L’ouvrage de J.A. Dickinson et de B. Young dont la première édition est parue en 1988, constitue un apport important à la connaissance du développement socio-économique du Québec. Cette quatrième édition, parue depuis déjà trois ans, s’inscrit bien évidemment dans la lignée des éditions précédentes tout en comportant certains ajouts. Rappelons tout d’abord que le seul fait que les auteurs soient des Canadiens anglais constitue en soi une certaine originalité. En effet, et comme Dickinson et Young le soulignent eux-mêmes, il n’est pas dans l’ordre des choses − ils utilisent le mot « téméraire » pour qualifier l’exercice derrière l’ouvrage − que deux Canadiens anglais s’intéressent à l’histoire socio-économique du Québec et proposent depuis près de 25 ans un ouvrage à l’intention des historiens, qu’ils soient professionnels, en herbe ou amateurs. Avant de nous pencher sur les ajouts et modifications de cette quatrième édition, nous en présenterons les aspects fondamentaux et récurrents. Comme son titre l’indique, ce livre aborde le développement économique du Québec. Tant les aspects politiques que culturels, démographiques et sociaux y sont traités. Des questions économiques étant présentées, ici, comme la conséquence de l’ensemble des réalités québécoises de 1534 à nos jours. Le regard que posent les auteurs sur cette historiographie québécoise est large, détaillé et s’inscrit dans un travail scientifique de fond. Cela dit, ce regard n’est pas dénué pour autant de toute préférence paradigmatique. En effet, d’entrée de jeu les auteurs mettent de l’avant leur préférence pour une approche que l’on pourrait qualifier de culturaliste et identitaire au détriment d’une perspective misant sur l’américanité du peuple québécois comme l’ont fait ressortir Gérard Bouchard ou encore Yvan Lamonde. Reprenant à leur compte l’approche de Jacques Beauchemin et de Ronald Rudin, Dickinson et Young insistent sur le fait que le Québec s’est développé économiquement et socialement à partir d’institutions qui lui sont propres, d’institutions imprégnées de rapports sociaux spécifiques et au sein desquelles des cultures européennes et autochtones se rencontrent, collaborent ou encore s’affrontent. Ambitieux, les auteurs n’en demeurent pas moins soucieux de situer le Québec dans des espaces spatiotemporels élargis, qu’il s’agisse du Canada, de l’Amérique du Nord ou encore de l’espace atlantique. Conscients de la lourdeur de la tâche qui les attendait, et ce, dès la première édition de l’ouvrage, Dickinson et Young s’inspirent des travaux de Trofimenkoff pour, disent-ils, « interpréter l’histoire du Québec à travers une grille d’analyse socio-économique qui propose une nouvelle approche théorique et entraîne une réévaluation de la périodisation traditionnelle» (p. 9). Rappelons que J.I. Little, dans un compte rendu paru en 1989 dans la Revue d’histoire de l’Amérique française, remettait quelque peu en question cette périodisation. Selon Little, avec qui on ne peut qu’être d'accord, le découpage temporel effectué dans l’ouvrage de Dickinson et Young évacue certaines conjonctures importantes. Par conséquent, des moments forts de l’historiographie québécoise se retrouvent en « plein milieu des sous-périodes définies par les auteurs » (Little, 1989, p. 126). Bien que l’idée de revoir la périodisation traditionnellement acceptée soit bonne et permette, comme c’est l’objectif des auteurs, de mettre l’accent sur des groupes trop souvent oubliés comme les femmes et les autochtones, ce redécoupage a pour effet d’insister sur certains éléments au détriment d’autres et il y a nécessairement des absents ou encore des thématiques plus faiblement abordées. Sur ce point, on notera que la question migratoire est reléguée à une sous-catégorie qui ne donne pas la pleine mesure de son importance pour le développement socio-économique du Québec. De même, les différents mouvements nationalistes québécois auraient pu faire l’objet d’un meilleur traitement. Curieusement, dans cette quatrième édition les auteurs affirment avoir …
Appendices
Référence
- Little, J.I., 1989 Recension de l’ouvrage de Brian Young et John A. Dickinson, A Short History of Quebec : A Socio-Economic Perspective, Revue d’histoire de l’Amérique française, 43, 1 : 125-127 (traduction de Lalita Lanthier).