Abstracts
Résumé
Cet article porte sur les rôles que les femmes ont joué dans le développement d’une scène jazz à Montréal. Les archives témoignent de l’importance des pianistes Vera Guilaroff et Ilene Bourne, de l’enseignante de piano Daisy Peterson Sweeney, des enseignantes de danse Olga Spencer Foderingham et Ethel Bruneau, ainsi que des danseuses de variétés dans le développement de la plus grande scène jazz du Canada au cours de la première moitié du xxe siècle. Cet article contextualise la présence des femmes dans ces espaces performantiels précis (le piano, l’enseignement, la danse) et explore les processus historiographiques liés à leur exclusion des récits historiques.
Abstract
This article contextualizes some of the roles that women played in Montreal’s interwar jazz scene. The archives testify to the importance of pianists such as Vera Guilaroff and Ilene Bourne, piano teacher Daisy Peterson Sweeney, dance teachers Olga Spencer Foderingham and Ethel Bruneau, as well as black women performers on the variety stage in the development of Canada’s most thriving jazz scene in the first half of the twentieth century. This article explains why women were drawn to these particular performance spaces (piano, teaching, theatrical dance) and documents the historiographical processes that have led to their marginalization from the historical record.
Article body
Dans la première moitié du xxe siècle, Montréal était le point nodal canadien le plus important du circuit transnational de spectacles de variétés des artistes noirs, ainsi que le plus grand centre de culture jazz du pays. Grâce à leur localisation particulière sur le réseau ferroviaire nord-américain, des cabarets montréalais tels que le Rockhead’s Paradise importaient déjà dans les années 1920 des numéros et spectacles de Harlem, célèbre quartier de New York, ainsi que de Détroit, Boston, Chicago, Cleveland et Washington. Dans les années 1930, le Terminal Club, sur la rue Saint-Antoine en face de la station Windsor, « était le genre d’endroit où tout pouvait arriver », se souvient le saxophoniste Myron Sutton, fondateur du tout premier jazz-band noir connu du Canada, qui s’établit à Montréal en 1933 : « Johnny Hodges est venu ici et a soufflé dans mon saxophone. J’ai même vu le trompettiste aux grosses joues [Dizzy Gillespie] ! Même Duke Ellington est venu ici et s’est assis au bar[1] » (Sutton 1981). Comme le rapporte le tromboniste Herb Johnson, qui a lui-même entamé sa carrière à New York :
J’ai joué dans pratiquement tous les cabarets de la ville de Montréal depuis que je suis arrivé ici en 1935, et je vous le dis : on savait qu’on était dans le showbiz lorsqu’on travaillait au Rockhead’s Paradise ou au Café Saint-Michel. C’était comme être transporté directement à Harlem[2]
Johnson 1981
Si la scène jazz montréalaise de cette époque a été décrite et analysée dans plusieurs ouvrages[3], ma thèse de doctorat constitue la première étude sur le rôle que les femmes ont joué dans son développement, ouvrant ainsi la voie à une meilleure reconnaissance de la contribution des jazzwomen à la formation des identités, des plaisirs et des sons de la modernité québécoise (Blais-Tremblay 2018[4]). Le statut particulier de Montréal comme ville-spectacle en fait un riche laboratoire pour étudier les relations de collaboration créative entre les artistes actifs sur le circuit des spectacles de variétés du début du xxe siècle (musicien·ne·s, chanteur·se·s, danseur·se·s). Ce projet de recherche met également en lumière l’étroite relation entre le jazz et le vice dans le discours critique du Québec de l’entre-deux-guerres, en particulier en ce qui a trait à l’incarnation genrée et racisée de la moralité dans des contextes de danse sociale et théâtrale. La moralité étant projetée à la fois sur les plans de l’identité de genre et de l’identité de race (parmi d’autres paramètres identitaires), la contextualisation de la musique jazz dans le cadre particulier de sa diffusion au sein des cabarets et autres lieux de danse théâtrale et sociale permet de cerner les enjeux entourant la récurrence du thème de la préservation de l’intégrité du corps de la « Québécoise de souche » dans la critique jazz de cette époque.
Dans cette thèse, je propose aussi une analyse critique de l’historiographie du jazz montréalais, ainsi que les premières notes biographiques détaillées consacrées à des artistes de jazz féminines ayant évolué à Montréal, telles que les pianistes Vera Guilaroff et Ilene Bourne ; à des ensembles de jazz féminins tels que les Soeurs Spencer, le Montreal Melody Girls Orchestra et les Vagabond Girls ; à des danseuses et chanteuses jazz telles que Tina Baines Brereton, Mary Brown, Marie-Claire Germain, Bernice Jordan Whims, Thelma Spencer et Natalie Ramirez ; ainsi qu’à des enseignantes de piano et de danse telles que Daisy Peterson Sweeney, Ethel Bruneau et Olga Spencer Foderingham. Les archives témoignent de la grande importance de ces femmes, pourtant quasi absentes des récits historiques existants — une situation qui a été largement documentée dans le cas des compositrices issues de la tradition associée à la musique classique, notamment par Susan McClary (2002) et Marcia J. Citron (1993), et par Marie-Thérèse Lefebvre (1991) au Québec, ainsi que dans le cas de la musique jazz aux États-Unis, entre autres par Sherrie Tucker (2000), Nichole T. Rustin et Tucker (2008) et, plus récemment en France, par Marie P. Buscatto (2007). Dans le présent article, je contextualise, par le biais de quelques courtes vignettes, la disparité qui subsiste entre le rôle primordial que certaines pianistes et autres instrumentistes jazz, enseignantes, chanteuses et danseuses ont joué dans l’articulation de la scène jazz à Montréal, et leur invisibilité dans les récits historiques existants. Les portraits ont été choisis pour leur représentativité et pour leur complémentarité, mais les personnes curieuses d’en savoir plus pourront consulter ma thèse qui explore de nombreuses autres figures féminines et propose une contextualisation et une analyse plus détaillées des contributions des jazzwomen à la modernité québécoise.
Vera Guilaroff
La compositrice, artiste-interprète, improvisatrice et animatrice de radio Vera Guilaroff conserve à ce jour le titre de première Québécoise à avoir enregistré de la musique jazz (Gilmore 1989, 7). Née le 26 octobre 1902 à Islington, en Angleterre, elle émigre au Canada en 1909 avec ses parents, Eugene Abraham Guilaroff et Annie Guilaroff (née Snitkin), tous deux des immigrants juifs de Russie (Biélorussie et Lituanie) ayant émigré en Angleterre à la fin du xixe siècle. Vera apprend le piano auprès de sa soeur Olga, qui elle-même devient une pianiste et enseignante de piano classique bien connue à Montréal. Vera, quant à elle, remplace dès 1916 le pianiste de cinéma muet Harry Thomas, puis, en 1919, elle occupe un poste permanent au théâtre Regent[5]. À partir du début des années 1920, Guilaroff est diffusée à CFCF et à CKAC — les auditeurs de la radio anglophone montréalaise se rappellent d’elle comme de la « Montreal’s Melody Girl » (Kidd 1966) — et déjà, en 1924, elle a acquis la réputation de « célèbre pianiste du théâtre Regent », selon l’édition du 15 février du journal La Presse. Au Regent comme à la brasserie Frontenac, tous deux situés dans un Mile-End alors en plein développement, Guilaroff se produit régulièrement avec le percussionniste Harry Raginsky, qu’elle épouse le 2 juin 1925, et avec qui elle part en tournée aux États-Unis dans un spectacle de type vaudeville à la fin des années 1920. Jusqu’à la fin des années 1930, Guilaroff continue de participer à l’industrie du divertissement[6], interprétant et enregistrant principalement des pièces connues du répertoire syncopé de l’époque, dont Dizzy Fingers (1922), composée par le pianiste de style novelty Zez Confrey ; Birth of the Blues, popularisée par l’orchestre de Paul Whiteman en 1926 ; une version rapide et fortement ornementée du Maple Leaf Rag de Scott Joplin (1899) ; une version de l’Humoresque, op. 101, no 7, d’Antonin Dvořák (1894), que Guilaroff adaptera et enregistrera en tant que Classic Rag no 1 sur un rouleau de piano pneumatique en 1926 ; ainsi que ses propres compositions, dont If You Only Knew (1921) et Lonesome Rose (1923). Guilaroff apparaît en tant qu’interprète dans deux films de Gordon Sparling, Back in ’22 (1932) et Back in ’23 (1933), tout en continuant de jouer à la radio, notamment avec les Vagabonds du piano (ou Piano Ramblers, un duo avec le pianiste Willie Ecsktein), entre 1932 et 1936. Durant l’été et l’automne 1937, elle effectue une tournée au Royaume-Uni avec Teddy Foster et ses Kings of Swing.
Bien qu’elle connaisse une carrière notable à titre de musicienne professionnelle au cours de l’entre-deux-guerres, Guilaroff est peu présente dans les récits historiques se rapportant à cette période. Cela s’explique en partie par le fait qu’on a eu de la difficulté, comme on le verra, à catégoriser le genre musical dans lequel sa musique s’inscrivait à l’époque, ainsi qu’à faire le suivi de son évolution artistique à partir de la fin des années 1930. Le style novelty piano, un style de piano populaire, syncopé, rapide et fortement ornementé devenu célèbre entre le milieu et la fin des années 1920, est souvent considéré comme un exemple de ragtime « sans élément réel de jazz », comme l’a expliqué James Richard Dossa, tout en n’ayant pas non plus été pleinement reconnu en tant que musique populaire par l’historiographie officielle (Dossa 1986 ; Riddle 1985). De plus, à l’instar de nombreuses autres pianistes de ragtime blanches, la carrière de Guilaroff a profondément changé lorsqu’elle est devenue mère et qu’elle s’est pour ainsi dire retirée de la performance publique rémunérée[7]. Bien qu’elle ait continué à jouer du piano à un niveau professionnel dans des contextes privés, semi-privés ou non rémunérés jusqu’à ce que les douleurs liées au développement de l’arthrite rhumatoïde l’en empêchent, sa contribution artistique n’est pas relayée par une présence dans l’histoire de la musique. Ainsi, la trajectoire professionnelle de Guilaroff, les particularités de son style pianistique, ainsi que certains paramètres identitaires ont eu un impact déterminant sur sa quasi-exclusion des récits historiques existants[8].
Ilene Bourne
Une situation comparable s’observe en ce qui concerne la contribution musicale de la pianiste Ilene Bourne — qui était pourtant encensée par ses pairs — et la production contemporaine de savoirs sur cette artiste, presque inexistante. Née à Montréal le 28 novembre 1914, aînée de six enfants de parents qui avaient émigré de la Barbade en 1909, Bourne a travaillé comme pianiste dans les cabarets et comme organiste d’église tout au long de son parcours professionnel. À partir du début des années 1930 et jusqu’à sa mort subite le 1er avril 1970, elle accompagne des artistes de variétés au Rockhead’s Paradise, au Café Saint-Michel, au Montmartre et au Café de l’Est, notamment, soit tant dans les cabarets du quartier Saint-Antoine — où la majorité des artistes de couleur travaillaient — que dans ceux situés plus à l’est, autour de la rue Saint-Laurent, où l’on retrouvait une plus forte concentration de musiciens francophones. Au cours des années 1930 et 1940, elle collabore ainsi avec des musiciens jazz incontournables de l’historiographie du jazz québécois tels que Chuck Peterson, Allan Wellman, Herb Johnson, Butch Watanabe, Dennis Brown et Steep Wade (avant qu’il ne passe lui-même au piano), et elle dirige même son propre groupe au Monte-Carlo dans la seconde moitié des années 1930. Bourne fait également des tournées dans les régions rurales du Québec, puis accompagnera un orchestre de jazz aux États-Unis, possiblement l’orchestre de Max Fidler au club Powatan de la ville de Détroit[9]. Comme se le remémore le tromboniste Herb Johnson dans une entrevue avec John Gilmore, l’auteur de Swinging in Paradise: The Story of Jazz in Montreal (1988),
Ilene Bourne, elle était vraiment quelqu’un ! Si on arrivait à trouver une chanson qu’elle ne savait pas jouer, elle était prête à payer ! […] Elle avait la main gauche la plus puissante que l’on avait jamais entendue ; on n’avait pas besoin de bassiste quand on jouait avec Ilene[10]
Johnson 1981
Le batteur Dennis Brown affirme quant à lui qu’« elle connaissait tous les standards qui aient jamais été écrits[11] » (Brown 1983). Et selon le pianiste Oliver Jones :
Elle avait vraiment une mémoire phénoménale. Elle connaissait les paroles, les couplets, elle avait une mémoire photographique […] Si quelqu’un voulait connaître le couplet d’une chanson, même d’une chanson peu connue, [on lui disait toujours :] « Demande à Ilene ! » […] C’était vraiment une formidable accompagnatrice[12]
Miller 1996 ; Jones 2016
Pourtant, comme c’est le cas pour les autres instrumentistes de jazz noires basées à Montréal à cette époque telles que Gertrude Waters, Nina Brown et le trio des Soeurs Spencer, aucun enregistrement audio n’a à ce jour refait surface pour témoigner de sa pratique musicale — un état de fait qui a beaucoup plus à voir avec les paramètres genrés et racisés de l’accès à la phonographie qu’aux qualités d’instrumentistes de ces femmes défendues par leurs pairs et documentées dans des sources d’archives telles que la presse afro-américaine. Olga Spencer, par exemple, a joué de l’accordéon, chanté et dansé avec son groupe, les Lucky Seven, dans le circuit de camps du United Service Organizations dans le Pacifique Sud (Hawaï, Philippines, Indonésie, Australie, Japon) pendant la Seconde Guerre mondiale, un groupe qui incluait notamment sa soeur Thelma à la guitare, sa nièce Natalie à la trompette, et le pianiste de jazz de Kansas City Lawrence « 88 Keys » Keyes, sans qu’aucun enregistrement ne soit jamais réalisé en studio[13]. (Spencer 1993-1994 ; Ramirez 1993-1994). Dans un questionnaire rédigé par John Gilmore à l’intention du frère d’Ilene Bourne, à la question « Quelles difficultés a-t-elle pu rencontrer en tant que femme dans le jazz à Montréal ? », ce dernier répond, laconiquement : « Elle a dû en avoir, à la fois en tant que femme et en tant que Noire[14] » (Bourne s. d.). S’il nous faudra attendre de pouvoir consulter le reste des archives la concernant avant d’en connaître le détail, les implications profondes que ces difficultés ont eues sur la construction d’archives, sur l’historiographie et sur le potentiel de recherche sur les instrumentistes noires montréalaises sont déjà évidentes. Un écart important persiste, d’une part, entre l’encensement de Bourne et des Soeurs Spencer par leurs pairs et leur présence marquée dans la presse afro-américaine de l’époque et, d’autre part, la production contemporaine de savoirs sur ces artistes.
De l’interprétation à l’enseignement
L’enseignement était aussi une des formes bien connues de la participation des femmes à la scène jazz montréalaise. L’enseignante de piano Daisy Peterson Sweeney et les enseignantes de danse Olga Spencer Foderingham et Ethel Bruneau font ainsi partie des plus grandes absentes de nos histoires nationales, tous récits confondus. Il existe un dicton anglophone populaire, fréquemment utilisé de manière désobligeante envers les enseignant·e·s de musique, selon lequel ce sont souvent ceux qui ne savent pas jouer d’un instrument qui finissent par l’enseigner[15]. Dans le cas présent, ce dicton illustre surtout le risque de présenter à tort comme de l’amateurisme des stratégies, comme le fait de donner la priorité à l’enseignement plutôt qu’à l’interprétation par exemple, que ces femmes ont déployé pour prendre part à la scène musicale populaire en tant que femmes et souvent aussi en tant que mères (Green 1997 ; Lefebvre 1991, 68-70). Pour bien des femmes qui étaient douées sur les plans artistique et technique à un instrument de musique comme l’étaient Spencer (accordéon), Sweeney (piano) et Bruneau (dans la mesure où le soulier à claquette constitue un instrument de percussion sur la scène du spectacle de variétés), la volonté de se positionner au centre d’un réseau de « care » d’enfants (leurs descendants biologiques comme les autres enfants de leur communauté) compliquait grandement la perspective d’une carrière internationale d’interprète jazz, comme celle du frère de Sweeney, le réputé pianiste Oscar Peterson. Il y avait donc une tension à l’oeuvre entre le désir de participer activement au milieu musical populaire et celui de « prendre soin » de la génération émergente, ce que Spencer, Sweeney et Bruneau réconciliaient en exerçant une forme de pédagogie à la fois musicale et sociale. Pour la communauté noire de Montréal, ces femmes faisaient bien davantage qu’exceller dans leur art : elles offraient à leurs élèves un moyen de gagner leur vie en dehors d’une économie traditionnelle restrictive pour la population montréalaise de couleur, multipliant ainsi le pouvoir d’achat d’une communauté défavorisée[16]. En outre, dans le contexte nord-américain de l’époque, où le corps des hommes et des femmes de couleur était défini principalement en fonction de sa valeur en tant que ressource « exploitable », la musique et la danse jazz offraient une échappatoire non seulement inspirante sur le plan créatif, mais surtout viable sur le plan économique, aux emplois serviles auxquels était restreinte cette population en majorité employée comme domestiques (pour les femmes) ou comme portiers à bord des trains (pour les hommes)[17].
Oliver Jones s’est prononcé à plusieurs reprises sur l’influence que Sweeney a eue non seulement sur son jeu pianistique, mais plus largement sur son développement en tant qu’artiste et en tant que citoyen. La discipline et l’indépendance des mains que Sweeney lui a enseignées étaient essentielles pour « atteindre ce niveau, pour que les pianistes de jazz atteignent un certain niveau », explique-t-il : « Daisy avait l’habitude de dire qu’Oscar [Peterson] et moi étions ses deux seuls élèves qui avaient cette attaque[18] » (Jones 2016). Mais elle enseignait aussi à ses élèves l’importance de la détermination[19], certaines notions de soins personnels (« self-care ») et, plus largement, elle renforçait les notions de respectabilité et d’autosuffisance chez ses élèves (Sweeney 1999 ; 2012). Selon l’habile formulation de Jones : « Elle avait une bonne oreille pour savoir ce qu’il fallait faire afin d’élever notre condition[20] » (Jones 2016). De l’avis de sa fille Sylvia, pour ses élèves de piano Sweeney « était comme une mère de substitution » :
Elle pouvait dire à un enfant de ne pas revenir [au Negro Community Center] s’il ne s’était pas préalablement lavé. Et à la fin de l’année, l’enfant recevait une bourse [donnant accès à des leçons privées] [...] Daisy pensait que tous les enfants devraient avoir de la musique dans leur vie. Elle était enseignante, mais aussi une sorte de travailleuse sociale de la musique. Les enfants réorientaient leurs vies sur son banc de piano. Elle gardait les enfants en dehors de la rue. J’en ai vu, des cas, les uns après les autres[21]
Sweeney 2016
Les enseignantes jouaient un rôle crucial non seulement dans le développement d’une scène jazz à Montréal, en formant des artistes qui ont contribué au rayonnement international du Québec tels qu’Oscar Peterson et Oliver Jones, mais aussi en faisant la promotion de l’autosuffisance économique des citoyens vivant dans ce quartier urbain défavorisé. Et ce même si, selon les paroles de Sweeney, elle « ne jouait pas de jazz, et ne l’enseignait pas non plus[22] » (Sweeney 1999).
Entre la danse de variétés et le développement d’une scène jazz au Québec
Outre le piano et l’enseignement, le chant et la danse étaient les manifestations artistiques auxquelles les femmes contribuaient le plus fréquemment dans les cultures jazz de la première moitié du xxe siècle. La presse montréalaise des années 1930 confirme bien le rôle central de l’érotisme du corps des femmes de couleur dans la promotion des spectacles de jazz du quartier Saint-Antoine, ce corps étant mis en valeur d’abord à titre d’attrait publicitaire. Au Connie’s Inn, au début des années 1930 (à l’époque où l’orchestre de Myron Sutton y était hôte), ce sont les corps dansants de femmes noires, quasi ou complètement nus, qui occupent la majeure partie de l’espace publicitaire (voir Figure 1). La première chose qui attire l’oeil sur les publicités du Montmartre est aussi une femme de couleur légèrement vêtue ; la plus petite police de caractères sur la page est réservée à une indication mentionnant l’orchestre swing de Mynie [sic] Sutton (voir Figure 2). Il est important de noter ici que les danseuses de variétés étaient souvent employées aussi comme chanteuses. Bernice Jordan (Whims), née le 25 mars 1918 dans le quartier Saint-Henri à Montréal, confirme dans une entrevue réalisée dans les années 1990 pour l’Office national du film du Canada qu’elle chantait régulièrement avec l’orchestre de Myron Sutton, mais que les photos officielles du groupe l’excluaient systématiquement. Elle explique :
Je ne me souviens pas avoir vu de photos de moi avec eux. Sur les photos, on voyait seulement tous les musiciens debout. Je pense que j’en ai vu une à l’époque, ils en ont pris une, et puis [elle fait une pause]. Mynie Sutton l’avait mais [elle fait une pause]. Maintenant, quand je vois ce qui est annoncé, ça montre toujours juste les hommes. Mais j’étais la chanteuse avec eux[23]
Jordan 1993-1994
Bien que Jordan ait travaillé comme chanteuse et danseuse de variétés dans tous les grands cabarets accessibles aux artistes noirs de Montréal et qu’elle ait fait des tournées dans diverses régions du Québec (Trois-Rivières, Shawinigan, Deux-Montagnes, Québec, parmi d’autres) et de l’Ontario (notamment à North Bay), elle a presque entièrement disparu des récits historiques officiels, comme la très grande majorité de ses collègues aux parcours professionnels similaires[24].
Femmes dans le jazz québécois : considérations historiographiques
Ce n’est donc pas à l’absence de femmes dans les milieux jazz du Montréal de l’entre-deux-guerres ni à leur absence dans les archives qu’il faut attribuer la méconnaissance de leur importance dans le développement du genre, et plus largement d’une économie du tourisme de divertissement au Québec. La source de leur exclusion historiographique se trouve plutôt dans la dévalorisation de l’enseignement par rapport à l’interprétation et à la composition (comme on l’observe dans le cas de Daisy Peterson Sweeney comparativement à son frère Oscar Peterson), ainsi que dans la dévalorisation de la performance féminine en contexte domestique ou non-rémunéré (comme c’est le cas pour la majeure partie de la contribution musicale de Vera Guilaroff après 1937). En outre, les difficultés d’accès aux studios d’enregistrement auxquelles se heurtaient les instrumentistes noires (les Soeurs Spencer ont eu une carrière internationale sans qu’aucun enregistrement audio professionnel d’elles n’ait refait surface), les processus de marginalisation du chant jazz (comme dans le cas de Bernice Jordan avec l’orchestre de Myron Sutton), ainsi qu’une forme d’idéalisation du jazz basée sur la séparation du « son » jazz — à cette époque encore majoritairement produit par des hommes — du corps des danseuses de variétés, tout cela a mené à occulter la contribution des femmes. Dans tous les cas mentionnés ci-dessus, l’exclusion du récit historique est moins liée à l’absence de femmes dans le passé ou dans les archives qu’elle n’est la conséquence directe des pressions sociales liées au genre, à la race et à la classe qui ont canalisé les parcours de ces femmes vers les marges de l’historiographie. Ainsi, les hiérarchies de genre, de race et de classe continuent donc d’agir comme un puissant tamis entre le récit historique, les archives, et l’infiniment plus vaste passé musical du Québec.
Appendices
Note biographique
Vanessa Blais-Tremblay est titulaire d’un doctorat en musicologie et d’une spécialisation en études du genre et des femmes de l’Université McGill. Ses recherches portent sur la musique et la vie musicale des femmes, en particulier sur les relations entre identité, esthétique et genre, et sur les processus de légitimation culturelle — une approche se situant au confluent de la sociomusicologie et de l’historiographie. Plusieurs articles issus de sa thèse sont à paraître en 2019 et en 2020, notamment dans Jazz and Culture, Women and Music : A Journal of Gender and Culture, et Recherches Féministes.
Notes
-
[*]
Cet article est issu d’une communication présentée en 2016 dans le cadre du concours de conférences de la série « Présences de la musique » de la Société québécoise de recherche en musique. J’aimerais remercier Marie-Thérèse Lefebvre pour sa grande générosité et son soutien précieux lors de la rédaction de cet article.
-
[1]
« I saw Johnny Hodges come in here and blow my horn. I saw that guy puff jaws come in here. Duke Ellington came in and sat behind the bar ». Toutes les traductions de citations de l’anglais vers le français sont les miennes.
-
[2]
« I played in practically every club in the city of Montreal since I came here in 1935, and I tell you, you knew you were in showbiz when you were working at Rockhead’s Paradise or the Café St-Michel. It was like transporting yourself to Harlem ».
-
[3]
Voir entre autres : P. Bouliane 2018 ; Gilmore 1988 et 1989 ; Lam 1998 ; Miller 1997 ; Marrelli 2004 et 2013 ; Roquigny 2012.
-
[4]
Voir aussi Charpentier 1999 ; Cuccioletta 1997 ; Kuplowsky 2015 ; Palmer 2009 ; et Weintraub 1996.
-
[5]
Le Regent, inauguré le 4 mars 1916, était situé au coin de l’avenue du Parc et de la rue Laurier. Avec ses 1200 places assises, le théâtre était l’un des plus luxueux ayant été construits à l’extérieur des limites du centre-ville de Montréal. Voir Pelletier 2012.
-
[6]
Si l’expression « industrie du divertissement » peut avoir une connotation péjorative, elle est pleinement revendiquée dans ce cas-ci : les cabarets de l’entre-deux-guerres s’inscrivent dans l’industrie du divertissement en tant que lieux de spectacles et de commercialisation de la danse sociale.
-
[7]
Voir aussi Chamberlain 2001 ; Lindeman 1985 et 1999 ; Morath 1985 ; Pilkington 2000 ; Taylor 2008 ; Tjaden 2006.
-
[8]
Pour une version détaillée de cet argument, voir Blais-Tremblay 2020.
-
[9]
Répondant à un questionnaire que John Gilmore lui avait soumis, Maurice Bourne, le frère d’Ilene, mentionne une tournée aux États-Unis ; voir Maurice Bourne (s. d.). Le Detroit Free Press annonce une pianiste nommée « Ilene Moore », et ailleurs « Ilene Morey », avec l’orchestre de Max Fidler au Powatan de Détroit entre mars et mai 1935. L’auteur des articles fait de nombreuses fautes d’orthographe dans les prénoms et les noms des artistes, ce qui laisse à penser qu’il a aussi pu mal orthographier le nom de famille d’Ilene Bourne. Par exemple, il présente la pianiste précédente de l’ensemble comme étant tantôt « Kay », tantôt « Kate », et le chef d’orchestre est parfois appelé Max « Fiddler » plutôt que « Fidler ». L’orchestre de Max Fidler était un groupe blanc qui jouait du « sweet » jazz dans un club relativement haut de gamme, mais qui accueillait aussi des artistes noirs ainsi que des artistes de Montréal grâce à la voie ferroviaire. Entre août 1934 et juin 1935, Max Fidler a embauché au moins quatre pianistes différents·es, dont Henrietta Young, Kay/Kate Graham, Ilene Moore/Morey (possiblement Bourne) et Bill Lankin. Une Ilene Moray apparaît également à la station de radio WEXL en tant que pianiste entre juin et octobre 1934. Comme David Eng le précise sur la plateforme web multimédia Jazz Petite-Bourgogne, le nom d’Ilene Bourne était souvent mal orthographié, incluant « Eileen », « Borne » et « Moore ».
-
[10]
« Ilene Bourne, now she was somethin’ else again! If you could call a tune that she couldn’t play, she was ready to pay off […] she had the most powerful left hand you ever heard in your life, you didn’t need a bass player with her! ».
-
[11]
« She must have known every standard tune that was ever written ».
-
[12]
« She had the finest phenomenal memory. She knew the lyrics, the verses, she had a visual memory […]. Anytime anyone wanted to know the verse to a tune, these obscure tunes, “Get in touch with Ilene” […]. She was a very wonderful accompanist ».
-
[13]
Pour en connaître davantage sur la carrière du trio des Soeurs Spencer, voir Blais-Tremblay 2019b.
-
[14]
« She must have had some, both as a woman, and as a black ».
-
[15]
« Those who can’t play teach ».
-
[16]
À ce sujet, voir : Bertley 1982 ; Este 2004 ; Israel 1928 ; Nelson 2004 et 2010 ; Small et Thornhill 2008 ; Williams 1997 ; Winks 1997. Les danseurs Travis et Tanya Knights se sont aussi exprimés en ce sens le 26 janvier 2019 lors d’un événement célébrant la carrière d’Ethel Bruneau.
-
[17]
Voir Small et Thornhill 2008 ; Williams 1997. Parmi de nombreuses autres études qui documentent cet état de fait, je souligne en particulier celles de Jacqueline Jones (1985) et de Jayna Brown (2008).
-
[18]
« reach that level, for jazz pianists to reach a certain level […] Daisy used to say that Oscar and I were her only two students who had that attack ».
-
[19]
« You have to have a purpose in life », affirme-t-elle à plusieurs reprises dans ses entrevues réalisées avec Arlene Campbell. Voir Campbell 2012.
-
[20]
« She had an ear for what you needed to do to elevate your condition ».
-
[21]
« She was kind of like a surrogate mother. She would tell a kid not to come back if not clean, and by the end of the year the kid got a scholarship [...] Daisy thought all children should have music in their lives. She was a teacher, a social worker of music. Kids turned around their lives on her piano bench. She kept kids off the streets. I saw stories one after the other ».
-
[22]
« I don’t play jazz. I don’t teach it. No, I don’t teach it ». Pour une version détaillée de cet argument, voir Blais-Tremblay 2019b.
-
[23]
« I don’t remember seeing any pictures of myself, with them you know. Pictures were all of them, standing. I think I seen it at the time, they had a take, and then [she pauses]. Mynie Sutton had it but [she pauses]. Now when I see everything advertised it always shows just the men. But I was the girl singer with them ».
-
[24]
À ce sujet, voir Blais-Tremblay 2018b ; 2019a.
Bibliographie
- Annonces de diffusions radio de Vera Guilaroff/Miss Guilaroff/Vagabonds du piano/Piano Ramblers (1924-1960). Sur les ondes de CBC, CBF, CBLT, CBMT, CFCF, CHRC, CKAC, CKNC, CKOC, CKPC, CKTB-CRC, CRC Network, CRCM, WCR, WCX, WNAC, WXYZ, et dans le Daily Boston Globe, Detroit Free Press, La Presse (Montréal), Le bulletin des agriculteurs (Montréal), Le Globe/The Globe, L’illustration nouvelle (Montréal), The Baltimore Sun, The Irish Times, The Scotsman, Toronto Daily Star, entre le 15 février 1924 et le 2 décembre 1960.
- Detroit Free Press (1935). « Ilene Moore/Ilene Morey, Pianist », 1er, 8, 22, 29 mars ; 5 avril ; 17, 24, 31 mai, au Powatan Club.
- La Presse (1924). « Le Radio de la Presse », 15 février, Montréal, p. 17.
- La Presse (1926). Annonces de spectacles de la Fanfare Jazz, 6 décembre, Montréal, p. 20, 21, 29, 30.
- La Presse (1942). « Le club Kiwanis de Montréal au camp de Saint-Jérôme récemment », 17 janvier, Montréal, p. 37.
- Le Nouvelliste (1935). « Le théâtre Impérial présente les “Patterson Minstrels” aujourd’hui », 6 décembre, Trois-Rivières, p. 7.
- L’illustration nouvelle (1940). « Les Soeurs Spencer au Café Louis », 22 juin, Montréal, p. 10.
- New Journal and Guide (1945), Photo de Lawrence Keyes, 18 août, Norfolk (Virginia), p. A14.
- Tubbs, Vincent (1945). « Flo Robinso Shops on Tokyo’s Fifth Avenue: Prefers Sidewalk Shopping Tour in Rickshaw to Visiting Palace », The Afro-American, 22 décembre, Baltimore (Maryland), p. 8.
- The Afro-American (1945). « Five New USO Shows Alerted for Travel », 26 mai, Baltimore (Maryland).
- The Afro-American (1945). « USO Unit Passes Manila », 25 août, Baltimore (Maryland).
- The Afro-American (1949). « Montreal’s Rainbow Revue a Democratic Arts Group », 19 novembre, Baltimore (Maryland).
- The Chicago Defender (1946). « GIs Laud “Freddy and Flo:” Unit Quits Japan for European Theatre », 12 janvier, p. 14.
- The Chicago Defender (1946). « Jive Units Back from USO Shows Tour », 23 mars, p. 17.
- The Manchester Guardian (1937). Annonces de spectacles de Vera Guilaroff/Miss Guilaroff au Royaume-Uni, 11 septembre, p. 15.
- The Pittsburgh Courier (1945). « Dick Campbell’s USO Troupe Wows GIs at Service Club », 20 janvier, p. 20.
- The Stage (1937). Annonces de spectacles de Vera Guilaroff/Miss Guilaroff au Royaume-Uni, « The Variety Stage », London, Angleterre, 9 septembre, p. 3 ; 16 septembre, p. 2 ; 30 septembre, p. 3 ; 7 octobre, p. 3.
- Brown, Dennis (1983). Entrevue avec John Gilmore, enregistrée le 15 avril, Fonds John-Gilmore (P0004-11-0010), Archives de l’Université Concordia, Montréal, 1 disque compact.
- Brown, Mary (1993-1994). « Interview with Mary », [Enregistrement vidéo], entrevue avec Meilan Lam, Fonds Meilan-Lam (P0135-09-0004 [7111]), Archives de l’Université Concordia, Montréal, vidéocassette.
- Guilaroff, Vera (1963). Tribute to Willie Eckstein, enregistré le 27 mai au Her Majesty’s Theatre, Montréal, 1 disque compact. Gracieuseté de Jack Litchfield.
- Guilaroff, Vera (1964). Vera Guilaroff Recording Session, réalisée le 9 juin par James Kidd, CFCF Studio, Montréal, 1 disque compact. Gracieuseté de Jack Litchfield.
- Johnson, Herb (1981). Entrevue avec John Gilmore, enregistrée le 8 février, Fonds John-Gilmore (P0004-11-0026), Archives de l’Université Concordia, Montréal, 1 disque compact.
- Jones, Oliver (2016). Entrevue avec l’auteure, 29 septembre, House of Jazz, Montréal.
- Jordan (Whims), Bernice (1993-1994). « Interview with Bernice », [Enregistrement vidéo], entrevue avec Meilan Lam, Fonds Meilan-Lam (P0135-09-0002 [7109]), Archives de l’Université Concordia, Montréal, vidéocassette.
- Ramirez, Natalie (1993-1994). « Interview with Natalie », [Enregistrement vidéo], entrevue avec Meilan Lam, Fonds Meilan-Lam (P0135-09-0007 [7116]), Archives de l’Université Concordia, Montréal, vidéocassette.
- Spencer (Foderingham), Olga (1993-1994). « Interview with Olga », [Enregistrement vidéo], entrevue avec Meilan Lam, Fonds Meilan-Lam (P0135-09-0006 [7115]), Archives de l’Université Concordia, Montréal, vidéocassette.
- Sutton, Myron (1981). Entrevue avec John Gilmore, enregistrée le 15 décembre,
- Fonds John-Gilmore (P0004-11-0064), Archives de l’Université Concordia, Montréal, 1 disque compact.
- Sweeney, Daisy Peterson (1999). « 20 ans de jazz. Entrevue avec Daisy Peterson Sweeney », entrevue avec Clodine Galipeau, réalisée le 23 novembre, Amérimage Spectra, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (P945, S1, PXX00-026 et P945, S1, PXX00-027), Vieux-Montréal, vidéocassette.
- Sweeney, Daisy Peterson (2012). Histoire orale retranscrite dans « Othermothering and Life Notations of Daisy Sweeney », Arlene Campbell, thèse de doctorat, Faculté d’éducation, Université York.
- Sweeney, Sylvia (2016). Entrevue avec l’auteure, 29 septembre, House of Jazz, Montréal.
- Bourne, Maurice (s. d.). « Questionnaire from John Gilmore on Ilene Bourne », Fonds John-Gilmore (P004/A1 1-027), Archives de l’Université Concordia, Montréal.
- Eng, David. « Burgundy Jazz: Life and Music in Little Burgundy », CBC Music, http://jazzpetitebourgognedoc.radio-canada.ca, consulté le 3 septembre 2017.
- « Ilene Bourne File » (P004/A1 1-027). Fonds John-Gilmore, Archives de l’Université Concordia, Montréal.
- Fonds John-Gilmore (P004/A1 1-027). Transcription d’une entrevue avec Maurice Bourne à propos de sa soeur Ilene Bourne, réalisée le 31 août 1982, dans « Ilene Bourne File », Archives de l’Université Concordia, Montréal.
- Fonds Meilan-Lam (HA1763, HA1767, HA1768, HA3127, HA3128). Photos, annonces et articles de journaux archivés dans le contexte de la production de Show Girls: Celebrating Montreal’s Legendary Black Jazz Scene (2008), Office national du film du Canada, Montréal, vidéocassette.
- Miller, Mark (1996). « Interview Notes on Ilene Bourne with Oliver Jones », entrevue réalisée le 21 novembre, communiquée à l’auteure le 8 juillet 2016.
- Bertley, June (1982). « The Role of the Black Community in Educating Blacks in Montreal, from 1910 to 1940. With Special Reference to Reverend Dr. Charles Humphrey », mémoire de maîtrise, Faculté d’éducation, Université McGill, Montréal.
- Blais-Tremblay, Vanessa (2018a). « Jazz, Gender, Historiography: A Case Study of the “Golden Age” of Jazz in Montreal (1925-1955) », thèse de doctorat, Faculté de musique, Université McGill, Montréal.
- Blais-Tremblay, Vanessa (2018b). Jazz Music and Theatrical Dance in Montreal’s Interwar Years, conférence enregistrée le 28 mars à l’école de musique Schulich, Université McGill, https://www.youtube.com/watch?v=OpKGCZUEEVE, consulté le 1er février 2019.
- Blais-Tremblay, Vanessa (2019a). « Gorgeous Girlies in Glittering Gyrations!!! Capital érotique et danse jazz dans l’entre-deux-guerres québécois », Recherches féministes, vol. 32, no 1 (à paraître).
- Blais-Tremblay, Vanessa (2019b). « “Where You Are Accepted, You Blossom:” Toward Care Ethics in Jazz Historiography », Jazz and Culture, vol. 2 (à paraître).
- Blais-Tremblay, Vanessa (2020). « Maple Leaf Rag in Maple Leaf Country: Impressing Jazz Upon Vera Guilaroff », Women and Music : A Journal of Gender and Culture, vol. 24 (à paraître).
- Brown, Jayna (2008). Babylon Girls: Black Women Performers and the Shaping of the Modern, Durham, Duke University Press.
- Buscatto, Marie P. (2007). Femmes du jazz : Musicalités, féminités, marginalités, Paris, Éditions du CNRS.
- Campbell, Arlene (2012). « Othermothering and Life Notations of Daisy Sweeney », thèse de doctorat, Faculté d’éducation, Université York, Toronto.
- Chamberlain, Charles (2001). « The Goodson Sisters: Women Pianists and the Function of Gender in the Jazz Age », Jazz Archivist: A Newsletter of the William Ransom Hogan Jazz Archive, vol. 15, p. 1-9.
- Charpentier, Marc (1999). « Broadway North: Musical Theatre in Montreal in the 1920s », thèse de doctorat, Faculté de théâtre, Université McGill, Montréal.
- Citron, Marcia J. (1993). Gender and the Musical Canon, New York, Cambridge University Press.
- Cuccioletta, Donald (1997). « The Américanité of Quebec Urban Popular Culture as Seen Through Burlesque Theater in Montreal, 1919-1939 », thèse de doctorat, Faculté d’histoire, Université du Québec à Montréal.
- Dossa, James Richard (1986). « The Novelty Piano Style of Zez Confrey », thèse de doctorat, Département de musique, Université Northwestern, Evanston.
- Este, David C. (2004). « The Black Church as a Social Welfare Institution: Union United Church and the Development of Montreal’s Black Community, 1907-1940 », Journal of Black Studies, vol. 35, no 1, septembre, p. 3-22.
- Gilmore, John (1988). Swinging in Paradise: The Story of Jazz in Montréal, Montréal, Véhicule Press.
- Gilmore, John (1989). Who’s Who of Jazz in Montreal: Ragtime to 1970, Montréal, Véhicule Press.
- Green, Lucy (1997). Music, Gender, and Education. New York, Cambridge University Press.
- Israel, Wilfred Emmerson (1928). « The Montreal Negro Community », mémoire de maîtrise, Faculté de sociologie, Université McGill, Montréal.
- Jones, Jacqueline (1985). Labor of Love, Labor of Sorrow: Black Women, Work, and the Family from Slavery to the Present. New York, Basic Books.
- Kidd, James (1966). « Vera Guilaroff: Princess of the Piano », Record Research, vol. 76, mai, p. 5-6.
- Kuplowsky, Adam (2015). « A Captivating “Open City:” The Production of Montreal as a “Wide-Open Town” and “Ville Ouverte” in the 1940s and ‘50s », mémoire de maîtrise, Départment d’histoire et d’études classiques, Université McGill, Montréal.
- Lam, Meilan (1998). Show Girls: Celebrating Montreal’s Legendary Black Jazz Scene, Montréal, Office national du film du Canada, vidéocassette.
- Lefebvre, Marie-Thérèse (1991). La création musicale des femmes au Québec, Montréal, Éditions du remue-ménage.
- Lindeman, Carolynn A. (1985). Women Composers of Ragtime: A Collection of Six Selected Rags by Women Composers, Byrn Mawr (PA), Theodore Presser Company.
- Lindeman, Carolynn A. (1999). « May Francis Aufderheide », dans Martha Furman Schleifer et Sylvia Glickman (dir.), Women Composers: Music Through the Ages, New York, G.K. Hall and Co, vol. 6.
- Marrelli, Nancy (2004). Stepping Out: The Golden Age of Montreal Night Clubs, 1925-1955, Montréal/Chicago, Véhicule Press/Independent Publishers Group.
- Marrelli, Nancy (2013). Burgundy Jazz: Little Burgundy and the Story of Montreal Jazz, Montréal, Véhicule Press/CatBird Productions. Livre numérique.
- McClary, Susan (2002) [1991]. Feminine Endings: Music, Gender, Sexuality, Minneapolis, University of Minnesota Press, 2e édition.
- Miller, Mark (1997). Such Melodious Racket: The Lost History of Jazz in Canada 1914-1949, Toronto, Mercury Press.
- Morath, Max (1985). « May Aufderheide and the Ragtime Women », dans John Edward Hasse (dir.), Ragtime: Its History, Composers, and Music, New York, Schirmer.
- Nelson, Charmaine (2004). Racism, Eh?: A Critical Inter-Disciplinary Anthology of Race and Racism in Canada, Concordia, Captus Press.
- Nelson, Charmaine (2010). Ebony Roots, Northern Soil: Perspectives on Blackness inCanada, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars.
- P. Bouliane, Sandria (2018). « “Le jazz devant ses juges” : Critique du jazz dans la presse montréalaise de l’entre-deux-guerres », dans Karine Cellard et Vincent Lambert (dir.), Espaces critiques. Écrire sur la littérature et les autres arts au Québec (1920-1960), Québec, Presses de l’Université Laval, p. 69-95.
- Palmer, Al (2009) [1950]. Montreal Confidential: The Low Down on the Big Town!, Montréal, Véhicule Press [Toronto, Export Publishing Enterprises].
- Pelletier, Louis (2012). « The Fellows Who Dress the Pictures: Montreal Film Exhibitors in the Days of Vertical Integration (1912-1952) », thèse de doctorat, Département de communication, Université Concordia, Montréal.
- Pilkington, Laura Ann (2000). « Three Ragtime Women in Socio-Historical Context: The Lives, Times and Music of May Aufderheide, Julia Lee Niebergall, and Adaline Shepherd », mémoire de maîtrise, Université de l’Oregon.
- Riddle, Ronald (1985). « Novelty Piano Music », dans John Edward Hasse (dir.), Ragtime: Its History, Composers, and Music, New York, Schirmer.
- Roquigny, Peggy (2012). « Les plaisirs de la danse à Montréal. Transformation d’un divertissement et de ses pratiques, 1870-1940 », thèse de doctorat, Département d’histoire, Université du Québec à Montréal.
- Rustin, Nichole T. et Sherrie Tucker (2008). Big Ears: Listening for Gender in Jazz Studies, Durham, Duke University Press.
- Small, Shirley et Esmeralda M. A. Thornhill (2008). « Harambec! Quebec Black Women Pulling Together », Journal of Black Studies, vol. 38, no 3, « Blacks in Canada: Retrospects, Introspects, Prospects », p. 427-442.
- Taylor, Jeffrey (2008). « With Lovie and Lil: Rediscovering Two Chicago Pianists of the 1920s », dans Nichole T. Rustin et Sherrie Tucker (dir.), Big Ears: Listening for Gender in Jazz Studies, Durham/London, Duke University Press, p. 48-63.
- Tjaden, Ted (2006). « Women Composers of Ragtime », Classic RagtimePiano, http://www.ragtimepiano.ca/rags/women.htm, consulté le 1er février 2019.
- Tucker, Sherrie (2000). Swing Shift: All-Girl Bands of the 1940s, Durham, Duke University Press.
- Weintraub, William (1996). City Unique: Montreal Days and Nights in the 1940s and 50s, Toronto, McClelland and Stewart.
- Williams, Dorothy (1997). The Road to Now: A History of Blacks in Montreal, Montréal, Véhicule Press.
- Winks, Robin W. (1997). Blacks in Canada: A History, Montréal, McGill-Queen’s University Press.