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Voici un collectif étonnant, qui s’est donné comme objectif de comprendre le Québec, la culture et l’identité québécoise dans son rapport avec l’Orient. Ce livre profite des polémiques culturelles actuelles pour remanier l’orientalisme tel qu’imaginé initialement par Edward Sa?d et essayer de comprendre comment et pourquoi l’Orient est si essentiel aux cultures occidentale et québécoise comme nous les connaissons aujourd’hui. Ce n’est donc pas l’Orient qui est au coeur de ce recueil, mais bien le Québec. Des auteurs venant d’horizons fort divers examinent la production culturelle québécoise dans son rapport avec cet Autre, cet Orient à la fois unique et multiple, unique dans sa fonction imaginaire mais multiple dans sa réalité historique et géographique. Le livre est par ailleurs divisé en deux parties, l’Extrême-Orient et le Proche et Moyen-Orient, et il regroupe des textes portant sur des thèmes divers tels le théâtre japonais, le Chinatown de Montréal, la représentation hindoue ou encore, la littérature juive québécoise.

Janusz Przychodzen (Université York) signe l’introduction. Sa position est claire : l’Orient joue un rôle parfois oublié mais certainement fondateur dans la culture québécoise contemporaine. Ce texte présente les études du recueil tout en rappelant la position minoritaire du Québec et la nature plutôt « postorientaliste » dans laquelle il se trouve aujourd’hui. L’Extrême-Orient est ensuite dévoilé. C’est dans l’art québécois que nous projette d’abord Boris Chukhovich qui précise que « l’orientalisme comme mythe occidental, ne doit pas nécessairement renvoyer à un territoire géographiquement délimité et définitif » (p. 18). Ainsi, rappelle-t-il, les Autochtones ont-ils été assimilés aux Indiens et l’Orient, source de nouveau langage artistique, voit d’abord le jour au Québec par le biais de la France…

Viennent ensuite des analyses textuelles. Serge Granger étudie la présence réelle des Québécois en Extrême-Orient par le biais de textes non littéraires ; Vijaya Ra s’attarde pour sa part à la représentation hindoue dans la littérature québécoise et scrute la spécificité de l’orientalisme québécois qui, à l’instar de l’orientalisme européen, sait prendre ses distances face à certaines hégémonies ; avec son analyse du Chinatown chez quatre auteurs contemporains, Gilles Dupuis dresse le portrait d’une Chine, d’un Orient, désorienté. Cette section se termine avec l’analyse que fait Janusz Przychodzen de de Robert Lepage qui utilise subtilement le théâtre japonais pour parler de l’identité québécoise. La deuxième partie, qui porte sur le Proche et Moyen-Orient, regroupe des auteurs féminins qui toutes à leur façon abordent la littérature québécoise. Anne Caumartin et Johann Sadock analysent la littérature juive québécoise et le rapport qui existe entre le Québec, le pays d’adoption, et le pays d’origine qu’il faut imaginer de nouveau. Rachel Bouvet fait une lecture orientaliste de Hypatie ou la fin des dieux de Jean Marcel. Mounia Benalil analyse la poésie et les images orientales de Marie-José Thériault. Finalement, Brassard dans son étude sur la poésie de Patrice Thibodeau, dépeint un Orient intérieur désincarné mais source d’images et de poésie.

De par la diversité de ses interventions, ce recueil assoit la présence incontestable de l’Orient et de l’orientalisme dans la culture québécoise. Pourtant, la spécificité de l’orientalisme québécois et de la culture québécoise actuelle démontre une ouverture vers l’Autre qui n’est pas bâtie sur une dichotomie Orient-Occident, mais bien sur une présence constante et saine de l’Autre comme source de dialogue et d’ouverture.