Abstracts
Abstract
Can legal tools used by judges and lawyers adequately deal with the public policy issues that underly any alteration of our present system of industrial relations.
Résumé
La Charte des droits et des libertés est devenue la principale source d'influence légale sur le régime des relations professionnelles au Canada. La Charte a amplifié les pouvoirs des tribunaux canadiens et crée la possibilité que notre régime de relations de travail puisse être transformé par les décisions judiciaires. Une question demeure sans réponse : les instruments juridiques utilisés par les juges et les avocats peuvent-ils être en conformiste avec les sujets de nature politique qui sont à la base de toute modification du régime actuel de relations professionnelles au Canada. Trois décisions récentes de la Cour suprême du Canada indiquent que les tribunaux mêmes peuvent partager cette préoccupation. Chacune de ces affaires soulève la question de savoir si le régime de négociation collective actuel est garanti dans une certaine mesure par la Charte. La majorité des juges de la Cour suprême n'étaient pas prêts à l'interpréter de façon à ce qu'elle assure la protection de l'action collective lorsque celle-ci s'exerce dans un contexte de relations professionnelles. Pour les syndicats canadiens, cette décision peut bien ne pas signifier le recul que beaucoup avait prédit, étant donné qu'elle confirme simplement que la législation à la base de notre régime de relations du travail relève du domaine politique et non du domaine judiciaire.
L'aspect le plus troublant de ces décisions pour les syndicats, cependant, est l'accent que place la Charte sur la protection des droits individuels. Si la garantie de la liberté d'association s'applique aux salariés pris individuellement régis par des conventions collectives, il se peut que les clauses de sécurité syndicale puissent devenir vulnérables selon le texte de la Charte. Peut-être que la plus grande menace pour la sécurité syndicale réside dans l'utilisation des cotisations syndicales à des fins politiques, étant donné qu'un recul du rôle politique des syndicats est probablement de nature à amoindrir leur action économique et leur pouvoir de négociation collective.
La décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Dolphin Delivery laisse entendre que les litiges entre des parties privées qui n'ont rien à voir avec le gouvernement sont à l'abri des garanties fondamentales de la Charte. La solution de toute menace de la Charte pour la sécurité syndicale, toutefois, découlera probablement du fait suivant : les conventions collectives devraient-elles être considérées comme des accords strictement prives qui ne relèvent pas de la Charte ou devraient-elles être considérées comme des documents législatifs essentiels qui pourraient donner lieu à l'application de la Charte?
Il faut considérer à la lumière de la décision Dolphin Delivery l'importante question de savoir si la Charte va influencer les conventions collectives et l'arbitrage des griefs. Le processus d'arbitrage des griefs au Canada est une institution hybride qui est à la fois le résultat de la négociation collective et de la législation. Si la Charte doit s'appliquer à l'arbitrage des griefs, les principes généraux énoncés dans la Charte auraient priorité sur les règles particulières des rapports collectifs de travail et pourraient modifier considérablement les modes d'arbitrage actuels.
Non seulement la Charte peut-elle faire éclater la réglementation particulière fixe par les parties, mais il lui est également possible de transformer la procédure d'arbitrage elle-même. Au lieu d'être le forum où se décident les différends du travail, l'arbitrage des griefs peut devenir un tribunal inférieur de type constitutionnel où l'expertise juridique l'emporte sur le sens commun des relations professionnelles.
Le prix que doivent payer employeurs et syndicats pour un tel changement du processus de règlement des griefs sera vraisemblablement d'autant plus élevé que les couts de l'arbitrage augmenteront et que s'accroîtront les délais dans le règlement des griefs.
Il est aussi possible que la Charte modifie les relations de travail individuelles même. C'est un fait que celles-ci se trouvent aujourd'hui incluses dans un encadrement législatif rigoureux et qu'on ne peut plus les considérer comme des matières strictement privées. La législation sur les normes de travail, les droits de l'homme, la santé et la sécurité professionnelle, les caisses de retraite, pour ne citer que quelques lois, ont une influence considérable sur les droits respectifs des employeurs et des employés. Cette législation doit être maintenant conforme à la Charte, ce qui crée la possibilité que celle-ci puisse modifier l'équilibre actuel des droits et des obligations qui existent présentement entre employeurs et salaries.
L'application de la Charte au régime canadien de relations professionnelles est destinée à être un long et pénible processus, ce qui rend difficile de prévoir maintenant le résultat final. Dans quelle mesure celle-ci modifiera-t-elle le régime des relations de travail? Cela est incertain, et il n'est pas encore assure si les cours canadiennes
mettront davantage l'accent sur les droits individuels ou si elles s'en tiendront à l'approche traditionnelle canadienne de donner préséance à la responsabilité collective.
Dans cette ambiance juridique nouvelle, cependant, il y aura tendance naturelle de la part de nos tribunaux à s'en remettre à la véritable technique juridique de façon à fonder leurs décisions en s'en remettant aux précédents. Le manque de jurisprudence pour résoudre les questions difficiles soulevées par la Charte peut amener les tribunaux canadiens à s'inspirer de la jurisprudence américaine qui est plus considérable. Le danger d'une pareille approche, toutefois, c'est que nos tribunaux s'appuient beaucoup trop sur les précédents américains pour trancher les questions relatives à la Charte en refusant de reconnaitre la nature originale du régime canadien de relations professionnelles.
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