Volume 74, Number 2-3, May–December 2022 Le bon pasteur : une métaphore parlante pour un leadership d’aujourd’hui ?
Table of contents (24 articles)
Le bon pasteur : une métaphore parlante pour un leadership d’aujourd’hui ?
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LIMINAIRE. LE BON PASTEUR, UNE MÉTAPHORE PARLANTE POUR UN LEADERSHIP D’AUJOURD’HUI ?
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SHEPHERDS, FATHERS, AND SHIPS: Ancient Greek Leadership Metaphors and Some Consequences
Joël Christensen
pp. 165–179
AbstractEN:
This paper applies Conceptual Metaphor Theory and Blending theory to explore the development of the phrase “people-eating king” across the background of cultural metaphors for leadership. First, I present a brief definition of the conceptual metaphor. Then I survey some primary metaphors for leadership in early Greek epic: the father-king, and the shepherd of the host. The investigation covers how various elements of each metaphor are activated in myth, creating an interconnection myths of Lykaon, who becomes a werewolf by eating people, Agamemnon, who sacrifices his own daughter, and Odysseus, who kills his own people. The stories around these leaders, I argue, emerge from anxieties about the consumptive potential of leadership through a convergence of separate conceptual metaphors.
FR:
Cet article utilise la théorie de la métaphore conceptuelle ainsi que celle du mélange conceptuel pour explorer la façon par laquelle l’image du « roi dévoreur de son peuple » s’est développée au fil du temps, à partir de l’ensemble des métaphores alors utilisées pour parler de leadership. Je présenterai d’abord ce qu’est une métaphore conceptuelle. J’examinerai ensuite quelques-unes des métaphores principales qu’on utilisait, pour parler de leadership, dans les premières épopées grecques : le roi-père et le berger des armées. L’enquête montrera comment différentes composantes de chacune de ces métaphores sont mobilisées dans la construction mythique, aboutissant au mythes interreliés de Lycaon qui devient un loup-garou en mangeant son peuple, Agamemnon qui sacrifie sa propre fille, et Ulysse qui tue ses propres sujets. Les histoires racontées au sujet de ces leaders émergent, selon moi, des angoisses créées par le caractère potentiellement dévorant des ambitions des leaders, à travers la convergence de métaphores conceptuelles auparavant distinctes.
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LEADERSHIP AS HERDING IN XENOPHON
Norman Sandridge and John Esposito
pp. 181–203
AbstractEN:
The purpose of this paper is not so much to critique what Michel Foucault has to say on the idea of leadership as a form of herding, so much as to posit a different solution to the problems of the image of the shepherd-as-leader, offered by the other famous philosopher-student of Socrates, Xenophon of Athens. We consider leadership as herding in Xenophon, in his several works, but particularly in his Cyropaedia (The Education of Cyrus), a fourth-century BCE prose work that purports to tell us about (i) the life of Cyrus II (“the Great”) from his childhood education in the Persian system to his death and (ii) the great realization of Cyrus’s life, which is to have established the world’s first multinational empire. The reason for our focus on this work is simple: the self-justifying apologia that opens the Cyropaedia casts this King of Persia as the most remarkable herdsman-of-humans to have ever lived.
FR:
L’objet de cet article n’est pas tant de critiquer ce que Michel Foucault a à dire sur l’idée de leadership comme forme d’élevage que de proposer une solution différente aux problèmes de l’image du leader comme gardien de troupeau, à savoir : celle que nous offre l’autre célèbre philosophe et élève de Socrate, Xénophon d’Athènes. Nous considérerons donc ici ce que Xénophon a à dire au sujet de l’idée d’envisager le leadership comme une forme de gardiennage de troupeau dans ses nombreux ouvrages, mais particulièrement dans sa Cyropédie (ou Éducation de Cyrus). Ce dernier ouvrage est une oeuvre en prose du IVe siècle avant notre ère, qui prétend raconter (i) la vie de Cyrus II (surnommé « le Grand ») depuis son enfance et son éducation dans le système perse jusqu’à sa mort et (ii) la grande réalisation de cette vie, qui est d’avoir établi le premier grand empire multinational du monde. La raison pour laquelle nous nous concentrons sur cette oeuvre est simple : l’apologie auto-justifiée qui ouvre la Cyropédie présente ce roi des Perses comme le plus remarquable berger d’êtres humains qui ait jamais existé.
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HOW DID JOSEPH BECOME THE SHEPHERD OF HIS BROTHERS?
Chi Ai Nguyen
pp. 205–222
AbstractEN:
Through a narrative reading of Genesis 37-50, we will follow Joseph’s journey in order to show how he became the shepherd of his brothers. At the beginning of the story, Joseph is seen as someone who “was shepherding his brothers,” an indication that anticipates the essential traits of his mission. In order to accomplish his mission, Joseph first needed to go beyond the boundaries of the sheepfold for which he was responsible. Indeed, being victim of his own flock, he took some detours (from being the favored son sent by the father to being a slave and a prisoner) before becoming the shepherd of his brothers in a new way and in a new context. His journey was extraordinary because he went to the peripheries in order to become the center, not only of his own family but also of Egypt. The purpose of our paper is to show how Joseph, by handling violence with tact, can be a model for those who take care of others in a challenging situation.
FR:
Cette lecture de l’histoire racontée aux chapitres 37-50 du livre de la Genèse se propose de retracer l’itinéraire vécu par Joseph en montrant comment il devint le berger de ses frères. C’est ainsi qu’est présenté Joseph dès le début, en anticipant les traits essentiels de ce qu’il deviendra de façon pleine et entière à la fin de l’histoire. Pour accomplir ce trajet de vie, Joseph a cependant besoin de dépasser les frontières du bercail dont il était responsable au début. Les péripéties à travers lesquelles ce dépassement s’accomplit incluent pour lui l’expérience de devenir victime de son propre troupeau (et de passer du statut de fils préféré de son père à celui d’esclave et de prisonnier), avant de pouvoir redevenir à nouveau le berger de ses frères, mais d’une façon nouvelle et dans un sens très différent. Ce parcours sort de l’ordinaire puisque Joseph doit traverser bien des périphéries pour finalement accéder au centre, non seulement de sa propre famille, mais encore du royaume d’Égypte. Le but de cet article est de montrer comment le tact avec lequel Joseph sait faire face à la violence peut servir de modèle à qui doit prendre soin d’autrui dans des situations éprouvantes.
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« LE VRAI PASTEUR » (Jn 10,1-21) : l’ancrage dans l’expérience commune d’un condensé christologique en quatre temps
Michel Gourgues
pp. 223–247
AbstractFR:
Des quelque 80 passages du Nouveau Testament où intervient l’imagerie du berger, Jn 10,1-21 se présente comme le plus élaboré, le plus original et sans doute le plus riche théologiquement. À partir d’une expérience pastorale courante dans l’Antiquité et observable par tous, Jésus, en en exploitant diverses facettes comme autant de traits métaphoriques, en les ajustant et les prolongeant de diverses manières, éclaire successivement quatre dimensions de son propre mystère : la finalité de sa mission, le sens de sa mort, la permanence de sa présence et la certitude de sa vie à venir.
EN:
Among some 80 passages in the New Testament where the imagery of the shepherd comes into play, Jn 10:1-21 is the most elaborate, the most original and undoubtedly the most theologically rich passage. From a pastoral experience common in Antiquity and observable by all, Jesus, by exploiting various facets like so many metaphorical features, by adjusting and extending them in various ways, successively illuminates four dimensions of his own mystery: the purpose of his mission, the meaning of his death, the permanence of his presence and the certainty of his life to come.
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UN LEADER PASTEUR ? Résister à une fausse bonne idée
Maxime Allard
pp. 249–265
AbstractFR:
À l’occasion d’une réflexion sur le « leadership » et la figure du Berger, cet article explore les fables de La Fontaine. Il s’agit de dessiner la figure du berger, ses forces, ses limites, son champ d’application. À partir des propos tirés de ces fables et en lien avec certains éléments en provenance des traditions philosophiques et théologiques occidentales, il s’agit de faire travailler la figure du berger et celle, concomitante, des brebis pour critiquer l’usage qui peut en être fait dans le cas du pouvoir politique ou du « leadership » et pour en limiter l’utilité à certains champs sociaux précis.
EN:
Often people reflecting on “Leadership” make use of the figure of the Shepherd. This article constructs this figure with La Fontaine’s Fables. With the result of this operation, with the consideration of the “lambs” involved in the figure also and exploring some strands of western philosophical and theological traditions, we show the limits of this figure to think political power and corporate leadership. We limit its use to some specific social interactions.
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UN ARCHÉTYPE INFANTILISANT DU LEADERSHIP : LE BON PASTEUR
François Boespflug
pp. 267–283
AbstractFR:
La notion moderne de leadership, dans l’espoir de devenir un concept opératoire, se cherche des sources d’inspiration positive tout comme elle peut trouver profit à se démarquer nettement de modèles contrevenant à l’esprit qui l’anime ou qu’elle cherche à promouvoir. C’est dans ce contexte d’investigation conceptuelle tâtonnante qu’a été entreprise la présente recherche concernant la relation entre un leader d’aujourd’hui et ses associés, et le Bon Pasteur et ses brebis, telle qu’elle se dégage de l’immense patrimoine d’images que recouvre ce sujet dans la tradition chrétienne, à la lumière des huit principaux types iconographiques ayant eu ou ayant encore cours dans le monde chrétien. L’analyse conclut à l’inadéquation globale des relations qui se créent et se cherchent à notre époque entre un leader et son équipe, et celles que célèbrent les images chrétiennes du Bon Pasteur avec ses brebis, faute, entre autres, de réactivité et d’initiative créatrice chez ces dernières.
EN:
In hope of becoming operative, the contemporary concept of leadership is often on the lookout for positive sources of inspiration that it will then try to promote and/or to set up against other models that it considers to be less inspiring, and against which it therefore wants to react. It is to contribute to this groping about search for a concept of leadership that this contribution has been undertaken. Its goal is to identify what relationship (if any) can be made between the contemporary reality of leadership and followership and both (i) the image of the Good Shepherd and his sheep as well as (ii) the gigantic iconographic patrimony that has come to define this image, within the Christian tradition. In light of an examination of eight iconographic types that have been used or are still used to depict the image, within the Christian tradition, the viability and potential fruitfulness of using this image, to speak of leadership, is examined. The analysis performed leads to a conclusion of inadequacy between, on the one hand, the relationships that exist (or are sought) between contemporary leaders and followers and, on the other hand, those that are celebrated in the Christian images of the Good Shepherd and his sheep. This inadequacy is in large part due to the lack of reactivity and creative initiative on the part of the sheep.
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DU BON BERGER AU BON MOUTON : la figure du leader chez les Peuls
Abdoul Echraf Ouedraogo
pp. 285–297
AbstractFR:
Cet article revisite la notion de leadership serviteur à travers l’éthique pastorale peule, particulièrement le rapport entre le berger peul et son troupeau, ainsi que le rôle de ce troupeau dans la définition de l’identité du berger et celle de son groupe. En partant de l’analyse du processus d’acquisition des vertus idéalisées chez les peuls et qui définissent le Pulaagu, l’article montre comment ces vertus correspondent à celles du leadership. Contrairement aux traditions occidentales ou mêmes grecques où l’animal (le mouton, la vache) renvoie à une image négative d’un être ayant besoin d’être guidé par un leader, l’analyse des rapports entre les peuls et leurs animaux de bergerie donne à croire que dans cette tradition pastorale, il ne saurait y avoir de bon berger sans un bon mouton. Grâce au recours à une abondante littérature de nature sociologique, anthropologique et historique l’article montre que dans l’univers pastoral peul, le mouton, le troupeau, les vaches, les brebis sont admirées pour leur façon de vivre, leur grâce, leur résilience, leur courage. Le berger quant à lui n’est ni le messie, ni le Dieu-père qui va sauver la bergerie de son égarement sur terre. C’est cet homme ou cette femme digne d’accompagner le troupeau, d’en prendre soin. Ce parcours initiatique au service du troupeau crée les qualités intrinsèques du bon berger, une manière d’être Peul (le Pulaagu) qui correspond au leadership serviteur.
EN:
This article revisits the notion of servant leadership through Fulani pastoral ethics, particularly the relationship between the Fulani shepherd and his flock, as well as the role of this flock in defining the identity of the shepherd and that of his group. Starting from the analysis of the process by which one acquires those idealized virtues of the Fulani that define the Pulaaku, this article shows how these virtues correspond to those of leadership. Contrary to Western or even Greek traditions where the animal (the sheep, the cow) refers to the negative image of a being in need of guidance from a leader, our analysis of the relationship between the Fulani and their sheepfold animals suggests that in this pastoral tradition, there could be no good shepherd without good sheep. Thanks to the use of an abundant literature of a sociological, anthropological and historical nature, the article shows that, in the Fulani pastoral universe, the sheep, the herd, the cows, the sheep are admired for their way of life, their grace, their resilience, and their courage. The shepherd, for his part, is neither the Messiah nor the God-father who will save the sheepfold from its straying on earth. It is rather the man or the woman deemed worthy of accompanying the flock, and to take care of it. This initiatory journey in the service of the flock is what creates the intrinsic qualities of the good shepherd, a way of being a Fulani (the Pulaaku) which corresponds to servant leadership.
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LA PART HUMAINE DU BÉTAIL AU MOZAMBIQUE : pouvoirs, savoirs, leadership et noms discursifs du pasteur du coin
César Cumbe
pp. 299–318
AbstractFR:
Au Mozambique, même si la société contemporaine urbaine est de plus en plus numérique, lettrée et scripturale, la tradition orale de bouche à oreille occupe toujours une place centrale. En effet, l’élevage du bétail (de même que l’agriculture familiale et la pêche artisanale) reste l’activité nucléaire ancestrale de rente et de survie dans les communautés rurales s’imposant et s’exposant également comme un espace discursif affranchi à la portée des familles modestes pratiquant l’agriculture, l’élevage, la pêche, la chasse et l’artisanat. C’est justement à ce titre que le pasteur du coin, par le simple acte d’attribuer un nom discursif et messager à chaque bête, devient à la fois observateur, passeur, décrypteur, éducateur et réconciliateur rapprochant ainsi troupeaux bestiaux et troupeaux humains avec ses pouvoirs langagiers et ses savoirs autochtones que nous explorons sous le prisme de la sociolinguistique interactionnelle et de l’anthropologie du langage. Autant reconnaître que l’élevage du bétail est une école à ciel ouvert polyvalente, pragmatique et pédagogique formant au-delà de l’art pastoral, puisque l’enfant-pasteur apprenti est encadré par ses tuteurs aînés déjà pasteurs chevronnés lui faisant traverser toutes sortes de rudes épreuves extrêmes et secrètes avec discipline, courage, jeux langagiers complices, esprit ouvert et bonne foi pour qu’il devienne à son tour un serviteur justicier humanimaliste.
EN:
In Mozambique, even though contemporary urban society is increasingly digital, literate and scriptural, the oral tradition of word of mouth still occupies a central place. Within rural communities, the breeding of cattle (as well as family farming and artisanal fishing) remains the central and inherited activity for generating income and/or merely surviving. These activities impose and also expose a free discursive space within the reach of modest families practicing agriculture, breeding, fishing, hunting and crafts. It is precisely for this reason that the local pastor, by the simple act of attributing a discursive and message conveying name to each of his beasts, becomes at the same time an observer, a ferryman, a decipherer, an educator and a reconciler, one that brings together cattle herds and human herds through his linguistic powers and indigenous knowledge. We will explore this here through the prism of interactional sociolinguistics and the anthropology of language. This will make us understand that cattle breeding teaches one way more than pastoral techniques. It acts in fact as a sort of outdoor school that is far more versatile, pragmatic and educational in what it teaches. Under the supervision of already experienced pastors that act as his parenting tutors, the apprentice child-pastor is made to go through all sort of trials, some hard, extreme and secret, with discipline, courage, mastery of appropriate language games, open mind and good faith so that he, in turn, can become a humanimalistic servant of justice.
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DU BON USAGE DU BON BERGER EN LEADERSHIP
Jean-François Garneau
pp. 319–333
AbstractFR:
L’image du berger ou de la bergère en train de s’occuper de ses moutons est une image parmi d’autres que l’on peut utiliser pour parler de leadership. Parmi ces autres images, il y a celles de l’artiste, de l’artisan, de l’architecte, du capitaine de navire, du tisserand, etc. Cet article prend pour acquis que ces différentes images peuvent jouer au moins trois sortes de fonctions sémantiques différentes : une fonction référentielle, une fonction expressive et une fonction évaluative. Notre réflexion se concentre sur la métaphore du bon berger et, en s’appuyant sur ces trois catégories, tente de dresser un inventaire des différentes significations possibles de cette image. L’objectif de l’article n’est cependant pas d’être exhaustif. Il voudrait au moins suggérer quelque chose de la richesse de cette métaphore et quels avantages il y aurait à la mobiliser plus fréquemment dans l’étude ou l’enseignement du leadership.
EN:
The image of the shepherd or shepherdess in the process of taking care of his or her sheep is one image among many that can be used to talk about leadership. Among these other images, are that of the artist, the craftsman, the architect, the ship’s captain, the weaver, etc. This article takes for granted that these different images can play at least three kinds of different semantic functions: a referential function, an expressive function and an evaluative function. Our article focuses only on the metaphor of the good shepherd and, drawing on these three categories, attempts to make an inventory of the different meanings of this image. The aim of the article is not to build an exhaustive inventory of these meanings, however. It is simply to be sufficiently exhaustive to make people realize how rich this metaphor is and what advantages there would be in using it more often to study or teach leadership.
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LA MÉTAPHORE DU BERGER SOUS LA LOUPE DES SCIENCES DE LA GESTION : conversations avec Cyrille Sardais et Joëlle Bissonnette
Anne-Laure Saives and Annie Camus
pp. 335–351
AbstractFR:
Cyrille Sardais, professeur de management et directeur de la Chaire de leadership Pierre-Péladeau à HEC Montréal et Joëlle Bissonnette, professeure en entrepreneuriat et chercheure au GEST (Groupe de recherche Entrepreneuriat, Société, Transformations) à l’ESG UQAM, ont été invités à réagir librement à la métaphore du berger dans le cadre d’une entrevue créatrice. Au fil de ces deux entretiens, la figure du berger, qui est aussi celle de la bergère, permet de ramener à l’avant-plan des dimensions négligées ou oubliées du leadership et de la gestion. Plus encore, cette métaphore apparaît comme à la fois stimulante et repoussante. Profondément paradoxale, elle offre une heuristique de découverte de la pratique du leadership qui aide à le penser non pas comme direction, mais comme accompagnement.
EN:
Cyrille Sardais, a professor of management at HEC Montreal and director of the Pierre-Péladeau research chair in leadership, together with Joëlle Bissonnette, a professor in entrepreneurship at ESG-UQAM and a research fellow at GEST (the Research Group on Entrepreneurship, Society and Transformation) have both been asked to react freely to the image of the shepherd within the context of a creative interview. During the two conversations performed, the image of the shepherd and of the shepherdess enabled us to bring forth issues that are often neglected or forgotten within the fields of leadership and management. The image is felt to be both stimulating and repulsive. Profoundly paradoxical, it provides us with a discovery heuristic, which helps one conceptualize leadership not so much as a form of leading but as a form of accompaniment.
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L’ACCOMPAGNEMENT À L’AUNE DE LA FIGURE DU BERGER : méditation – théorisation à partir de trois expériences
Eliane Le Jeune-Bézard
pp. 353–370
AbstractFR:
L’objet de cet article est de montrer en quoi les capacités d’observation et les formes de l’attention qu’une personne peut avoir pour autrui nourrissent la pratique du leadership, comme chez le berger, en plus d’être au fondement de toute relation d’accompagnement. Dans cet article, mon propos est articulé à la méditation-théorisation de trois expériences fortes et de ce qu’elles ont à nous apprendre, dans leur apparente diversité, sur les sujets que nous venons d’évoquer. Cette méditation-théorisation nous fera nous demander ce que les trois activités suivantes nous apprennent sur l’accompagnement dans le monde de la communication infra-verbale, toujours présente tout au long de la vie humaine et cruciale dans l’exercice des diverses formes de leadership, à savoir : (i) l’observation des humains (ex. : celle des bébés dans leur famille et des managers dans leur entreprise), (2) l’art pastoral du berger et (3) la pratique de l’éthologie équine. En analysant l’observation comme forme sans cesse renouvelée de l’attention, nous montrerons que cette pratique de l’observation peut ainsi inspirer tout responsable de collectif, tout leader, pour conduire l’action et l’aider à en co-construire le sens.
EN:
The object of this article is to show how the observation capacities and the forms of attention that a person can have for others can nourish the practice of leadership, as is the case with the practice of shepherding, in addition to being at the root of any support and accompaniment relationship. In this article, my purpose is articulated around the theorizing meditation of three powerful experiences and what they have to teach us, in their apparent diversity, on the subjects we have just mentioned. This theorizing meditation will make us wonder what the following three activities teach us about accompaniment in the world of infra-verbal communication, always present throughout human life and crucial in the exercise of the various forms of leadership, namely: (i) the observation of human beings (e.g.: the observation of babies in their families and of managers in their work environment), (2) the pastoral art of shepherds and (3) the practice of equine ethology. By conceptualizing observation as an endlessly renewed form of attention, we will show that this practice of observation can inspire any person responsible for a collective and/or at its head, to lead the action of that collective and help to co-construct its meaning.
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THE RHETORIC OF LEADERSHIP: Deepening Responsible Autonomous Agency and Broadening the Scope of Participation through an Ignatian Contemplation of the Parable of the Good Shepherd
Gordon Rixon
pp. 371–385
AbstractEN:
The contentions of meaning implicit in the metaphors and symbols of the Good Shepherd Parable bear upon leadership issues and highlight the ambiguities, paradoxes, and conflicts of self-transcending social, cultural, and religious projects. Both shepherds and sheep need metaphors to stretch their understanding and engagement and symbols to reach toward a guiding vision that remains beyond their grasp. The Ignatian appropriation of the medieval monastic adaptation of principles of Ciceronian rhetoric in the practice of mental prayer helps to resolve, discern, cultivate, and direct the use of self in the service of such visionary projects. Ignatian discernment contributes to such dynamic development by identifying and resolving the norming affective dispositions of gratitude for creaturehood, freedom in the use of gifts and talents, and commitment to praise, reverence, and serve God and neighbor. These dispositions affirm human agency and orient practitioners to purposeful action without certainty about present facts and future outcomes. Such healing of human agency and participation in a higher purpose contributes to the restoration and elevation of human history.
FR:
Les ambivalences de signification implicites dans les métaphores et les symboles de la parabole du Bon Pasteur portent sur des questions de leadership et mettent en évidence les ambiguïtés, les paradoxes et les conflits de tout projet d’action sociale, culturelle et religieuse visant à la transformation de l’existence. Bergers comme moutons ont besoin de ces métaphores pour étendre leur compréhension et leur engagement, et de ces symboles pour atteindre une vision directrice qui reste hors de leur portée. L’appropriation ignatienne de l’adaptation monastique médiévale des principes de la rhétorique cicéronienne à travers la pratique de la prière mentale aide à résoudre, discerner, cultiver et orienter la mobilisation de soi au service de tels projets visionnaires. Le discernement ignatien contribue à un tel développement dynamique à travers l’identification et la résolution des dispositions affectives à la gratitude pour la condition de créature, pour la liberté dans l’usage des dons et des talents, pour un engagement à louer, révérer et servir Dieu et le prochain. Ces dispositions donnent confiance dans la capacité humaine d’agir dans le monde et orientent vers une action qui reste déterminée quant aux intentions, mais sans certitude quant à la réalité présente et aux résultats à venir. Une telle guérison de l’agir humain et la communion à des valeurs supérieures contribuent à la restauration et à l’élévation de l’histoire humaine.
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SEEKING WHAT IS PURE, DOING WHAT IS TRUE, AND LIVING A LIFE OF LOVE: Pastoral Leadership and Self-Sacrifice in the Gospel of John
Peter Nguyen and M. Ross Romero
pp. 387–407
AbstractEN:
Through an examination of five central passages in the Gospel of John and a consideration of significant religious symbols in this Gospel, we offer a theological reading to show that Christian leaders, who contemplate the Crucified Christ as the pledge of God’s devotion to humankind, are profoundly converted at the interior level. Because of their unrestricted availability to be a shepherd to others, a Christian leader, saved by the love of the Father in Jesus, comes to recognize with gratitude that it is this self-sacrificial love that makes him become a gift to others and that by accepting it, a reciprocal devotion to others ensues. We conclude that the Fourth Gospel demonstrates that ecclesial leadership is founded on Christ’s love and, if it is accepted as such, is not an organizational necessity but an act of service.
FR:
À travers un examen de cinq passages centraux de l’évangile de Jean et une prise en compte des symboles religieux significatifs de cet évangile, nous proposons une lecture théologique pour montrer que les dirigeants chrétiens qui envisagent le Christ crucifié comme le gage de la dévotion de Dieu envers l’humanité, se trouvent profondément transformés dans leur vie intérieure. En raison de la disponibilité totale qu’on lui demande pour être le berger des autres, un leader chrétien, sauvé par l’amour du Père en Jésus, en vient à reconnaître avec gratitude que c’est par cet amour qui se sacrifie qu’il peut devenir un don pour les autres et que cette acceptation entraîne une dévotion réciproque à l’égard des autres. Nous concluons que, selon le quatrième évangile, un leadership ecclésial est fondé sur l’amour du Christ et que, s’il est accepté comme tel, il n’est pas tant vécu comme une nécessité organisationnelle que comme un acte de service.
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LEADING IN THE TIME THAT REMAINS: The Passion and Complexity of Paul’s Leadership in 1 Corinthians
Brent Duckor and Jean-François Racine
pp. 409–431
AbstractEN:
Paul of Tarsus sought to lead Gentiles toward Israel with a passion, style, and commitment that invite us to study his leadership model with a concrete congregation, the Corinthians. After discussing what is known about Paul and the Corinthian congregation, the article explains further his project for this group and how its adoption of Paul’s message puts them in a delicate and difficult position. The article then presents three case studies (1 Cor 1:10-12; 5:1-4; 12) that examine how Paul exercises leadership relevant for today’s leadership studies. Using a standard modern work, The Leadership Challenge, the article shows how Paul’s exercise of leadership in 1 Corinthians converges with some best practices of leadership described by Kouzes and Posner, but also collides with these prescriptions. The article concludes that Paul appears as an audacious and refreshingly authentic leader dedicated to his commission to bring this group in proximity to Israel. From this study emerges the portrayal of a complex, principled leader who must lead at multiple levels within and across a community.
FR:
Paul de Tarse s’est engagé à mener les Gentils vers Israël avec une passion, un style et un engagement qui incitent à étudier son type de leadership avec une communauté particulière, celle des Corinthiens. Après une discussion concernant ce que l’on connaît au sujet de Paul et de la communauté corinthienne, l’article explique quel est le projet de l’apôtre à l’égard de cette communauté et comment celle-ci, dans son adhésion au message promu par son fondateur, se trouve placée dans une position délicate et difficile. Suivent trois études de cas (1 Co 1,10-12 ; 5,1-4 ; 12) cherchant à voir comment la manière dont Paul exerce son leadership demeure pertinente aujourd’hui. Utilisant un ouvrage standard d’aujourd’hui, The Leadership Challenge, par Kouzes et Posner, l’article montre comment le leadership de Paul en 1 Corinthiens converge, mais aussi diverge par rapport aux meilleures pratiques de leadership décrites par ces auteurs. L’article conclut que Paul apparaît comme un leader audacieux, d’une authenticité rafraîchissante, indéfectible quant à sa mission de rapprocher ce groupe d’Israël. De cette étude se dégage le portrait d’un leader complexe, animé par des principes et exerçant son leadership à plusieurs niveaux dans et à travers la communauté.
Recensions et comptes rendus
Philosophie
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Jennifer Awes Freeman, The Good Shepherd. Image, Meaning and Power. Waco TX, Baylor University Press, 2021, 15,2 × 21,6 cm, 205 p., ISBN 978-1-4813-1537-1
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Gilles Maloney, Moi, Aristote (À propos), Québec, Presses de l’Université Laval, 2020, 15,2 × 22,8 cm, IX-648 p., ISBN 978-2-7637-4698-2
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Nolen Gertz, Nihilism (The MIT Press Essential Knowledge Series). Cambridge MA, The MIT Press, 2019, 13,7 × 21,3 cm, 224 p., 21,90 $USA, ISBN 978-0-26253-717-9
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Justin E. H. Smith, Irrationality: A History of the Dark Side of Reason. Princeton NJ, Princeton University Press, 2019, 344 p., 16.2 × 23.6 cm, ISBN 978-0-69118-966-6
Théologie
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Víctor Morla Asensio, Eclesiastés. El colapso del sentido (Estudios Bíblicos, 64), Estella, Verbo Divino, 2018, 214 p., 16 × 24 cm, ISBN 978-84-9073-362-2
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Jean-Noël Aletti, Le Messie souffrant, un défi pour Matthieu, Marc et Luc : essai sur la typologie des évangiles synoptiques (Le livre et le rouleau). Namur, Éditions jésuites - Lessius, 2019, 14,5 × 20,5 cm, 183 p., ISBN 978-2-87299-372-7
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Étienne Fouilloux, Yves Congar 1904-1995. Une vie. Paris, Salvator, 2020, 15 × 22,5 cm, 350 p., ISBN 978-2-7067-2013-0
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Robert Cheaib, Au-delà de la mort de Dieu. La foi à l’épreuve du doute (Forum) ; trad. de Robert Kremer. Paris, Salvator, 2019, 13 × 20 cm, 201 p., ISBN 978-2-70671-761-1