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Voici le troisième et dernier numéro thématique portant sur la pédagogie universitaire et le numérique en contexte de pandémie. Le premier faisait état de la transition rapide vers l’enseignement à distance. Le deuxième s’intéressait aux étudiants et aux dispositifs mis en place à leur intention. Le présent numéro cible le point de vue des enseignants et formateurs, ainsi que celui des établissements d’enseignement. Les textes de ce troisième opus présentent des études empiriques et des réflexions pédagogiques qui veulent contribuer à faire le point sur différentes facettes de ces changements vécus par les formateurs de plusieurs continents, et dans diverses disciplines.
Le premier groupe de 15 textes porte sur les formateurs. (1) Les entretiens de Godoi et de son équipe auprès de six formateurs universitaires brésiliens révèlent que les formateurs d’enseignants d’éducation physique ont dû trouver rapidement des pistes misant sur les nouvelles technologies pour atteindre les objectifs bien particuliers de leurs cours. (2) À l’Université de Montréal, Michelot et ses collègues font état des instruments d’évaluation mis en place par le Centre de pédagogie universitaire afin notamment de voir l’évolution du sentiment d’efficacité personnelle des enseignants ayant participé à un programme intensif d’activités visant à les aider à préparer leurs cours à distance. (3) Ndibnu-Messina Ethé et Kouankem proposent ensuite une réflexion sur le suivi des apprenants dans les cours à distance, qui pourrait mener à une politique officielle sur l’enseignement hybride à l’université au Cameroun. (4) Par la suite, c’est une grille d’indicateurs révélatrice de l’ingénierie de la formation à distance adoptée par des enseignants-chercheurs que Papadopoulou présente, après une analyse de corpus de cours et de scénarios pédagogiques associés aux réalités de la pandémie. (5) Cette « réingénierie » pédagogique est aussi soulignée par Munoz et ses collaborateurs, cette fois grâce à la participation d’un réseau d’écoles d’ingénieurs mettant l’accent sur le travail collaboratif et l’apprentissage par les pairs. (6) Du côté de la Côte d’Ivoire, Djede et Adon mettent en lumière les forces et les failles des politiques numériques de l’enseignement supérieur révélées dans le contexte de la crise de la COVID‑19. (7) Yerly et Issaieva présentent des défis semblables au plan des pratiques d’évaluation. (8) Caron aborde ensuite les caractéristiques et spécificités de l’enseignement à distance au moment de l’élaboration d’un tel dispositif lors de la migration forcée vers la distance. (9) De leur côté, St-Jean et Dupuis-Brouillette analysent l’impact d’activités misant sur la pédagogie active sur l’engagement des étudiants dans les cours à distance. (10) Au Maroc, Bouhafs fait un retour critique sur les nouveaux rôles de l’étudiant et de l’enseignant lors de l’utilisation de la plateforme Moodle dans des cours à distance. (11) Les résultats du sondage réalisé par Terrien et Güsewell dévoilent les difficultés, mais aussi les avantages de l’enseignement musical à distance afin d’assurer la continuité pédagogique, en mettant en évidence les exigences de certains changements en profondeur. (12) Lemieux propose ensuite une réflexion plus large sur les inégalités numériques mises au jour par le contexte pandémique, les types de difficultés qui en découlent et les conditions à mettre en place pour contribuer à les atténuer. (13) Les conclusions d’une enquête réalisée auprès d’enseignants permettent à Martin et à ses collaborateurs de tracer des profils d’usagers des outils numériques et d’analyser l’impact des usages existant chez les enseignants préalablement au confinement. (14) En médecine, cette fois, Defaveux et de nombreux pédagogues et praticiens belges démontrent comment leur département a réussi à s’adapter rapidement aux nouvelles exigences des travaux pratiques à distance, tout en s’assurant de la cohérence pédagogique des dispositifs. (15) Miras et Burrows fournissent des données intéressantes sur le lien entre les dispositifs pédagogiques d’urgence pour l’enseignement-apprentissage des langues, et l’introduction des pratiques numériques à plus long terme.
Un second groupe de 9 textes approfondit certains des thèmes déjà abordés, en privilégiant le point de vue des établissements, et en aborde de nouveaux, tels que l’enseignement clinique. On y examine notamment dans quelle mesure le numérique est venu à la rescousse de bon nombre d’établissements universitaires. (16) Ferreira-Meyers et Dlamini-Zwane présentent une recherche menée dans le petit Royaume d’Eswatini, en Afrique australe. Ils décrivent les pratiques mises en oeuvre par le personnel et les étudiants de deux universités pour s’adapter à la crise sanitaire, dans l’urgence et avec des moyens limités. (17) Dubruc décrit ensuite l’expérience menée dans une école d’ingénieurs française qui l’amène à tirer des leçons plus larges pour l’accompagnement des enseignants vers l’enseignement à distance. (18) Papi et ses collègues exposent les étapes qui leur ont permis d’élaborer et de mettre en place, à la demande des autorités gouvernementales, la formation « j’enseigne à distance » destinée au personnel enseignant du Québec. (19) Le texte de Bernatchez et Alexandre convie à une réflexion sur le concept de transition et de ses enjeux politiques et didactiques, en référence au passage à la formation à distance. (20) L’analyse des données issues des groupes de discussion menés par Cuerrier auprès de formateurs et d’apprenants du postsecondaire, lors de la pandémie, permet à la chercheuse de faire émerger des indicateurs reliés à la fracture numérique. (21) Capitanescu et son équipe reviennent sur la confrontation aux pratiques de la démarche clinique en formation qui a été provoquée par les nouveaux dispositifs d’enseignement hybride et à distance. (22) C’est sous l’angle d’une réflexion sur l’évaluation des apprentissages que Kozanitis aborde ensuite des thèmes apparentés, en développant une proposition d’utiliser le contexte pandémique comme une occasion pour évoluer vers des pratiques d’évaluation authentique. (23) De leur côté, Tremblay-Wragg et son groupe de travail se sont penchés sur l’utilisation de stratégies numériques proposées à 33 doctorantes et doctorants de six universités québécoises pour recueillir leurs commentaires dans le but d’en analyser les écueils, mais aussi de proposer des pistes pour venir en aide aux étudiants. (24) Enfin, Lessard et Boudreault soulignent la pertinence de la vidéoconférence comme substitut, en temps de crise, visant à maintenir l’apprentissage expérientiel nécessaire à la formation initiale en psychoéducation.
Des chercheurs de plusieurs régions du monde, de divers horizons et de diverses disciplines ont répondu à l’invitation que nous avions lancée au printemps dernier dans le but de mieux comprendre « le défi planétaire » imposé au monde de l’éducation par la soudaine crise sanitaire. Les textes retenus témoignent de la nécessité du partage, dans un contexte de transformation soudaine, de la connaissance, de la réflexion et de la pratique pédagogique. Cette troisième parution met un terme à notre dossier. D’entrée de jeu, on peut s’interroger sur un portrait aussi hétéroclite de la situation, mais l’engouement soulevé par la thématique témoigne de la nécessité de partager les expériences vécues. L’ensemble de ce dossier thématique met en lumière la diversité des perspectives et des pratiques développées pour assurer la continuité pédagogique et maintenir l’engagement des apprenants dans une grande variété de contextes. Il esquisse en filigrane les conditions du développement professionnel des enseignants dans un contexte où le numérique et la distance deviennent omniprésents. Il pourra servir de source d’inspiration aussi bien aux chercheurs et praticiens s’intéressant aux formations hybrides et à distance qu’à ceux qui s’intéressent au développement professionnel et alimentera la réflexion sur les actions à poser post-pandémie.