Comptes rendus

André Joyal, Le développement local. Comment stimuler l’économie des régions en difficulté, Sainte-Foy, Les Éditions de l’IQRC, 2002, 156 p. (Diagnostic, 30.)[Record]

  • Louis Guay

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  • Louis Guay
    Département de sociologie,
    Université Laval.

Dans ce court mais dense essai, André Joyal, qui a lui-même contribué à la recherche sur les économies régionales et locales, se penche sur les problèmes, les défis et les bons coups du développement local. La politique régionale fédérale et provinciale a, au cours de son histoire, suivi une évolution très peu linéaire. L’après-guerre a été marqué par de grandes ambitions, nourries par les années difficiles de la dépression, la nécessité de relancer les économies et d’adapter les équipements collectifs et les infrastructures aux nouvelles réalités dont l’accélération de l’urbanisation. Les États n’ont pas tous été aux prises avec des problèmes identiques – certains devaient reconstruire leurs infrastructures détruites par la guerre, d’autres maintenir l’activité économique et intégrer les hommes libérés par la paix – mais ils se sont tous préoccupés de développement et d’équilibre économique régional. Comme le rappelle l’auteur, les idées de pôle de croissance et de pôle de développement, émanant des économistes, ont marqué les politiques publiques. On cherche à mieux répartir l’emploi, les populations, les services, bref établir l’égalité des chances territoriales. Ces grandes ambitions, qui forment l’armature du développement et de l’aménagement des territoires, ont favorisé une forte prise en charge par les gouvernements centraux. Les plans ARDA (aménagement rural et développement agricole) sont, au Canada, les structures qui ont permis cette intervention gouvernementale accrue. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Un bilan de ces interventions, malgré des réussites évidentes, laisse songeur. L’équilibre régional ne se fait ni spontanément, comme l’avait entrevu Myrdal, ni volontairement, comme le désiraient les aménagistes régionaux du BAEQ : il reste, et restera peut-être toujours, des poches ou zones de développement plus faibles, que certains ont qualifié de sous-développement. Ce contexte bien campé, l’auteur nous dirige vers le changement de politique au milieu des années 1970. Certains programmes gouvernementaux, comme l’Opération solidarité économique (OSE), annoncent une direction nouvelle. Le développement ne peut se faire sans la collaboration des régions et des localités. Joyal affirme que les pouvoirs publics ont pris conscience qu’ils ne peuvent se substituer aux acteurs locaux. Ils commencent, graduellement, à « percevoir les régions comme des creusets dotés d’autonomie » (p. 20). Un changement de cap, qui, au Québec, s’est accompagné de plusieurs transformations des structures politiques et administratives locales, avec la création des Municipalités régionales de comté (MRC), d’énoncés de politique régionale, comme Le choix des régions, et, plus récemment, de la création des centres locaux de développement (CLD) et d’un ministère des régions. Sur une période de près de trois décennies, les fins et les moyens du développement régional ont été profondément transformés. Le développement local a, en cours de mutation, remplacé le développement régional. Il n’est pas utile d’énumérer tous les instruments et organismes créés depuis pour promouvoir et mieux réaliser le développement local. L’auteur en examine un assez grand nombre, tant en contexte urbain que rural. Économiste rompu à l’analyse des conditions du succès des entreprises, il insiste sur les facteurs favorables au développement. Pour lui, le succès du développement local réside dans les entreprises innovantes qui adoptent des stratégies productives et commerciales qui leur donnent un avantage sur les marchés. La mondialisation des économies force encore plus les entreprises à innover : la concurrence s’est élargie ; la science et la technologie offrent des possibilités considérables de nouveauté en produits et procédés ; les goûts des consommateurs sont à la fois plus diversifiés et raffinés. Pour survivre et tirer son épingle du jeu dans ce nouvel espace – pour l’instant plus nord-américain que véritablement mondial pour la plupart des sociétés québécoises –, les entreprises doivent être à …