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Introduction

Les débats ces dernières années autour de la possibilité même d’une société civile globale se sont atténués au point où cette dernière semble être acceptée pour ce qu’elle est, à la fois réelle et incontournable. Les discussions n’en sont plus tant à se demander ce qui en est du modèle de l’État-nation, sa place et sa capacité à créer du lien social et de la solidarité politique, mais à aller au-delà de cette forme considérée par beaucoup comme étant désuète. Par exemple, nul ne paraît en mesure de contester aujourd’hui les dires de Fraser concernant la mise en place d’une « sphère publique transnationale » (2007) ; pas même Habermas, objet des critiques de Fraser, qui s’est récemment mis à parler de « constellation post-nationale » (1998). Ce monde, notre monde, est résolument cosmopolitique, globalisé ou transnationalisé, et cela paraît informer une sorte de consensus intellectuel (Featherstone et al., 2002 ; Pollock et al., 2000). Ce qui est moins sûr, par contre, est de savoir si les sciences sociales et la philosophie politique ont pris toute la mesure des bouleversements opérés. Qu’en est-il de la portée de cette autre « transformation structurale » de l’espace public pour encore une fois parler comme Habermas ? Est-elle seulement politique ou informe-t-elle quelque chose de plus profondément culturel ? À ce second niveau, s’agit-il d’imaginer une culture déjà mondialisée et qui serait sans creux ni aspérités ou faut-il s’en tenir plutôt à l’idée d’un monde en devenir, fragmenté, plein de ses propres disjonctions et interruptions ? Suivant cette dernière hypothèse, comme ce sera précisément le cas ici, il faudrait alors discerner des mondialisations, dont une entre autres serait la mondialisation de la réflexivité, c’est-à-dire de la conscience d’appartenir à un monde agité et fractionné (Beck, Giddens et Lash, 1994). Les discours, performances et actions qui protestent et contestent, remettent en question et problématisent se sont certainement modifiés au cours des dernières décennies et une grande partie de l’explication de ce phénomène tient justement dans ce jeu d’échelle ayant fait passer le cadre de référence à quelque chose de plus macro, extra, post ou trans-national. La transformation de la réflexivité suit en ce sens le processus de mondialisation comme elle participe de la complexification de ce nouveau monde.

L’objet plus particulier de ce texte est l’évolution récente de la critique et la manière dont elle se pense de plus en plus au travers de préoccupations à caractère culturel. Longtemps, peut-être trop d’ailleurs, la critique comme forme privilégiée de réflexivité a été pensée à l’intérieur des catégories fixées par la gauche — domination et idéologie versus activisme et militantisme, etc. Aujourd’hui, la compréhension sociologique de ce qu’est la critique est fortement en train de changer à la faveur entre autres d’une sorte de dédoublement dans lequel les pôles pratique et théorique commencent à se distancier. Du côté de la pratique, la sociologie se rend de plus en plus compte que critiquer est ce que les gens font, à savoir que la critique est une compétence, sinon un réel besoin : celui précisément de se plaindre, de s’opposer, de diverger d’opinion ou de conviction, etc. La critique est alors ce qui est transigée ou partagée socialement et ce qui vient, du coup, informer une certaine dramaturgie sociale et culturelle dans laquelle se sont autant le sens et les actions, les performances des acteurs et leurs conflits d’interprétation qui en sont teintés — ce qui renvoie par exemple à ce qui est fait en France autour de la sociologie pragmatique de la critique ou ce qui est développé aux États-Unis par le courant de la Cultural Pragmatics (Alexander, 2004, 2006 ; Alexander et al., 2006 ; Boltanski, 1990, 2009 ; Boltanski et Thevenot, 1991 ; Celikates, 2006 ; Roberge, 2009, 2011b). Est-ce que cela porte nécessairement atteinte à l’idée d’une théorie critique ? De son côté, et par rapport à ses propres prérogatives, force est de constater que ce type de théorisation se porte plutôt bien comme en font foi, par exemple, les travaux d’Axel Honneth et l’importance de leurs retombées (Honneth, 2000, 2006). La question est donc ailleurs, et d’abord dans la portée heuristique d’une opposition arrêtée entre pratique et théorie critique. C’est qu’aussitôt séparés les pôles se ressoudent : l’un comme l’autre participent d’une seule et même critique normative, axiologique. Toute critique, qu’elle émane des individus ou des sociologues, porte un jugement sur la signification de la réalité, sur ce que celle-ci devrait être ou devenir. Comme le notent Alexander et Jacobs, la critique est une interprétation du « mode subjonctif de la culture » (1998 : 28). Et c’est cela qui est le plus important, à savoir que la critique met en scène et met en jeu un sens, une définition de la culture dans sa capacité à incarner la solidarité, l’émancipation, les valeurs démocratiques, la vie bonne, etc. La culture apparaît alors comme une idée régulatrice — universelle, anthropologique ou cosmopolitique — autour de laquelle les uns et les autres s’accordent, certes, mais se désaccordent aussi très souvent.

Dans cette nouvelle « arène symbolique » (Cefaï, 1996) qu’est la société civile globale, la critique culturelle se démultiplie, se fractionne et se contredit même régulièrement. La critique culturelle, autrement dit, construit notre monde en le déconstruisant ; son principe d’unification en est un de complexification. Ainsi, il s’agira surtout dans ce qui va suivre d’une tentative pour cerner les contours toujours imprécis de cette critique ; ce qui devrait permettre l’exploration de trois lieux de son expression, de trois locus où vient se jouer son destin[1]. Le premier de ces locus est représenté par les mouvements sociaux et la manière dont ils réfléchissent et traduisent les problèmes publics. Sans trop anticiper, il s’agit tout de même de souligner que ceux-ci sont des acteurs privilégiés de la société civile et du travail critique qu’elle effectue sur elle-même. Les mouvements sociaux sont traversés de culture comme ils projettent au dehors des significations culturelles. Ce qu’il faudra alors comprendre, c’est la façon dont ces significations procèdent d’une structure oppositionnelle, comment, autrement dit, les mouvements se construisent dans leurs conflits avec des contre-mouvements — ce qui passera en outre par l’élaboration d’une théorie de la performance. Un second lieu où s’exprime la critique certainement intéressant à analyser correspond aux médiacultures entendues non seulement comme surface des événements médiatiques, mais aussi comme fond de significations et de représentations que ces mêmes médias agitent tantôt de manière inconsciente, tantôt délibérément (Maigret, 2009 ; Maigret et Macé, 2005). Les médiacultures sont en quelque sorte une scène d’apparition, une plate-forme où se transigent différents processus de légitimation-déligitimation, valorisation-dévalorisation, y compris ceux-là mêmes qui correspondent aux intérêts des nouveaux conglomérats médiatiques. Les médiacultures ne sont ainsi jamais tout à fait neutres ; leurs prismes sont constitutifs de ce qui est vu et de ce qui se transforme dans l’espace public et la société civile globalisée. Enfin, un troisième locus de la critique culturelle pouvant permettre d’en saisir le sens et l’évolution renvoie à une question humanitaire se déclinant comme double crise : l’idée de crise humanitaire proprement dite, d’une part, c’est-à-dire tous ces moments liminaires où la détresse humaine appelle l’empathie et, d’autre part, l’idée de l’humanitaire en crise, à savoir la dérive du spectaculaire et de l’instrumentalisation de l’aide. La critique culturelle oscille constamment entre ces deux pôles et c’est ce qui la rend finalement emblématique d’une ambiguïté plus fondamentale, à la fois foncière et en pleine transformation.

Les mouvements sociaux comme vecteur de la critique culturelle

Le présent article ne sera certes pas le premier à souligner la manière ou plutôt les multiples manières par lesquelles les mouvements sociaux sont toujoursaussi des mouvements culturels (Earl, 2004 ; Jaspers, 2009 ; Johnston et Klanderman, 1995 ; Della Porta, 1997[2]). S’il importe de ne pas verser dans la confusion des genres[3], il est tout de même indéniable que les termes du social et du culturel comme épithètes à « mouvement » renvoient l’un à l’autre ou qu’ils sont impensables l’un sans l’autre. Les mouvements sociaux sont transis de culture et ce, que ce soit pour ainsi dire en amont ou en aval, sur leur face interne ou externe. Ici, il s’agira surtout d’identifier un versant compréhensif et un autre davantage tourné vers l’action et l’action symbolique. Sur le premier versant, les mouvements sociaux ne cessent d’apparaître comme des hauts lieux de socialisation pour des individus qui trouvent là quelque chose comme un monde commun. Partage, apprentissage, prise de parole, recherche de réflexivité par rapport à l’expérience vécue, c’est tout cela — et souvent de façon assez peu différenciée — qui vient servir de terreau pour ce qui est à la fois le recrutement et la mobilisation et qui fait en sorte que les mouvements sociaux deviennent de ces milieux effervescents qui carburent autant à la passion qu’à la signification. À ce propos, la littérature scientifique anglo-saxonne de l’après-cultural turn est tout à fait digne de mention dans sa capacité à cerner la part des émotions (Collins, 2001 ; Goodwin et Jaspers 2004 ; Gould, 2001) ou encore celle qui revient aux narrations et histoires de vie dans ce processus (Davis, 2002 ; Fine, 1995 ; Polletta, 1998a et b). Les unes comme les autres contribuent à forger ce qui est autant l’expérience collective du mouvement que son identité même, à savoir autant donc sa propre réflexivité que son auto-compréhension (McDonald, 2004 ; Snow et MacAdam, 2000).

Sur un autre versant, il apparaît tout aussi fondamental de souligner que les mouvements sociaux sont constamment des producteurs d’actions symboliques. Dans un essai maintenant devenu célèbre, Jamison et Eyerman (1991) expliquent comment les mouvements agissent à titre de « pratique cognitive », comment, entre autres, ils sont capables d’imaginer ou d’inventer le changement social. Dans un même ordre d’idées, toute une littérature s’est développée aux États-Unis autour de la notion goffmanienne de cadre d’expérience (Benford, 1997 ; Benford et Snow, 2000). Cette frame analysis appliquée aux mouvements sociaux postule que ceux-ci opèrent une sélection dans les matériaux du monde ou qu’ils accentuent certains points de vue afin de rendre intelligible quelque chose comme l’« intérieur » du cadre au détriment de son extérieur. Pour peu, il s’agirait de dire que les mouvements sociaux viennent travailler ce qui, côté français, se donne à voir en termes de « définition de situation » (Cefaï, 1996, 2009) : qu’est-ce qui entre en ligne de compte ?, quelle est la nature des événements ?, qui sont les protagonistes ?, les bons, les méchants ?, quels sont leurs moyens ?, leurs buts ?, etc. Ce que toutes ces approches ont ainsi en commun, c’est de venir montrer que les mises en sens opérées par les mouvements sociaux ne sont jamais un reflet de la réalité ou une adéquation quelle qu’elle soit de la vérité. Chaque fois, l’action des mouvements sociaux est de produire des interprétations qui ne sont pas hors du monde, mais en lui, soit pour le refaire ou le défaire. Et c’est ce qui explique en outre les liens intrinsèques qui unissent interprétations et critique sociale et culturelle (Rebughini, 2010 ; Walzer, 1987). L’action symbolique des mouvements sociaux en est une qui dénonce et revendique, questionne et résiste. Soit le cas par exemple du mouvement altermondialiste. Celui-ci n’est certes pas à l’origine de la mondialisation mais y participe en traduisant ou en rendant visibles toute une série de phénomènes qui autrement resteraient difformes ou informes. Le statu quo s’apparente à un non-lieu, c’est-à-dire que le changement politico-économique constaté et décrié ne l’est que dans la mesure où il est contrasté avec une autre forme de changement ou, plus justement, avec un changement autre[4].

S’il y a donc un versant interne tourné vers l’auto-compréhension et un versant plus externe et préoccupé par l’action symbolique des mouvements, il doit également y avoir une ou des manières de les penser ensemble. Parmi celles-ci, il semble que la cultural pragmatics et la théorie de la performance qu’elle met de l’avant soient des plus prometteuses. Alexander, par exemple, identifie six éléments se retrouvant peu ou prou dans une performance : des représentations collectives d’arrière-fond, des acteurs sociaux, des moyens de production symbolique, une mise en scène, du pouvoir et des auditoires (2004). Ces éléments forment un ensemble, à savoir qu’ils fonctionnent en réseaux comme si les uns ne pouvaient se passer des autres. En effet, alors même que les représentations fournissent sens et compréhension, elles ne peuvent que s’incarner dans des rituels, des scripts qui sont lus ou actés par des individus ou des groupes — ici des mouvements sociaux dans ce qu’ils se manifestent de façon quasi théâtrale — en face d’autres individus ou groupes qui les reçoivent en tant que public spectateur[5]. Pour Alexander, le noeud dramatique est très puissant et c’est ce qui explique pourquoi, chez lui, la mesure de succès pour une performance est celle de sa capacité à « fusionner » ses éléments (2004). Une performance réussie est celle qui a du flow, qui se rend pour ainsi dire « naturellement » chez son auditoire. Et cela doit pouvoir s’appliquer à une multitude de cas dont, entre autres, celui des transformations de la société civile globalisée. Le problème avec la fusion, c’est qu’elle est plutôt rare et, dans les conditions actuelles de la mondialisation, force est de constater que la fragmentation accrue des auditoires et la multiplication des sociétés civiles au sein même de la société civile globalisée ne font que rendre les choses encore plus difficiles (Appadurai, 2001, 1990 ; Inglis, 2005). De même, il apparaît bien nécessaire de se rendre à l’idée que dans l’évolution présente, les ressources et pouvoirs des uns et des autres sont inégalement distribués. Les performances du mouvement altermondialiste, entre autres, ne se calculent que dans un jeu à somme nulle avec les performances de ses vis-à-vis qui, eux, pour des raisons de ressources idéologiques ou simplement financières, apparaissent beaucoup plus en contrôle de la situation.

Ce jeu à somme nulle est ce qui donne la clef de cela même qui est performé à travers la recherche bien incertaine et toujours à refaire de la fusion. De quoi s’agit-il ? Qu’est-ce qui est agité ou fait concrètement ? Comme le note Eyerman, la manière dont les mouvements sociaux bougent a tout à voir avec le fait de « performer l’opposition » (2006). Deux registres peuvent être distingués ici, même s’ils finissent par se recouper en plusieurs endroits. L’un, plus sémantique, renvoie à toutes ces expressions par lesquelles se trouve désigné le modus operandi des mouvements : démonstration, manifestation, protestation, etc. Les performances, celles de la rue par exemple, se construisent en contre, c’est-à-dire que l’action est une réaction. Pour peu, il s’agirait de décrire les mouvements sociaux dans les termes d’une négativité positive. L’autre registre, cette fois, a trait à cette dynamique tout à fait fondamentale entre mouvements et contre-mouvements (Mottl, 1980 ; Macé 2005). Le réflexe d’un sociologue est très souvent de penser qu’en face d’un quelconque mouvement se dresse la société ou l’État ; mais voilà, en face d’un mouvement s’en trouve surtout un autre. Soit l’exemple paradigmatique des mouvements pro-vie et pro-choix dans le débat sur l’avortement (Meyer et Staggenborg, 1996 ; Rohlinger, 2002). Non seulement chacune des positions est symboliquement surchargée et construite par rapport à son autre — selon les binômes liberté/aliénation, vie/mort, par exemple —, mais encore ces positions vivent dans un pur équilibre stratégique : ce qui est gagné par l’une est nécessairement perdu par l’autre. Ce qui se découvre ainsi, c’est un certain plan d’immanence dans lequel ce sont à la fois les mouvements les plus progressistes et les plus conservateurs qui se doivent d’être pris en compte. Pour le meilleur ou pour le pire, une sociologie analytique n’a pas à déterminer ce qu’est un mouvement social en fonction de son potentiel émancipateur ni davantage en fonction de critères moraux. De fait, il est toujours aussi important de saisir la portée critique de ce que les Américains appellent les « bad social movements » (Chambers et Kopstein, 2001). Le problème est donc ailleurs et, entre autres, dans la nature du terrain ou de l’« arène symbolique » sur laquelle s’affrontent mouvements et contre-mouvements. Et c’est ce qui est à voir maintenant.

Les médiacultures représentent-ils la plaque tournante de la critique culturelle ?

Poser la question du locus, du lieu où se déroulent les transactions entre mouvements et contre-mouvements, et plus généralement toutes les transactions critiques à propos du sens, a inévitablement pour effet de déplacer le centre de l’analyse vers les apories de l’espace public. D’abord, il s’agit de voir qu’au même titre que la critique culturelle est non neutre pour des raisons touchant à sa définition même, l’espace public est depuis toujours orienté moralement. Autrement dit, un espace public vierge ou vide qu’il suffirait dès lors de remplir ne peut exister. Et que ceci se trouve relayé par cette autre évidence — toute aporétique, encore une fois — selon laquelle l’espace public est nécessairement médiatisé ou médiatique, c’est-à-dire peuplé par les médias et opérationnalisé par ceux-ci. Les mouvements sociaux et les médias sont pris par exemple dans ce que Gamson et Wolfsfeld appellent un « système interactif » (1993) et que Neveu, en France, va décrire en termes de « jeu d’associés-rivaux » (Neveu, 1999 : 21 ; Gitlin, 1980 ; Champagne, 1991). Ils se trouvent d’abord associés puisque les mouvements ont constamment besoin des médias pour publiciser ce qu’ils sont et font ou pour s’attirer la sympathie du public et ce, alors même que les médias ont besoin des mouvements pour créer de la dramatisation sociale, entre autres à travers les manifestations. Or voilà, cette situation en cache mal une seconde beaucoup plus complexe dans laquelle ils sont aussi, sinon surtout, des protagonistes et des rivaux. Les médias « choisissent » leurs interlocuteurs — le plus souvent selon des logiques gauche-droite — en valorisant leurs projets ou en les déligitimisant au contraire. Plus fondamentalement, il faut saisir que les médias traduisent ce qu’ils voient et entendent dans un langage qui leur est propre compte tenu de leurs impératifs, à savoir qu’ils ont surtout tendance à personnaliser les choses et à oblitérer le fond des débats et, particulièrement, les causes historiques de tel ou tel problème[6]. C’est donc chaque fois, dans chaque étude de cas sur tel ou tel mouvement que la recherche se doit de faire la lumière sur cette négociation avec les médias. Ici, par contre, la démarche sera quelque peu différente. Elle consistera à partir de ce niveau des interactions entre mouvements et médias pour aller plus bas, plus profondément au sein même de la structure culturelle et significative de l’espace public. Les médias animent certes cet espace, mais ils reposent également sur toute une industrie culturelle et un ensemble de représentations qui apparaissent encore plus fondamentales. Cet autre niveau, c’est celui que des auteurs comme Maigret ou Macé nomment les « médiacultures[7] ».

En deçà des médias d’information et interagissant avec eux se trouvent le cinéma, la musique, la télévision, la littérature, etc. Les médiacultures entendues en ce sens renvoient à un ensemble plus vaste, en passe de structuration et de déstructuration perpétuelle, et qui touche à la production de répertoires d’images, de narratifs, de symboles rendant possible la compréhension du monde et donc la capacité d’action sur celui-ci. Dans la littérature scientifique, et pour paradoxal que cela puisse paraître, c’est principalement la théorie critique qui fait aujourd’hui figure d’interprétation classique ou traditionnelle à ce sujet (Horkheimer, 1996). Chez Adorno, par exemple, l’industrie culturelle de l’après-guerre exerce un profond contrôle sur une culture de masse pensée sous le double signe de la distraction et de l’aliénation (2003). Cette culture n’interagit pas dès lors avec la sphère publique, sauf à venir la vider de son sens. Et c’est là justement le problème. Nombre d’études plus récentes tendent à montrer que la culture populaire demeure malgré tout un « agent massif de socialité » (Jacobs, 2007) en plus de se présenter comme une source de politisation et de critique. En d’autres termes, il ne suffit pas de dénoncer la stupidité réelle de bien des produits culturels que de voir qu’à leur côté il en existe bien d’autres fort intelligents et créatifs (Thorburn, 1987). La télévision, par exemple, offre des représentations fictives de la quotidienneté de gens ou de groupes marginalisés — minorités sexuelles ou ethniques — qui autrement peineraient à trouver un auditoire aussi large. La télévision offre également des satires politiques allant tout à fait à l’encontre des pouvoirs établis ; ce qui se voit maintenant aux États-Unis dans le Daily Show ou le Colbert Report, entre autres. Il s’agit de construire un diagnostic plus nuancé de l’industrie culturelle ; ce qui passe, en outre, par la réévaluation d’une autre thèse en vogue : celle de l’impérialisme culturel et de l’américanisation de la culture. Il ne sert à rien de nier cette tendance à l’homogénéisation, mais encore faut-il reconnaître que cette logique n’est pas la seule à l’oeuvre. Comme le note Appadurai, « la nouvelle économie culturelle globale se doit d’être comprise comme un ordre complexe, empilé et disjoint qui ne peut plus être compris dans les termes des modèles centre-périphérie existants » (1990 : 296). La nouveauté, c’est le conflit entre homogénéisation et hétérogénisation, c’est-à-dire tout à la fois le va-et-vient, la reprise, la réadaptation et le re-travail dans différents contextes locaux[8]. Et là-dessus, ce ne sont certainement pas les exemples qui manquent : créolisation et fusion de la cuisine (Inglis, 2005) et de la littérature mondiale (Griswold, 1987), hispanisation de la télévision américaine (Ben Amor-Mathieu, 2000 ; Macé, 2005), etc.

De la question de la production des médiacultures, via la mondialisation, à celle de leur réception, il n’y a bien sûr qu’un pas. Ici, c’est principalement la grande famille des Cultural Studies et des études en communication qui fait figure de pionnière — même si, il est vrai, certains ont eu parfois tendance à surestimer la force de « résistance » et de « subversion » des publics[9]. L’argument général est à dire que la consommation de biens culturels ne relève pas d’une quelconque passivité, mais qu’elle est en soi de l’ordre de l’activité. Quelque chose est construit, une relation dialogique s’installe, une interprétation se met en branle, etc. Dans leurs fameuses études sur Dallas, Ang (1985), d’un côté, et Libes et Katz (1990), de l’autre, ont réussi à démontrer que l’homogénéisation et la captivité des auditeurs faisaient plutôt place à une contextualisation et une mise en relation avec les expériences vécues. Entre autres, les auditeurs réagissent en fonction de leur sexe et de leur nationalité en sorte que les identifications avec tel ou tel personnage demeurent profondément variables et contingentes. Dans la même lignée — bien que de manière peut-être encore plus percutante puisque hautement contre-intuitive —, Bielby et Bielby se sont intéressés aux fans des soap operas d’après-midi pour découvrir qu’ils évoluent au sein d’une « culture participative » dans laquelle tout est négocié, y compris l’autonomie relative des uns et des autres (2004). Les auditeurs de ce type d’émission sont des passionnés qui communiquent entre eux ou avec des publications spécialisées, mais également et directement avec les producteurs de ces émissions par l’entremise du courrier. La question en jeu se trouve toujours être celle de la « propriété du savoir expert » : qui porte un jugement légitime ?, qui a autorité ?, qui, finalement, est le détenteur moral de l’émission et de son évolution fleuve[10] ? Il y a là un conflit d’interprétations qui non seulement montre des capacités critiques importantes, mais aussi des formes d’engagement qu’il ne faudrait pas négliger — et encore moins mépriser. Ces capacités et ces formes doivent plutôt inciter à prendre ses distances avec une théorie ou une méta-théorie critique et à se rapprocher de l’action concrète des auditoires et de ce que pourrait être, dès lors, une sociologie culturelle et pragmatique de la critique.

Pour dire la même chose encore autrement, c’est ce type de régime d’engagement et d’action au sein même des rapports avec les médiacultures qui donne à penser ces dernières en tant que « forum culturel » (Newcomb et Hirsh, 1983). La négociation du sens se trouve jusque dans les moindres détails ; et la virulence de certains commentaires ou de certaines critiques ici et là est surtout le signe de phénomènes plus profonds et importants. En effet, il faut voir que cette idée de forum demeure dans la lignée de cette autre idée d’« arène symbolique » évoquée ci-haut, à savoir que l’une comme l’autre ont pour tâche de montrer les logiques de légitimation, de disqualification et les luttes pour la reconnaissance à l’oeuvre (Becker, 2008 ; Bourdieu, 1983 ; Honneth, 2000 ; Ricoeur, 2004). À terme, et de l’intérieur, ce sont ces luttes qui viennent informer des changements à la fois fondamentaux et structuraux de l’espace public comme lieu et forme de la démocratie — dans ce qui est dès lors à la fois une continuation et une modification de la célèbre thèse habermassienne[11]. Les transformations contemporaines sont profondes et lourdes de sens, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, dans l’espace public national et international. C’est que dans un nombre presque incalculable d’endroits, la critique culturelle se perçoit chaque jour davantage à travers l’image de sa propre crise (Berger, 1998 ; Hohendahl, 1982 ; McDonald, 2007). Les discours alarmistes portent tour à tour sur la perte d’influence des grandes institutions journalistiques, l’accroissement-appauvrissement des lieux de discussion sur internet, la commercialisation de la critique à travers la promotion culturelle et l’industrie des relations publiques, etc. Tout cela existe bien sûr et doit bel et bien être pris en considération. Par contre, il doit sans doute s’agir de proposer une interprétation plus nuancée de cette même crise et de sa signification. La montée des sites de discussion et de critiques culturelles sur internet, par exemple, n’a-t-elle pas un potentiel de démocratisation par l’implication même de ses participants ? En abaissant entre autres la frontière entre experts et profanes, entre professionnels et amateurs, cette nouvelle plateforme s’inscrit pour beaucoup dans une logique de renégociation du pouvoir et de la légitimité (Roberge, 2011b). C’est donc plus vers une logique de décomposition-recomposition de la critique culturelle que tend l’analyse ; ce qui est également une manière de penser la désinstitutionnalisation-réinstitutionnalisation fluctuante de ce qui serait, du coup et plus largement, quelque chose comme une démocratisation paradoxale.

Crise humanitaire et humanitaire en crise : une illustration de la double nature de la critique culturelle

Dans tout ce qui peut rendre la société civile globale à elle-même, la question humanitaire est très certainement des plus importantes et récurrentes. Tout se passe, en effet, comme si l’une était désormais devenue synonyme de l’autre : la réflexivité et la conscience d’appartenir à ce monde globalisé allant de pair avec les problèmes et crises ne manquant jamais de ressurgir ici et là. Cette question de l’humanitaire est même ce qui incarne le mieux aujourd’hui tout ce pan de ce qui constitue pour ainsi dire l’événementialité de la société civile globale[12]. Il s’agit d’une question liminaire au sens de Turner (1974), c’est-à-dire que les troubles qu’elle apporte marquent l’émergence d’une rupture impossible à ignorer dans la reproduction d’une certaine quotidienneté. Il y a irruption de l’événement, désordre et appel à une action pour contenir ce dernier. Dans le langage ordinaire, l’accent est bien mis sur la notion de « crise ». Or une crise, très justement, a cette capacité d’aller chercher les éléments les plus fondamentaux d’un groupe, sa culture, son identité, son sens de la solidarité, etc. Et c’est là tout le problème. Au fondement du lien social se trouve une ambiguïté encore plus fondamentale et qui trouve en outre à s’exprimer dans une certaine réversibilité de la crise humanitaire et de l’humanitaire en crise.

Ce qui relie le tremblement de terre haïtien et le tsunami de 2004 au Darfour et autres guerres civiles, c’est d’abord le rôle que jouent les émotions dans la réaction des publics de la société civile globale. Arquembourg discute à ce sujet de l’émergence d’une « sensibilité mondiale » (2006). Les divers publics réagissent spontanément et même davantage puisqu’ils semblent vouloir attribuer à cette spontanéité quelque chose comme une valeur en soi. Indignation, dénonciation et compassion sont intrinsèquement liées ici en renvoyant chaque fois à l’expérience d’un choc moral pour les uns, lui-même adossé à la réalité des autres en tant que destin affublé d’une injustice profonde — toute divine ou naturelle qu’elle soit. Les crises humanitaires, en ce sens, viennent construire des ponts qui relèvent d’un rapport de concernement et de solidarité. Dans un livre récent intitulé The Work of Global Justice, Kurasawa parle de cette solidarité au travers des crises touchant de près ou de loin aux droits de l’homme comme d’un travail social se devant de faire émerger un « cosmopolitisme critique » (2007 : 194-210). Ceci dit, l’auteur ne se fait pas d’illusion quant au contenu réel de ce dernier et c’est pourquoi il ne se range ni dans le camp des optimistes ni dans celui des pessimistes. Encore une fois, il y a travail social. Et c’est ce qui explique pourquoi l’analyse sociologique doit précéder toute digression de l’ordre de la philosophie politique. De fait, qui sont ceux qui portent à bout de bras cette solidarité en devenir et à refaire ? Qui façonne la sensibilité des uns et des autres dans la société civile globale ? Plusieurs réponses pourraient bien sûr être tentées, mais parmi celles-ci il semble presque impossible de ne pas mentionner le rôle des mouvements sociaux et de leurs organisations — dans lesquels se trouveraient inclus les mouvements et organisations diasporiques (Ryfman, 2008 ; Stammers, 1999). Ceux-ci sont très souvent les porteurs à la fois des biens et des messages, à savoir des objets, des argents et des significations. Les mouvements sociaux prennent ainsi en charge les crises humanitaires en leur donnant un nouvel écho ; comme peut le donner à voir par ailleurs l’exemple emblématique des femmes de la Plaza de Mayo face à la dictature argentine (Jelin, 1994 ; Bosco, 2006). Aussi qu’il ne faudrait pas non plus sous-estimer le rôle des médias et des médiacultures. Ces dernières années ont vu un accroissement vertigineux de la capacité des groupes médiatiques à relayer des informations dans ce qui est dit être un temps réel. Mais est-ce que celui-ci renvoie nécessairement à la réalité du temps et des crises ? Poser la question, c’est au moins commencer à entrevoir le problème.

L’envers de la médaille, c’est l’humanitaire en crise. Des guerres aux famines, en passant par les catastrophes naturelles, il s’est institué un modèle de réponse ou de traitement qui prend pour beaucoup la forme de ce que Boltanski, à la suite de Arendt, appelle une « politique de la pitié » (1993). L’observation de la souffrance des victimes transforme cette souffrance en spectacle. Les uns sont voyeurs dans leur indignation même et malgré leurs bonnes intentions et le fait qu’ils puissent être tout à fait bien pensants. Les autres, c’est-à-dire les victimes justement, sont construites d’une manière à ce qu’elles apparaissent à la fois dépourvues et anonymes. Cette figure de la victime est alors fortement esthétisée et pour ainsi dire fictionnalisée ; elle participe d’une iconographie sensationnaliste dont l’exemple paradigmatique est l’enfant sahélien au ventre gonflé et au regard perdu (Mesnard, 2002). Il y a donc dramatisation au sens le plus général du terme et force est de constater que les médias y sont partie prenante, sinon qu’ils en sont les promoteurs privilégiés. Leur rapidité d’exécution et leur besoin d’audience sont ici assez peu compatibles avec leur rôle de vecteur de solidarité et de critique et assez peu compatibles, de même, avec l’idée de médiation politique et réflexive. Plutôt, la dramatisation des enjeux qu’ils favorisent est ce qui, paradoxalement, signe un certain désintérêt de la part des publics, une certaine apathie faisant en sorte que tout élan de générosité est vite passé. Et cela pointe en direction de l’autre grande crise de l’humanitaire : son instrumentalisation multiforme. Instrumentalisation politique, d’abord, dans la suite des échecs de la communauté internationale à venir en aide aux plus démunis — les millions de victimes rwandaises ou congolaises, en outre —, dans la corruption avérée de plusieurs des gouvernements prestataires d’aide et dans ce que d’aucuns pourraient appeler le détournement du regard qui fait en sorte que l’attention change selon l’évolution des intérêts stratégiques des grandes puissances (Ron, Ramos et Rodgers, 2006). Instrumentalisation de la part des organisations du mouvement ou de la mouvance humanitaire même, ensuite, dans la mesure où la technicisation de l’aide cache souvent à la fois des agendas bien précis et des valeurs que relativement universelles — celles, par exemple, des églises évangélistes américaines intervenues massivement en Haïti. La pluralité des instances crée des conflits dans les visions, les financements, les interventions et, de près en près, dans ce qui devient un champ concurrentiel de l’humanitaire. Les plus critiques, et parmi lesquels plusieurs issus du monde de l’humanitaire, diront dès lors qu’il y a « marché de la générosité » (Hours, 1998) ou « business humanitaire » (Rieff, 2004). Malaise profond.

Conclusion

Ce qui reste toujours fondamental ou inhérent au développement de la société civile globale, c’est sa capacité à se remettre en question et à douter d’elle-même. Il y a là quelque chose d’une idée normative, certes, mais également d’une idée fortement impliquée dans la pratique, c’est-à-dire dans ce que les gens font le plus concrètement du monde en ayant recours aux diverses formes possibles de critique culturelle. C’est en outre ce qui avait été signalé dès l’introduction comme argumentation principale : la réflexivité propre à la critique change et s’adapte en se mondialisant sans pour autant que cela vienne marquer une quelconque réduction de sa complexité. Bien au contraire. Remises en question et doutes radicalisés trouvent à s’exprimer au travers d’une critique culturelle elle-même conçue comme une multitude de discours tout aussi riches les uns que les autres et comme un ensemble de pratiques non pas tellement disparates que fortement reliées. La critique culturelle, autrement dit, est un monde de tensions, de désaccords et de conflits axiologiques. Et c’est ce qui explique pourquoi ses contours sont si imprécis, malléables, etc. Tout se joue ainsi dans ces déplacements de frontières petits ou grands, faisant en sorte qu’il soit possible de voir ou de comprendre certaines transformations pour le moins subtiles de l’espace public transnational ou de la société civile globalisée.

Dans ce qui précède, ce sont d’abord les mouvements sociaux qui sont apparus comme lieu ou, mieux, comme incarnation de l’action symbolique et de la critique entendues au sens large du terme. L’intérêt qu’il y a à analyser les mouvements sociaux tient à ce qu’ils respirent pour ainsi dire de la culture comme s’ils l’inhalaient et l’exultaient à la fois. Leurs performances sont toutes tournées vers la transformation axiologique du statu quo — celui de l’état actuel de la mondialisation, entre autres — et vers le fait de convaincre les auditoires du bien-fondé de cette transformation. Or, c’est là qu’ils rencontrent des difficultés et de la résistance, nommément d’autres forces sociales et en particulier d’autres mouvements sociaux. In fine, c’est même cette dynamique entre mouvements et contre-mouvements qui est très souvent indépassable. La tension ne se règle pas ; elle ne fait que se déplacer et se répercuter ailleurs. Entre autres, elle vient bouleverser et retravailler l’action des médias et, plus fondamentalement, ce qui est autant la production que la réception de la culture ou des médiacultures. Comme il a été vu, toute signification est en rapport tendu avec de multiples interprétations — à plus forte raison si elles sont globalisées. C’est ainsi qu’il n’est pas tant question aujourd’hui de faire une critique extérieure et théorique de la culture que de voir opérer en son sein même quelque chose comme une critique culturelle. La soi-disant crise de la critique s’en trouve dès lors modifiée : à travers l’utilisation des nouvelles technologies et à travers l’implication nouvelle des individus, il semble plutôt que la critique réponde à sa propre crise. L’équilibre est fortement instable, mais il y a équilibre. Ici encore donc, si la tension ne se règle pas, elle ne fait que se déplacer et se répercuter ailleurs. Aussi que, dans la suite du texte, c’est la question humanitaire qui est apparue comme étant plus qu’un exemple parmi d’autres. La société civile globale — à travers ses mouvements et ses médias — porte en elle-même ses propres capacités d’indignation et de dénonciation. Mais c’est le doute qui la rattrape et qui fait en sorte qu’émerge ici et là l’interprétation d’un humanitaire en crise. Tout se passe alors comme si la société civile avait au moins la capacité à se voir et à se savoir problématique. Et si justement la solution était également le problème ? Cela serait pour le moins paradoxal et critique.

Trois locus donc de la critique culturelle qui finissent tous par se recouper et pointer en direction d’une seule et même ambiguïté plus fondamentale qu’il faudrait dire être celle de la société civile globale en tant que telle. Celle-ci, en effet, ne semble pouvoir s’apparaître qu’à travers son propre tiraillement et à travers son propre manque d’unité. Fondamentalement, si la critique lui sert d’une forme de révélation, les vérités qu’elle fait apparaître sont à la fois obscures et mitigées. Et le pis dans toute cette histoire, c’est que prendre le problème sous l’angle de l’évolution ou des transformations récentes de la société civile globalisée ne fait aussi que déplacer le problème à une autre échelle. Aujourd’hui, ce que ces transformations donnent à penser correspond à une démocratisation paradoxale à l’intérieur de laquelle il n’y a pas forcément d’adéquation entre participation et délibération, quantité et qualité de la critique, rapidité d’accès et temps de la réflexion, etc. Qu’est-ce qui est positif et négatif dans cette nouvelle configuration de la critique culturelle finalement ? Est-ce positif qu’il y ait des critiques négatives et négatif qu’il y en ait de positives ? Est-ce que la mésentente est suffisante ou faudrait-il que la critique change réellement le monde pour lui accorder un quelconque poids ? Chose certaine, il semble que plus de critiques attirent encore plus de critiques dans une sorte de dialogue sans fin. C’est sans issue, semble-t-il ; ce qui n’est pas nécessairement bien, mais qui n’est pas franchement mal non plus.