L’intérêt du politologue et professeur émérite de l’Université Laval, Vincent Lemieux, pour l’analyse structurale et les réseaux sociaux n’est pas récent, ceux-ci étant parmi ses domaines de prédilection depuis des décennies. Comme il le soulignait lui-même dans un texte publié il y a maintenant plus de vingt ans, « Un cheminement en science politique », c’est au cours d’un séjour en France, notamment à l’occasion de sa participation, en 1960, à un séminaire en analyse structurale du politique donné par l’anthropologue Claude Lévi-Strauss, l’un des principaux théoriciens du structuralisme du XXe siècle, que Lemieux approfondit ce domaine d’études. Quant à l’analyse des réseaux, Lemieux s’y intéresse depuis fort longtemps, et ce pour plusieurs raisons dont cette contribution de l’anthropologie sociale qui, souligne-t-il dans son texte de 1984, l’a « toujours fasciné » et qui est révélatrice de la prédominance des phénomènes de communication et de relation tout en se prêtant bien à l’analyse structurale. De son côté, Mathieu Ouimet, coauteur de l’ouvrage, est étudiant au doctorat du Département de science politique de l’Université Laval. Dans son mémoire de maîtrise déposé en 2000 à l’Université Laval, il s’est intéressé au réseau des organisations intervenant auprès des toxicomanes de la région de Québec. L’un comme l’autre se trouvent donc en terrain connu qu’ils maîtrisent de façon expérimentée et qu’ils vulgarisent habilement pour les publics lecteurs auxquels se destine cette publication, étudiants et chercheurs qui souhaitent s’initier à cette approche interdisciplinaire. L’objectif est clair et les résultats probants. Comprenant un glossaire des principaux concepts appropriés à l’analyse structurale, cet ouvrage a d’abord des fonctions pédagogiques. Selon Lemieux et Ouimet, l’analyse structurale a pour objet les réseaux et leur structuration. Pour les acteurs sociaux, leurs relations avec d’autres acteurs et la forme de ces relations importent davantage que leurs attributs, leurs fonctions et leurs actions ainsi que l’interprétation qu’ils font du monde ou des événements historiques dont ils sont à la fois témoins et participants. Mais l’analyse structurale « n’est qu’une façon parmi d’autres d’aborder les phénomènes sociaux » (p. 11). En témoignent différentes approches en analyse de politiques, dont celle des réseaux de politiques publiques. Il en est de même de l’analyse causale (la recherche et la compréhension des déterminants), de l’analyse séquentielle ou par étapes des politiques publiques (de l’émergence à l’évaluation) ou de ces autres approches qui mettent l’accent sur les intérêts et les stratégies des acteurs, sur leurs croyances ou encore, sur la construction du sens dans les politiques publiques et qui se fondent, généralement, sur les déterminants de l’action plutôt que sur les relations entre des acteurs sociaux. Le deuxième chapitre présente le cadre conceptuel de l’analyse structurale, lequel résulte de la théorie des graphes et de l’analyse des réseaux sociaux, et propose des définitions des principaux concepts utilisés en ce domaine et abordés dans les chapitres suivants. Les travaux de différents auteurs sont mis à contribution, dont ceux de G.J. Zijlstra relatifs aux acteurs collectifs et de L.C. Freeman qui s’attarde à la position des acteurs, à la notion de centralité et aux trois mesures de centralité qu’il a développées, soit la centralité de degré « qui reflète l’activité relationnelle directe d’un acteur », la centralité de proximité qui repose sur « la longueur du plus court chemin reliant deux acteurs » et, enfin, la centralité d’intermédiaire qui met l’accent sur « l’importance de la position intermédiaire occupée par les acteurs d’un graphe » (p. 23-24). Le troisième chapitre traite de divers aspects méthodologiques liés à la collecte et au traitement des données nécessaires à l’analyse structurale ainsi que de différentes techniques courantes de collecte de données. …
Vincent Lemieux et Mathieu Ouimet, L’analyse structurale des réseaux sociaux, Québec et Bruxelles, Les Presses de l’Université Laval et De Boeck Université, 2004, 112 p. (Méthode des sciences humaines.)[Record]
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Diane Saint-Pierre
INRS Urbanisation, Culture et Société.