Abstracts
Abstract
The Canada Labour Relations Board and most of our provincial Boards are protected in the determination of the matters coming before them by « privative clauses ».
The author questions the effect of such clauses on the endeavours of the Boards and more directly on their real jurisdiction.
Résumé
INTRODUCTION
« Le Conseil canadien des relations ouvrières » et la plupart de nos Commissions provinciales possèdent une compétence exclusive dans les cas qui leur sont soumis, en vertu de textes restrictifs de l'intervention judiciaire (privative clauses), contenus dans les lois qui les régissent. Au tout début du texte original nous citons la section 80 de la Loi des relations de travail de l'Ontario qui est explicite à ce sujet.
Cette compétence exclusive place donc les Commissions à l'abri de la révision des tribunaux. Cependant, ces pouvoirs ne sont pas larges au point de constituer les membres des tribunaux, au sens de la section 96 de l'Acte de l'Amérique du Nord. De plus, leur compétence et leurs pouvoirs semblent avoir été accordés par les législatures provinciales dans les limites de leur compétence législative.
Il y a treize ans, le professeur Laskin écrivait qu'« aucun libellé de texte tentant d'éviter la révision judiciaire ne sera effective advenant les désirs contraires d'un juge d'un tribunal supérieur », et plus récemment, le professeur Willis a blâmé les tribunaux d'avoir « émasculé » les « clauses privatives » à ce qui équivaut à une misinterpretation honteuse de leur libellé. Mais l'histoire parle efficacement et on doit en tenir compte. L'idée d'interpréter à la lettre les mots eux-mêmes de la législature souveraine est un peu naïve. Les tribunaux supérieurs dans le monde du « common law » ont toujours eu le pouvoir de réviser, à l'intérieur de limites, le travail des tribunaux inférieurs. En effet, à l'exception des règles du droit naturel, il n'y a pas de critères quant à l'interférence judiciaire qui sont suffisamment spécifiques pour être d'un grand secours.
Même s'il est évident que les tribunaux ne tiennent pas compte des dispositions apparemment claires des « clauses privatives » qui les excluent de toute considération d'un objet relevant d'une commission de relations de travail, il ne s'ensuit pas que la « clause privative » constitue du verbiage inutile. En même temps qu'il est désirable que les tribunaux administratifs soient soustraits jusqu'à un certain point de l'intervention des tribunaux, il est aussi souhaitable que ces commissions soient soumises à une forme quelconque de contrôle. Mais au fond, le réel problème réside dans la définition de la compétence elle-même.
LE SENS DE LA COMPÉTENCE
On doit se demander qui décide quoi. La compétence dans le contexte présent, signifie l'autorité de décider, soit correctement, soit incorrectement. Mais quand les tribunaux annulent les décisions des commissions sous prétexte d'une décision incorrecte, ceci signifie que les commissions doivent décider correctement et pas autrement. On a par exemple le cas « Police Mechanics' ». Ici la cour cassa une décision du Ontario Labour Relations Board à l'effet que ces mécaniciens étaient exclus des dispositions du Labour Relations Act, selon la section 2(g) de cette Loi. De même, dans le cas « Ontario Food Terminal Board », feu M. le juge Laidlaw déclarait que le Ontario Labour Relations Board ne pouvait déclarer le« Ontario Food Terminal Board » une compagnie de la couronne ou non. Dans le casTaylor, qui survint quelques mois après le casFood Terminal, le juge en chef McRuer concluait qu'évidemment la « Commission » doit se prononcer sur plusieurs questions légales incidentes dans l'exécution de ses fonctions administratives, mais il ne voulait pas laisser entendre qu'il croyait la Commission habilitée à rendre des décisions judiciaires en regard de sujets connexes sans possibilité de révision par voie de certiorari.
DES COMMISSIONS SPÉCIALISÉES POUR DES OBJETS SPÉCIALISÉS
Pour des objets spécialisés, se présentant souvent, impliquant continuellement les intérêts de groupes ayant un certain intérêt défini et exigeant un certain degré d'expertise, une commission spécialisée est nécessaire. L'établissement de commissions possédant de larges pouvoirs à la fois d'enquête et d'action n'est rien de nouveau, non plus que la révision judiciaire de leurs conclusions. Dans la législation du travail, c'est le devoir des tribunaux de faire en sorte qu'elle atteigne son but. J'espère qu'il est vrai, comme le suggérait le Juge Abbott, que les membres de commissions sont au moins aussi compétents que les juges pour rendre des décisions sur des questions qui surgissent dans l'administration des Lois de relations de travail. Dans son commentaire sur le cas « Ontario Food Terminals » le professeur Laskin signala que la fonction de la Commission dans un tel cas était semblable à celle qu'elle aurait pu être appelée à accomplir en vertu de la section 2 de la Loi des relations de travail. Dans le cas « Associated Medical Services », 7 des 9 juges soutinrent qu'il était normal pour le tribunal en question de considérer les mérites de la décision de la Commission à l'effet qu'un certain plaignant était une « personne » pour les fins de la Loi des relations de travail. Au fond, ce qui importe, c'est le concept de « jurisdiction » et les pour et les contre d'un concept relativement large ou relativement étroit. Les possibilités peuvent être arrangées en une sorte d'éventail. A une extrémité, les questions ressortissant du droit constitutionnel, dans lesquelles les tribunaux ont compétence. Puis les questions générales d'interprétation et l'ensemble des règles de la justice naturelle. Et à peu près au milieu de l'éventail, diverses questions : une personne est-elle membre d'un corps de police ? Une certaine personne est-elle un employé d'un certain employeur ? Une telle organisation est-elle une union ouvrière ? A l'autre extrémité de l'éventail, on trouve toute une série de questions qui relèvent de la compétence des commissions ; le meilleur exemple serait celui-ci : une personne, en tant qu'employé, fait-elle partie de l'union ouvrière impliquée ?
LA DISTINCTION ENTRE QUESTION PRINCIPALE ET QUESTION CONNEXE
Ainsi, on peut classifier les questions entre celles qui peuvent nettement être révisées et celles qui ne le peuvent pas. Le critère juridique est le suivant : une telle question est la question principale soumise au tribunal ou plutôt elle en est une « extrinsèque », « connexe » et « préliminaire ». Evidemment, ce sont les tribunaux qui possèdent la compétence pour déterminer si une commission peut se prononcer sur une question selon les pouvoirs qui lui sont conférés.
Même si on continue à distinguer la question « principale » de la question « connexe », je ne peux laisser le débat sans référer à Lord Esher qui suggérait, dans les cas « Income Tax Commissionners etBradley », que la législature pourrait conférer à la commission une compétence telle que, selon moi, l'intervention judiciaire serait reportée à un stage ultérieur.
LES RÈGLES DE LA JUSTICE NATURELLE
Les règles de la justice naturelle constituent un chapitre spécial dans la question de la compétence. Celles-ci ont été longuement étudiées et, en règle générale, il n'y a rien de remarquable dans les récents cas canadiens sur ce point.
Des questions de défaut d'avis surviennent avec une fréquence alarmante. Pour sûr, c'est la règle que toute information qui peut nuire à une partie autre que celle qui informe doit être fournie à cette autre partie. Ceci est également vrai pour la plaidoirie. Ainsi dans le casForest Industrial Relations, le juge Judson déclarait qu'après avoir écouté une partie et également la réponse de l'autre, la Commission peut, sans déroger aux règles de la justice naturelle, déclarer que le débat a duré assez longtemps et qu'il est temps d'y mettre fin. Dans le casJein Patrick, la Cour d'Appel de la Saskatchewan cassa une accréditation prétextant une encoche à la justice naturelle par le refus d'accorder un ajournement.
Une variation quelque peu troublante sur les notions sous-jacentes aux exigences d'avis apparaît dans des questions concernant l'acceptation de la preuve. Dans le cas Trenton Construction Workers Association, où le statut d'une organisation comme union ouvrière était en question, le tribunal décida que le Ontario Labour Relations Board s'était trompé « in resorting to evidence that had been given before a Board differently constituted in regard to another application ». Si la décision signifie que les faits découverts dans des cas précédents ne peuvent jamais être utilisés, alors j'estime respectueusement que c'est aller trop loin.
Le dernier motif pour révision que je désire considérer s'exprime par cette phrase difficile à comprendre et d'une grande source de confusion : « erreur en droit prima facie ». Il s'agit d'une sorte d'erreur quelque peu spéciale. Dans le casTag's Plumbing, on s'appuya sur ce motif pour attaquer par voiede certiorari la décision du Saskatchewan Labour Relations Board à savoir qu'un requérant dans un cas de pratique interdite de travail était une union ouvrière « directement concernée » dans certains événements.
Le mystère de ce motif de révision peut, selon moi, trouver son explication sur une base historique. Le cas moderne par lequel l'idée d'une « erreur en droit prima facie », devint monnaie courante fut le casNorthumberland, auquel on a référé dans plusieurs décisions canadiennes. Le certiorari pour casser une décision était en réalité une nouvelle application d'un principe depuis longtemps reconnu. La question du prima facie devint alors, d'après les mots de Lord Summer, « le visage impénétrable du sphinx ». C'est pour cette raison que ce motif fut très peu utilisé jusqu'à son application aux tribunaux administratifs en 1952.
LA QUESTION DE LA CLAUSE PRIVATIVE
Aucune clause privative n'empêchera les tribunaux de réviser la compétence de tribunaux inférieurs ou de tribunaux statutaires (statutary), comme il a été démontré. Cette clause cependant devrait s'appliquer proprement, en empêchant, par exemple, les tribunaux deréviser le travail des Commissions à l'intérieur de leur compétence. Qu'adviendrait-il sans une telle clause ? Ce n'est pas le cas que les tribunaux interféreraient à volonté. Il y a eu, règle générale, deux motifs pour le bref en certiorari : 1 ) défaut de juridiction et 2 ) erreur en droit prima facie. L'effet de la clause privative doit être l'élimination du deuxième motif. Ceci est d'ailleurs confirmé par le jugement rendu par le juge Roack dans le cas Bradley.
CONCLUSION
La seule conclusion valable, selon moi, c'est que la clause privative ne veut rien dire. En effet, d'après le raisonnement du juge Smith, cette clause ne peut exclure le bref en certiorari sous aucun des deux motifs énoncés plus haut. Donc la seule raison d'être optimiste ici c'est la pensée que présumément une clause privative quelconque puisse signifier quelque chose, dès qu'elle est suffisamment « formelle ».