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Entrevue avec Claire Colomb, professeure d’études urbaines et d’aménagement à la Bartlett School of Planning, University College LondonDans les coulisses de la science[Record]

  • Nacima Baron

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  • Nacima Baron
    Professeure, Université Paris-Est, Laboratoire Ville Mobilité Transport ; nacima.baron@enpc.fr

L’entrevue a été réalisée le 21 juin 2019 en marge d’un colloque international intitulé Un municipalisme transformateur ? L’expérience barcelonaise en perspective, organisé conjointement par deux composantes de l’Université autonome de Barcelone (l’Institut de la gouvernance et des politiques publiques [IGOP] et l’équipe de recherche en géographie du tourisme [TUDISTAR]), dans le cadre d’un programme de recherche associant les écoles françaises de Rome, d’Athènes et la Casa de Velázquez de Madrid sur les crises et les mutations des métropoles en Europe du Sud, sous la responsabilité de Nacima Baron (Université Paris-Est) et de Dominique Rivière (Université Paris-Diderot). L’objectif de ce colloque était d’analyser de manière critique les résultats et les limites de l’expérience de l’équipe municipale progressiste autour de Barcelona en Comú, notamment en matière de politiques du tourisme, de l’espace public et du logement. La présentation de Claire Colomb, intitulée « Cities vs Airbnb? Conflicts and Challenges around the Regulation of Platform-mediated Short-term Rentals in Large European Cities », a ouvert une session consacrée à la touristification et aux revendications pour le droit à la ville. À la Bartlett School of Planning, j’enseigne la sociologie urbaine et l’aménagement comparé à des groupes d’étudiants venant de nombreux pays. Mes thèmes de recherche couvrent deux champs : la gouvernance urbaine, les politiques publiques, l’aménagement et les mobilisations sociales dans les villes européennes, mais aussi – à une échelle plus large – l’aménagement de l’espace en Europe, les politiques régionales, les conflits territoriaux et l’aménagement régional comparé. Mon terrain de recherche a été d’abord l’Europe (souvent dans une perspective de comparaison entre pays), et a permis des collaborations avec des collègues en France, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni, et des publications en anglais, en français, en espagnol et en allemand. Je développe actuellement un intérêt de recherche pour les villes d’Amérique du Sud. Dans mon travail, je me suis inscrite dans différentes traditions intellectuelles et linguistiques pour aborder les critiques, maintes fois répétées, concernant ce qu’on peut désigner comme une certaine domination des « méta-récits anglo-américains » dans le champ international des études urbaines, de manière à mieux analyser les différenciations qui affectent les processus urbains au sein du continent européen. Cela veut dire prêter attention aux niveaux méso et micro, et aux spécificités politiques, sociales, culturelles et institutionnelles qui marquent les relations entre l’État, le marché et les acteurs de la société civile dans la production et la régulation de l’environnement bâti, en vue d’éviter des généralisations hâtives sur les dynamiques des processus urbains et des politiques publiques qu’on a pu noter parfois (par exemple à travers l’usage indifférencié du concept de « néolibéralisme » ; voir Patrick Le Galès, 2016, à ce sujet). En termes théoriques, ma contribution aux études urbaines et à l’aménagement tente d’enrichir ces domaines en combinant les approches de l’économie politique urbaine avec celles des cultural studies, de la sociologie des mobilisations sociales et de l’action collective, et les modes d’analyses « constructivistes » des politiques publiques. Le tourisme urbain n’était pas un de mes sujets de recherche jusqu’à récemment. En tant que sociologue-urbaniste, j’ai commencé à m’intéresser à ses impacts dans le cadre de recherches sur l’articulation entre les mouvements sociaux urbains, les conflits autour des questions d’aménagement et les politiques publiques dans les villes européennes. En 2010-2012, j’ai obtenu un financement européen pour réaliser un projet de recherche à Barcelone. C’était une période d’intenses mobilisations dans la ville (et en Espagne plus largement, dans la suite du mouvement des « Indignés » entamé sur les places des grandes villes espagnoles le 15 mai 2011). Les impacts négatifs des flux …

Appendices