Abstracts
Résumé
L’absence de la poésie lyrique dans la poétique d’Aristote et longtemps après a permis et exigé la rédaction d’innombrables « arts poétiques », dont les fonctions, les contenus et la place dans l’oeuvre poétique n’ont cessé de varier. La perte d’autorité sociale du discours littéraire et la relégation du lyrique loin derrière la fiction narrative ont à la fois entraîné un développement potentiellement illimité du métapoétique au détriment de toute référence au monde et sauvé, parfois, le poème, de sa dissolution dans la prose. De la hantise et de la fascination du silence, chez Rilke, au retour d’un sujet souverain de ses incertitudes chez Guillevic, on constate le manque de la voix de l’autre, d’une voix autre que celle du sujet esseulé. Dire le manque ne suffit pas. La tâche du poème aujourd’hui serait de bâtir un espace pour cette voix et de faire en sorte qu’art poétique et poème du monde jouissent, eux aussi, chacun de son tour de parole.
Abstract
The absence of lyrical poetry in Aristotle’s poetics and long afterwards allowed for and required the redaction of innumerable “poetic arts”, whose functions, contents and place in the poetic oeuvre has steadily varied. The lost social authority of literary discourse and the relegation of the lyrical far behind narrative fiction led to a potentially unlimited development of the metapoetical at the expense of all references to the world and, at the same time, occasionally saved the poem from dissolving into prose. From the obsession and fascination with silence in Rilke, to the return of a sovereign subject of his uncertainties in Guillevic, one observes the absence of the voice of another, of a voice other than that of the lonely subject. Mentioning this absence is not enough. The poem’s task today is to build a space for this voice and ensure that both poetic art and the poem about the world enjoy their turn to speak as well.