Comptes rendus

Led Zeppelin. Contexte, analyse, réception, dirigé par Philippe Gonin, Coll. Musiques, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2021, 240 pages[Record]

  • Benoît Navarret

Dans son introduction intitulée « Stairway to Heaven. L’irrésistible ascension de Led Zeppelin (1969-1971) » (p. 5-16), Philippe Gonin présente l’ouvrage dans le contexte de la littérature académique existante en France et à l’étranger. Il en montre la pertinence par les nouveaux outils d’analyse qui y seront présentés ainsi que des recherches musicologiques qui intègrent des études du sonore et de la perception. Sans retracer une biographie du groupe – ce qui n’est pas vraiment attendu non plus –, l’allusion bienvenue à Jeff Beck permet toutefois de revenir aux origines du groupe, puis de souligner l’importante contribution de Jimmy Page (guitariste, production, composition) et de John Bonham (batteur) au sujet duquel peu d’écrits existent encore malgré l’héritage sonore et musical qu’il a laissé à l’histoire du rock. La première partie, « Contexte » (p. 17-62), comprend ensuite les textes de Pierre Michel (« Led Zeppelin et Jimmy Page dans le contexte du folk-rock anglais ») et de Jean-René Larue (« Les processus de création de Led Zeppelin à travers l’analyse de liens d’hypermusicalités »). Pierre Michel interroge les influences folk de Led Zeppelin et relativise la notion de plagiat qui a été reprochée au groupe dans leur exploitation de certaines sources d’inspiration. Les analyses comparées de versions originales et de leurs adaptations ont le mérite de souligner le contexte communautaire des artistes et des phases de transition stylistique qui fragilisent nécessairement la question de catégories esthétiques souvent difficiles à définir du fait de leurs frontières perméables. Elles soulignent ainsi les capacités de réinterprétation, de réappropriation dans une approche syncrétique qui constitue l’essence du renouveau stylistique apporté par Led Zeppelin. L’analyse porte sur les figures de style, les cellules mélodico- rythmiques, le placement rythmique (et les syncopes), les aspects formels et la gestion de la longueur des chansons, le son et les arrangements vocaux. Cet article parvient à poser un regard plus tolérant sur la notion de plagiat et livre des pistes intéressantes d’analyse, avec un accent sur le réarrangement en lien avec l’héritage des artistes folk tels que Fairport Convention, Sandy Denny, Davy Graham ou Roy Harper, qui ont influencé par leur poésie et leurs approches musicales toute une génération de jeunes artistes anglais tels que Robert Plant et Jimmy Page. Dans un prolongement certain, Jean-René Larue pose la question du procédé de la réécriture et reprend le prétexte des allégations pour plagiat comme fil conducteur des analyses stylistiques de quelques chansons de Led Zeppelin, en miroir des sources originales. Cette approche méthodique, titre après titre, permet de retracer les influences respectives des artistes de l’époque, leurs sources d’inspiration, sans occulter les travers de crédits non mentionnés – de manière abusive… ou pas. Il parvient à proposer un classement selon l’hypermusicalité en fonction de trois critères (transposition, forgerie, mirage palimpsestique) qui sont clairement définis dans l’article. Les analyses s’appuient sur des résultats statistiques, des comparaisons rigoureuses et l’usage des matrices de similarités dont il est ainsi possible d’avoir un exemple d’application en musicologie. Ce texte présente aussi l’intérêt de survoler l’anecdote d’un contexte juridique médiatisé pour justifier des choix de corpus, en extraire des processus créatifs et parvenir, comme Pierre Michel, à une relativisation des éléments de plagiat… une sorte de procès révisé par un juge de paix aux arguments musicologiques. La partie « Analyse » (p. 63-183) réunit plus de la moitié des textes de l’ouvrage. Elle comprend les textes de Philippe Lalitte (« Procédés déceptifs et attentes musicales chez Led Zeppelin »), Maxime Cottin (« Aux frontières du Rock Progressif. Le maximalisme musical dans les compositions “épiques” de Led Zeppelin, entre 1971 et 1976 »), Laurent Pottier …

Appendices