Abstracts
Résumé
Le but de l’article est de déplacer les interrogations sur la crise du modèle de démocratisation en place depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Ce modèle est fondé sur une séparation de l’école et de la société. Ce qui était prôné comme une protection devient une perte de sens : les élèves d’origine populaire ne retrouvent pas leurs enjeux dans les « épreuves en papier » de l’école. Cette idée est illustrée par une analyse de la situation française et en particulier des résultats de la politique visant à amener 80 % d’une génération au niveau du baccalauréat. La croissance des résultats a été spectaculaire de 1985 à 1995. Depuis, la courbe flotte et tend même à décroître. Cette crise peut être interprétée dans un cadre plus large : le déclin de l’État-providence et la montée de l’État managérial. Celui-ci relève d’un nouveau modèle de démocratisation : plus de séparation entre le temps des études et le temps de la production, mais une formation tout au long de la vie ; une gouvernance en réseau qui fait une large place aux intérêts économiques... Paradoxalement, ce nouveau modèle qui correspond à la nouvelle organisation du capitalisme pourrait peut-être répondre plus adéquatement au désengagement des classes populaires que l’ancienne forme scolaire.
Abstract
The objective of this article is to refocus on the crisis of the democratization model set up after World War II. This model is based on the separation of education and society. What is acclaimed as a protection becomes a loss of meaning : students of working classes do not find their goals in the school ‘examinations on paper’. This idea is illustrated by an analysis of the French situation and more specifically the results of the policy implemented to bring 80 % of one generation to baccalaureate level. The improvement in the results rate was spectacular between 1985 and 1995. Since then the curve has leveled off and even tends to decline. This crisis can be interpreted in a wider framework : the decline of the Welfare State and the expansion of the Manager State. This pertains to a new model of democratization : a greater separation between the time for study and time for production, but with more further education throughout the professional career, a networking authority giving much space to economic needs... Paradoxically this new model that corresponds to the new organization of capitalism may possibly respond more adequately to working classes defaulting than the old scholastic form.
Resumen
El objetivo del artículo es desplazar las interrogaciones sobre la crisis del modelo de democratización existente desde el final de la Segunda Guerra Mundial. Este modelo está basado en una separación de la escuela y la sociedad. Lo que se preconizaba como una protección se convierte en una pérdida de sentido : los alumnos de origen popular no encuentran lo que les interesa en los “exámenes escritos” de la escuela. Esta idea está ilustrada por un análisis de la situación francesa y en particular de los resultados de la política destinados a conducir un 80 % de una generación al bachillerato. El crecimiento de los resultados fue espectacular de 1985 a 1995. Desde este tiempo, la curva fluctúa y tiende incluso a disminuir. Esta crisis puede interpretarse en un marco más amplio : la decadencia del Estado benefactor y la subida del Estado de gestión. Éste le sucede en el nuevo modelo de democratización : más separación entre el tiempo de los estudios y el tiempo de la producción, pero una formación a lo largo de la vida ; una gobernanza en red que da más lugar a los intereses económicos... Paradójicamente, este nuevo modelo que corresponde a la nueva organización del capitalismo podría quizá responder más adecuadamente a la falta de compromiso de las clases populares que la antigua forma escolar.
Appendices
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