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À Pierre Ouellet, un théologien reconnaissant[Record]

  • Olivier Bauer

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  • Olivier Bauer
    Théologie, Université de Montréal (Canada)

Pierre Ouellet (philosophe : 1950-) est un passeur (au double sens de celui qui permet de passer vers un autre endroit et de celui qui adresse une passe dont on se doit de profiter). Pierre Ouellet est un penseur qui compte, au Québec, au Canada et même dans le monde. En témoignent ses fonctions universitaires : il est titulaire de la chaire du Canada en esthétique et poétique, professeur titulaire au département d’études littéraires de l’Université du Québec à Montréal, membre régulier du Centre interuniversitaire d’études sur les lettres, les arts et les traditions, professeur invité au Mexique, au Brésil, en France et au Japon. En témoigne sa bibliographie : il a publié une quarantaine d’ouvrages tant de poésie (premier recueil en 1989 : Sommes) que d’essais (premier ouvrage en 1990 : Chutes. La littérature et ses fins). En témoignent les nombreux prix et distinctions qui reconnaissent sa pensée : il est lauréat de deux prix du Gouverneur général, il a été élu à l’Académie des lettres du Québec, il est membre de la Société Royale du Canada, etc. Dans son ouvrage Sacrifiction, il offre sa pensée sur le sacré et la fiction, sur le sacré comme fiction, sur la fiction comme sacré, sur « Dieu ou quoique ce soit du genre » (119). Matériellement, l’ouvrage est un livre de 392 pages dans une belle édition de VLB éditeur. Il se présente comme le 28e titre de la collection « Le soi et l’autre » que Pierre Ouellet dirige personnellement. Sur la couverture du livre figure la reproduction d’un montage de Christine Palmiéri, intitulé Livre-autel et daté de 2011. L’image donne sans aucun doute le ton et le sens de l’ouvrage. Je la regarde et j’y vois un vieux livre épais, relié en peau, en bon état, fermé (a-t-il été seulement ouvert ?) ; sur le livre repose une tête coupée, celle d’une statue en bois polychrome, celle d’un homme jeune, beau, la bouche fermée, les yeux, noirs, un peu bridés, grand ouverts, le regard fixe ; avec ses cheveux ondulés et ses pommettes saillantes, il pourrait être un Christ ou un ange ; de son cou, de la commissure de ses lèvres et de son nez coulent deux fois trois filets de sang rouge ; ils dégoulinent sur la tranche et sur le dos du livre ; ils se rejoignent pour former une tache visqueuse, poisseuse, irrégulièrement arrondie. Tout est montré, tout est dit : ensemble, l’image et l’écrit ; ensemble, l’art et le sacrifice ; ensemble, la fiction et le sacré ; et cette référence au christianisme. Dans le livre, Ouellet déploie une pensée originale et féconde sur la « sacralisation et [la] profanation dans l’art et la littérature » (sous-titre de l’ouvrage) essentiellement contemporains, une pensée qu’il organise en deux parties d’égales longueurs, la première intitulée : « La part de Dieu » (avec une majuscule) et sous-titrée « Fictions du sacré », et la seconde : « Tonalités du verbe » (avec une minuscule) et sous-titrée « Tonus et virtus ». Ouellet y écrit (c’est à dire qu’il montre ce qu’il dit) comment s’articulent le sacré (du côté de Dieu ?) et la fiction (du côté du verbe ? à moins que ce ne soit l’inverse), comment des artistes voient et entendent le monde, comment des plasticiens et des poètes disent et montrent le monde, comment « la perte de toute vision d’ensemble et de toute voix commune laisse place à l’émergence de “vocalités” et de “visualités” inédites où peuvent apparaître des modes inattendus de socialité et de sacralité » (4e …

Appendices