Symposiums Critiques - Le fédéralisme canadien

Un bilan du fédéralisme à nuancerRéjean Pelletier, Le Québec et le fédéralisme canadien. Un regard critique, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2008, 236 p.[Record]

  • Benoît Pelletier

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Comme son titre l’indique, l’ouvrage de Réjean Pelletier jette un regard critique sur le fédéralisme canadien et sur la place que le Québec y occupe. De tous les ouvrages consacrés à ce sujet, celui de Pelletier est sans contredit l’un des plus accessibles. L’auteur ne cherche pas à répondre aux articles et autres ouvrages écrits sur le même thème, mais il propose tout simplement, sans prétention, d’analyser l’évolution du fédéralisme canadien dans une perspective québécoise. La première partie de l’ouvrage est essentiellement historique. Elle fait un tour d’horizon des diverses raisons qui ont motivé le choix du fédéralisme en 1867 et des nombreuses perceptions qui s’en sont dégagées. Dans le premier chapitre, l’auteur rappelle que ce sont surtout des facteurs économiques, politiques et militaires qui expliquent l’adoption de la formule fédérale au moment de la création du Canada, ainsi que la présence d’un clivage ethnique important reposant avant tout sur l’existence de deux grandes communautés, l’une anglophone et l’autre francophone. Plus précisément, l’adoption en 1867 de la formule fédérale résulte d’un « compromis entre ceux qui désiraient une forte intégration des colonies et une forte centralisation des pouvoirs et ceux qui insistaient sur la décentralisation afin de préserver la diversité des cultures et des intérêts régionaux » (p. 14). Néanmoins, selon Réjean Pelletier, l’inégalité du partage des compétences – cette inégalité découlant du fait que tous les pouvoirs inhérents à la souveraineté et toutes les affaires d’importance nationale ou d’intérêt général ont été confiés dès le départ au gouvernement central – témoigne de l’ambition centralisatrice des artisans de la fédération canadienne. Plus précisément, « l’esprit centralisateur qui a prévalu finalement dans le partage de compétences se trouve renforcé par l’idée d’une subordination des provinces à l’égard du gouvernement central, selon le modèle colonial qui avait marqué jusque-là les rapports entre les colonies et les autorités britanniques » (p. 18). De souligner l’auteur, « cette volonté d’assujettir les provinces aux autorités centrales était clairement présente au début de la fédération. Est-elle disparue par la suite ? L’histoire nous enseigne que ce n’est pas le cas, […], même si elle a pu prendre des formes différentes et même si on a assisté parfois à des périodes d’accalmie, ce qui a pu laisser croire à une certaine décentralisation » (p. 20). Or, cette décentralisation n’est qu’un mythe selon Réjean Pelletier, puisque l’histoire ne révèle aucun transfert de compétences du fédéral en faveur des provinces, alors que l’inverse est survenu à différentes occasions. Élaboré suivant une démarche chronologique, le second chapitre illustre bien le fait que, durant les cent quinze années qui ont suivi la fondation du fédéralisme canadien, la recherche d’une identité nationale forte, elle-même reposant sur un gouvernement central fort, a consacré un modèle de fédéralisme centralisateur plus ou moins respectueux des provinces, et surtout, de la nation québécoise. En gros, pendant toutes ces années, le gouvernement fédéral a cherché à assurer sa prédominance sur les provinces et, selon l’auteur, y est parvenu. Réjean Pelletier reconnaît toutefois que, entre 1867 et 1896, on a assisté à une certaine reconnaissance des provinces et de leur autonomie et que, de 1896 à 1930, on a vu naître une période marquée par la recherche d’un certain équilibre entre les provinces et le fédéral. Mais l’équilibre dont parle Réjean Pelletier était loin d’être parfait. Ainsi, selon lui, cet équilibre ne parvint pas à empêcher la subordination des provinces au fédéral, cette dernière en venant même à se transformer en une véritable domination de celles-ci par celui-là. « [L]e gouvernement fédéral fixait les grandes priorités pour les provinces, comme si elles ne pouvaient pas être autonomes dans …