Au cours des dernières années, la transformation des villes et de la réalité urbaine a confirmé le triomphe des flux sur les lieux (Castells, 1996 ; Urry, 2000). Cela est dû en bonne partie aux changements technologiques et à leurs effets sur l’organisation de l’espace favorisant une mobilité accrue des citadins (Ascher, 1998). Mais cela s’explique aussi par l’individualisation des rapports sociaux (Beck, 1994) qui définissent les liens à l’espace en fonction des besoins de chacun. S’il permet de souligner des tendances générales qui alimentent le développement des villes contemporaines, ce constat demeure toutefois insuffisant pour saisir l’ensemble des changements en cours. Les milieux urbains possèdent une matérialité fortement inscrite dans l’histoire et la culture locales, de sorte que même si des tendances générales contribuent à changer les valeurs et les représentations sociales, les pratiques quotidiennes sont, en bonne partie, héritées des choix et des contraintes du passé. Comment faire la part des choses entre rupture et continuité en matière de pratiques et de politiques urbaines ? En raison de l’importance accrue de la mobilité et des flux pour l’organisation de l’espace et l’aménagement urbain, sommes-nous en droit d’affirmer que les villes contemporaines sont irrémédiablement dans un processus radical de transformation de leur code génétique, pour ainsi dire ? Dans quelle mesure la ville à centralité forte – par opposition aux villes polycentriques – est-elle menacée par l’augmentation de la mobilité ? Comment se redessinent aujourd’hui les relations entre la ville centre et la banlieue ? En outre, l’accroissement de la mobilité encourage-t-il l’étalement urbain au détriment de la ville centre ou engage-t-il à repenser la ville sous l’angle d’une nouvelle relation entre le centre et la périphérie ? Ce que l’on observe dans les grands milieux urbains peut-il être transposé à des villes de taille moyenne ? Enfin, comment la culture, les mentalités et les processus politiques interagissent-ils dans la production de la ville et de l’espace urbain ? Ces questions, qui ont, au cours des dix dernières années, retenu l’attention de bon nombre de chercheurs en études urbaines ont aussi alimenté les préoccupations des participants au présent numéro thématique. Les programmes de recherche ont, cependant, pris des directions multiples. La ville est un phénomène complexe et, comme objet d’étude, ne se laisse pas appréhender aisément. C’est ce qui permet d’expliquer la grande diversité des perspectives d’analyse et des questions de recherche. Cela ne signifie pas que certaines questions n’ont pas une actualité plus grande. C’est le cas notamment des nouveaux défis qu’ont eu à relever et doivent toujours relever les villes centres. On a beaucoup vanté la revitalisation des quartiers centraux. Ne faudrait-il pas, toutefois, réfléchir à des modèles d’organisation spatiale inédits et en tirer les conséquences pour la planification urbaine (Ford, 2003) ? Si on pense qu’il faille maintenir les fonctions centrales des villes, est-il opportun de définir un seuil minimal de « vitalité » en dessous duquel l’avenir d’une ville centre est irrémédiablement compromis ? À cet égard, la redéfinition des hiérarchies urbaines qu’entraîne la mondialisation provoque des ajustements qui doivent être pris en compte par l’analyse et l’intervention. Quelle est alors la marge de manoeuvre des pouvoirs locaux ? L’étude récente de Savitch et Kantor (2002) a mis en lumière l’existence de divers cas de figure, dépendant de la combinaison de facteurs internes et externes qui façonnent les stratégies des acteurs et donnent naissance à ce que la littérature nomme des régimes urbains. Selon que, d’un côté, les conditions du marché sont favorables ou défavorables et que, de l’autre, l’appui en provenance des …
Appendices
Bibliographie
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