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Depuis quelques décennies, la question de la coexistence des différentes cultures à l’ère de la mondialisation se pose. Plusieurs États sont préoccupés par la suprématie de certaines cultures étrangères aux dépens desquelles les expressions culturelles nationales, reflet d’une culture donnée, se retrouveraient condamnées à l’état de survie, voire à la disparition. Le droit des États d’intervenir en faveur de la protection de cette culture se heurte toutefois à ses engagements internationaux dans des secteurs autres que culturels, et en particulier ceux qui découlent des accords commerciaux.

Face à une telle situation et dans un objectif de contrer les effets néfastes des règles de libre-échange, les membres de la communauté internationale ont adopté en octobre 2005 la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles[1] (Convention de 2005). Cet instrument juridique réaffirme le droit souverain des parties de mettre en place leurs politiques culturelles et d’adopter des mesures nationales afin de protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles sur leur territoire. De même, il reconnaît la nature spécifique des biens, services et activités culturels en tant que porteurs d’identité, de valeurs et de sens[2]. Par contre, le champ d’application de ce traité s’étend exclusivement à la diversité des expressions culturelles, une partie intégrante de la diversité culturelle, tel que décrit dans son article 4 au premier alinéa[3].

Considérant le fait que l’Union européenne (UE) et ses États membres ont joué un rôle important dans l’élaboration ainsi que dans la mise en oeuvre de la Convention de 2005, on peut se demander quel est l’impact qu’exerce aujourd’hui cet instrument culturel sur l’ordre juridique de l’UE, onze ans après son entrée en vigueur? Il convient ainsi de s’intéresser tout d’abord à l’impact qu’exerce la Convention de 2005 sur l’ordre juridique interne de l’UE (I), pour ensuite s’attarder sur son impact à l’égard des actions extérieures de cette organisation régionale d’intégration économique (II).

I. L’impact de la Convention de 2005 sur l’ordre juridique interne de l’UE

L’UE et ses États membres ont démontré activement leur implication politique au cours des négociations qui ont mené à l’adoption de la Convention de 2005. Les principes directeurs et les obligations réaffirmés par la Convention de 2005 visant à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles correspondent aux principes fondateurs de l’UE[4]. Ainsi, l’obligation des parties d’intégrer la culture dans les autres domaines de leur ressort et de tenir compte de la spécificité des biens et services culturels est déjà inscrite dans les principes de l’UE. Il convient de mentionner que l’objectif de la Convention de 2005 visant à octroyer une assistance spécifique aux pays en développement pour qu’ils puissent développer leurs propres politiques culturelles et renforcer leurs industries culturelles se retrouve au coeur de l’action des institutions européennes[5]. Ainsi, l’influence de la Convention de 2005 sur l’ordre juridique interne de l’UE se manifeste surtout au niveau de ses institutions (A), ainsi que dans le domaine de l’audiovisuel (B).

A. Au niveau des institutions de l’UE

Malgré le fait que les États membres détiennent toujours la compétence exclusive dans le domaine de la culture, les institutions européennes ont manifesté leur volonté de déployer des efforts considérables dans l’objectif d’intégrer la diversité culturelle à toutes les politiques pertinentes. L’entrée en vigueur de la Convention de 2005 renforce et influence directement cette tendance de l’UE.

Ainsi, la Commission européenne a lancé en 2007 l’idée d’un Agenda européen de la culture à l’ère de la mondialisation[6], le premier document politique global consacré à la culture au niveau de l’UE. Cet Agenda vise trois objectifs stratégiques communs dont la promotion de la diversité culturelle et du dialogue interculturel, de la culture en tant que catalyseur de la créativité et de l’innovation, ainsi que de la culture dans les relations internationales[7]. Ces objectifs guident l’action culturelle de l’UE et permettent la mise en place de nouvelles méthodes de travail pour le développement de partenariats culturels entre les institutions européennes, ses États membres et les acteurs culturels[8].

De plus, la Commission européenne a adopté un programme de coopération internationale dans le secteur audiovisuel, le programme MEDIA Mundus, dont l’objectif principal est d’intensifier les relations culturelles et commerciales entre le secteur audiovisuel européen et les créateurs des pays tiers[9]. Outre divers programmes et projets, plusieurs institutions européennes ont adopté des résolutions ou des conclusions faisant partie du droit dérivé contraignant pour les États membres, afin de promouvoir la diversité culturelle, le dialogue interculturel ainsi que la mise en oeuvre des dispositions de la Convention de 2005 au sein de l’ordre juridique de l’UE. À titre d’exemple, on peut citer la Résolution sur le statut social des artistes, adoptée par le Parlement européen en 2007[10]. En se référant explicitement à la Convention de 2005, le Parlement souhaite encourager la mobilité des artistes, en proposant différentes initiatives aux États et aux institutions européennes, dont l’établissement d’un registre professionnel européen pour les artistes[11]. De même, il invite la Commission à « réfléchir sur les systèmes actuels de visa et de permis de travail pour les artistes ainsi qu’à ébaucher une réglementation communautaire dans ce domaine[12] ».

De nombreux autres politiques et programmes mis en place par l’UE ont aussi une incidence sur les affaires culturelles et la diversité culturelle[13].

Notamment, il convient de mentionner la mise en place d’un nouveau programme-cadre de l’UE, Europe Créative, dédié aux secteurs culturels et créatifs pour la période 2014-2020[14]. Ce programme, doté d’un budget de 1,4 milliard d’euros, a comme objectif, pour 2020, un renforcement de la diversité artistique et culturelle européenne et de la compétitivité de ces secteurs afin d’en faire des atouts du rebond européen[15]. Il vise également à : soutenir la capacité des secteurs culturels et créatifs à opérer à l’échelle transnationale et internationale; à favoriser la circulation transnationale des oeuvres culturelles et créatives et la mobilité des acteurs culturels et créatifs, en particulier les artistes; ou encore à favoriser l’innovation, la créativité, le développement de l’auditoire, l’élaboration de politiques et la mise en place de nouveaux modèles économiques et de gestion, grâce à l’appui de la coopération politique transnationale[16].

L’ensemble de l’analyse ci-dessus nous permet de constater la présence d’un nombre important de mesures, tant déclaratoires que contraignantes, adoptées par les institutions européennes visant à intégrer le respect des divers aspects de la diversité culturelle et de la Convention de 2005 dans les politiques internes. Il s’agit à présent d’observer les actions de ces institutions dans le domaine audiovisuel, un secteur bien représentatif de leur volonté de promouvoir la Convention de 2005.

B. Le cas spécifique du domaine de l’audiovisuel

Les oeuvres audiovisuelles sont considérées comme un vecteur fondamental de transmission des valeurs culturelles au sein d’une société. À l’origine, la Communauté européenne n’était pas compétente dans le domaine de la radiodiffusion. Avec l’introduction de l’article « culturel » du Traité de Maastricht, la Communauté a vu ses fonctions s’élargir, afin d’encourager la coopération entre les États membres, ainsi que de soutenir et de renforcer leurs actions dans le secteur de l’audiovisuel[17].

La Directive « Télévision sans frontières » (Directive TSF) adoptée en 1989 représente le noyau dur du cadre réglementaire de l’UE dans le secteur de l’audiovisuel. Elle a mis en place des conditions régissant une libre circulation des programmes télévisés à l’intérieur du marché unique de l’UE[18]. Deux dispositions, soit les articles 4 et 5, visent la réalisation « d’objectifs culturels, tout en garantissant l’équilibre de l’offre sur les marchés européens de radiodiffusion[19] ». Ces règles ont été mises en place longtemps avant l’adoption de la Convention de 2005, en raison de la volonté exprimée par certains États membres, de réserver un espace de temps d’antenne pour les productions autres qu’américaines, afin de protéger les identités culturelles ainsi que les langues nationales[20].

La Directive TSF a fait l’objet d’une première révision en 1997[21], puis d’une seconde en 2007, par la Directive Services de médias audiovisuels sans frontières (Directice SMAF)[22]. Le processus de révision de la Directive TSF a débuté en 2003, en même temps que les négociations de la Convention de 2005. Le rôle majeur joué par l’UE en faveur de l’adoption de cette Convention de 2005 a amené la Commission européenne à insister, lors de la révision de la Directive TSF, sur l’amélioration de la prise en compte de l’objectif de promotion de la diversité culturelle, y compris dans le domaine des services non linéaires[23]. L’une des raisons principales de cette révision était de prendre en compte les développements technologiques et les changements apparus dans la structure du marché de l’audiovisuel[24]. La diversité culturelle et la promotion des productions européennes et indépendantes restent la priorité de la Directive SMAF[25]. À cette fin, cette dernière devait maintenir un équilibre entre une libre circulation des médias audiovisuels et la préservation de la diversité culturelle européenne à l’ère du numérique, tout en respectant les principes de subsidiarité et de proportionnalité inhérents à l’UE[26].

Récemment, dans le cadre de sa stratégie pour un marché unique numérique en Europe[27], la Commission européenne a proposé une version actualisée de la Directive SMAF afin de refléter les évolutions du marché et de la consommation avec les progrès technologiques[28]. À l’heure actuelle, les spectateurs regardent des contenus vidéo non seulement sur leurs chaînes de télévision, mais aussi, de plus en plus, en se tournant vers des services de vidéo à la demande, comme Netflix ou MUBI ou encore vers les plateformes de partage de vidéos, telles que YouTube et Dailymotion. Ainsi, en proposant cette version actualisée de la réglementation de l’UE en matière d’audiovisuel, la Commission européenne entend parvenir à un meilleur équilibre des règles qui s’appliquent aujourd’hui aux organismes traditionnels de radiodiffusion télévisuelle, aux fournisseurs de vidéos à la demande et aux plateformes de partage de vidéos[29]. Également, cette nouvelle version de la Directive SMAF vise à renforcer la promotion de la diversité culturelle européenne, à garantir l’indépendance des autorités de régulation de l’audiovisuel, ainsi qu’à offrir une plus grande souplesse aux organismes de diffusion en matière de publicité[30].

En conclusion, on peut affirmer que la préoccupation de sauvegarder le domaine de l’audiovisuel par les États membres de l’UE était bien présente avant l’entrée en vigueur de la Convention de 2005, ce dont témoigne la Directive TSF et ses articles 4 et 5. De même, l’adoption de la Directive SMAF, ainsi que la proposition d’actualisation de celle-ci témoignent d’un engagement continu de la part de cette organisation régionale de poursuivre son objectif de protection de la diversité culturelle dans une nouvelle ère du numérique. Ainsi, la Convention de 2005 a exercé une influence considérable sur le cadre réglementaire actuel de l’UE relatif à l’audiovisuel[31].

II. L’impact de la Convention de 2005 sur les actions extérieures de l’UE : la conclusion des accords commerciaux bilatéraux et régionaux

L’intégration des différents aspects de la diversité culturelle par l’UE dans ses actions extérieures, dont la promotion des objectifs et principes de la Convention de 2005, se manifeste tant dans le domaine de la coopération internationale pour le développement[32] que dans le domaine des accords commerciaux bilatéraux et régionaux. Dans le cadre de cet article, nous nous attarderons plus particulièrement à l’impact de la Convention de 2005 sur la conclusion des accords commerciaux bilatéraux et régionaux par l’UE au cours des dernières années.

Une récente étude scientifique[33] a examiné 59 accords commerciaux bilatéraux et régionaux conclus entre des États de tous les continents, après l’adoption de la Convention de 2005. Cette étude démontre que le modèle d’accord le plus novateur est celui développé par l’UE auquel est annexé un Protocole de coopération culturelle [PCC]. Ce modèle a été retenu pour trois des 59 accords examinés, soit les accords conclus par l’UE avec les États du Cariforum[34], la République de Corée et les États d’Amérique centrale[35]. À ce jour, les trois PCC annexés aux accords de commerce incorporent quelques références explicites à la Convention de 2005 et renvoient à l’acte de ratification de cet instrument juridique par les parties. Ils contiennent des dispositions visant spécifiquement la coopération dans le domaine de la culture et, dans certains cas, incorporent des références à la diversité culturelle, à la coopération culturelle ou encore au développement culturel[36].

Afin de mieux analyser l’impact de la Convention de 2005 dans le domaine commercial, il convient à présent de nous intéresser au contenu des trois PCC annexés aux trois accords conclus par l’UE (A). Par la suite, nous nous attarderons sur l’impact de la mise en oeuvre des dispositions de ces PCC en prenant l’exemple plus particulièrement de l'Accord de Partenariat économique UE-Cariforum (B).

A. Contenu des PCC : un moyen de mise en oeuvre des articles 16 et 21 de la Convention de 2005

Les PCC visent plusieurs objectifs, dont le renforcement des capacités, et l’indépendance des industries culturelles des parties, la promotion des contenus culturels régionaux et locaux, ainsi que la reconnaissance, la protection et la promotion de la diversité culturelle[37]. De même, ils prévoient l’attribution d’un traitement préférentiel au bénéfice de chacune des parties. Ce traitement comprend trois volets dont le premier se réfère à l’admission et au séjour temporaire d’artistes et d’autres professionnels de la culture[38]. Un deuxième volet s’intéresse à la négociation de nouveaux accords de coproduction ainsi qu’à la mise en oeuvre d’accords existants entre une ou plusieurs parties aux accords[39]. Par ailleurs, les PCC annexés à l’ALE UE-Corée et à l’ALE UE-Cariforum contiennent un troisième volet portant sur l’accès commercial préférentiel des oeuvres audiovisuelles[40]. Enfin, les trois PCC visent une coopération culturelle dans des secteurs autres que celui de l’audiovisuel, dont les arts du spectacle vivant, les publications et la protection de sites du patrimoine culturel et de monuments historiques[41].

Outre les PCC, plusieurs accords commerciaux conclus par l’UE prévoient un traitement particulier pour les biens et services culturels[42]. Par le biais d’une exemption culturelle, ces accords excluent les services audiovisuels de leur champ d’application, et plus spécifiquement de leurs sections ou chapitres consacrés à la fourniture transfrontière de services et à l’établissement d’une présence commerciale[43].

L’ensemble de cette analyse nous amène à déduire que l’UE et ses États membres démontrent ouvertement leur volonté d’articuler d’une manière harmonieuse leurs engagements commerciaux avec les règles de la Convention de 2005[44]. De plus, les multiples dispositions des PCC, ainsi que le traitement accordé à certains biens et services culturels, reflètent la volonté de l’UE de mettre en oeuvre la Convention de 2005 dans ses relations extérieures, ainsi que de promouvoir et de protéger la diversité culturelle dans d’autres enceintes internationales.

Par contre, on constate un changement de comportement de la part de l’UE à l’égard de la promotion des objectifs et principes de la Convention de 2005 lors de la conclusion du nouvel Accord économique commercial global avec le Canada[45]. Au sein de cet accord, les parties ont retenu une exemption culturelle de portée « asymétrique », incorporée dans un nombre limité de chapitres[46]. En ce qui concerne plus spécifiquement la portée de cette exemption culturelle, l’UE bénéficiera d’une exemption limitée aux services audiovisuels. Ainsi, certaines industries culturelles, comme celles des secteurs du livre et de l’édition se verront contraintes de respecter les règles de l’AECG, ce qui pourrait remettre en question certaines politiques culturelles actuellement en vigueur[47]. Bien qu’une référence aux objectifs de la Convention de 2005 soit incorporée au sein du préambule de l’AECG[48], on constate, selon la lecture de cet accord, que l’UE a adopté un comportement beaucoup moins protecteur des principes et objectifs de la Convention de 2005 par rapport à celui adopté lors de la conclusion de ses précédents accords commerciaux assortis de PCC. Après plusieurs années suivant la conclusion des accords commerciaux assortis d’un PCC par l’UE, on peut se demander quels sont aujourd’hui les impacts réels de la mise en oeuvre des dispositions de ces PCC?

B. L’impact de la mise en oeuvre des PCC annexés aux accords commerciaux conclus par l’UE

Plusieurs études et rapports témoignent, jusqu’à présent, d’une mise en oeuvre assez faible, voire inexistante des dispositions du PCC de l’ALE UE-Cariforum et de l’ALE UE-Corée. À titre d’illustration, le rapport sur l’examen quinquennal de la mise en oeuvre de l’ALE UE-Cariforum de 2015[49], souligne qu’il y a une promotion et une utilisation très limitée des dispositions du PCC par les deux parties visant à améliorer et à renforcer les opportunités pour les artistes et autres professionnels de la culture. Ainsi, de nombreuses difficultés ont été repérées quant à l’entrée sur le marché de l’UE des prestataires de service du Cariforum (on se réfère aux chanteurs, danseurs, etc.). Ils sont peu nombreux à être entrés dans les marchés de l’UE tel que cela est prévu par l’accord. Cet accès des prestataires de services du Cariforum à l’UE est surtout freiné par les obstacles rencontrés dans le cadre de l’obtention de visas Schengen et surtout dans le cadre de la procédure d’obtention des visas de travail ou de séjour temporaire qui est assez complexe.

Ces obstacles nuisent considérablement à une mise en oeuvre réelle et effective des dispositions du PCC relatives au traitement préférentiel accordé aux artistes et autres professionnels de la culture des deux parties. Notamment, il est précisé que les modalités liées au secteur des industries culturelles ne sont pas encore mises en oeuvre par les parties. L’une des raisons de cette faible mise en oeuvre étant des ressources financières et humaines faibles tant aux niveaux national que régional des pays des Caraïbes. Dans ce cas, les deux parties sont plutôt invitées à activer et à renouveler leurs engagements à l’égard des principes et objectifs du PCC. De cela témoigne l’adoption très récente de la Résolution de la 105e session du Conseil des Ministres du groupe ACP tenue en mai dernier 2017, qui invite l’UE « à honorer ses obligations en ratifiant l’APE Cariforum-UE, et en permettant à cette région d’en tirer parti, notamment à travers le commerce des services et de la coopération culturelle, […] et en outre, à prendre les mesures nécessaires pour mettre en oeuvre un régime de visa spécial destiné à appuyer l’accès au marché pour les fournisseurs de services du Cariforum[50] ».

Cependant, il convient de mentionner quelques actions positives qui ont été entreprises jusqu’à présent, par les deux parties, et qui visent à mettre en oeuvre les dispositions du PCC. À titre d’exemple, la Commission européenne s’est engagée en 2014 à faciliter l’entrée et le séjour temporaire des praticiens de la culture, ainsi que d’alléger les procédures d’obtention des visas touristiques[51].

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L’ensemble des analyses menées tout au long de cet article nous permet d’observer que le respect de la diversité des cultures fait partie du processus d’intégration européen depuis les années 1950. À l’heure actuelle, la notion de la diversité culturelle y est affirmée comme une valeur fondamentale du processus d’intégration européen. Elle est mentionnée au sein des traités constitutionnels, de la Charte des droits fondamentaux de l’UE[52], ainsi qu’au sein de nombreux documents des institutions européennes[53].

Le rôle fondamental joué par l’UE dans l’adoption de la Convention de 2005, son engagement actif dans la mise en oeuvre de cet instrument juridique, autant dans son ordre interne que dans ses relations extérieures, témoignent de sa volonté et de celle de ses États membres de protéger la diversité culturelle et plus particulièrement la diversité des expressions culturelles.

Dans le domaine du commerce, l’UE a adopté le modèle d’accord le plus novateur auquel est annexé un PCC mettant en oeuvre les articles 16 et 21 de la Convention de 2005. À ce jour, ce modèle a été retenu pour trois des 59 accords examinés, à savoir les ALE UE-Cariforum, ALE UE-Corée et ALE UE-Amérique centrale. Ce sont les seuls trois à incorporer des références explicites à la Convention, à réserver un statut particulier à certains services culturels, à procéder à une libéralisation par voie de liste positive d’engagements et à prévoir un traitement préférentiel spécifique pour les biens et services culturels, les artistes et les professionnels de la culture des parties[54]. En revanche, on a pu constater une faible, voire inexistante mise en oeuvre de ces PCC dans les systèmes juridiques nationaux des parties.

Également, il convient de souligner un changement de comportement de la part de l’UE lors de la conclusion des récents accords commerciaux. C’est l’exemple de l’AECG dans lequel l’UE a adopté un comportement beaucoup moins protecteur des principes et objectifs de la Convention de 2005 par rapport à celui adopté lors de la conclusion de ses précédents accords commerciaux assortis de PCC. De plus, ces dernières années, l’UE a conclu plusieurs accords de libre-échange ou de partenariat économique, non assortis d’un PCC. Aucun de ces accords ne mentionne explicitement la Convention de 2005 et n’octroie aucun traitement particulier aux biens et services culturels[55]. Il reste à voir si l’UE continuera dans l’avenir à incorporer le PCC lors de la conclusion de nouveaux accords commerciaux, et de cette façon, rester le fervent défenseur des objectifs et principes de la Convention de 2005 dans le domaine du commerce international.