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Abstract
An analysis of the unique nature of the administrative solution to labour disputes in British Columbia experience, with particular reference to section 33 of the Labour Code.
Résumé
« Les cours de justice ne peuvent vraiment avoir qu'une vue sommaire de l'ensemble des problèmes du travail. Leur intervention dans le passé n'a été que sporadique et fortuite. Les juges ne connaissent pas en profondeur le processus dynamique des relations professionnelles et de la négociation collective. Pour ces raisons, le nouveauCode du travail a écarté la compétence des cours en matière de conflits du travail. La nouvelle loi recherche une solution administrative plutôt que judiciaire aux conflits du travail ».
C'est ainsi que s'exprimait le ministre du Travail de la Colombie Britannique au cours d'un débat en 1973.
Rechercher "une solution administrative plutôt que judiciaire aux différends du travail» est, pour s'exprimer en termes généraux, une politique qui est commune dans la législation canadienne en matière de négociation collective. Cependant, ce qui est propre auCode du travail de la Colombie Britannique, ce sont les moyens par lesquels leCode du travail de cette province cherche à mettre au point la solution administrative « Nouvelle, controversée, discutable au point de vue constitutionnel ». Telle est la façon dont un commentateur a décrit cette disposition qui se lit ainsi: « 33. La Commission a et exerce compétence exclusive pour déterminer les limites de sa compétence en vertu de cette loi, d'une convention collective et de règlements et pour connaître de tout fait ou question de droit qui sont essentiels à l'exercice de sa compétence et pour déterminer si elle exercera ou non sa compétence et de quelle manière elle l'exercera. ». L'arrière-plan de la désobéissance judiciaire à la clause privative dans la législation du travail au Canada fait voir pourquoi la législature de la Colombie Britannique a conféré cette compétence nouvelle à l'organisme chargé d'appliquer leCode du travail dans cette province. À une date aussi reculée que 1952, le professeur Bora Laskin (fonction qu'il occupait alors) faisait observer « l'apparente futilité » des efforts variés faits dans l'après-guerre pour écarter la juridiction de la cours des questions attribuées aux commissions de relations du travail. « Face à de tels textes législatifs, notait Lakin, la persistance des cours à exercer un pouvoir derévision ne comporte une attribution d'autorité que sur le fondement d'un principe constitutionnel (et un tel principe n'existe pas) et sur la base de quelque théorie « élitique » de connaître ce qui est préférable pour tout le monde».
Le concept qui sous-tend l'intervention des cours en matière de clauses privatives, qui enjoignent à ces cours de ne pas intervenir, n'existe pas qu'au Canada. Notez la clause privative ordinaire écartant du pouvoir de révision judiciaire « toute décision, ordre, directive ou réglementation du tribunal administratif » en question. Puisqu'une « décision, un ordre ... ou une réglementation » outrepassant les pouvoirs statutaires du tribunal (c'est-à-dire sa compétence) n'est en réalité ni une « décision », ni un « ordre », ni un « règlement », ils ne sont pas protégés par la clause privative. Donc, le plus que ces clauses ont signifié, c'est d'exclure l'intervention de la cour, là ou l'erreur d'une commission, qu'elle soit de fait ou de droit, n'en n'est pas une relative à sa compétence.
C'est en vue de donner des dents à la clause privative du Code, contenue à l'article 34(2) que l'Assemblée législative de la Colombie Britannique a adopté l'article 33. En résumé, conformément à l'article 33, la Commission est autorisée à fixer les limites de sa propre compétence — y compris à cette fin le pouvoir de connaître de tout fait et de toute question de droit qu'il lui faut trancher pour établir sa compétence — d'où il découle que toute erreur que la Commission commet n'entache pas sa compétence et se trouve dans les limites de la clause privative.
Cependant, on peut prévoir que, malgré l'article 33 du Code, les cours aient l'intention de réclamer juridiction. L'article étudie quatre de ces arguments. Deux autres, qui se rapportent à l'aspect constitutionnel de la compétence de la Commission, touchant à la question du partage des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces du Canada, ne sont pas étudiés. Bien qu'il ne s'agisse qu'une question de temps avant que ces arguments d'ordre constitutionnel soient vérifiés judiciairement au Canada, la jurisprudence sur laquelle ils se fondent a été examinée dans d'autres instances. Des quatre autres arguments, on peut dire qu'ils se rapportent à la solution administrative des différends du travail et à l'habileté des cours à retirer sa compétence à l'organisme administratif.
La conclusion à laquelle on en arrive, c'est que le Code de la Colombie Britannique, grâce à l'interaction de l'article 33 et des autres dispositions de la loi relatives à la compétence fait obstacle à la justification ordinaire de la cour pour excéder ou contourner la clause d'exclusion. Cependant, ce n'est pas toutes les affaires que les cours de la Colombie Britannique l'ont accepté. L'affairePruden contreAssessment Authority of British Columbia a établi que, là où, aux fins d'établir sa juridiction, la Commission de cette province doit interpréter une loi autre que le Code, il y a matière à révision de sa décision par les cours en la manière habituelle. Le présent article met en doute cette conclusion eu égard à la compétence exclusive de la Commission non pas simplement de déterminer elle-même les limites de sa compétence, mais aussi de « connaître de tout fait ou de toute question de droit nécessaire pour établir sa compétence ». Il suffit de noter que les mots « toute ... question de droit » ne sont pas qualifiés; ils ne se lisent pas toute ... question de droitdécoulant de la loi, (c'est-à-dire du Code).
Là ou la Commission administrative se trouve ainsi en présence de questions d'ordre juridique préliminaires à son rôle essentiel — questions au sujet desquelles elle n'a pas de qualification spéciale — on peut penser que le maintien de la compétence des tribunaux de décider en dernier ressort est souhaitable. Mais le principe que l'affairePruden a posé n'est pas aussi limité qu'on peut le croire. À la suite de cette affaire, les tribunaux de la Colombie Britannique ont élargi le critère de « la loi externe » aux fins de révision des décisions de la Commission au-delà de la loi générale de façon à inclure plusieurs lois spéciales du travail qui comprennent « les définitions, les dispositions et les règles de procédure duCode du travail ». L'inclusion des dispositions légales du Code au moyen de clauses générales d'incorporation à ces lois avait pour objet comme le signalait la Commission, d'éviter une situation « où les parties à un conflit découlant duCollective Bargaining Continuation Act seraient obligées de faire la navette entre les tribunaux et la Commission au fur et à mesure que se révéleraient les ramifications légales du différend ». Et la Commission ajoutait ce qui suit: « Il serait contraire à un principe législatif fondamental d'avoir recours à deux tribunaux pour administrer un ensemble de législations du travail. Le thème principal des réformes de 1973-74 était l'établissement de la Commission des relations du travail comme l'organisme responsable de toutes les questions de relations du travail en Colombie Britannique. En plus de ses fonctions dérivées duCode du travail, la Commission s'est vue confier un mandat en vertu de cinq autres lois ... ».
En fait, le maintien du droit de réforme des tribunaux non seulement va-t-il à rencontre de la politique législative appuyant les réformes en Colombie Britannique, mais aussi des effets que l'on recherchait par l'introduction des clauses d'incorporation. Comme celles-ci incorporent aux fins de chaque pièce de législation l'article 33 duCode du travail la compétence exclusive de la Commission de « déterminer les limites de sa compétence en vertu de la loi » ne réfère pas en pareil cas au Code, mais à la loi dans laquelle a été incorporé l'article 33, ce qui ne laisse par conséquent aucune place à l'approche fondée sur le concept de « la loi externe ».
La question posée est loin d'être nouvelle cependant. Car, en remontant aussi loin que 1952, le professeur Laskin se demandait « pourquoi les tribunaux, en tant qu'agences de l'État, ne respectaient pas l'autorité et la responsabilité d'une autre agence, la législature, dans les matières où ne repose aucune question relative au partage des pouvoirs législatifs ». Si, comme on le croit, l'intention du législateur de créer une commission du travail indépendante et autonome sert l'intérêt public en minimisant le désordre dans le monde du travail, alors quelle justification y a-t-il à cette aversion pour la clause privative?