Abstracts
Résumé
Cet article s’attache à la définition du statut des Historiae Canadensis (1664) du père François DuCreux, s.j., ouvrage rédigé en latin à partir de textes en langue vernaculaire. Leprocessus de « traduction-adaptation » opéré par l’auteur pose trois questionsmajeures relatives à sa poïétique. La première concerne la description des rapportsentretenus par le texte avec ses sources, suivant deux types d’interventionpossible. L’un touche le contenu et son organisation : la composition du substrattextuel (ou hypotexte) et l’agencement des éléments constitutifs de l’hypotexte dansl’oeuvre. L’autre se rapporte aux interventions liées à la forme du texte. Cettepremière question, qui suppose une réflexion globale sur l’intertexte, conduitensuite à envisager une seconde, portant sur le choix de la langue latine pour larédaction des Historiae Canadensis et,enfin, une troisième, qui invite à s’intéresser au lectorat visé par la publicationde ce texte à la fois historique et édifiant.
Abstract
This article examines the definition of the status of Historiae Canadensis (1664) by Father François DuCreux, SJ, a work written in Latin based on texts in the vernacular. The“translation-adaptation“ process performed by the author poses three key questionsrelative to his poetics. The first concerns a description of the text’s relations toits sources using two types of possible intervention. The first touches on thecontent and its organization: the composition of the textual substratum (orhypotext) and the arrangement of the constituent elements of the hypotext in thework. The other deals with interventions related to the shape of the text. Thisfirst question, which supposes a broad reflection on the intertext, then leads toconsideration of a second, which deals with the choice of Latin for writingHistoriae Canadensis and, finally, athird, which invites a look at the readership targeted by the publication of thistext, at once historic and inspiring.
Article body
Dans l’adresse au roi Louis XIV des HistoriaeCanadensis : seu, Novae-Franciae libri decem, ad annum usque Christimdclvi, François Du Creux écrit : « Ces annales de votre Nouvelle-Francevous informeront avec quelles effusions de joie elle a célébré le jour de votrenaissance, à l’exemple des corps sociaux de l’ancienne France [2]. » C’est cependant auxmembres de la Compagnie des Indes occidentales et des deux Amériques,méridionale et septentrionale, du Cap-Vert et du Sénégal — autrement dit, laCompagnie des Indes occidentales — que l’auteur dédie son Histoire, reprenant l’intitulé de l’oeuvre(Historiae Canadensis) : « Nouspublions donc cette Histoire, persuadé non par le seul Supérieur de notreCompagnie ; je mentirais à coup sûr, si je ne voyais le lien qu’elle a avec vosintérêts [3]. » Or,l’utilisation par Du Creux, à quelques lignes d’intervalle, des termesd’annales et d’histoire, pose d’emblée la question du statutde l’oeuvre qui nous est donnée à lire, laquelle engage à son tour la définitionde cet ouvrage rédigé en latin à partir de textes en languevernaculaire.
Aussi le processus de « traduction-adaptation » dont l’ouvrage de Du Creuxsemble indissociable pose-t-il trois questions majeures relatives à sapoïétique. La première est d’ordre intertextuel et concerne la description desrapports entretenus par le texte avec ses sources, suivant deux typesd’intervention possible. L’un touche le contenu et son organisation : lacomposition du substrat textuel (ou hypotexte) et l’agencement des élémentsconstitutifs de l’hypotexte dans l’oeuvre. Par exemple, que révèle le choix del’auteur de ne pas traiter de la fondation de Montréal ? On peut certes croirequ’il s’agit d’un oubli, d’un défaut de méthode historique, comme il a étéreproché à Du Creux par la critique, mais il se peut aussi que nous soyons enprésence d’un choix porteur de sens. L’autre se rapporte à des interventionsliées à la forme du texte : comment chaque unité hypotextuelle a-t-elle étéretravaillée sur le plan stylistique, quelles sont les modalités du changementde langue, que nous révèlent les choix de la traduction à propos de lacompréhension qu’avaient les Jésuites de la Nouvelle-France ? Cette premièrequestion, qui suppose une réflexion globale sur l’intertexte, conduit ensuite àces deux autres, dont on proposera tour à tour l’examen : pourquoi le père DuCreux a-t-il choisi de rédiger son oeuvre en latin ? Quel est le lectorat visépar la publication de ce texte à la fois historique et édifiant ?
L’oeuvre et ses sources
Les Historiae Canadensis comptentparmi les premières histoires du Canada. On sait de l’auteur qu’il est né en1596 à Saintes, en Saintonge, et mort en 1666 à Bordeaux. Entré dans laCompagnie de Jésus en 1614, à l’âge de 18 ans, Du Creux a enseigné lesbelles-lettres dans un collège pendant douze ans [4] et, selon la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, il a fait paraître cinqouvrages, dont deux vies latines (saint Jean-François Régis en 1660 [5] et saint François de Salesen 1657 [6]) et deuxgrammaires (deux éditions de la Grammairegrecque de Clenard en 1657 et une édition de la Grammaire latine de Despautère en1658 [7]). C’est àtitre d’historien officiel de la Compagnie de Jésus qu’il a entrepris, àBordeaux, la rédaction des HistoriaeCanadensis en 1643 (soit la première année de la régence d’Anned’Autriche, mère de Louis XIV encore mineur), à la demande de ses supérieurs, etce, sans s’être jamais rendu lui-même en Nouvelle-France. Vingt et un ans plustard, cette histoire paraît à Paris, chez Sébastien Cramoisy (éditeur habitueldes Relations des Jésuites), ets’inscrit dans le contexte de la Contre-Réforme, au moment où la France s’étaitengagée dans la guerre de Trente Ans (1635 à 1648) [8]. De plus, entre 1645 et 1663,d’énormes difficultés financières affectent la Compagnie des Cent Associés, dontle mandat consiste à veiller à la conversion des Amérindiens et à administrer,défendre et peupler la colonie, le tout en échange d’un monopolecommercial [9].
Depuis sa publication en 1664, l’ouvrage de François Du Creux semble avoirconnu des périodes d’intérêt (deuxième quart du xviiie siècle, dernière moitié du xixe siècle, milieu du xxe siècle) entrecoupées de périodes de relatif oubli. C’estdu moins ce qui se dégage de l’examen, pour l’instant encore en cours, desdocuments dans lesquels on trouve mention des Historiae. Au reste, il semble que l’on a surtout utilisél’oeuvre pour sa carte de la Huronie et comme complément d’informationbiographique sur Samuel de Champlain et le père Pierre Chaumonot. Mais d’autresauteurs se réfèrent aussi à Du Creux pour expliquer l’attribution de toponymeset de noms de rue, ou encore pour étoffer leur description des Amérindiens. Parailleurs, ceux qui ont lu et commenté son oeuvre soulignent à juste titrequ’elle reprend le contenu des Relations des Jésuites : « Cet Ouvrage extrêmement diffus a étécomposé presqu’uniquement sur les relations des Jesuites [10] » ; « Le P. Ducreux, qui n’avaitjamais vu le Canada, écrivit son livre uniquement d’après les relations desJésuites [11] » ;« Si l’on admet l’autorité des Relations, il faut admettre aussi l’autorité duPère Du Creux puisque tous s’accordent à dire qu’il écrit d’après les Relations [12] » ; « On se demande cependant si le père Du Creuxajoute énormément aux Relations desJésuites et aux Voyages de Champlaindont il s’est d’ailleurs inspiré [13] » ; « Après comparaison, les chercheurs accordentle même crédit à l’Historia Canadensisqu’aux Relations parce qu’elles seconfirment réciproquement, quoique l’Histoire soit plus condensée [14] ».
Pour composer son oeuvre, Du Creux a donc pris pour sources principales lesrelations de ses confrères [15], mais aussi les Voyages de Samuel de Champlain [16], le Grandvoyage de Gabriel Sagard [17] et L’histoire de laNouvelle-France de Marc Lescarbot [18]. Au surplus, dans un compte rendu de1954 de la traduction anglaise des HistoriaeCanadensis, un professeur d’histoire du Canada au CollègeSainte-Marie de Montréal, Georges-Émile Giguère, qui a écrit sur les Relations des Jésuites, sur Samuel deChamplain et sur Lionel Groulx, souligne que certains passages proviennentprobablement des récits de Jacques Cartier [19]. Quoi qu’il en soit, cet ensemble de textes,dorénavant appelé « hypotexte », est à la base de la rédaction du livre de DuCreux, qui représente une part importante du patrimoine littéraire de et sur la Nouvelle-France, même s’il a été rédigé en latin, depuisla France, et par quelqu’un qui n’est jamais venu au Canada.
Le genre littéraire
Les Historiae Canadensis relatentles événements survenus en Nouvelle-France dans un ordre chronologique : chacundes dix livres organise sa présentation sous forme annalistique. À la manièredes historiens antiques, Du Creux dégage les leçons qu’il importe de retenir dupassé au moyen de discours, d’épisodes qui racontent les dangers éprouvés et lesdevoirs accomplis, sur un ton plus romanesque par endroits afin de susciterl’émotion du lecteur et lui donner l’impression qu’il assiste en personne auxévénements, ou encore en adoptant des motifs épiques. Il s’intéresse plus auxacteurs de l’histoire qu’aux faits historiques eux-mêmes. Les courageux pères,les néophytes, les chefs amérindiens, les gouverneurs de la colonie et ceux quifont obstacle à la mission sont les personnages principaux de cette histoire dela christianisation en terre sauvage, qui prend la forme d’un récit desactivités et des méthodes de conversion déployées par les Jésuites. L’auteurrefuse, ainsi qu’il l’écrit dans sa préface, « de laisser périr la mémoire detant d’hommes, même de ceux qui non seulement par leurs sueurs, mais aussi parleur sang, ont arrosé ce sol infertile, ni la mémoire des hommes qui consacrentleurs biens et continuent de le faire pour une oeuvre aussi sainte, ou de ceuxqui la soutiennent de leur autorité et de leurs avis [20] ». Tout tourne donc autour de cequ’ont accompli les personnes profondément investies dans le développement de lacolonie et dans l’entreprise de conversion. Même s’il annonce que son oeuvre nefait « aucune place [aux] ornements de l’histoire, [aux] discours militairesexcitant les guerriers aux combats et à la guerre, [aux] exhortations descitoyens à la paix, à la guerre, aux traités, aux finances, aux prises devilles, à l’administration des provinces, aux magistrats et au gouvernement dela république [21] », DuCreux raconte bon nombre d’épisodes relatifs à la guerre et à la prise debourgs, aux traités et aux négociations de paix, toujours dans le cadre resserréde la mission jésuite. Les succès de la Compagnie sont mis en avant, malgré lesrésistances et les obstacles auxquels les pères sont en butte, rendant partouthommage à ses héros, Isaac Jogues, Jean de Brébeuf, Gabriel Lalemant, CharlesGarnier et bien d’autres.
L’ouvrage foisonne d’exemples de conversions réussies et de discoursprononcés tant par les pères que par les convertis. Si quelques discourss’opposent parfois au catholicisme avec virulence — lorsqu’ils sont prononcéspar les défenseurs des traditions religieuses amérindiennes, s’entend —,l’essentiel du propos tend à transmettre une foi ardente, un enthousiasmereligieux qui se veut contagieux et une forte volonté prosélyte. Non seulementles Historiae Canadensisillustrent-elles les succès et les dangers de la mission, mais elles soulignentaussi l’éloquence de ses acteurs, incluant les Amérindiens, parmi lesquelscertains surprennent les Européens par leur prestance et par leur capacité àcaptiver leur auditoire [22]. Le discours historiographique, l’auteur le souligne lui-mêmeen invoquant des raisons linguistiques (HC, iii, ro), répond au critère devraisemblance et se fonde sur l’authenticité présumée des sources qui en faitl’autorité. Du Creux raconte les chosesaccomplies, les res gestae, sur la basede témoignages jugés crédibles et au nom de la vraisemblance [23], comme en témoigne cetextrait de la préface : « je ne demande pas plus de foi de qui que ce soit à mesécrits qu’on n’en doit ordinairement accorder à un historien véridique ou àl’autorité et à la sincérité de ceux de qui j’ai reçu ce que j’écrirai. De lasorte, je ne veux rien préjuger, en ce qui concerne les vénérables serviteurs deDieu dont je raconterai ici les actions […] [24]. »
L’oeuvre rassemble donc une série de traits propres au genrehistoriographique hérité de l’Antiquité et qui s’est maintenu jusqu’au xixe siècle : discours construits, autorité fondée sur lavraisemblance, narration des événements plutôt que leur analyse. En revanche, lamanière dont Du Creux désigne son oeuvre soulève quelques questions : pourquoi,en effet, utiliser le terme annalesdans l’adresse au roi et dans la préface, et historiae dans l’adresse à la Compagnie des Indes occidentaleset dans le titre ? Le choix de ces termes est-il délibéré ou l’auteur lesemploie-t-il comme synonymes, suivant l’usage médiéval [25] ? Que peuvent impliquer le choix etla distribution de ces deux mots ? Intituler le texte histoire en fait-il un ouvrage susceptible demieux se vendre ? Faut-il voir dans l’emploi des deux mots une référence auxAnnales et à l’Histoire, qui sont les deux grandes oeuvresde Tacite ? Question elle-même indissociable du modèle littéraire dont s’estinspiré Du Creux, puisqu’on sait que l’écriture, à l’âge classique, s’adossetrès souvent à une pratique de l’imitatio : bref, songe-t-il à Tacite ? Lorsque l’auteur annonce,dans la préface, qu’il n’y a « aucune place ici pour les ornements del’histoire », s’inscrit-il dans la nouvelle conception de l’Histoire, développéepar exemple par Jean Bodin à la fin du siècle précédent [26] ? Quant aux discours, quimettent-ils en scène, quelle est leur valeur édifiante ? Qu’incarnent les« orateurs » par rapport à la mission jésuite ? Telles sont les nombreusesquestions qu’il faudra approfondir un jour.
Le statut de la langue latine au xviie siècle
S’il semble encore malaisé de résoudre la question du genre littéraireauquel appartiennent les HistoriaeCanadensis, du moins pouvons-nous chercher à élucider le choix dela langue latine comme langue de rédaction. En effet, pourquoi et pour qui publier une telle oeuvre en latin, à une époque où lestextes en vernaculaire gagnent en diffusion et en prestige, comme en témoigne lacréation de l’Académie française, qu’accompagne la publication d’ouvrages sur lebon usage et l’élégance du style ? La prise en considération du statut de lalangue latine sous l’Ancien Régime entre ici en jeu. On sait que le roi et sonentourage, de même que les milieux doctes et religieux, utilisaient toujours lelatin au xviie siècle. Les adresses sur lesquelles s’ouvrent lesHistoriae Canadensis destinentd’ailleurs l’oeuvre au roi Louis XIV et aux membres de la Compagnie des Indesoccidentales — mais retenons ici le roi plutôt que les marchands, sans oublierque la préface interpelle aussi les confrères de Du Creux : « Certes, lesouvriers zélés ne manqueront d’y trouver de l’intérêt, par la comparaison deleurs travaux avec ceux de leurs confrères [27]. »
Y a-t-il toutefois un public plus vaste ? Les autres ouvrages qui seprésentent comme des histoires (dans leur intitulé) à la même époque sont assezpeu nombreux en ce qui concerne la Nouvelle-France. On a déjà mentionnél’Histoire de la Nouvelle-France deMarc Lescarbot ; Joannes de Laet consacre aussi à la Nouvelle-France un livre deson Histoire du Nouveau Monde (1625) enlangue vernaculaire (et, en l’occurrence, en néerlandais), dont la traductionfrançaise parut en 1640 [28] ; enfin, une autre histoire de la Nouvelle-France en languefrançaise est publiée en 1664, celle de Pierre Boucher, sieur deBoucherville [29].L’oeuvre de Du Creux serait donc la première histoire du Canada rédigée enlatin [30]. Àquel(s) besoin(s) répond cette entreprise ? De manière plus précise, peut-onespérer que la comparaison entre ces différentes histoires soit susceptible denous éclairer sur les ambitions qui animent la Compagnie de Jésus lorsqueparaissent les Historiae Canadensis etsur le lectorat auquel songent les pères ?
Mais rappelons d’abord le contexte général en fonction duquel il imported’interpréter cette stratégie éditoriale. Le latin, en effet, a représenté uneforme stable et sûre pour fixer le discours religieux et se montrer à la mesurede sa sacralité [31].D’une part, il s’agit d’une langue que l’on destine depuis des siècles àexprimer « les vérités surnaturelles » (LES, p. 64) : à ce premier titre, le choix du latin pour larédaction des Historiae Canadensiss’explique peut-être par la volonté de souligner le caractère sacré de lamission jésuite. D’autre part, la stabilité de cette langue et son emploiuniversel en font un véhicule privilégié pour garantir la diffusion de l’oeuvrede Du Creux et sa pérennité. Alors que le vernaculaire était perçu comme pauvreet instable, le latin s’y opposait par sa majesté et son caractère immuable,constituant un moyen propice à la conservation de textes sacrés. Langueuniverselle de l’Occident, de la religion chrétienne et de l’éducation, dusavoir et de la morale, le latin représentait aussi une marque de civilisation.Sous le règne de Louis XIV, la noblesse prend en compte « la nécessité d’unetelle formation [savoir et éducation formelle alors essentiellement fondée surle latin], ne serait-ce que pour remplir un certain nombre de fonctions ou pourparticiper à la vie de cour » (LES,p. 250). Sans que cette classe devînt lettrée, elle s’intéressa néanmoins, parl’intermédiaire de traductions, aux ouvrages politiques, d’histoire et d’artmilitaire rédigés en latin.
Associé au genre littéraire de l’histoire, l’usage du latin fixe à jamais etdiffuse, dans une langue universelle, les efforts civilisateurs déployés par lespères de la Compagnie de Jésus pour intégrer les Amérindiens à la sociétéchrétienne et, surtout, souligne leur héroïsme dans un environnement hostile.Éternité, universalité, prestige, autorité politique, caractère sacré del’entreprise de conversion, édification du lecteur, voilà ce que le choix dulatin, pour la rédaction des HistoriaeCanadensis, pouvait signifier. Quant au lecteur pressenti, l’unedes pistes les plus prometteuses dans l’état actuel de la recherche nous estdonnée par François de Dainville, qui consacre un chapitre à l’importance del’histoire et de la géographie dans la formation dispensée par les collègesjésuites du xvie au xviiie siècle.
Celle-ci [l’histoire], estimaient-ils [les humanistes italiens], nepouvait être seulement l’exposé objectif des faits et de leurs causes, elledevait enseigner avec éloquence […]. Ainsi conçue la lecture des historiens,plus féconde à tout prendre que l’étude d’un manuel, apprenait en même tempsque des faits mémorables du passé, la manière d’écrire l’histoire et defaire réflexion sur les choses humaines [32].
En ce sens, la fonction d’historien officiel de la Compagnie de Jésusqu’occupait Du Creux le destinait vraisemblablement à jouer un rôle pédagogiqueéminent dans les collèges de l’ordre, en favorisant notamment l’acquisitiond’une érudition qui « servait à préparer l’orateur » en « fournissa[nt] tout unarsenal de faits et une source inépuisable d’exemples [33] ». Surtout, à la différence duxvie siècle, le xviie siècle tendit peu à peu à étendre l’enseignement del’histoire de l’Antiquité au monde moderne, et jusqu’à y inclure le NouveauMonde, dans un contexte où l’histoire devenait « une pièce essentielle del’instruction des princes et des grands [34] » formés dans les collèges jésuites. Les écritsdes Jésuites ont eu, eux aussi, un rôle prépondérant dans la formationhistorique, puisque à « l’influence des livres, il faut joindre celle plusétendue encore dans les collèges, et jusque dans le populaire, des fameusesRelations de la Nouvelle France, publiées sans interruption de 1632 à1672 [35] ». Cettevogue dont jouissaient les Relations àpartir desquelles Du Creux a rédigé ses HistoriaeCanadensis incite, en somme, à croire à l’importance de sadiffusion dans les établissements d’enseignement jésuites.
Les transformations de la réécriture
Derrière la question de la langue, on trouve aussi celle des procédés deréécriture employés dans les HistoriaeCanadensis qui sont, bien sûr, nombreux et soulèvent certainsproblèmes. On s’intéressera ici, en particulier, à la traduction et àl’adaptation : passer d’un ensemble d’hypotextes à une seule oeuvre, entransformant le genre littéraire et en changeant de langue, représente de faitune opération complexe.
Chez Du Creux, la traduction du français vers le latin constitue le rapportintertextuel le plus évident, Genette décrivant d’ailleurs ce passage d’unelangue à une autre comme « la forme de transposition la plus voyante [36] », où la transposition est définie comme une« transformation sérieuse [37] ». L’un des problèmes les plus importants de toute traductionconcerne le choix du lexique, qu’il s’agisse de décrire des réalités absentes dela langue d’arrivée (ici le latin) ou d’intervenir sur le style du texte dedépart — la transformation générique dans le cas qui nous intéresse. Une étudeplus approfondie des HistoriaeCanadensis permettra sans doute d’examiner comment Du Creuxdésigne les réalités propres aux Amérindiens, s’il suit l’usage des auteurs deshypotextes, ou s’il crée plutôt des vocables grâce à la productivitémorphologique de la langue latine [38]. Une autre question importante touche, puisqu’ils’agit d’hypotextes écrits en français, à la présence de gallicismes dans lesHistoriae Canadensis. L’exercice duthème, c’est-à-dire la traduction vers une langue autre que la languematernelle, comporte également sa part de problèmes, d’autant plus que la langued’arrivée, le latin, ne compte plus de locuteurs natifs depuis longtemps.L’apprentissage de cette langue passe donc par la lecture et l’imitation d’unesérie d’auteurs latins jugés exemplaires, série dont les noms ont d’ailleursvarié au cours des siècles. Le choix des modèles d’imitation pour l’exercice duthème prend donc tout son sens, non seulement pour l’analyse intertextuelle,mais encore pour mieux comprendre les choix de traduction, d’autant plus quel’histoire n’a pas les mêmes finalités que le rapport de mission.
La mise en parallèle de ce passage des Historiae Canadensis, où Du Creux décrit la coiffure desAmérindiens, avec son hypotexte correspondant tiré de la relation de 1657-1658de Paul Le Jeune illustre bien la question de l’intervention stylistique sur leplan lexical :
Neque verò lex ulla tondendi capilli apudeos : quem quísque modum sibi sinxerit, hunc usurpat. Sunt qui comamsurrigant in verticem : ab eáque crinium conformatione Natio apud eostota quaedam omen invenit : alii verticem ipsum radunt capillis utrinquead tempora propendentibus, occipitio item raso : alii partem alteramcapitis totam radunt, in altéra excrescere sinunt caesariem : feminaeautem capillorum partem maximam in occipitium rejiciunt, parte altéra,rariori, circà tempora neglectim dependente
[Aucune règle ne leur impose de se tondre les cheveux et chacun use àcet égard de l’ordre qu’il a imaginé. Il y en a qui redressent leurs cheveuxverticalement, et c’est par cette conformationde la chevelure qu’une nation parmi eux a reçu son nom.D’autres se rasent le sommet de la tête et laissent pendre le reste des deuxcôtés, l’occiput aussi rasé. D’autres se rasent entièrement la moitié de latête, mais ils laissent croître les cheveux de l’autre moitié. Quant auxfemmes, elles rejettent la plus grande partie de leurs cheveux surl’occiput, mais le reste étant moins abondant, elles le laissent pendrenégligemment sur leurs tempes.].
HC,p. 62 ; nous soulignons
On ne fait point le poil à la mode en ce païs-là. Leur fantaisie estleur mode. Quelques-uns les portent relevez sur le haut de la teste, lapointe en haut. Il se trouve une Nation toute entiere, qui se nomme lescheveux relevez, pource qu’ils aiment cette façon de coiffure. D’autres se rasent sur le milieu de lateste, ne portant du poil qu’aux deux costez, comme de grandes moustaches.Quelques-uns découvrent tout un costé, et laissent l’autre tout couvert. Lesmoustaches se portent en France aux costez de la teste, les femmes Sauvagesles portent sur le derriere, ramassant leurs cheveux en un petit pacquet,qui pend sur leurs espaules. Jugez maintenant qui a perdu, ou qui a gagné.Chacun croit sa mode la plus belle. La nostre change souvent enFrance [39].
La traduction, par Du Creux, du substantif moustache (« mèche de cheveux [40] ») par une forme déclinée de capillus, de façon de coiffure par criniumconformatione et de derrière [de la tête] par occiput, semble indiquer assez nettement une transformation del’hypotexte à la faveur d’une plus grande élévation du registre lexical, dans lebut de répondre aux exigences d’un genre littéraire qui, suivant la hiérarchiefixée par les poétiques classiques, est plus relevé que celui de larelation.
L’adaptation, pour sa part, se caractérise plus souvent par sa fidélité ausens du message de départ plutôt qu’à sa forme ; en ce sens, l’exemple précédent illustre très bien leprocédé d’adaptation. Celle-ci implique des interventions volontaires de la partdu traducteur, ce que fait abondamment Du Creux sur les hypotextes : il allongeet retranche des passages, travaille le style de la phrase, déplace desconstituants textuels (l’extrait de la relation de 1657-1658 de Le Jeune citéprécédemment se trouve dans le premier livre des Historiae Canadensis, qui couvre les années 1625-1629 etprésente le territoire et les habitants naturels de la Nouvelle-France), etc. Ilarrive toutefois que Du Creux supprime un long passage de sa source, comme lemontre la confrontation de ces deux extraits :
Ménart raconte que, dans toute cette navigation, il n’y eut personne àne pas remplir excellemment tous les devoirs et les offices chrétiens : lesvoyageurs, les matelots, les officiers assistaient avec modestie aux officesdivins, qui furent souvent chantés. Les sacrements ont été fréquentés avecsoin. On se réunit assidûment pour les prières publiques et pour la lectureascétique. Ainsi, pendant que chacun purement et soigneusement servait Dieu,ayant tout autour une mer calme, ils arrivèrent à Tadoussac à la fin dejuin [41].
Je n’ay point veu plus de devotion sur la terre que sur la mer, lesprincipaux de nostre flotte, les passagers et les matelots assistoient audivin service que nous chantions fort souvent, ils frequentoient lesSacremens, se trouvoient aux prieres et aux lectures publiques qu’on faisoiten son temps, mais la devotion fut tres-sensible et tres-remarquable le jourdu sainct Sacrement, on prepara un autel magnifique dans la chambre denostre Admiral, tout l’equipage dressa un reposoir sur l’avant du vaisseau,nostre Seigneur voulant estre adoré sur cet element si mobile, nous donna uncalme si doux que nous pensions voguer sur un estang […] ; enfin apres avoirjouy d’assez de beau-temps depuis cette action, toute plaine de pieté,l’Admiral arriva à Tadoussac le dernier de Juin […] [42].
La réécriture de ce passage présente ce que Genette appelle une excision, c’est-à-dire une « suppression pureet simple [43] ». Dansle texte de la relation de 1640, Le Jeune développe assez longuement lacérémonie de célébration du saint Sacrement — il y consacre un peu plus d’unepage —, cérémonie omise chez Du Creux. Ce type d’opération sur l’hypotextemontre que l’auteur des HistoriaeCanadensis a effectué des choix dont on ignore, pour l’instant,les modalités. En fonction de l’importance de ces interventions, on peuts’interroger sur les limites, en termes quantitatifs, en fonction desquelles sedéfinit la notion d’adaptation : une phrase retranchée, un paragraphe, un récitentier tel celui de la fondation de Ville-Marie ?
Que conclure de la présentation des problèmes que pose un texte dontl’analyse complète reste à faire, sinon qu’on n’en perçoit encore que lasurface ? Il ressort néanmoins de cet exercice que, si la présentationmatérielle de l’ouvrage de Du Creux relève de la forme annalistique, lacooccurrence des mots annales ethistoire invite à une réflexionplus approfondie sur le genre littéraire auquel se rattachent les Historiae Canadensis et sur la rhétorique quece texte met en oeuvre en voulant immortaliser, par le récit de leur courage etpar l’illustration de leur éloquence, des héros au service de Dieu et dontl’activité prosélyte s’inscrit dans l’histoire d’un ordre, d’une mystique, d’unepolitique et d’enjeux socioreligieux. Or, l’instrument propre à frayer une voievers cette immortalité est une langue deux fois millénaire qui n’a rien perdu desa force expressive ni de sa richesse à travers — ou grâce à — l’émulation etl’imitation. Toutefois, les modèles comme la langue portent en eux leurs propresmessages et leurs propres systèmes référentiels, dont la compréhension estintimement liée à l’analyse de la réécriture, et la réécriture se manifeste parune vaste gamme de procédés, eux-mêmes problématiques selon les conceptsthéoriques auxquels ils font appel ; mais c’est assurément en plaçant cesconsidérations au coeur de la réflexion que l’on pourra mettre en lumière lessubtilités du message de Du Creux et ainsi mieux rattacher son oeuvre à notrepropre histoire.
Appendices
Note biographique
Amélie Hamel
Amélie Hamel est étudiante audoctorat à l’Université de Montréal sous la direction de Jean-François Cottier,en cotutelle avec Antony McKenna de l’Université de Saint-Étienne (France). Sathèse, intitulée « Historiae Canadensis : seu,Novae-Franciae libri decem, ad annum usque Christi mdclvi du père François Du Creux, s.j. (1664) : rhétorique d’uneréécriture », porte sur les modalités de la composition des Historiae Canadensis et sur la question desréécritures des textes vernaculaires en latin dans le contexte de laNouvelle-France.
Notes
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[1]
Cette recherche bénéficie du soutien financier du Conseil de recherche ensciences humaines du Canada (CRSH).
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[2]
« Referent tibi hi Novae tuae Franciae Annales, quâ gestientis laetitiaesignificatione diem natalem tuum prosecuta sit, cùm Galliae veteris institutacultiora eadem […] » (François Du Creux, S. J., Historiae Canadensis : seu, Novae-Franciae libri decem, ad annum usqueChristi mdclvi, Paris,Sébastien Cramoisy et Sébastien Mabre-Cramoisy, 1664, aii,vo ; nous utilisons une traduction inédite de LucienCampeau). Désormais, les références à cet ouvrage seront indiquées par le sigleHC, suivi de la page, et placéesentre parenthèses.
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[3]
Hanc Historiam porro edidimus, suadente non uno moderatore nostraeSocietatis, quam si rebus vestris obstrictam negem, profecto mentiar.
HC, aai,vo -
[4]
François Du Creux, The History of Canada orNew France, éd. James B. Conacher, introduction et trad. PercyJ. Robinson, Toronto, The Champlain Society, coll. « Publications of theChamplain Society », 1951-1952, 2 vol., p. x ; voir également, Augustin deBacker, Aloys de Backer et Auguste Carayon, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, nouv. éd. CarlosSommervogel, s.j., Louvain, Éditions de la Bibliothèque S. J., Collègephilosophique et théologique, 1960, 12 vol., t. II, p. 1657-1658. Ce dernierouvrage est une mise à jour de BibliothecaScriptorum Societatis Jesu de Nathaniel Bacon, nommé aussiSouthwell (Sotwel ou Sotvellus), publié à Rome en 1676.
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[5]
Jésuite qui s’est illustré dans les missions internes en France, mort en1640.
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[6]
Évêque de Genève et grand théologien, il joua un rôle fondamental dans ladiffusion de la foi catholique au sortir des guerres de Religion du xvie siècle par l’institution du catéchisme. Mort en 1622,canonisé en 1665.
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[7]
Sur le père Du Creux, voir l’introduction de Percy J. Robinson, The History of Canada, ouvr. cité, p. x-xi ;Casimir Hébert, « Le père François Du Creux », dans Centenaire de l’histoire du Canada de François-XavierGarneau. Deuxième semaine d’histoire à l’Université de Montréal, 23-27 avril1945, Montréal, Société historique de Montréal, 1945,p. 255-267 ; et Augustin de Backer, Aloys de Backer et Auguste Carayon,Bibliothèque de la Compagnie deJésus, ouvr. cité.
-
[8]
Le cardinal Richelieu s’étant allié aux protestants étrangers contre lesHabsbourg, champions du catholicisme, la France dut s’engager dans un conflitarmé pour contenir leur puissance.
-
[9]
En 1645, selon L’encyclopédiecanadienne (Dale Miquelon, « Compagnie des Cent-Associés »,Fondation Historica, 2010. En ligne, <www.thecanadianencyclopedia.com>,consulté le 15 décembre 2009), la Compagnie se voit contrainte de concéder sesdroits et obligations au Canada à la Communauté des Habitants (groupe decommerçants coloniaux). Ces droits et obligations seront retirés à la Compagnieen février 1663.
-
[10]
Pierre-François-Xavier de Charlevoix, s.j., Histoire et description générale de la Nouvelle France avec le journalhistorique d’un voyage fait par ordre du roi dans l’Amériqueseptentrionale, Paris, Rollin fils, 1744, t. vi, p. 400.
-
[11]
Joseph François Michaud et Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne, ou Histoire,par ordre alphabétique, de la vie publique et privée de tous les hommes quise sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions, leurs talents, leursvertus ou leurs crimes, Paris, Michaud, 1811-1862, 85 t. en44 vol., 1855, t. XI, p. 416b.
-
[12]
Casimir Hébert, « Le P. François Du Creux », art. cité, p. 264.
-
[13]
Jean-Charles Bonenfant, « Compte rendu » (de The History of Canada, James B. Conacher [éd.], vol. 1, ouvr.cité), The Canadian Historical Review,vol. XXXIII, 1952, p. 173.
-
[14]
Georges-Émile Giguère, « Compte rendu » (de The History of Canada, James B. Conacher [éd.], ouvr. cité),Revue d’histoire de l’Amériquefrançaise, vol. 8, no 2, 1954, p. 283. Enligne : http://id.erudit.org/iderudit/301658ar, consulté endécembre 2008.
-
[15]
Du Creux cite d’ailleurs explicitement dans sa préface la Relation de Pierre Biard publiée en 1616 àLyon chez Louis Muguet sous le titre : Relation dela Nouvelle France, de ses terres, naturel du pays, et de ses habitants,item Du voyage des Peres Jesuites ausdictes contrees et de ce qu’ils y ontfaict jusques a leur prinse par les Anglais ; voir « La premièremission d’Acadie, 1602-1616 », dans MonumentaNovae Franciae, éd. Lucien Campeau, Rome/Québec, Hist. Soc.Jesu/Presses de l’Université Laval, t. I, 1967, doc. 162, p. 456-637.
-
[16]
Samuel de Champlain, Les voyages de laNouvelle France occidentale, dicte Canada faits par le Sr. de ChamplainXainctongeois, capitaine pour le Roy en la marine du Ponant, et toutes lesdescouvertes qu’il a faites en ce pais depuis l’an 1603, jusques en l’an1629, où se voit comme ce pays a esté premièrement descouvert par lesFrançois sous l’authorité de nos Roys très-Chrestiens, jusques au règne deSa Majesté à présent régnante Louis XIII, Roy de France et deNavarre, Paris, Louis Sevestre Imprimeur-Libraire rue du Meurierprès la Porte S. Victor, et en sa Boutique dans la Cour du Palais, 1632, 723p. ; Les voyages du Sieur de ChamplainXaintongeois, capitaine ordinaire pour le Roy, en la marine divisez en deuxlivres, ou, journal très-fidèle des observations faites ès des couverturesde la Nouvelle France, tant en la description des terres, costes, rivières,ports, havres, leurs hauteurs, et plusieurs déclinaisons de laguide-aymant […], Paris, Jean Berjon, rue S. Jean de Beauvais, aucheval, volant et en sa boutique au Paris […], 1613, 439 p.
-
[17]
Gabriel Sagard, Le grand voyage du pays desHurons situé en l’Amérique vers la mer douce, és derniers confins de laNouvelle France, dite Canada, où il est amplement traité de tout ce qui estdu pays, des moeurs et du naturel des Sauvages, de leur gouvernement etfaçons de faire […] avec undictionaire de la langue huronne, pour la commodité de ceux qui ont àvoyager dans le pays, et n’ont l’intelligence d’icelle langue,Paris, Denys Moreau, 1632.
-
[18]
Marc Lescarbot, Histoire de laNouvelle-France : contenant les navigations, découvertes et habitationsfaites par les François és Indes Occidentales et Nouvelle-France souzl’avoeu et authorité de noz Rois Très-Chrétiens, et les diverses fortunesd’iceux en l’exécution de ces choses, depuis cent ans jusques à hui : enquoy est comprise l’histoire morale, naturelle, et géographique de laditeprovince : avec les tables et figures d’icelle, Paris, JeanMilot, 1609, 951 p.
-
[19]
Georges-Émile Giguère, « Compte rendu », art. cité, p. 283.
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[20]
« […] interire nomina et memoriam tantorum virorum, vel eorum qui nonsudoribus modò suis, sed etiam cruore, malignum solum illud rigaverunt ; veleorum qui suas opes in tam pium opus pergunt effundere ; vel eorum qui suâauctoritate, suísque cosiliis benè coepta promovent […] » (HC, fo i,ro). Une liste des noms des membres de la Compagnie desCent-Associés précède la préface.
-
[21]
Nullum enim hîc habere locum posse Historiae ornamenta, orationesmilitares, quibus bellatorum animi ad pugnam Martémque accendi à Ducibussoleant ; civiles, de pace, de bello, de foederibus, de vectigalibus, de Urbiumpropugnaculis, de Provinciarum administratione, de Magistratibus, de multiplicigestione Républica.
HC, ciiii,ro -
[22]
Sur l’importance de la parole chez les Amérindiens, voir Pierre Berthiaume,« Babel, l’Amérique et les Jésuites », dans Frank Lestringant (dir.), La France-Amérique (xvie-xviiie siècles). Actes du XXXVecolloque international d’études humanistes, Paris, HonoréChampion, 1998, p. 341-354, plus particulièrement, p. 346-347.
-
[23]
René Martin et Jacques Gaillard, Les genreslittéraires, Paris, Nathan, 1990, p. 109.
-
[24]
[…] non exigere me ut plus fidei tribuatur à quoquam, iis quae à mescribentur, quàm quod tribui vulgò solet veraci Historico ; vel auctoritatisinceratíque illorum, à quibus quae scribo, accepi : atque adeò, nihil mepraejudicati afferre velle, quod ad venerabiles servos Dei, quorum hîc resgestae attexuntur […].
HC, iiii,ro -
[25]
Voir Roger Ray, « Historiography », dans Frank Anthony Carl Mantello etGeorge Rigg (dir.), Medieval Latin. AnIntroduction and Bibliographical Guide, Washington, The CatholicUniversity of America Press, 1996, p. 639.
-
[26]
À ce propos, on peut consulter l’article de Normand Doiron, « La rhétoriquerobine de l’historia nuda et le récitde voyage », dans Frank Lestringant (dir.), LaFrance-Amérique, ouvr. cité, p. 381-392.
-
[27]
Utique non poterit non esse jucunda gnavis operariis, laborum suorum inaliorum laboribus inspectio […].
HC,fo i, ro -
[28]
Joannes de Laet, L’Histoire du Nouveau Monde,ou, Description des Indes occidentales contenant dix-huict livres : enrichide nouvelles tables géographiques et figures des animaux, plantes etfruits, trad. de Nieuwe wereldtofte beschrijvinghe van West-Indien [1625], Leyde, ChezBonaventure et Abraham Elsevier, 1640, p. 33-66. Le livre II traite de laNouvelle-France, du Cap Breton, du golfe Saint-Laurent, du Canada, de l’Acadieet de la guerre entre Français et Anglais jusqu’en 1630.
-
[29]
Pierre Boucher, sieur de Boucherville, Histoire veritable et naturelle des moeurs et productions du pays de laNouvelle France, vulgairement dite le Canada, Paris, FlorentinLambert, 1664.
-
[30]
À partir du premier quart du xviiie siècle, le jésuite Pierre-François-Xavier Charlevoixrédigera un grand nombre d’histoires des colonies (Paraguay, Japon,Nouvelle-France) pour la Compagnie de Jésus.
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[31]
Françoise Waquet rapporte ici les propos de Vittorio Coletti (L’éloquence de la chaire : victoires et défaites dulatin entre Moyen Age et Renaissance, trad. de l’italien parSilvano Serventi, Paris, Éditions du Cerf, coll. « Cerf/Histoire », 1987,p. 21), dans Le latin ou l’empire d’un signe.xvie-xxe siècle, Paris, Albin Michel, 1998, p. 57.Désormais, les références à cet ouvrage seront indiquées par le sigle LES, suivi de la page, et placées entreparenthèses dans le corps du texte. Sur la langue latine au xviie siècle, voir aussi Emmanuel Bury (dir.), Tous vos gens à latin. Le latin, langue savante, languemondaine (xive-xviie siècles), Genève, Droz, 2005.
-
[32]
François de Dainville, L’éducation desjésuites (xvie-xviiie siècles), éd. Marie-Madeleine Compère,Paris, Minuit, coll. « Le sens commun », 1978, p. 434.
-
[33]
François de Dainville, L’éducation desjésuites, ouvr. cité, p. 435.
-
[34]
François de Dainville, L’éducation desjésuites, ouvr. cité, p. 447.
-
[35]
François de Dainville, L’éducation desjésuites, ouvr. cité, p. 457.
-
[36]
Gérard Genette, Palimpsestes. L’écriture ausecond degré, Paris, Seuil, coll. « Points, Esais », 1985,p. 293.
-
[37]
Gérard Genette, Palimpsestes, ouvr.cité, p. 291.
-
[38]
Dans l’article « Langue ancienne et Nouveau Monde » (Emmanuel Bury [dir.],Tous vos gens à latin, ouvr. cité,p. 295-308), Geneviève Demerson souligne la capacité historique d’adaptation dela langue latine et sa créativité, dès l’Antiquité, lorsqu’il s’agit de désignerdes réalités nouvelles ou exotiques.
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[39]
Paul Le Jeune, s.j., Relation de ce qui s’estpassé de plus remarquable aux missions des PP. de la Compagnie de Jesus enla Nouvelle France, és années 1657 et 1658, Paris, SébastienCramoisy, 1659, p. 111 ; nous soulignons.
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[40]
Jean Dubois, René Lagane et Alain Lerond, « Moustache », Dictionnaire du français classique, Paris,Larousse, 1971, p. 371. Aussi, « longue mèche de cheveux qu’on laissait pendred’un côté du visage » (Edmond Huguet, « Moustache », Dictionnaire de la langue française du seizièmesiècle, Paris, Librairie ancienne Édouard Champion, 1925, t. 5,p. 357b).
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[41]
Memorabat Menartius totâ eâ navigatione neminem non egregiè Christianiofficii partes ac numéros obiisse : vectores, nautas, Praefectos interfuissesingulari cum modestiâ divinis Officiis, quae saepenumerò modulatè peractasunt : Sacramenta sedulò célébrasse, confluxisse assidue tùm ad preces publicas,tùm ad asceticam lectionem. Ita, dum pro se quisque caste, solicitéque Deofamulatur, placida ubique aequora experti, Tadossacum exeunte Junio tenuere.
HC, p. 282 -
[42]
Paul Le Jeune, Relation de ce qui s’est passéen la Nouvelle France en l’année M. DC. XL envoyée au R. P. provincial de laCompagnie de Jésus de la province de France, Paris, SébastienCramoisy, 1641, p. 9-11.
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[43]
Gérard Genette, Palimpsestes, ouvr.cité, p. 323.