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Inscrit dans la théorie de l’action conjointe, l’ouvrage présente une synthèse des notions et de la relation entre le jeu didactique et le jeu épistémique à travers des « exemples emblématiques » de situation d’apprentissage tirés des sciences, des mathématiques et de la littérature. Suivant une introduction qui rappelle la place de la didactique dans l’étude des savoirs immanents aux pratiques humaines, le premier chapitre développe l’arrière-plan du travail scientifique propre à la notion de jeu épistémique dans la théorie de l’action conjointe. Le deuxième s’intéresse à la comparaison entre le jeu d’apprentissage et le jeu épistémique. Le troisième porte sur la filiation culturelle des pratiques didactiques. Le quatrième travaille la question des relations entre les pratiques professorales et les apprentissages des élèves. Le cinquième chapitre aborde l’ingénierie didactique coopérative et le dernier concerne la posture de chercheur⋅se-professeur⋅e dans la recherche en didactique.
La force de l’ouvrage est de présenter de manière autonome la théorie de l’action conjointe ainsi que les concepts de jeu didactique et jeu épistémique. Dans cette théorie, un savoir est l’enjeu d’un jeu didactique entre un⋅e élève et un⋅e enseignant⋅e. Pour gagner à ce jeu, l’élève doit internaliser le savoir et l’enseignant⋅e doit accompagner l’élève de telle manière qu’elle⋅il parvienne à ses fins. Après la lecture de cet ouvrage, les lecteur⋅rice⋅s non initié⋅e⋅s aux différents concepts devraient avoir acquis une compréhension de ceux-ci. L’utilisation fréquente d’exemples pour répondre aux différents questionnements de l’auteur permet en effet de mieux comprendre les distinctions entre les deux types de jeu et leurs finalités. Cela dit, bien que l’auteur tente d’utiliser des exemples provenant de plusieurs champs d’enseignement, les sciences sont beaucoup plus représentées. D’ailleurs, le titre aurait pu mieux le souligner et le livre aurait gagné à ne s’intéresser qu’à un champ d’études.
Dans la volonté de la théorie de l’action conjointe de s’inscrire dans un « tournant pratique », l’auteur ne se limite pas à la simple explication des concepts et utilise de bons exemples pour comprendre leur articulation dans la pratique. Le cinquième chapitre sur la coopération entre chercheur⋅se⋅s et enseignant⋅e⋅s renforce cette intention, en soulignant l’importance du travail de deux expert⋅e⋅s dans une volonté de développer des savoirs épistémiques qui dépassent les savoirs scolaires. Toutefois, l’ouvrage occulte l’aspect pragmatique de cette coopération et les défis concernant le temps. Dans un exemple sur la simulation des dégâts d’un séisme, l’auteur rend compte de la période de trois ans et du travail qui a été fait entre chercheur⋅se⋅s et enseignant⋅e⋅s pour arriver à un résultat satisfaisant. Il est difficile de voir comment cette coopération pourrait s’articuler de manière concrète dans la pratique des enseignant⋅e⋅s considérant l’aspect chronophage de celle-ci et les réalités reliées aux programmes volumineux que les enseignant⋅e⋅s doivent couvrir.
Si l’ouvrage de Santini est un excellent point de départ pour comprendre les concepts et leurs intentions dans la sphère didactique, le niveau de langage employé dans celui-ci est selon nous le plus grand obstacle que les lecteur⋅rice⋅s auront à surmonter. L’auteur aurait gagné à faire un travail de vulgarisation pour permettre à davantage de professionnel⋅le⋅s de bénéficier de celui-ci. Les lecteur⋅rice⋅s devront se heurter à des phrases savantes qui pourraient être exprimées de manière plus concise et plus claire.