette conception, développée par Alan Patten dans le cadre du multiculturalisme libéral, un État ne peut être neutre que s’il assiste ou entrave de manière équivalente les différentes conceptions du bien. La neutralité est ainsi réinterprétée pour devenir un principe permettant de justifier les exemptions religieuses. L’article souligne certains aspects de cette théorie qui méritent d’être repensés.
EN:
Supporters of neutrality as benign neglect argue that a neutral state should not grant any type of recognition to cultural or religious groups. Liberal multiculturalists argue instead that due to the non-neutral nature of public institutions, democratic states must adopt policies that recognize and accommodate the distinctive needs of ethnocultural groups. This article examines a different way of conceiving the principle of neutrality. In this conception, developed by Alan Patten in the framework of liberal multiculturalism, a state can only be neutral when it extends equivalent levels of assistance/hindrance to rival conceptions of the good. Neutrality is thus reinterpreted to become a principle justifying the religious exemptions. The article highlights some aspects of this theory that that should be reconsidered.
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Définir la spiritualité : une généalogie des débats
Thomas Nérisson
pp. 242–267
AbstractFR:
La spiritualité est aujourd’hui un concept incontournable en sciences des religions. Or, force est de constater l’absence de consensus en ce qui concerne sa définition. Dans cet article, j’avance que cette situation est causée par la tendance des chercheurs en sciences humaines et sociales à faire peu de cas de l’historicité de ses concepts. Ce désintérêt engendre une situation où les auteurs négligent les implications de leurs appareils théoriques et les critiques qui leur ont été faites, ce qui fait reposer leurs recherches subséquentes sur des fondations d’argile. Ainsi, bien qu’elles coexistent aujourd’hui, les différentes interprétations du concept de spiritualité ont des fondements théoriques et théologiques opposés qui ont été en grande partie perdus de vue, ce qui les rend intrinsèquement incompatibles. Afin de démontrer cette thèse, je ferai un survol généalogique de ce concept afin de mettre en valeur des débats qui lui ont ajouté des couches de signification.
EN:
Spirituality is an unavoidable concept in religious sciences nowadays. That being said, it is most remarkable how little consensus there is on its meaning. In this article, I argue that this state of fact lies in social scientists’ tendency to overlook the historicity of their concepts. This creates a situation where authors neglect the implications of their theoretical apparatus and the critics that have already been addressed to them, which create unstable grounds for the research to come. Thus, even though they currently coexist, the different interpretations of the concept of spirituality have opposite theoretical and theological foundations that have been mostly forgotten, which makes them intrinsically incompatible. To demonstrate this thesis, I examine a genealogy of this concept in order to highlight some debates that added layers of meaning to it.