Comptes rendus

Ennio Morricone. Et pour quelques notes de plus..., dirigé par Chloé Huvet, Dijon, Éditions Universitaires de Dijon, 2022, 320 pages[Record]

  • Guillaume Debay

Au cours de mon dernier voyage en Europe, un élément surprenant s’est immiscé dans mon horizon littéraire : un ouvrage collectif de 2022 intitulé Ennio Morricone.Et pour quelques notes de plus… et produit sous la direction de Chloé Huvet, maîtresse de conférences à l’Université d’Évry-Val-d’Essonne – Paris Saclay. Ce livre, en partie issu d’un colloque organisé en 2021 dans la même université, s’est frayé un chemin au coeur de mon été, se distinguant parmi des ouvrages plus généralistes tels que Ennio Morricone. Entre émotion et raison, Ennio Morricone ou le poison d’une oeuvre, ou encore Ennio Morricone. Perspective d’une oeuvre. Se décrivant comme « le premier ouvrage scientifique français » dédié au compositeur italien, ce nouveau volume aspire à étudier et honorer l’une des personnalités musicales les plus renommées et productives de l’histoire du septième art. À cet effet, il ambitionne de poser de nouveaux jalons dans la connaissance de l’oeuvre de Morricone, ainsi que de rendre hommage à ce dernier, en remplissant trois objectifs : Cet écrit non chronologique s’organise en trois parties, reléguant le début de la carrière de Morricone avec Sergio Leone à la fin du volume, plus précisément après l’étude de ses créations destinées à d’autres genres cinématographiques. Le livre, de type pluridisciplinaire, rassemble 12 chercheurs en musicologie, en études cinématographiques, et des compositeurs pour l’image, tous présentés dans l’efficiente introduction rédigée par Huvet. À la suite d’un court rappel du parcours de Morricone et de son style, celle-ci résume chacune des contributions et expose leurs intentions quant à l’objectif d’appréhender le travail du maestro dans le contexte du film, ainsi que d’étudier ses pièces de concert pour mieux cerner les spécificités, mais également les paradoxes, de son travail. Pour éviter toute répétition, je choisis une approche plus libre qui synthétise ce qui m’a semblé innovant, marquant et éducatif dans chaque apport. La première partie, « Au coeur des expérimentations Morriconiennes » (p. 25-95), comporte quatre chapitres se concentrant sur le style du compositeur italien, notamment dans le western, ainsi que sur son évolution entre la fin des années 1960 et le début des années 1980. Le professeur Roberto Calabretto débute ses explications en exposant dans le premier chapitre (« Ennio Morricone, entre musique absolue et cinéma », p. 25-45) certaines techniques et autres procédés d’écriture du compositeur italien, comme ses « partitions modulaires » (p. 32) développées grâce au synthétiseur synket inventé par l’ingénieur Paolo Ketoff et découvert dans le cadre des activités du groupe d’avant-garde Gruppo di Improvvisazione di Nuova Consonanza dont le maestro était un membre fondateur en 1964. Il y cite également « l’immobilité dynamique » (p. 38), technique engendrée par le processus de simplification harmonique présent dans ses oeuvres, dont la description fait grandement écho à l’écriture statique du compositeur français Claude Debussy. Calabretto mentionne aussi les inspirations du maestro qui, se sentant appartenir à une génération post-weberienne, composait en fixant des paramètres précis tels que les hauteurs, les valeurs, les pauses, le timbre, le rythme qu’il traitait de façon rigoureuse à l’instar de la précision de la musique de la seconde école de Vienne. Le compositeur américain John Cage le poussera à considérer que le hasard soit possible en musique. Luigi Nono, son confrère de l’avant-garde italienne, le conduira à trouver un dénouement à la dualité existante entre la rigueur formelle et l’expression sensible par l’absolutisation du timbre. Ces rencontres et son travail avec Nuova Consonanza permettront à Morricone d’approfondir la recherche du timbre de son écriture, et de créer l’emblématique leitmotiv timbral du western spaghetti. Dans le deuxième chapitre (« Émergence et affirmation d’une esthétique morriconienne …

Appendices