Abstracts
Résumé
Bien que la figure de l’auteur demeure investie d’une forte autorité dans le théâtre anglais contemporain, qui accorde traditionnellement une place de choix aux nouvelles écritures dramatiques, elle se trouve ébranlée depuis le début du xxie siècle par un accroissement notable des pratiques collaboratives. Fondé sur une analyse des discours des dramaturges sur leur rôle (tel qu’il leur échoit mais aussi tel qu’ils le revendiquent), l’article examine comment ces évolutions influent sur le statut des auteurs au sein du monde du théâtre anglais, ou plus précisément sur le système de reconnaissance et de valorisation dans lequel ils s’inscrivent et dont ils contribuent à refaçonner les contours par leurs prises de position. Il s’intéresse notamment au développement d’une posture collaborative, particulièrement manifeste dans la volonté, exprimée par un nombre croissant d’auteurs, sinon de se démettre de leur autorité, du moins de la partager davantage, non seulement avec leurs collaborateurs artistiques, mais également avec les spectateurs.
Abstract
Although the figure of the author remains retains significant authority in contemporary English theatre, which traditionally accords a place of choice to new dramatic writing, it has been undermined since the early 21st century by a notable increase in collaborative practices. Founded on an analysis of playwrights’ discourses regarding their role (as it falls to them, but also as they lay claim to it), this article examines how these evolutions affect the status of authors within the English theatre world or, more precisely, the recognition and valorization system they belong to and whose outlines they help reshape through their positions. It focuses, notably, on the development of a collaborative stance that is particularly evident in the will expressed by a growing number of authors not to relinquish their authority, but to share it a bit more, at least, with both their artistic collaborators and the spectators.
Article body
La culture théâtrale anglaise[1], largement textocentrée[2], accorde une place prépondérante aux écritures dramatiques contemporaines et à leurs auteurs. Ces derniers y constituent des figures d’autorité, non au sens où ils régiraient le champ théâtral, mais au sens où ils y jouissent d’un crédit qui leur confère une influence notable sur les processus de création. Depuis le début du xxie siècle, un nouveau partage des rôles tend toutefois à s’opérer au sein de ces processus, à la faveur notamment d’un accroissement des pratiques collaboratives. Quand il ne s’absente[3] pas radicalement, le texte produit pour la scène ne l’est plus systématiquement par un écrivain professionnel. D’autres figures peuvent se substituer à l’auteur, ou, plus fréquemment dans le cas du théâtre anglais, se joindre à lui pour co (« avec ») laborare (« travailler »), à des degrés divers, à un projet désormais commun : le développement du texte, qu’il demeure dramatique ou non. La présence de l’auteur perd alors, sinon de son évidence, du moins de son unicité. Dans cet article, nous nous proposons d’interroger comment ces évolutions fonctionnelles influent sur le statut de l’auteur, plus précisément sur le système de reconnaissance et de valorisation dans lequel il s’inscrit[4], à l’intérieur du monde[5] du théâtre anglais. Nous nous appuierons pour ce faire sur une analyse des discours publics (entretiens, tribunes, conférences) ou rendus publics (rapports) où les auteurs font référence à leur statut. Cette matière discursive constitue en effet un témoin éloquent de la valeur accordée à l’auteur, par le volume qu’elle représente comme par les représentations qu’elle reflète, en même temps qu’elle participe à la construction de cette valeur, par l’image que l’auteur y projette de lui-même, voire la posture qu’il y affirme. Comme l’écrit Ruth Amossy, « l’écrivain doit, bon gré mal gré, sciemment ou involontairement, se situer dans le monde [du théâtre] — se positionner dans le champ [théâtral] — et […] son image d’auteur joue un rôle non négligeable dans la position qu’il occupe ou qu’il désire occuper[6] ». Nous verrons ainsi comment les discours des auteurs rendent compte de la manière dont l’auctorialité se trouve déstabilisée dans le théâtre anglais depuis une dizaine d’années, tout en contribuant, par les positionnements qu’ils affichent, à en refaçonner les contours.
« C’est encore l’auteur dramatique qui compte[7] » (David Edgar)
Alors que le constat d’une remise en question de la présence des textes dramatiques et de leurs auteurs sur la scène internationale est récurrent dans la critique théâtrale depuis la parution de Postdramatisches Theater de Hans-Thies Lehmann à la fin des années 1990[8], l’importance de leur rôle dans le champ théâtral britannique reste étonnamment marquée. Comme le note Chris Campbell, directeur littéraire du Royal Court Theatre, « au Royaume-Uni, l’écriture dramatique importe plus que dans tout autre pays que je connaisse[9] ». On justifie fréquemment, comme le fait d’ailleurs Campbell, la fidélité des Britanniques aux textes dramatiques et à leurs créateurs par le fait que Shakespeare, figure tutélaire de leur culture, soit un auteur. Cette influence historique, conjuguée à celle de directeurs de théâtre qui se sont fortement engagés dans la seconde moitié du xxe siècle en faveur des dramaturgies de leurs temps, à l’instar de George Devine[10], Peter Hall[11] ou Trevor Nunn[12], explique que les nouvelles écritures dramatiques, désignées sous l’appellation générique de new writing, occupent aujourd’hui une place privilégiée dans le monde du théâtre anglais. Selon Aleks Sierz, « partout on peut voir des pièces qui relèvent des nouvelles écritures, partout on peut rencontrer des auteurs contemporains[13] ». Le new writing a en effet bénéficié en Angleterre de l’augmentation des financements dédiés au théâtre au milieu des années 1990 puis dans les années 2000, ce qui a contribué à accroître sa présence au sein des programmations[14], ainsi que le nombre des lieux spécialisés dans sa promotion (pour la seule ville de Londres, outre le Royal Court Theatre, on peut citer le Hampstead Theatre, le Bush Theatre, le Soho Theatre et Theatre 503).
L’examen des critères de sélection privilégiés par ces lieux révèle qu’ils recherchent tous des textes caractérisés par une « voix » originale — « extraordinaire » dirait Theatre 503[15] — et indexent donc le talent dramaturgique sur la capacité à faire entendre une « voix auctoriale forte[16] ». Dans la mesure où l’on considère souvent le « style réaliste et naturaliste [comme une manifestation de] la britannicité du théâtre britannique[17] », dont une part significative favorise effectivement l’imitation de la réalité, et par conséquent l’effacement de l’auteur derrière ses personnages (du moins dans les dialogues), on peut s’étonner de ce que les instances de légitimation des nouvelles écritures anglaises présentent l’affirmation d’une voix auctoriale comme une qualité décisive. Cela tient en partie à l’usage ambigu qu’elles font de la notion de « voix », qu’elles appliquent tant au style de l’auteur qu’au discours de ce dernier sur le monde, mais aussi et surtout au primat qu’elles accordent à l’individualité. La voix auctoriale, quelles que soient les qualités qu’on attend d’elle, opère en effet comme une signature ; elle est la marque d’une singularité distinctive que le théâtre anglais continue de considérer, en conformité avec la conception moderne du statut de l’artiste créateur qui s’est imposée au xixe siècle[18], comme un fondement primordial de l’auctorialité.
Aussi la « fonction-auteur » se trouve-t-elle particulièrement corrélée à l’identité singulière de l’auteur dans le théâtre anglais. Selon Foucault, qui insiste sur sa variabilité historique, la fonction-auteur procède de la « [construction] d’un certain être de raison qu’on appelle l’auteur », qui permet de définir « le principe d’une certaine unité d’écriture » et d’« expliquer aussi bien la présence de certains événements dans une oeuvre que leurs transformations, leurs déformations, leurs modifications diverses[19] ». Elle conditionne en cela l’interprétation des oeuvres. Son incidence sur la réception est extrêmement marquée dans le théâtre anglais puisqu’elle y détermine souvent explicitement l’approche scénique. De fait, on a tendance en Angleterre à considérer la mise en scène comme la traduction scénique d’un texte, partant d’une « voix » auctoriale. L’auteur Simon Stephens estime ainsi que, « quand une pièce est montée dans le théâtre anglais, une culture théâtrale qui place l’auteur dramatique en son centre, le processus de répétition tend à donner corps à la conception originelle de l’auteur dénotée par le texte[20] ». Cela alimente un « désir d’auteur », au double sens où les metteurs en scène se montrent friands de textes d’auteurs vivants, mais aussi soucieux de comprendre et d’honorer les intentions de ces derniers, particulièrement quand ils assurent la première création scénique de leurs pièces. Le dramaturge se trouve ainsi investi d’une forte autorité en Angleterre. En ce qu’il est à l’origine de l’oeuvre dramatique, on lui prête le pouvoir démiurgique de l’éclairer. On ne se tourne pas alors seulement vers lui en amont du processus de création, pour qu’il autorise le passage du texte à la scène : on le sollicite pour qu’il l’accompagne et contribue ainsi — signe de la reconnaissance dont il jouit — à valoriser la production scénique à laquelle il donne lieu. Alors que sur la scène internationale les metteurs en scène se réclament fréquemment de leur liberté de créateurs pour modifier et couper les textes dramatiques, voire en user comme d’un matériau refaçonnable, y compris quand ils émanent d’auteurs vivants, le rapport dominant aux dramaturgies contemporaines et à leurs auteurs reste notoirement révérencieux en Angleterre[21]. La protection apportée aux auteurs par le copyright anglo-saxon est pourtant inférieure à celle garantie par d’autres systèmes juridiques nationaux, tels que le droit d’auteur français, qui confère une inaliénabilité aux droits moraux. Au Royaume-Uni, les auteurs peuvent en effet perdre le droit au respect de l’intégrité de leur oeuvre s’ils y renoncent contractuellement. Il est ainsi d’usage que les scénaristes britanniques abdiquent leurs droits moraux « irrévocablement et sans conditions[22] ». Que l’autorisation juridique de ces renonciations ou transferts n’ait que peu entamé les prérogatives des auteurs dramatiques anglais atteste de la préséance symbolique qui leur est accordée. Comme en témoigne Simon Stephens, qui pointe dans le même temps les avantages financiers qui en découlent, « [n]ous signons des contrats qui nous donnent un pouvoir de véto sur les metteurs en scène. Nous assistons aux auditions, travaillons avec les scénographes. On nous paie pour assister aux répétitions, et parfois aussi pour ne pas y assister. […] Cela nous donne du pouvoir[23] ». Les auteurs anglais jouissent donc d’une place de choix dans la hiérarchie théâtrale. Ils ne sont pas pour autant omnipotents, ne serait-ce que parce qu’ils demeurent tributaires des metteurs en scène à un double titre. Ceux-ci constituent tout d’abord, en Angleterre comme ailleurs, l’autorité primordiale en matière de création scénique, qui pour être fréquemment centrée sur l’auteur (« playwright-centered ») outre-Manche, n’en reste pas moins rarement dirigée par lui (« playwright-led »). Ils tendent en outre à monopoliser les directions de lieux et, partant, le pouvoir de décision en matière de production et de diffusion, dont les carrières des auteurs dépendent évidemment fortement[24]. Les dramaturges ne le disputent pas moins aux metteurs en scène en termes de notoriété. Connus du grand public pour un nombre non négligeable d’entre eux, ils contribuent à l’attractivité commerciale des productions et jouissent d’une importante présence médiatique, qui témoigne de la valorisation de leur parole dans la sphère publique. Or, il apparaît à l’examen que cette parole tend à prendre un tour revendicatif depuis le début du xxie siècle, nombre de dramaturges s’inquiétant d’une dégradation, possible ou avérée, de leur statut. Dans la citation de David Edgar qui prête son titre à cette partie, « C’est encore le dramaturge qui compte », l’adverbe « encore » (« still ») a en effet tout autant une valeur de continuation que de concession. Si le dramaturge demeure une figure essentielle dans le théâtre anglais, c’est, selon Edgar, en dépit d’une « tendance anti-écrivain[25] » (« anti-writer »), dont il estime qu’elle ne risque pas seulement de nuire aux conditions économiques dans lesquelles les auteurs exercent, mais à la légitimité qu’on leur accorde[26].
Menaces sur la singularité auctoriale
En 2003, une petite dizaine d’auteurs, parmi lesquels Richard Bean, Roy Williams, Moira Buffini et David Eldridge, décident de fonder un groupe autodésigné « the Monsterists », dans le but de promouvoir les nouvelles écritures en Grande-Bretagne. Ils ambitionnent en particulier de faire pression sur les théâtres pour qu’ils redonnent aux auteurs les moyens de créer des pièces de grande ampleur, en n’excluant plus de les programmer sur leurs plus larges plateaux et de mobiliser pour eux des distributions importantes[27] (c’est essentiellement en ce sens qu’ils s’affichent, par leur nom même, comme porteurs d’une revendication « monstrueuse »). Cette démarche collective, qu’on pourrait dire expansive en ce qu’elle vise explicitement à accroître la place des nouvelles écritures dans le théâtre britannique, vient nuancer le constat d’un privilège du new writing, puisqu’elle présente la position de ce dernier comme marginale par rapport à celle des pièces d’auteurs morts. La publicité dont bénéficient les Monsterists, ainsi que l’écoute qu’ils trouvent chez les directeurs de théâtre, dont certains se mettent à produire des textes contemporains dans leurs grandes salles, témoignent toutefois du crédit dont les auteurs jouissaient alors, tout en laissant présager une évolution favorable pour eux. Pourtant, quand en 2009 les auteurs David Eldridge et Duncan Macmillan initient un réseau informel de dramaturges baptisé « The Antilope Group », ils perçoivent « beaucoup de colère[28] » au sein de la profession, qui semble alors s’accorder sur le constat que « et les écrivains, et leurs pièces, ont perdu de leur valeur[29] ». Une enquête menée la même année par le British Theatre Consortium pour l’Arts Council of England[30] le confirme : « les auteurs dramatiques [avaient] le sentiment que leur voix [était] moins valorisée et qu’il leur [était] devenu plus difficile de faire carrière[31] ». Comment expliquer la généralisation de ce sentiment de déclassement, à une époque où les programmes consacrés aux nouvelles écritures continuaient pourtant de se multiplier dans les théâtres ? Parmi les facteurs identifiés par les auteurs comme susceptibles de marginaliser leur position, plusieurs sont, sans surprise, d’ordre économique. La prolifération des dispositifs de soutien, dont on note qu’ils tendent à se concentrer sur les premières pièces[32], a en effet induit une forte croissance du nombre d’oeuvres dramatiques disponibles sur le marché, mais aussi du nombre d’auteurs aspirant à vivre de leur art. Il en découle inévitablement une atomisation des ressources consacrées au new writing et une accentuation de la concurrence entre les auteurs. Nombre d’auteurs estiment ainsi que leurs textes peinent de plus en plus, non seulement à être montés sur de grands plateaux, mais à être montés tout court[33]. Les crises économiques et sociales que traverse le Royaume-Uni depuis 2009 et les politiques d’austérité qui les accompagnent ne contribuent évidemment guère à apaiser la situation. Si les coupes budgétaires qui affectent régulièrement la culture depuis 2009 ont moins impacté la part des nouvelles écritures dans les programmations théâtrales que les auteurs ne le redoutaient[34], elles n’en contraignent pas moins fortement l’économie du new writing, comme le démontre le rapport In Battalions de 2013, initié par le dramaturge Fin Kennedy[35]. Dans le cadre du présent article, ce n’est toutefois pas sur les inquiétudes auctoriales liées à la conjoncture économique que nous souhaitons insister, mais sur celles que nourrit le développement des pratiques collaboratives et sur ce qu’elles révèlent du potentiel déstabilisant de ces pratiques sur la figure de l’auteur, à l’intérieur des processus de création et au-delà.
Deux évolutions ont ainsi retenu notre attention qui, pour n’être pas unanimement dénoncées, n’en suscitent pas moins des critiques suffisamment récurrentes pour que nous puissions les considérer comme perturbatrices. Toutes deux attestent d’un déplacement de l’auctorialité, qui n’apparaît plus comme l’affaire du seul auteur, mais qui se construit de plus en plus souvent au contact de contributeurs divers. La première résulte paradoxalement des initiatives mises en place pour soutenir les auteurs. Elle tient en effet aux dispositifs d’accompagnement, ou plus précisément de « développement », dramaturgique, devenus monnaie courante dans les théâtres anglais en ce début de xxie siècle[36]. Des conseillers littéraires, fréquemment associés à des artistes sélectionnés pour l’occasion, y assistent les auteurs dramatiques dans l’élaboration de leurs pièces, par le truchement de programmes combinant réunions, lectures et workshops [ateliers]. Les récriminations auxquelles ces programmes donnent lieu demeurent relativement anonymes : elles sont plus souvent relayées par des témoins du monde du spectacle vivant que nominativement assumées, puisqu’elles présentent un risque économique pour les auteurs qui en sont à l’origine et qui pourraient se voir fermer la porte des théâtres concernés. Se trouvent généralement mis en cause l’interventionnisme trop grand de ceux qui mettent en oeuvre les programmes, mais aussi le bien-fondé de leurs conseils. Comme le résume Duncan Macmillan : « Beaucoup d’écrivains en avaient vraiment assez que des gens qui en savaient moins qu’eux sur leur métier leur expliquent comment le faire[37]. » Certains y voient une entrave, sinon à leur liberté de création, du moins à leur singularité auctoriale. Les nouveaux professionnels de l’accompagnement dramaturgique ne risquent-ils pas d’insister par principe sur la nécessité d’opérer des changements dans les pièces dont ils s’emparent, ne serait-ce que pour justifier leur fonction même[38] ? En répétant leurs conseils d’un auteur à l’autre, ne contribuent-ils pas à impersonnaliser les pièces, sinon à les formater ? Les auteurs craignent pour la qualité artistique de leurs oeuvres, mais aussi pour la considération qu’on leur porte au sein du monde théâtral. S’ils restent seuls signataires de leurs textes et si leur auctorialité demeure donc a priori inchangée du point de vue de la réception, la manière dont elle est perçue côté production évolue nécessairement. À partir du moment où diverses influences interviennent ouvertement dans la genèse de l’oeuvre, l’autorité de l’auteur s’émousse au sein du processus de création scénique, où ses intentions ne constituent plus une référence primordiale. La généralisation de la pratique collaborative du « développement » des pièces contribue ainsi à affaiblir l’image de démiurge inspiré attachée à l’auteur, dont la fonction perd alors de sa centralité structurante à l’intérieur du système théâtral anglais.
L’effet de décentrement est évidemment plus important encore quand les processus collaboratifs qui entrent dans la conception de la partition textuelle s’accentuent et deviennent publics. C’est le cas notamment avec les écritures de plateau (« devised theatre ») qui se réclament de « la création collective de l’art (non de la vision singulière de l’auteur dramatique)[39] ». Certaines renoncent totalement à associer des auteurs, ou effacent leur contribution en affichant une auctorialité collective, à l’instar de Forced Entertainment, dont les génériques n’attribuent plus la production des textes à Tim Etchells, l’écrivain du groupe, contrairement à ce qu’on observait dans les premiers spectacles, mais au collectif même[40]. La recrudescence des pratiques de ce type au début des années 2000 n’a pas été sans susciter l’émoi de certains auteurs. Comme le relate David Edgar : « Les dramaturges s’inquiétaient de plus en plus de ce que les compagnies expérimentales du type de celles au contact desquelles ils avaient développé leur art, n’utilisaient plus de dramaturges pour écrire leurs spectacles, mais les créaient elles-mêmes collectivement en partant de rien[41]. » À partir du moment où des équipes artistiques revendiquaient de créer la dramaturgie et les textes de leurs spectacles sans recourir à des auteurs, à partir du moment où le nombre de ces compagnies augmentait de manière significative, au point que la critique Lyn Gardner avait intitulé un article consacré à la programmation du festival fringe d’Edimbourg de 2005, « Les auteurs dramatiques ? Ils sont passés de mode cette année[42] ! », ne pouvait-on redouter que les auteurs ne devinssent des figures désuètes dans le paysage théâtral ? Une modification dans la déclaration de politique théâtrale (« Theatre policy ») de l’Arts Council of England (ACE), l’organisme de financement national des arts en Angleterre, contribua à attiser ce sentiment de menace. Alors qu’il présentait le new writing comme une priorité en 2000, il cessa en effet d’y faire explicitement référence en 2007, préférant afficher un soutien plus global aux oeuvres nouvelles (« new work »), de manière à inclure le cirque et les arts de la rue, mais aussi, comme les auteurs le perçurent aussitôt, les écritures de plateau et le théâtre gestuel (« physical theatre »). Cette inflexion dans l’orientation politique de l’ACE fut interprétée comme la marque d’une perte d’intérêt pour le new writing et fit craindre à certains que l’Angleterre ne cessât de s’affirmer comme une « culture de dramaturges[43] ».
Comme déjà avec les créations collectives en vogue dans les années 1970[44], on observe pourtant que nombre d’écritures de plateau continuent en Angleterre d’associer des auteurs et de les valoriser comme tels[45].
Que des compagnies ayant renoncé à fonder leurs créations sur des textes préalables n’excluent pas, et parfois même privilégient, de passer commande à des auteurs — parce qu’elles considèrent que leurs qualités d’écriture peuvent enrichir leurs productions théâtrales (qu’elles résultent ou non en la création de textes dramatiques), mais aussi à certains égards parce qu’elles les savent susceptibles d’attirer des financements et des publics[46] — est un gage de ce que les auteurs de théâtre « comptent encore » en Angleterre. L’instance auctoriale ne s’en trouve pas moins « totalement bouleversée[47] » dans les collaborations qui en découlent. Elle ne s’incarne plus en un individu unique, pas non plus en un collectif qui se serait substitué à lui ; elle est mise en partage entre plusieurs entités, impliquées au titre de compétences diverses (selon les configurations : auteurs, metteurs en scène, comédiens, musiciens, scénographes, vidéastes, etc.), mais participant toutes de l’auctorialité. Dans ce régime de co-auctorialité, l’auteur continue d’exercer une fonction spécifique, mais il n’en devient pas moins, à rebours de l’idéal de l’auteur originel et original qui prévalait jusqu’alors, un collaborateur parmi d’autres, avec lesquels il partage ses prérogatives symboliques : l’autorité et la reconnaissance. Comme l’analyse Sarah Sigal dans une thèse où elle se penche sur des créations associant respectivement Shared Experience, Frantic Assembly et Filter Theatre à divers auteurs[48], cette part fluctue en fonction des modalités de travail, qui peuvent être très variées, mais aussi de la notoriété des différents collaborateurs. On pourrait par exemple imaginer qu’un auteur inconnu se trouve en grande partie désinvesti de la fonction-auteur suite à sa collaboration avec une compagnie réputée : quand bien même il aurait rédigé le texte issu des explorations de la compagnie et en serait à ce titre officiellement l’auteur[49], ce sont en effet les traits thématiques et formels associés à la compagnie que le public chercherait dans l’oeuvre produite, c’est à elle et à ses productions antérieures qu’il rattacherait cette dernière. Il en va évidemment tout autrement dans le cas d’une pièce comme Pool (No Water) (2006), fruit d’une collaboration entre la célèbre compagnie de théâtre gestuel Frantic Assembly et le plus renommé encore Mark Ravenhill. Si la fonction-auteur était assurée conjointement par les co-auteurs à la création de la pièce, le texte de cette dernière, publié par Samuel French sans faire référence à Frantic Assembly sur la première de couverture, a donné lieu depuis à plusieurs productions en Angleterre et à l’étranger. L’expérience de l’auctorialité partagée a donc ici paradoxalement contribué à renforcer l’auctorialité individuelle de Ravenhill, qui tire seul profit du devenir scénique de l’oeuvre dramatique[50].
Sans doute des expériences de ce type ont-elles eu pour effet d’assouplir la position défensive de certains auteurs. Comme en témoigne le dramaturge Steve Waters dans un article significativement intitulé « Mon secret honteux : j’aimais les écritures de plateau », l’hostilité qu’ont d’abord manifestée les auteurs dramatiques vis-à-vis des pratiques collaboratives s’atténue : « peut-être le conflit entre ces différentes traditions théâtrales est-il enfin révolu[51] ». On note en effet une porosité croissante entre ces traditions, dont nous proposons maintenant de voir comment elle participe à une redéfinition de la manière dont les auteurs conçoivent leur auctorialité.
L’affirmation d’une posture collaborative chez les auteurs
Écrire pour le théâtre, c’est inévitablement s’inscrire dans une « chaîne de coopération[52] » dense. La création théâtrale relevant d’un processus fondamentalement collectif, l’auteur dramatique est prédestiné à oeuvrer avec d’autres ; il ne peut s’accomplir en autarcie. En régime de singularité auctoriale, on tend toutefois à considérer la production du texte dramatique, première étape d’une activité théâtrale en « deux temps[53] », comme un acte de création isolé : l’auteur compose en solitaire, avant de s’engager, de manière plus ou moins active selon les cas, dans le processus pluriel du passage à la scène. Poser le développement d’une posture collaborative parmi les dramaturges anglais, c’est pointer une remise en question de cette conception du travail auctorial, et ce à partir d’un double constat. Celui d’abord d’une tendance au désenclavement de la phase d’écriture à l’initiative des auteurs dramatiques mêmes, qui sortent de plus en plus fréquemment et délibérément de leur « retraite » créative pour écrire en collaboration avec d’autres. Celui ensuite d’une compénétration des pratiques et des discours chez certains auteurs, qui trahit une « stratégie de positionnement » assumée, sans laquelle on ne pourrait parler de « posture[54] ».
De plus en plus d’auteurs intègrent des dispositifs collaboratifs, en « développant » leurs pièces en interaction avec les services littéraires des théâtres, ou plus fondamentalement encore, en s’associant à des projets d’écriture au plateau. Si on peut espérer qu’ils ne s’y engagent pas à leur corps défendant, on ne peut toutefois exclure la possibilité qu’ils le fassent par nécessité économique, et donc par défaut. Pour attester du développement d’une posture collaborative, c’est donc plutôt sur le cas d’initiatives portées par des auteurs que nous souhaitons nous arrêter.
L’exemple d’Alexander Zeldin est à cet égard emblématique. L’auteur-metteur en scène élabore systématiquement ses pièces au fil de processus pluriannuels, comprenant si possible des immersions (par exemple avec des hommes et des femmes de ménage pour Beyond Caring), et dans tous les cas des expérimentations développées collaborativement avec un groupe fidélisé d’acteurs, mais aussi parfois avec des personnes extérieures au monde du théâtre[55]. Ce qui rend la démarche de Zeldin assez radicale au sein du paysage théâtral anglais, ce n’est pas qu’il s’engage dans une écriture au plateau (« written through devising ») pour façonner des textes qu’il publie ensuite[56], c’est qu’il revendique de ne pouvoir écrire autrement et fonde ainsi son auctorialité sur un partage de l’activité créatrice, qu’il souhaite aussi horizontal que possible : « La hiérarchie est morte. […] Nous sommes dans une salle, nous construisons ensemble, il faut que ça se passe ainsi, sinon c’est une perte de temps[57]. »
Si les auteurs anglais privilégient dans l’ensemble des démarches d’écriture moins systématiquement partagées, un certain nombre d’entre eux n’en manifestent pas moins une disposition collaborative, qui transparaît jusque dans les projets où ils continuent de s’affirmer en tant qu’auteurs individuels (« sole authors »). C’est le cas de Tim Crouch, qui déclare pourtant être avant tout enthousiasmé par « les pièces qui naissent sous la plume d’un auteur » (« authored by an author ») — non sans reconnaître, de manière significative pour notre enquête, que ce point de vue « n’est plus très à la mode aujourd’hui[58] ». Tim Crouch écrit essentiellement seul, chez lui, mais n’en ressent pas moins la nécessité d’éprouver les textes qu’il élabore auprès de ses collaborateurs de longue date, Andy Smith and Karl James, avec lesquels il a codirigé plusieurs de ses textes : « Quand j’arrive à un certain stade de développement, je partage avec eux ce que j’ai en tête, puis un peu plus tard, nous essayons de trouver deux jours, parfois même une semaine, pour nous retrouver dans une même pièce et réfléchir ensemble à ce que je cherche à faire[59]. » Non sans lien avec son ambition d’écrire avec les spectateurs, sur laquelle nous reviendrons ultérieurement, Tim Crouch apprécie de tester ses projets d’écriture auprès de collaborateurs de confiance, au cours de séances de travail dédiées. Ces dernières ne sont pas sans rappeler certains des processus d’accompagnement dramaturgique déclinés dans les théâtres anglais, à l’exception notable que Tim Crouch y garde la main sur le choix des collaborateurs et sur les modalités de la collaboration. Si des considérations stratégiques peuvent d’ailleurs entrer dans l’appropriation des pratiques collaboratives par les auteurs (montrer qu’on est bien accompagné permet parfois d’éviter un accompagnement non souhaité…), la tendance procède aussi chez eux d’une volonté de décloisonnement de l’activité créatrice, dont témoigne par exemple Mark Ravenhill :
En tant que dramaturge, j’ai appris que collaborer était une bonne chose. Certaines pièces surgissent dans votre tête, et vous vous enfermez chez vous jusqu’à ce qu’elles soient prêtes, puis vous vous mettez en quête d’un metteur en scène ou d’un théâtre qui leur soient adaptés. Mais ça concerne un nombre limité de pièces — et il y a un risque, quand on écrit seulement de cette façon, de se couper du monde, de demeurer extérieur à l’expérience des autres. Travailler avec des collaborateurs, ça provoque, ça interroge nos façons de travailler, ça fait entrer de l’air frais[60].
Or, à mesure que leur écriture s’ouvre à des apports extérieurs qui l’empêchent de se suffire à elle-même et l’incitent à se décentrer, le rapport des auteurs dramatiques à leurs pièces semble évoluer. Ils apparaissent moins soucieux de préciser le sens de ces dernières, et évoquent en revanche plus volontiers la diversité des évolutions et actualisations auxquelles elles peuvent prêter, au point parfois de déléguer à d’autres la responsabilité de les interpréter. Cela se manifeste par deux types de discours. On note tout d’abord chez certains auteurs une propension nouvelle à afficher leur confiance et leur tolérance à l’égard des inventions de mise en scène. Ainsi, pour Dennis Kelly, quand un metteur en scène s’empare d’un texte, « le résultat n’est jamais ce que vous aviez imaginé. Mais ce que vous espérez, c’est qu’il sera meilleur[61] ». Aux antipodes de la position qu’affichait l’auteur Gregory Motton en 1999 — « Je ne supporte pas cette idée du metteur en scène tout-puissant qui se sert du texte pour faire son petit objet. […] Le metteur en scène doit donner à voir ce que l’écrivain a écrit pour le public[62] » —, plusieurs auteurs, à commencer par ceux qui collaborent régulièrement avec des metteurs en scène européens[63], revendiquent même un appétit pour la réinvention, sinon le détournement — le « bidouillage[64] », dirait l’auteur écossais David Greig — de leurs pièces. Simon Stephens, dont David Barnett souligne qu’il « a cherché avec le temps à travailler plus collaborativement, rejetant le rôle du poète inviolable[65] », évoque ainsi le tournant créatif qu’a constitué pour lui la prise de conscience que ses pièces, non seulement pouvaient, mais devaient se remodeler lors de leur passage à la scène (et qu’elles gagnaient donc à éviter la clôture) : « […] j’ai réalisé que la pratique théâtrale n’avait pas simplement vocation à porter l’imagination du dramaturge à la scène, c’était un processus multi-auctorial de collaboration, conflit, intervention et exploration. Ça m’a conduit à repenser ma façon d’écrire[66]. »
Le second type de discours a trait à la réception des pièces. Certains auteurs anglais manifestent en effet explicitement leur souci de se délester de tout contrôle sur le sens de leurs textes pour favoriser l’investissement interprétatif des spectateurs. Tout se passe alors comme si les idées originellement associées à la poétique de l’« oeuvre ouverte[67] », dont on sait qu’elle a conduit à repenser le rapport du lecteur à l’oeuvre en présentant l’ambiguïté de cette dernière comme un atout, étaient devenues inhérentes à leurs projets d’écriture, auxquels elle conférait une « auctorialité ouverte », disposée à se remettre en jeu dans la rencontre avec les spectateurs. Non sans affinité avec Howard Barker, qui insistait déjà en 1989 sur la nécessité de développer « de nouvelles relations avec le public, qui soient elles-mêmes essentiellement non autoritaires[68] », Tim Crouch parle ainsi d’« auctorialiser le public » (« authorising the audience »), ce qui revient en quelque sorte à user de son pouvoir d’auteur pour mieux le partager avec lui. Très critique de la manière « dont on laisse la scène accaparer le pouvoir[69] », il conçoit la relation théâtrale comme un transfert de pouvoir :
Je veux faire tout ce que je peux pour faire prendre conscience au public de son autorité à l’intérieur de la relation théâtrale. L’autorité est un mot-clef pour moi. [Ma pièce] L’Auteur[70] porte ce titre pour de nombreuses raisons, mais entre autres parce qu’elle pose la question de savoir qui a l’autorité. Le personnage de Tim Crouch dans la pièce est un monstre[71].
Notre investigation des discours des auteurs dramatiques anglais s’achève ainsi sur l’évocation d’une pièce où l’auteur réel Tim Crouch se met en scène sous les traits d’un auteur fictif qu’il juge « monstrueux » et dont il dramatise le suicide. Si cette référence métathéâtrale permet de mettre en lumière l’importance que revêtent les enjeux auctoriaux dans le théâtre anglais en ce début de xxie siècle, elle ne vise nullement à annoncer, ni a fortiori à signaler, la mort de l’auteur. Un tel pronostic serait, pour reprendre les mots de David Edgar, « grandement exagéré[72] ». Ce n’est pas tant en effet la fonction de l’auteur, que la définition qu’on en a longtemps donnée, qui s’étiole depuis quelques années au sein du monde du théâtre anglais. Contrairement à la conception qui prévalait encore à la fin du siècle dernier, cette fonction n’est plus considérée comme individuelle, originelle et cohésive par essence : trop d’exemples ont mis en évidence le fait qu’elle ne dépendait plus nécessairement d’un créateur singulier, ne constituait plus forcément la source de la production théâtrale et déterminait de moins en moins systématiquement le sens de cette dernière. À mesure que les pratiques collaboratives se développaient dans le théâtre anglais, une pluralisation et un décentrement de l’auctorialité se sont en effet opérés.
Les auteurs dramatiques se sont alors inquiétés de ce que la valeur accordée à leur contribution artistique, mais aussi leur capacité à peser dans les rapports de pouvoir qui régissent leur environnement professionnel, se trouvaient mises à mal. De fait, dans un système théâtral qui ne leur assigne plus un rôle prédéfini, il leur faut constamment renégocier la part qu’ils prennent dans les créations, ce qui fragilise inévitablement leur position. Comme nous l’avons vu, des voix s’élèvent pourtant parmi les auteurs anglais pour rendre hommage à l’apport des dynamiques collaboratives. En célébrant les possibilités créatives inhérentes à l’assouplissement des contours de la fonction auctoriale, voire à l’érosion de son autorité, elles témoignent de l’affirmation d’une posture d’auteur dont l’identification importe d’autant plus qu’elle n’a pas seulement vocation à s’exprimer à travers des discours « aux alentours de l’oeuvre[73] », mais également au sein de cette dernière. La posture collaborative s’accompagne en effet d’une préférence esthétique pour l’indétermination et l’ouverture, dont on peut supposer qu’elles contribueront à terme à remodeler le visage des nouvelles écritures anglaises.
Appendices
Note biographique
Séverine Ruset est maîtresse de conférences en Arts du spectacle à l’Université Grenoble Alpes (UMR Litt&Arts). Elle travaille notamment sur les interactions entre création artistique, modes d’organisation et modes de production dans le spectacle vivant européen depuis la seconde moitié du xxe siècle, particulièrement dans le théâtre britannique contemporain. Elle a récemment codirigé (avec Alice Folco) L’injouable au théâtre (Revue d’Histoire du Théâtre, 2015) et Déjouer l’injouable. La scène contemporaine à l’épreuve de l’impossible (European Drama and Performance Studies, Garnier, 2017), ainsi que Troupes, compagnies, collectifs dans les arts vivants (L’Entretemps, 2018 ; avec Bérénice Hamidi-Kim). Elle a également écrit Métamorphoses du temps et de l’espace dans les dramaturgies anglaises contemporaines (Garnier, coll. « Études sur le théâtre et les arts de la scène », 2019).
Notes
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[1]
C’est bien sur le théâtre anglais, et non le théâtre britannique dans son ensemble, que porte la présente étude. Si les cultures théâtrales galloise, écossaise et nord-irlandaise présentent de fortes affinités avec celle dont il sera ici question, notamment pour la place qu’elles accordent à leurs auteurs, elles font néanmoins l’objet de politiques culturelles distinctes. Elles sont en outre traversées par des enjeux nationalistes qui influent sur la manière dont la question auctoriale y est posée. À défaut de pouvoir en rendre compte de manière satisfaisante à l’échelle de cet article, nous avons résolu de limiter notre champ d’investigation à l’Angleterre. Nous n’évoquerons le théâtre britannique que ponctuellement, quand les sources que nous citerons le rendront nécessaire.
-
[2]
Comme nous le verrons dans la suite de l’article, et comme le souligne Aleks Sierz dans Rewriting the Nation. British Theatre Today, la production théâtrale britannique ressortit en grande partie au modèle du « théâtre de texte, qui place l’auteur individuel au centre du processus de création théâtrale »/« text-based theatre, where where an individual playwright is at the centre of the theatre-making process » (Aleks Sierz, Rewriting the Nation. British Theatre Today, Bloomsbury, Methuen Drama, 2011, p. 50 ; nous traduisons).
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[3]
Voir Joseph Danan, Absence et présence du texte théâtral, Paris, Actes Sud-Papiers, 2018.
-
[4]
Ce n’est qu’en tant qu’elles nous renseigneront sur le capital symbolique des auteurs que nous nous intéresserons occasionnellement à des questions de propriété intellectuelle.
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[5]
Voir Howard S. Becker, Les mondes de l’art, Paris, Flammarion, 1988. Recourir à la notion de « monde de l’art », ou ici de « monde du théâtre », c’est accorder une attention particulière aux interactions professionnelles, mais aussi aux « conventions » — principes plus ou moins formalisés, mais néanmoins partagés — qui les structurent.
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[6]
Ruth Amossy, « La double nature de l’image d’auteur », Argumentation et analyse du discours [En ligne], no 3, 2009, mis en ligne le 15 octobre 2009, consulté le 5 juillet 2018, URL : http://journals.openedition.org/aad/662 ; pour éviter que l’usage que nous faisons de la citation ne soit ambigu, nous avons pris la liberté de remplacer entre crochets les références au « monde des Lettres » et au « champ littéraire » par des références à ceux du théâtre.
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[7]
David Edgar, « The Playwright’s still the thing », The Guardian, 29 janvier 2015 ; nous traduisons. Le titre que David Edgar, auteur dramatique depuis 1970 et président de la Writers’ Guild de 2007 à 2 013, donne ici à sa tribune repose sur un détournement d’une citation d’Hamlet, « the play’s the thing » (Shakespeare, Hamlet, acte ii, sc. 2), fréquemment reprise au Royaume-Uni, où elle a servi de titre à une émission de téléréalité produite par Channel 4 en 2006. Consacrée à la recherche d’une nouvelle pièce — et d’un nouveau « talent dramaturgique » — pour un théâtre du West End (The New Ambassadors), l’émission atteste de l’intérêt particulier que suscitent les auteurs dramatiques et leurs productions dans ce pays.
-
[8]
Hans-Thies Lehmann, Postdramatisches Theater, Frankfurt am Main, Verlag der Autoren, 1999.
-
[9]
« In the UK, playwriting matters in a way that it doesn’t matter so much in almost any other country I know » (« Chris Campbell on the Royal Court Theatre » [En ligne], mis en ligne le 23 juin 2016, consulté le 12 juillet 2018, URL : https://www.youtube.com/watch?v=YeQFc9byXKo ; nous traduisons).
-
[10]
Fondateur du Royal Court Theatre, dédié aux écritures dramatiques contemporaines, en 1956.
-
[11]
Fondateur de la Royal Shakespeare Company en 1960, puis directeur du tout nouveau National Theatre de Londres de 1973 à 1988.
-
[12]
Directeur de la Royal Shakespeare Company de 1968 à 1986, puis du Royal National Theatre de 1997 à 2003.
-
[13]
« Everywhere, you can watch plays that are examples of new writing; everywhere, you can meet new writers » (Aleks Sierz, Rewriting the Nation. British Theatre Today, ouvr. cité, p. 15 ; nous traduisons).
-
[14]
Un rapport du British Theatre Consortium de 2015 a ainsi fait valoir que le nombre des créations originales avait dépassé pour la première fois le nombre des reprises en 2013. 56 % des représentations données la même année ressortissaient au new writing (« British Theatre Repertoire 2013 » [En ligne], consulté le 14 juillet 2018, URL : http://britishtheatreconference.co.uk/wp-content/uploads/2015/05/British-Theatre-Repertoire-2013.pdf).
-
[15]
Voir la page d’accueil du site internet. Consulté le 14 juillet 2018, URL : https://theatre503.com/.
-
[16]
« Nous voulons voir sur nos scènes des oeuvres qui possèdent une voix auctoriale forte »/« We want to see work that has a strong authorial voice on our stages » (Bush Theatre, « The Student Guide to Playwriting. Rewriting » [En ligne], mis en ligne le 11 février 2016, consulté le 14 juillet 2018, URL : https://www.bushtheatre.co.uk/bushgreen/the-student-guide-to-playwriting-rewriting/ ; nous traduisons).
-
[17]
« [A] realistic and naturalistic style embodies the Britishness of British theatre » (Aleks Sierz, Rewriting the Nation, ouvr. cité, p. 59 ; nous traduisons).
-
[18]
Voir Nathalie Heinich, L’élite artiste. Excellence et singularité en régime démocratique, Paris, Gallimard, 2005, p. 40.
-
[19]
Michel Foucault, « Qu’est-ce qu’un auteur ? », Dits et écrits, Paris, Gallimard, 1994, t. i, texte no 69, p. 803.
-
[20]
« When a play is produced in English theatre, a theatre culture with the playwright at its heart, the process of rehearsal tends to involve standing the original conception of the writer as described in the text, on its feet » (Simon Stephens, « Skydiving Blindfolded : or Five Things I learned from Sebastian Nübling », conférence prononcée le 8 mai 2011 à Haus der Berliner Festspiele ; nous traduisons).
-
[21]
« Au Royaume-Uni, l’auteur dramatique et le texte sont souvent traités avec révérence »/« In the UK the playwright and text are often treated with reverence » (Lyn Gardner, « What draws British playwrights to Europe » [En ligne], mis en ligne le 28 mars 2018, consulté le 12 juillet 2018, URL : https://theatreanddance.britishcouncil.org/blog/2018/cultureafterbrexit7/ ; nous traduisons).
-
[22]
The Writers’ Guild of Great Britain, « Writing Film. A Good Practice Guide » [En ligne], consulté le 14 juillet 2018, URL : https://writersguild.org.uk/wp-content/uploads/2015/02/WG_film_Oct09_LR.pdf, p. 16.
-
[23]
« We sign contracts that give us veto over directors. We attend auditions and work with designers. We are paid to go to rehearsals and sometimes also paid not to go to rehearsals. […] It empowers us » (Simon Stephens, « Skydiving Blindfolded », conf. citée ; nous traduisons).
-
[24]
Pour dénoncer cette surconcentration des metteurs en scène dans les postes de direction, les Monsterists — un groupe d’auteurs dramatiques dont nous présenterons le projet global dans la partie suivante — avaient symboliquement entrepris au milieu des années 2000 de candidater collectivement chaque fois qu’une place de direction artistique devenait vacante.
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[25]
« The anti-writer trend » (David Edgar, « The Playwright’s still the thing », art. cité ; nous traduisons).
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[26]
David Edgar insiste notamment sur la présence au sein des universités d’une idéologie assimilant les textes dramatiques contemporains à des formes réactionnaires, qui aurait contribué à dévaloriser les notions de « vision ou de voix personnelles » dans les formations, avant de se répandre dans le milieu professionnel. Que deux théâtres londoniens se soient déclarés comme des « zones sans pièces » (« script-free zones ») au milieu des années 2000 lui apparaît comme symptomatique de la diffusion de cette idéologie et de la dévaluation des écritures dramatiques qu’elle favorise (« The Playwright’s still the thing », art. cité ; nous traduisons).
-
[27]
La motivation des Monsterists est à la fois esthétique — les auteurs veulent pouvoir explorer de nouveaux formats, et donc de nouvelles formes, dramaturgiques —, mais aussi économique, l’exploitation d’une pièce dans une grande salle permettant évidemment la perception de royalties plus importantes.
-
[28]
« There was a lot of anger » (« New writing special : David Eldridge and Duncan Macmillan discuss the Antelope group » [En ligne], mis en ligne le 2 décembre 2012, consulté le 16 juillet 2018, URL : http://www.theatrevoice.com/audio/new-writing-special-david-eldridge-and-duncan-macmillan-discuss-the-antelope-group/ ; nous traduisons).
-
[29]
« Both the writers and those plays have much less value » (« New writing special : David Eldridge and Duncan Macmillan discuss the Antelope group », entretien cité ; nous traduisons).
-
[30]
The British Theatre Consortium, Writ Large. New Writing on the English Stage, 2003-2009. A report for Arts Council England by the British Theatre Consortium, mis en ligne le 9 décembre 2009, consulté le 6 août 2019. L’enquête repose sur des méthodes quantitatives et qualitatives (entretiens). Sur environ 600 auteurs sollicités, 106 ont répondu au questionnaire (p. 23).
-
[31]
« […] Playwrights felt that the playwright’s voice was less valued and that it was harder to sustain a playwriting career » (The British Theatre Consortium, Writ Large, ouvr. cité, p. 8 ; nous traduisons).
-
[32]
« Martin Crimp : “Aujourd’hui, des auteurs soutenus par un théâtre pour une pièce, voire deux, peuvent être écartés ensuite, […] beaucoup de personnes se retrouvent en concurrence pour un nombre limité d’occasions. Et, évidemment, notre culture théâtrale met l’accent sur la nouveauté plutôt que sur l’engagement” »/« Nowadays, writers that are supported by a theatre for one play or perhaps two may find themselves dropped, […] there is a large number of people competing for a small number of opportunities. And, of course, our theatre culture puts emphasis on novelty rather than commitment » (Aleks Sierz, « theartsdesk Q&A : Playwright Martin Crimp » [entretien avec Martin Crimp], mis en ligne le 10 mars 2012, consulté le 6 août 2019, URL: https://theartsdesk.com/theatre/theartsdesk-qa-playwright-martin-crimp ; nous traduisons).
-
[33]
Cela concerne également les auteurs sélectionnés par les théâtres pour qu’ils y « développent » leurs pièces, ces processus d’accompagnement débouchant de moins en moins systématiquement sur des productions théâtrales.
-
[34]
« Les nouvelles écritures continuent d’être au coeur des théâtres toutes catégories confondues, les nouvelles pièces, nouvelles adaptations et nouvelles traductions représentant plus de la moitié de la production des théâtres traditionnels en 2014 »/« New writing continues to be at the heart of all theatre, with new plays, new adaptations and new translations representing more than half of all straight theatre produced in 2014 » (« British Theatre Repertoire 2014 » [En ligne], consulté le 14 juillet 2018, URL : https://static1.squarespace.com/static/513c543ce4b0abff73bc0a82/t/57347c792b8dde48ff9c18e1/1463057537574/British+Theatre+Repertoire+2014.pdf, p. 3 ; nous traduisons). Les nouvelles pièces représentent toutefois désormais 51 % des productions, contre 55 % l’année précédente (p. 13).
-
[35]
In Battalions. A snapshot of new play development in England at the start of 2013 [En ligne], consulté le 15 juillet 2018, URL : https://drive.google.com/file/d/0B0yB2pxxhJH-OXVBb2ZCSnFsYlk/view.
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[36]
« Au cours des dix dernières années, une culture du développement des nouvelles écritures dramatiques — fondée sur le modèle américain — s’est enracinée dans les théâtres britanniques où elle est maintenant si fermement ancrée qu’elle est devenue une industrie en soi »/« Over the last 10 years a new play development culture—based on American models—has taken root in British theatres and it is now so firmly embedded that it has become an industry in itself » (Lyn Garner, « Where are all the good new playwrights ? », The Guardian, 30 octobre 2006 ; nous traduisons).
-
[37]
« A lot of writers were really sick of being told how to do their jobs by people who didn’t know as well as they did » (« New writing special : David Eldridge and Duncan Macmillan discuss the Antelope group », entretien cité ; nous traduisons).
-
[38]
« Ça crée une culture de “propriété” sur les pièces, avec des théâtres exerçant parfois des pressions sur les auteurs pour qu’ils renoncent à une pièce qu’ils voulaient vraiment écrire au profit d’une idée née au sein de la “maison”, de manière à ce que le théâtre puisse dire que l’auteur n’aurait pas pu écrire la pièce sans sa participation à leur programme spécifique »/« It leads to the creation of a culture of “ownership” of plays, with theatres sometimes exerting pressure on writers to ditch the play they really want to write and generate a new idea “in house” so that the theatre can argue that it was only by the writer being in their particular programme that the play could have been written » (Lyn Garner, « Where are all the good new playwrights ? », art. cité ; nous traduisons).
-
[39]
« Devised theatre is concerned with the collective creation of art (not the single version of the playwright) » (Alison Oddey, Devising Theatre : A Practical and Theoretical Handbook, London, Routledge, 1994, p. 4 ; nous traduisons).
-
[40]
« Text : Forced Entertainment ». Notons que Tim Etchells, qui ne cache pas ses « doutes vis-à-vis de la singularité auctoriale » (« Tim Etchells on performance : why a few heads are better than one », The Guardian, 21 décembre 2019), signe en revanche désormais les mises en scène des spectacles de Forced Entertainment.
-
[41]
« But playwrights became increasingly concerned that the kind of experimental company they’d learned their craft with was no longer using playwrights to write shows but devising them from scratch themselves » (David Edgar, « The Playwright’s still the thing », art. cité ; nous traduisons).
-
[42]
Lyn Gardner, « Playwrights ? They’re so last year », The Guardian, 8 août 2005.
-
[43]
David Edgar estime ainsi « que l’opinion s’est détournée de l’écriture dramatique au profit des méthodes théâtrales collectives »/« there has been a shift of opinion against playwriting, in favour of collective methods of theatre » (« The Playwright’s still the thing », art. cité ; nous traduisons).
-
[44]
Parmi les compagnies nées dans les réseaux alternatifs du fringe dans les années 1970, dont beaucoup pratiquaient la création collective, plusieurs se sont distinguées en collaborant avec de jeunes dramaturges, à l’instar de Joint Stock Theatre Company. Elles ont été de véritables tremplins pour des auteurs comme Caryl Churchill, David Edgar, Howard Brenton et David Hare, auxquels elles ont permis d’accéder à la reconnaissance des scènes institutionnelles.
-
[45]
Parmi les collaborations notables de ces dernières années, on citera celle de Bryony Lavery avec Sound & Fury (Kursk, 2009), de Abi Morgan avec Frantic Assembly (Lovesong, 2011), de Simon Stephens avec Frantic Assembly et Karl Hyde (Fatherland, 2017) et très récemment de Leo Butler avec Told by an Idiot (All You Need Is LSD, 2018).
-
[46]
Voir Sarah Sigal, The Role of the Writer and Authorship in New Collaborative Performance-Making in the United Kingdom from 2001-2010, thèse de doctorat, Goldsmiths, University of London, 2013, p. 312-313.
-
[47]
Voir Anne-Françoise Benhamou, « Entre texte et plateau. Réponses à des questions posées par Martial Poirson et Emmanuel Wallon », Théâtre public, no 217 (Théâtre en travail : Mutations des métiers du spectacle (toujours) vivant, dir. Emmanuel Wallon et Martial Poirson), 2015, p. 54-57.
-
[48]
Sarah Sigal, The Role of the Writer and Authorship, ouvr. cité.
-
[49]
Et par conséquent celui qui perçoit les royalties.
-
[50]
Il faut dire que la collaboration entre l’auteur et la compagnie n’avait pas été aussi symbiotique que ses commanditaires ne l’avaient espérée. Comme le met en évidence Sarah Sigal dans The Role of the Writer and Authorship, Scott Graham et Steven Hoggett, les directeurs artistiques de Frantic Assembly avaient laissé une autonomie importante à Mark Ravenhill, qui avait alors développé un texte que la compagnie avait peiné à s’approprier, au point qu’Hoggett estimait en 2010 que cette création avait été la plus difficile de l’histoire de Frantic Assembly (« the most challenging production in the company’s history »). Sarah Sigal analyse d’ailleurs comment la compagnie a ensuite veillé à mettre en place des processus d’écriture fondés sur une réciprocité accrue avec les auteurs avec lesquels elle collabore (Sarah Sigal, The Role of the Writer and Authorship, ouvr. cité, p. 204-238).
-
[51]
« Perhaps the battle between different performance traditions is finally over ». Et Waters d’ajouter : « I even put a toe in the water myself, collaborating with Offstage Theatre on Amphibians » (Steve Waters, « My dirty secret : I like devised theatr », The Guardian, 4 janvier 2012 ; nous traduisons).
-
[52]
Howard S. Becker, Les mondes de l’art, ouvr. cité, p. 49.
-
[53]
Henri Gouhier, Le théâtre et les arts à deux temps, Paris, Flammarion, 1989.
-
[54]
« En d’autres termes, c’est lorsque l’image d’auteur est produite et assumée par l’écrivain dans une stratégie de positionnement plus ou moins délibérée (elle n’a pas besoin d’être consciente et calculée), qu’elle peut recevoir le nom de posture. […] La posture est le fait de l’écrivain. Elle désigne les modalités selon lesquelles il assume, reproduit ou tente de modifier la façon dont les discours d’accompagnement le donnent à voir » (Ruth Amossy, « La double nature de l’image d’auteur », art. cité).
-
[55]
« Avec Love, quand des gens venaient nous rendre visite — des personnes sans domicile fixe vivant à l’hôtel — on leur demandait de s’impliquer dans la recherche théâtrale : de diriger une partie des répétitions ou de jouer dans un passage »/« What I’ve also done with Love is that when we’ve had people come to visit us — homeless people living in B&Bs — we’ve asked them to get involved in the theatre side of things and direct a bit of rehearsal or act in a bit of it » (Catherine Love, « Alexander Zeldin : “I want audiences to experience intensity and forget their phones” », The Stage [En ligne], mis en ligne le 8 décembre 2016, consulté le 7 août 2019, URL : https://www.thestage.co.uk/features/interviews/2016/alexander-zeldin-i-want-audiences-to-experience-intensity-and-forget-their-phones/ ; nous traduisons).
-
[56]
Comme nous l’avons vu, cette pratique, déjà familière dans les années 1970 en Angleterre, y revient en force depuis quelques années.
-
[57]
« Hierarchy is dead. […] We’re in a room, we’re making it together, it’s got to be like that otherwise it’s a waste of time » (Catherine Love, « Alexander Zeldin: “The Director as God is Bullshit” » [En ligne], mis en ligne le 21 avril 2015, consulté le 8 août 2019, URL : http://exeuntmagazine.com/features/the-director-as-god-is-bullshit/ ; nous traduisons).
-
[58]
« I do not know why I think that, it is not a very fashionable thing nowadays, but I am excited by a play being authored by an author » (Séverine Ruset, « “Standing with the Audience”, an interview with Tim Crouch », RADAC, Coup de théâtre, no 30 (Tim Crouch ou la scène émancipée, dir. Jean-Marc Lanteri, Elisabeth Angel-Perez et Christine Kiehl), 2016, p. 184 ; nous traduisons).
-
[59]
« When I reach a certain stage of development, I open up my thoughts to them, and further down the line, we might find a couple of days, or maybe a week, to sit in a room and think more about what I’m trying to do » (Séverine Ruset, « “Standing with the Audience” », art. cité, p. 186 ; nous traduisons).
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[60]
« As a playwright, I’ve learned it’s good to collaborate. Some plays pop up in your head, you lock yourself away until they’re ready, and then you go looking for a suitable director or theatre. But there’s only so many of these — and there’s a danger that if you only write in this way, you retreat from the world, divorce yourself from other people’s experiences. Collaborators can challenge you, question your patterns of working, let in some fresh air » (Mark Ravenhill, « In at the deep end », The Guardian, 20 septembre 2006 ; nous traduisons).
-
[61]
« […] it’s never, ever how you imagined it. But what you hope is that it’s going to be better » (« Interview with Utopia’s writer Dennis Kelly » [En ligne], mis en ligne le 19 décembre 2012, consulté le 7 août 2019, URL : http://www.channel4.com/info/press/news/interview-with-utopias-writer-dennis-kelly ; nous traduisons).
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[62]
« Je ne supporte pas cette idée du metteur en scène tout-puissant qui se sert du texte pour faire son petit objet. Qu’est-ce que ça veut dire cette prétendue liberté ? C’est comme si un imprimeur changeait les didascalies dans un roman ! Le metteur en scène doit donner à voir ce que l’écrivain a écrit pour le public. Il ne doit pas devenir un obstacle entre le public et l’auteur par ses intentions » (V. Klein, « Gregory Motton — À saute Motton », Les Inrockuptibles [En ligne], mis en ligne le 19 mai 1999, consulté le 7 août 2019, URL : https://www.lesinrocks.com/1999/05/19/musique/concerts/gregory-motton-a-saute-motton-11229817/).
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[63]
Voir Lyn Gardner, « What draws British playwrights to Europe », art. cité.
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[64]
David Greig : « I’ve had people in the UK ask me what it feels like to have someone “mucking about with your play”, but it is always the mucking about that makes it exciting » (Lyn Gardner, « What draws British playwrights to Europe », art. cité ; nous soulignons).
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[65]
« He has also sought to work more collaboratively over time, rejecting the role of the inviolable poet » (David Barnett, « Simon Stephens : British Playwright in Dialogue with Europe », Contemporary Theatre Review [En ligne], vol. 6, no 3, 2016, p. 306, mis en ligne le 22 septembre 2016, consulté le 18 juillet 2018, URL : https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/10486801.2016.1183666 ; nous traduisons).
-
[66]
« I went home realising that theatre practise is not simply about staging the imagination of a playwright but a multi-authored process of collaboration, conflict, intervention and exploration. It led me to re-imagine how I write » (Simon Stephens, « Skydiving Blindfolded », conf. citée ; nous traduisons).
-
[67]
Voir Umberto Eco, L’oeuvre ouverte, Paris, Seuil, 1965. Ce livre ne constitue pas une référence explicite chez les auteurs contemporains anglais. Si nous l’évoquons, ce n’est pas pour le présenter comme exerçant une influence directe, mais pour souligner une proximité entre sa philosophie et celle de certains dramaturges.
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[68]
Howard Barker, Arguments for a Theatre [1989], Manchester, Manchester University Press, 1997, p. 48. Pour l’auteur, cette émancipation est empêchée par le primat de « la voix auctoriale cherchant à éclairer les aveugles »/« It is the authorial voice straining to illuminate the blind, that prevents the proper focus of meaning in a work of art » (p. 48).
-
[69]
Séverine Ruset, « “Standing with the Audience” », art. cité, p. 18.
-
[70]
Tim Crouch, The Author, London, Oberon Books, 2009. La pièce a été créée au Royal Court Upstairs en 2009.
-
[71]
Séverine Ruset, « “Standing with the Audience” », art. cité, p. 181.
-
[72]
« The death of the British dramatist is greatly exaggerated » (David Edgar, « The Playwright’s still the thing », art. cité ; nous traduisons).
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[73]
Ruth Amossy, « La double nature de l’image d’auteur », art. cité.