Comptes rendus

Music in the Present Tense. Rossini’s Italian Operas in Their Time, par Emanuele Senici, Chicago, The University of Chicago Press, 2019, 358 pages[Record]

  • Federico Volpe

Professeur de Musicologie et Histoire de la musique à l’Université La Sapienza de Rome, Emanuele Senici s’intéresse à l’opéra italien du « long xixe siècle », à la théorie et l’historiographie de l’opéra – en relation avec les questions des genres musicaux notamment – et au rapport entre opéra et vidéo. Grand spécialiste de Gioachino Rossini, comme démontré, entre autres, par sa direction de l’ouvrage collectif The Cambridge Companion to Rossini (Cambridge University Press, 2004), l’auteur donne le jour en 2019 au livre Music in the Present Tense, où il analyse les opéras italiens de Rossini composés entre 1810 et 1825. Comme il le fait observer, ces opéras étaient destinés spécifiquement au public italien, dans le contexte des tensions politiques et sociales et des transformations idéologiques de l’époque. Mais les idées, les craintes et les espérances des Italiens du début du xixe siècle étaient partagées par les autres populations européennes contemporaines, ce qui explique la rapide diffusion des opéras de Rossini dans les pays d’Europe continentale. L’enquête de Senici s’arrête en 1825, année après laquelle Rossini – qui avait gagné plus de prestige que tous les autres compositeurs de la même époque – n’a plus composé d’opéras italiens ; aussi, les principales caractéristiques du style rossinien consolidées durant cette première période de sa vie ne se sont plus beaucoup développées dans les années suivantes. Le livre est divisé en deux parties. Dans la première (p. 21-123), l’auteur concentre son attention sur les aspects techniques caractéristiques du style de Rossini, comme l’imitation, la répétition, l’auto-emprunt ou la question du genre musical. Dans la seconde (p. 125-274), Senici aborde des thèmes plus généraux concernant, par exemple, la modernité, le théâtre ou le répertoire, et il contextualise les opéras de Rossini dans le monde culturel de son temps. Le premier aspect que Senici met en évidence pour illustrer les caractéristiques du style rossinien est l’imitation, étroitement liée à l’expressivité. Cette caractéristique est en outre présentée dans le cadre du rapport entre la musique et les mots. En effet, si l’on considère que – selon la conception esthétique de la musique vocale de la fin xixe siècle-début xxe siècle – le but de la musique est l’implication émotionnelle de l’auditeur, seule la musique qui se trouve dans un rapport d’imitation avec le texte peut exprimer de tels sentiments. Dans le cas de Rossini, chaque nouvel opéra était jugé par les critiques, entre autres, sous cet angle de l’accompagnement musical du texte, en évaluant si l’atmosphère donnée par la musique correspondait à la signification des paroles ou s’il y avait trop de distance entre l’une et l’autre. Cette considération était faite souvent en comparant Rossini avec ses prédécesseurs, spécialement les compositeurs napolitains. Rossini, de ce point de vue, avait souvent une attitude différente de ses prédécesseurs, comme de beaucoup de ses contemporains, par sa tendance à réemployer de la musique composée dans ses pièces antérieures pour l’insérer dans ses nouvelles oeuvres (par exemple, dans la cantate Le nozze di Teti e di Peleo de 1816 ; voir p. 23-30). Parmi les défenseurs de Rossini, le critique Giuseppe Carpani affirmait que la musique devait avoir et suivre sa propre logique et non celle du texte. Un deuxième élément identifié par Senici pour caractériser la musique de Rossini est la répétition. Avec ce terme, on se réfère tant à de petits morceaux qu’à de plus amples parties d’une pièce musicale. Par exemple, le crescendo (qui est considéré comme l’un des éléments les plus typiques des opéras de Rossini depuis l’époque du compositeur) se construit sur la répétition d’une même phrase de l’orchestre …

Appendices