Comptes rendus

Jean Renaud, Annick Germain et Xavier Leloup (dirs), Racisme et discrimination. Permanence et résurgence d’un phénomène inavouable, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2004, 262 p.[Record]

  • Micheline Labelle

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  • Micheline Labelle
    Département de sociologie,
    Université du Québec à Montréal.

L’ouvrage présente les actes d’un colloque tenu en 2003 par le Centre d’études ethniques de l’Université de Montréal, sur le thème du racisme et de la discrimination. Il comporte 13 textes, la majorité étant rédigés par des doctorants et des post-doctorants, québécois et étrangers. Une brève présentation précède quatre grandes sections touchant l’établissement des immigrants, la « distance », l’éducation et les relations interpersonnelles. La première section regroupe trois textes portant sur les stratégies d’établissement des immigrants à Montréal, l’accès à l’emploi et la distribution des travailleurs dans le secteur des services de soins et d’aide à domicile, dans les services de santé et l’accès des minorités au logement. On y constate entre autres la sous-représentation des « Noirs » dans les CLSC et « l’effet net du groupe ethnique » dans les services de santé, et on y illustre le discours raciste d’un petit échantillon de propriétaires de logements à l’égard des « communautés noires », en particulier, dans les secteurs Villeray, Côte des Neiges et Hochelaga Maisonneuve. La seconde section concerne les attitudes des municipalités dans les dossiers d’aménagement des lieux de culture des minorités ethniques, le racisme chez les jeunes des quartiers populaires français, l’identité arabe à Montréal, et une synthèse ou revue des écrits portant sur le racisme au Québec. La troisième section comprend trois textes traitant de l’éducation antiraciste et du rôle de l’école. La dernière section intitulée « relations interpersonnelles » contient un texte sur les assises socio-psychologiques du racisme et un essai, rédigé par un auteur qui se définit comme « non-spécialiste » en matière de racisme (p. 261). Qualifiant sa posture d’« Homme, Blanc, universitaire » (p. 261), Guy Bourgeault tentera néanmoins d’expliquer « la constante résurgence du racisme » à partir de la « tendance cognitive naturelle » qui consiste à attribuer à notre position sociale un niveau d’universalité qu’elle n’a pas » (p. 25). Quelques textes se démarquent par leur rigueur, la clarté du style ou l’intérêt des questions soulevées. Mentionnons celui d’Annick Germain et de Julie Élizabeth Gagnon sur les dossiers d’aménagement des lieux de culte dans le contexte montréalais, celui de Marguerite Cognet sur les services d’aide à domicile dans le secteur de la santé, celui de Paul Reid sur les représentations liées à l’identité arabe chez les jeunes Montréalais d’origine arabe, celui de Marie McAndrews sur la faible prégnance de l’éducation antiraciste au Québec et ses difficultés d’implantation dans le système scolaire, au profit de l’éducation à la citoyenneté ; l’auteure lie le déclin de l’éducation antiraciste au Québec à l’accession graduelle des francophones au statut de majorité sociologique, thèse discutable mais susceptible d’ouvrir le débat. On peut par contre souligner quelques faiblesses et incohérences. Ainsi, les intitulés des grands regroupements qui structurent l’ouvrage prêtent à confusion. Qu’entend-on par exemple par la rubrique générale de « distance » ? Quels liens exacts établit-on entre les « distances culturelles » et le racisme ? En quoi, la résurgence constante du racisme devrait-elle être traitée sous la rubrique « relations interpersonnelles » ? Sylvie Fortin et Jean Renaud utilisent la notion d’« exclusion par repli sur l’endogroupe » pour qualifier les réseaux et les stratégies d’établissement économique de certains groupes de migrants, sans pour autant aborder et analyser en profondeur le facteur du racisme, l’un des facteurs structurels qui opèrent dans l’explication des modes d’incorporation des immigrants, selon la théorie de l’assimilation segmentée à laquelle ils se réfèrent. Dans un article à faible teneur méthodologique, Didier Lapeyronnie analyse les expressions du proto-racisme chez les jeunes des « quartiers populaires » immigrés en France et affirme en une formule …