Cet ouvrage est le fruit de la collaboration de plusieurs chercheurs intéressés par l’impact de la déréglementation sur l’organisation de la production et du travail, la formation, les qualifications de la main-d’oeuvre et les conditions de travail dans l’industrie de la construction des pays suivants : Pays-Bas, Allemagne, Danemark, Canada (sur le Québec plus essentiellement), Australie, Espagne, États-Unis, Royaume-Uni et République de Corée. De façon générale, les auteurs respectifs de chaque chapitre commencent en situant l’industrie de la construction dans le contexte de l’évolution économique et du marché plus spécifique de la construction. On retrouve également des informations sur les principaux acteurs et leur influence dans la régulation du milieu. Du point de vue strict des relations patronales-syndicales, on retrouve certes des informations sur les structures de négociation, mais très peu de données sur les arrêts de travail. La séquence des chapitres présente la situation de chaque pays selon un ordre décroissant du degré de réglementation de l’industrie de la construction. Dans leur excellente introduction, les deux directeurs de l’ouvrage suggèrent que l’industrie de la construction dans chacun des pays étudiés s’est développée en adoptant une des deux voies suivantes. La première emprunte une direction privilégiant l’investissement à plus long terme dans le capital financier, dans les ressources humaines, notamment au niveau de la formation, et dans l’innovation technologique. L’autre voie préconise une main-d’oeuvre moins qualifiée et moins rémunérée et favorise des technologies et des modes d’organisation du travail moins avancés. Les auteurs des différentes études de cas ont donc tenté de décrire et d’interpréter la situation de chaque pays en fonction de la voie empruntée. Ainsi on examine les particularités de l’industrie de la construction, du marché du travail et des politiques publiques et on cherche à comprendre et à savoir dans quelle direction s’est engagé le pays concerné. L’ensemble des auteurs lient, par exemple, l’importance de la sous-traitance au degré de réglementation. En effet, en l’absence d’un cadre réglementaire articulé, on assiste au foisonnement des petits sous-traitants et à la transformation du statut de salarié en celui de travailleurs autonomes; cette approche ne vise pas à développer la sous-traitance spécialisée mais plutôt à contourner les obligations qu’entraînerait la reconnaissance du statut de salarié au niveau de la rémunération et d’un certain engagement patronal en faveur de la stabilité d’emploi. Les Pays-Bas représente la figure de la réglementation alors que la République de Corée celle de la déréglementation. La structure de gouvernance de l’industrie est fortement institutionnalisée dans le premier pays et les partenaires sociaux sont organisés et pourvus de moyens pour coopérer tout en promouvant leurs intérêts respectifs. À l’opposé, en République de Corée, les syndicats ne représentent que 1 % de la main-d’oeuvre du secteur et les travailleurs de la construction ne peuvent envisager aucune perspective de carrière, ni sécurité d’emploi, aucun avantage social, si ce n’est qu’une assurance en cas d’accident de travail, aucune formation et, évidemment, aucune protection syndicale. Cette lecture nous fait aussi voir comment coopération patronale-syndicale, négociation collective et réglementation se renforcent mutuellement pour créer des conditions favorables à la qualité des conditions de travail et des travaux et à la productivité, particulièrement à cause des qualifications d’une main-d’oeuvre formée et de l’importance des investissements des employeurs dans les nouvelles technologies et techniques de production. Ces observations s’appliquent non seulement pour les Pays Bas, mais aussi pour le Danemark et l’Allemagne pour laquelle le lecteur retrouve d’ailleurs des informations et des analyses éclairantes sur les conditions et les impacts de la réunification politique sur l’industrie de la construction en particulier. L’affaiblissement des syndicats et de la négociation collective aux États-Unis favorise le passage …
Building Chaos: An International Comparison of Deregulation in the Construction Industry sous la direction de Gerhard Bosch et Peter Phillips, London : Routledge, 2003, 256 p., ISBN 0-4152-6090-6.[Record]
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Michel Grant
Université du Québec à Montréal