L’album, une des portes d’entrée privilégiées de l’apprentissage à la maternelle, peut s’avérer un moyen d’action puissant dans le développement des compétences langagières et cognitives de l’enfant. Occupant une place de choix en salle de classe, l’exploitation, par les enseignants, du livre illustré n’est pas pour autant pédagogiquement porteuse de sens. Force est de reconnaître que les auteures pallient le manque d’outils en offrant une démarche complète d’entraînement au langage accessible, concrète et bien documentée à l’usage des éducateurs novices ou chevronnés. L’ouvrage, coécrit par trois spécialistes des sciences du langage, a donc le mérite de vouloir outiller les enseignants dans la sélection et l’utilisation optimale de l’album pour le développement langagier des enfants. Le livre est divisé en trois chapitres étroitement imbriqués. Le premier examine les principaux éléments théoriques qui permettent à l’enfant d’apprendre à parler en racontant, à élaborer un discours narratif cohérent, cohésif et syntaxiquement organisé (p. 17). Ce chapitre s’avère particulièrement utile. Au moyen de multiples exemples issus de pratiques sur le terrain, les auteures illustrent, entre autres, diverses difficultés de compréhension (interprétation de l’image, du texte ou du rapport entre ces deux facteurs) chez l’apprenti lecteur. De plus, elles exposent avec clarté la nécessité, pour les enseignants, de ne pas miser uniquement sur les caractéristiques de l’album, mais de cibler également des objectifs éducationnels en lien avec les capacités langagières maximales de l’enfant de même qu’avec les étapes d’acquisition du langage. Dans le deuxième chapitre, les auteures s’appuient sur la recherche ainsi que sur leur expertise pour fournir aux enseignants des ressources pertinentes aisément adaptables à la réalité de chaque milieu (par exemple milieu linguistique minoritaire). Ainsi, bien au-delà d’une pratique simplifiée, la grille d’analyse détaillée et les exemples commentés génèrent un espace de réflexion où les professionnels peuvent questionner leurs pratiques de sélection d’albums. Finalement, le troisième chapitre relève une composante tout aussi fondamentale dans l’apprentissage du langage : le rôle de l’adulte, acteur essentiel dans le rapport de l’enfant à l’écrit. Pour accompagner l’enfant dans son apprentissage, les enseignants se voient proposer une conjugaison de stratégies (interactions verbales, reformulation des énoncés et séances d’entraînement au langage individuelles ou collectives) pour soutenir l’enfant. Quoique celle-ci soit présente, l’ouvrage n’inclut que superficiellement la famille dans cette démarche. Pour une deuxième édition, il serait opportun de faire une place prépondérante aux parents dans le but d’établir un partenariat de collaboration foyer-maternelle. Finalement, on ne saurait passer sous silence les annexes dont la sélection d’albums de littérature jeunesse et les outils à l’usage de l’enseignant qui enrichissent la structure d’accompagnement pédagogique proposée. Par ailleurs, il faut préciser que le lecteur devra fréquemment établir un parallèle entre le système scolaire français et celui qui fait figure de référence pour lui. Fin dosage entre la théorie et la pratique, il n’en demeure pas moins que cet ouvrage de qualité constitue un guide de référence riche en information.
Canut, E., Bruneseaux-Gauthier, F. et Vertalier, M. (2012). Des albums pour apprendre à parler : les choisir, les utiliser en maternelle. Nancy, France : CRDP de Lorraine[Record]
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Isabelle Pineault
Université de MonctonRose-Marie Duguay
Université de Moncton