
Volume 3, Number 2, 2018 L'engagement des jeunes dans les diverses sphères de la vie Première partie Guest-edited by Diane Farmer and Nicole Gallant
Table of contents (7 articles)
Articles
-
Présentation du numéro
-
L’engagement : lieu d’expression des valeurs chez les jeunes
Chantal Royer
pp. 7–20
AbstractFR:
Cet article porte sur le sens que des jeunes donnent à l’engagement et les manières dont cet engagement prend forme, ou non, dans leur vie. Il présente les résultats d’une analyse secondaire réalisée de manière inductive à partir des données de deux enquêtes qualitatives sur les valeurs des jeunes. L’échantillon compte 70 participants âgés de 14 à 25 ans rencontrés dans le cadre d’entretiens individuels menés dans la période allant de 2003 à 2010; les propos de 59 d’entre eux ont été retenus aux fins de l’analyse. Les résultats contribuent à mettre en lumière le sens et l’importance de l’engagement pour les jeunes, les formes de leur engagement, ainsi que des profils de jeunes engagés et celui d’autres jeunes qui le sont moins. L’engagement des jeunes varie selon ce qui semble important à leurs yeux et cela va de leur propre vie à un intérêt avéré, voire une attirance, pour de grandes causes sociales. Par ailleurs, si l’engagement ne se dessine pas comme une valeur en tant que telle, il apparaît néanmoins comme un lieu où s’expriment des valeurs, dont celles associées à l’entraide, comme pressenti, mais aussi à la famille, à l’amitié, aux études et au travail, des dimensions de la vie des jeunes qui orientent leur engagement. En fin d’analyse, des pistes sont envisagées pour favoriser l’engagement chez les jeunes.
-
L’engagement des cégépiens en contexte de migration pour études : une réciprocité incontournable
Julie Mareschal and Éric Richard
pp. 21–37
AbstractFR:
Chaque année, plusieurs jeunes Québécois quittent leur région pour entamer des études collégiales. La migration pour études, c’est-à-dire un déplacement à plus de 80 kilomètres de son milieu d’origine, touche environ 15 % de la population collégiale (Richard, 2017). Outre la transition entre le secondaire et les études supérieures, l’intégration aux études collégiales pose de nombreux défis pour ces jeunes : éloignement, adaptation à un nouveau milieu, nouvelles responsabilités (tâches ménagères, repas, budget, etc.) et dynamique relationnelle en mouvance. À partir d’entretiens effectués auprès de migrants pour études à propos de leur parcours, de leur motivation, de leurs difficultés et des stratégies déployées pour surmonter les défis rencontrés, ce texte explore le sens et les formes d’engagement associées à cette expérience. Ces différentes manifestations sont décrites à travers trois composantes associées à la notion d’engagement académique : cognitive, affective et sociorelationnelle. L’analyse montre que les manifestations d’engagement de ces cégépiens dépassent largement le pari de la réussite scolaire. Migrer pour ses études collégiales pousse l’individu à s’engager dans différentes sphères de sa vie : académique, professionnelle et citoyenne. Enfin, cet article ouvre également la réflexion sur le caractère réciproque de la notion d’engagement en abordant le rôle des cégeps dans le processus d’intégration de ces jeunes.
-
La conciliation travail-famille : un engagement pluriel qui se conjugue à l’indicatif présent et qui s’accorde au féminin
Dominique Morin, Sylvie Fortier and Frédéric Deschenaux
pp. 38–57
AbstractFR:
Expression d’une revendication devenue un problème social et organisationnel ainsi qu’une expérience parentale ordinaire, la conciliation travail-famille est vécue dans une pluralité de significations par les jeunes qui y sont engagés. Cet article examine l’importance accordée au travail et à la famille par de jeunes parents d’enfants d’âge préscolaire, en décrivant comment ils parviennent, au quotidien, à composer avec les exigences d’exister dans et hors de la vie familiale. Les analyses présentées s’appuient sur 49 entretiens semi-dirigés portant sur les vies de familles et se concentrent sur les questions touchant le parcours scolaire et professionnel, la conciliation travail-famille et la description de l’horaire quotidien typique. Certaines régularités apparaissent, comme le recentrement de la vie autour des enfants, la volonté de passer du temps de qualité avec eux et l’effort de maintenir une stabilité de leur horaire, ce que les parents s’imposent comme un idéal ou un étalon. Si plusieurs stratégies adoptées pour y arriver sont conjugales, il appert que les femmes font encore la majorité des concessions concernant les enfants et l’économie domestique de la famille. En outre, l’enquête suggère l’intérêt de recherches sur l’engagement en couple dans l’étude des parcours des jeunes : c’est en couple qu’ils négocient en situation avec leurs responsabilités, leurs contraintes de temps et la réalisation de leurs aspirations personnelles et familiales.
-
Le sens des processus d’engagement hors du champ politique chez les jeunes
Anne Quéniart
pp. 58–75
AbstractFR:
Dans ce texte, l’auteure revient sur deux des recherches qualitatives qu’elle a réalisées il y a quelques années, l’une qui comparait le parcours de vie et le sens donné à l’engagement de jeunes se définissant comme des consommateurs engagés à ceux de jeunes militant au sein de divers groupes ou associations et de partis politiques, l’autre qui analysait l’insertion de la pratique de don de sang dans la vie quotidienne des jeunes et analysait la convergence ou la concurrence entre des pratiques de don de sang et d’autres pratiques d’engagement civique chez les jeunes. En lien avec la réflexion amorcée lors du colloque de Baie-St-Paul de 2012 sur le processus d’engagement, elle y examine deux dimensions particulières de l’engagement : celle de la finalité de l’engagement de ces jeunes – pour quoi ou qui s’engagent-ils ? – et celle de la temporalité – comment s’insère l’engagement dans leur quotidien ? L’auteure montre que les processus d’engagement des jeunes sont fortement marqués par une porosité entre le privé et le public, les actes posés individuellement ayant toujours un sens et une portée collective. Les gestes de consommation responsable de même que le don de sang sont définis comme des actes de participation à la société, comme un « agir » pour changer les choses à leur échelle. Leurs pratiques individuelles sont également l’expression d’un souci de l’Autre, de son bien-être, que cet Autre soit lointain (producteurs du Sud) ou proche (petits commerçants, malades).
-
Se rattacher au monde. Considérations propédeutiques à l’analyse de l’engagement cosmopolite des jeunes adultes
Vincenzo Cicchelli
pp. 76–94
AbstractFR:
Cet article entend avancer quelques considérations propédeutiques à l’analyse d’un type d’engagement pour le monde, que j’appelle engagement cosmopolite, s’inscrivant dans un sentiment de rattachement à une commune humanité. Dans cet article, je pars de l’hypothèse que même dans un cadre qui dépasse les liens sociaux de proximité, et qui finit par embrasser le cercle ultime de l’humanité tout entière, l’individu peut éprouver un sentiment tel que la responsabilité en vienne à être considérée comme une réponse irrécusable, incessible et non résiliable à l’égard d’autrui. Je m’interroge sur la façon dont s’exprime ce sentiment lorsque des peuples, pouvant être éloignés sur le plan géographique, voire culturel, sont frappés par des événements tels des catastrophes nucléaires et environnementales, des attentats terroristes, des génocides. En exploitant une partie des entretiens menés en 2011 auprès d’une trentaine de jeunes adultes français, j’insiste sur cette forme de souci d’autrui qui peut être intelligible par la notion d’engagement cosmopolite. J’inscris l’analyse de cet engagement à l’intérieur d’un cadre général de socialisation cosmopolite de type éthique. Émerge l’idéal de l’individu cosmopolite : compétent sur le plan géopolitique, faisant preuve d’une certaine sollicitude, manifestant une forme de souci d’un autrui éloigné culturellement et géographiquement. Le repoussoir serait un individu cynique n’affichant aucune forme de sensibilité pour le sort des êtres humains.
-
Le point de vue de jeunes autochtones en milieu urbain sur leur parcours scolaire
Natasha Blanchet-Cohen, Giulietta Di Mambro, Geneviève Sioui and Flavie Robert-Careau
pp. 95–115
AbstractFR:
Dans cet article, nous explorons le cheminement scolaire et les sources de soutien de jeunes atikamekw vivant en milieu urbain et fréquentant des écoles publiques. Des entrevues menées dans le contexte d’une recherche-action mettent en lumière des parcours scolaires non linéaires, caractérisés par de multiples transitions scolaires étant donné la mobilité entre la communauté et la ville des familles autochtones. L’étude démontre que le milieu scolaire est souvent vécu comme une source de démotivation par les jeunes atikamekw de la ville de Joliette, surtout quand ils sont dirigés vers des classements en cheminement particulier au secondaire ou lorsqu’ils vivent de la discrimination. À la maison, on valorise l’assiduité à l’école, mais le sentiment des familles envers le milieu scolaire demeure ambivalent. Les pairs jouent un rôle variable : ils peuvent être tantôt des soutiens, tantôt des influences démotivantes. En trame de fond, la culture atikamekw est un élément prisé par les jeunes. Ils cherchent à la connaitre et à alimenter leur autochtonie à travers le partage relationnel au sein du groupe d’appartenance et d’un rassemblement collectif soutenu par un Centre d’amitié. Les jeunes naviguent et négocient dans un contexte complexe où la culture et les attentes familiales et scolaires sont parfois difficilement conciliables. Ainsi, leur agencéité s’exprime autant par le choix de rester à l’école que celui, parfois, de la quitter. Notre étude soulève le besoin de revoir l’approche dominante au « décrochage » scolaire et d’élargir la réflexion au-delà d’une problématique individuelle.