Abstracts
Résumé
À propos de la place de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec dans la structure de l’ordre juridique québécois, Jacques-Yvan Morin a parlé d’une constitutionnalisation progressive. Pourtant, son caractère « quasi constitutionnel » ne rend pas véritablement justice à la Charte, qui reste un texte unique dans l’histoire législative du Québec. Cet article s’inspire de Morin, qui n’a cessé de soutenir qu’il fallait réserver à la Charte une place se situant au sommet de la hiérarchie des normes. Il discute de la primauté de la Charte sur les lois ordinaires, ainsi que de l’intégrité du contenu de ce texte, qui depuis 1975 se veut le symbole des valeurs de la société québécoise. Dans un premier temps, les auteurs mettent en lumière l’ambiguïté inhérente à la notion même de quasi-constitutionnalité. Il est de moins en moins défendable de nier au texte québécois, au prix d’une occultation de son caractère spécifique, le statut d’une véritable loi fondamentale, de caractère constitutionnel. Dans un deuxième temps, les auteurs soulignent que la Charte est loin d’être à l’abri de régressions dues aux vicissitudes du jeu politique, bien qu’elle ait fréquemment été bonifiée au fil du temps et ce, de manière largement consensuelle. Il serait aujourd’hui dans l’ordre des choses que le processus de « constitutionnalisation progressive » que Jacques-Yvan Morin a promu, accompagné politiquement et admirablement décrit dans ses travaux finisse par trouver son aboutissement historique dans une constitutionnalisation explicite des dispositions de la Charte. Il s’impose en effet de reconnaître aujourd’hui, de façon explicite, la Charte québécoise pour ce qu’elle représente pour la société québécoise : une loi fondamentale possédant un caractère constitutionnel.
Abstract
“A gradual constitutionalization” is the phrase used by Jacques-Yvan Morin to describe the process through which the Québec Charter of Human Rights and Freedoms is gradually finding its place in the structure of the Québec legal order. However, its so-called “quasi constitutional status” does not really do justice to the Charter, which remains unique in our legislative history. Inspired by Morin, who consistently argued that the Charter should stand at the top of the hierarchy of legal norms, this paper discusses the supremacy of the Charter over ordinary laws, as well as the integrity of its substantive content, keeping in mind that, since 1975, the Charter has embodied the values of Québec society. Part I stresses the inherent ambiguity in the very notion of a quasi-constitution. It argues that, short of denying the Charter its specific status it is becoming increasingly difficult to ignore its nature as a fundamental constitutional law. Part II stresses the fact that, although it has frequently been improved, largely on the basis of broad consensus, the Charter remains highly vulnerable to the vagaries of politics and potential regressions. A logical step forward into the above-mentioned process of “gradual constitutionalization” would be an explicit recognition of the Charter’s constitutional status, a fitting outcome to a process that Jacques-Yvan Morin has so aptly promoted and analyzed in both his academic and political life. Nothing should now stand in the way of explicitly recognizing the Charter for what it means for Québec society: a fundamental law of a constitutional status.
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