Abstracts
Abstract
This paper tests whether an inconsistency exists between unions' industrial relations philosophies and their abilities to secure real wage gains. One economic measure and two attitudinal measures are related to union membership. The influence of these measures on both the likelihood that a person is a union member and union membership's impact upon these measures are simultaneously estimated. The implications of the results for private-sector union decline in Canada are then discussed.
Résumé
Le déclin du syndicalisme en Alberta peut ressortir, du moins en partie, à des transformations de l'environnement survenues dans les années 1980, lesquelles se sont combinées pour accroître l'hostilité à son égard. En effet, les syndicats albertains ont dû affronter en même temps des attitudes politiques rébarbatives et une grave récession économique. Les activités syndicales dans l'arène politique et sur le marché du travail ne sont que deux aspects — et très visibles — de l'action syndicale qui ont été modifiés par ces changements macro-économiques. Un troisième aspect de l'activité syndicale, moins perceptible celui-ci, est le processus par lequel les membres sont conditionnés à une unique vision du monde, de telle sorte que, peut-on affirmer, les transformations économiques tendent à écarter l'action des syndicats de leur philosophie fondamentale, ce qui est de nature à freiner leur cheminement en tant qu'organisation.
Historiquement, l'approche pratique et idéologique des syndicats albertains en matière de relations professionnelles répondait à la notion d'«antagonisme mature» exposée par Adams (1988). Ils acceptaient un partage dans l'aménagement des relations du travail entre les employeurs et eux. Le rôle de ceux-là, estimaient-ils, consistait à organiser et à diriger l'entreprise. Leur propre fonction, c'était de protéger leurs membres en s'assurant que les employeurs n'enfreindraient pas les normes négociées collectivement.
Du point de vue philosophique, les syndicats acceptaient d'avoir une responsabilités limitée dans la société albertaine. Ils s'efforçaient d'améliorer les conditions de travail de leurs membres et, donc, leur bien-être. Puisqu'ils n'avaient aucun intérêt commun avec les employeurs, les syndicats estimaient qu'ils devaient rester en dehors des mécanismes de prise de décisions dans l'entreprise et s'en tenir à la négociation collective pour faire progresser les intérêts de leurs membres. Dans la pratique, les syndicats tentaient de réaliser leur propre conception des relations professionnelles en poursuivant une orientation fondée sur des intérêts d'ordre économique immédiats, soit l'augmentation du pouvoir d'achat et la sécurité d'emploi, par la négociation collective et autres activités reliées au marché du travail.
Le déclin du syndicalisme en Alberta, croyons-nous, est le résultat de l'incompatibilité entre cette vision syndicale antagoniste et l'incapacité d'atteindre les objectifs économiques qu'une telle attitude suppose. Une contradiction s'est développée entre les attentes économiques des syndiqués résultant des promesses que les syndicats leur ont laissé miroiter, et l'incapacité des syndicats à les réaliser. Les syndicats ont continué d'inculquer à leurs adhérents qu'ils sont les victimes d'un milieu de travail hostile et que l'organisation syndicale constitue leur seule planche de salut.
Aujourd'hui, par suite d'une opposition devenue de plus en plus farouche, les syndicats ont beaucoup plus de difficulté à «livrer la marchandise». Ceci a pu avoir pour effet d'amoindrir l'attrait du syndicalisme tant pour les salariés qui en sont membres que pour ceux qui ne le sont pas, ce qui pourrait expliquer en partie son déclin.
Cet article vise à vérifier l'existence d'une incompatibilité entre la vision que peuvent avoir les syndicats du régime de relations professionnelles et leur capacité d'assurer à leurs adhérents des avantages véritables en matière de salaires. On traite ensuite des conséquences d'une telle incompatibilité sur l'organisation syndicale.
Pour en évaluer la portée exacte, on a tenu compte du fait que les revenus des salariés et leur conception des relations du travail ont aussi un effet sur la probabilité d'être syndiqué. Aussi, les auteurs de l'étude estiment-ils que l'adhésion syndicale, d'une part, de même que les gains des salariés et leurs attitudes face aux relations patronales-syndicales, d'autre part, s'influencent réciproquement.
On a découvert, tel que prévu, que la syndicalisation atténue l'opinion du «travail musclé» (c'est-à-dire la notion que les syndicats sont des institutions trop puissantes et qu'il faut freiner leur influence) et renforcent l'idée du «capital musclé» (c'est-à-dire la conception que les syndicats sont essentiels pour contrebalancer le pouvoir des employeurs et améliorer les conditions de travail des salariés). Aussi, les salariés croyant les syndicats trop forts étaient davantage des non-syndiqués et ceux qui, au contraire, exprimaient le sentiment du trop grand pouvoir du capital étaient plus portés à être syndiqués. On observe donc une forte socialisation des membres à cette conception antagoniste des relations du travail.
Le rapport entre l'adhésion syndicale et les gains s'écartait partiellement des modèles traditionnels. En premier lieu, nous avons constaté que les salariés dont les salaires étaient les plus élevés étaient davantage des syndiqués. Alors que l'effet négatif de l'affiliation syndicale sur les salaires peut n'être qu'un cas d'espèce, puisque nous ne connaissons qu'une seule étude faisant état d'ouvriers spécialisés ayant subi une perte de salaire à la suite de leur adhésion syndicale (MacDonald et Evans 1981), on se rend de plus en plus compte que, aux États-Unis (Bernstein 1986; Freeman et Kleiner 1988) et au Canada (Adams et Saul 1988; Globe and Mail, 21 octobre 1988; Panitch et Swartz 1987:100), la valeur comparative des salaires conventionnels devient moins marquée qu'elle ne l'était auparavant.
Ces constatations montrent que, dans le microcosme albertain, les syndicats éprouvent des difficultés à satisfaire les désirs de leurs membres en matière de salaires, mais qu'ils entretiennent néanmoins encore de tels espoirs et nourissent l'idée que les relations professionnelles doivent se fonder sur l'antagonisme. Si nos analyses et notre raisonnement théorique sont justes, un certain nombre de syndicats canadiens risquent de dépérir à cause de leur incapacité à adapter leur philosophie des relations du travail à des circonstances nouvelles. Qu'ils émergent handicapés de ce conflit ou qu'ils reprennent vigueur dépendra de leur aptitude à réévaluer en profondeur leur rôle premier et leurs objectifs.