Relations industrielles
Industrial Relations
Volume 11, Number 4, September 1956
Table of contents (11 articles)
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Le Syndicalisme dans une société libre
Gérard Dion
pp. 234–243
AbstractFR:
Dans une civilisation industrielle et démocratique, le syndicalisme apparaît, comme une institution normale et indispensable. Fruit de la démocratie, il contribue au maintien et au développement de la vie démocratique. A condition cependant qu'il soit lui-même une institution représentant vraiment les travailleurs et leur permettant d'y exprimer leurs aspirations tout en sauvegardant leurs intérêts économiques et professionnels. La démocratie syndicale apparaît comme une exigence indispensable au bien de toute la nation. C'est d'abord la responsabilité des chefs syndicaux de la réaliser par des institutions adéquates et par leur contribution à la formation civique des syndiqués.
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Trade Unions in a Free Society
Gérard Dion
pp. 244–253
AbstractEN:
In an industrial and democratic civilization, labor unionism appears as a normal and essential institution. Born of democracy, it helps to preserve and develop democratic life. There is, however, an essential condition. It must be itself an institution that really represents the workers and gives them the opportunity of expressing their aspirations while safeguarding their economic and professional interests. Union democracy is a necessity for the national welfare. But, above all, democracy in the labor movement is the direct responsability of union leaders who must ensure its maintenance and survival through good institutions and also by their cooperation in the civic education of the rank-and-file members.
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Sur le droit de grève dans les services publics au Canada
René H. Mankiewicz
pp. 254–267
AbstractFR:
Ce rapport étant destiné à s'insérer dans une série d'études sur la grève dans les services publics, le recours à la méthode comparative semble particulièrement utile. Le terme de comparaison sera fourni par les principes généraux admis par les principaux pays européens, notamment la France. L'auteur examine d'abord la catégorie « service public », ce qu'elle comprend et qu'elle couvre; puis, il jette un coup d'oeil sur les « fonctionnaires » ou agents des services publics; il s'arrête enfin au point important de la grève dans ce secteur et amène d'intéressantes distinctions et dégage en dernier lieu quelques conclusions.
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The Newfoundland Woods Labour Board
R. Gushue
pp. 268–279
AbstractEN:
In this article, the author intends to give to the reader a good idea of the Newfoundland Woods Labour Board. After a short description of the situation leading to its formation, he exposes its organization, development and continuance under several chairman; he also presents an interesting composition of the woods labour rates and working conditions in 1940 and 1955 and some activities and accomplishments of the Board. Finally, his analysis of the results of the Board's operations proves that labour and management can effectively co-operate.
FR:
Avant la formation du Woods Labour Board, un grand nombre de difficultés patronales-ouvrières s'élevaient dans le district Humber et sur la Côte de l'est; depuis la mise-sur-pieds de cette institution, quinze ans après, le climat a complètement changé. Il est donc intéressant d'étudier les points suivants: la situation qui a fait naître cette commission; son organisation et sa marche continue sous plusieurs présidents; le contraste dans les taux de salaires et les conditions de travail dans le bois, de 1940 à 1955; quelques activités et réalisations; analyse des résultats obtenus
1. SITUATION AVANT 1940
Peu de temps après la période de prospérité de la première guerre mondiale, l'industrie du papier tomba précipitamment dans une dépression longue et prolongée. En effet, cet état de dépression et de pessimisme eut des répercussions: salaires bas et conditions de vie inacceptables dans les camps.
Le 11 avril 1936, le premier syndicat des travailleurs de bois fut formé; connu sous le nom de Newfoundland Lumbermen's Union. Il est encore très prospère; dès 1938, trois autres syndicats se constituèrent. Cependant, les syndicats existants ne travaillaient pas bien ensemble et il y avait aussi un bon nombre d'hommes engagés dans ce domaine qui n'appartenaient à aucun syndicat. Les efforts du côté de la direction et des travailleurs furent massifs et la déclaration de la guerre en 1939 apporta de nouveaux et de sérieux problèmes. Il semble bien, toutefois, que l'accroissement du sens de la responsabilité et de la prise de conscience de l'état d'urgence dû à la guerre furent la cause de la fusion des deux éléments opposés.
2. ORGANISATION ET PROGRÈS
La première manifestation du désir de collaboration émana des travailleurs qui suggérèrent à la Commission des Ressources naturelles une rencontre des compagnies et des unions sous l'égide du Gouvernement. La Commission gouvernementale approuva l'idée et la première rencontre eut lieu à St-Jean du 26 au 29 mars 1940. Elle donna naissance au Woods Labour Board avec droit de vote égal pour les quatre unions d'un côté et pour les deux compagnies, de l'autre. On décida de limiter les activités de la Commission aux compagnies de pulpe et de papier. Il était entendu que cette Commission demeurerait en opération pour la durée de la guerre et aussi longtemps après que les membres voudraient continuer. Un président indépendant devait être nommé par le gouvernement.
3. CONDITIONS EN 1940 ET 1955
Il existe un contraste réel et révélateur entre les conditions; de vie; en 1940 et en 1955; en effet, elles ont été tellement améliorées en 1955 qu'elles n'ont presque plus de ressemblance avec celles de 1940. Le transport des hommes pour se rendre aux camps et en revenir a été organisé; la nourriture est meilleure et les menus plus variés. Il y a une liste acceptée de nourriture disponible dans les camps. De plus, une clause est prévue pour le règlement des griefs.
En ce qui a trait aux taux de salaires, ils gravitent autour d'un orbite qui est sensiblement celui des taux généraux de salaires. De 1940 à 1955 les salaires ont augmenté de 232%; ils passèrent de $2.75 à $9.15. Le montant que retire le bûcheron de Terre-Neuve est supérieur à celui touché dans les régions de l'Est du Canada.
4. ACTIVITÉS ET RÉALISATIONS DE LA COMMISSION
L'influence de la Commission ne se limite pas aux salaires seulement. En effet sa collaboration avec les autorités chargées du contrôle de la nourriture pendant la guerre eut pour conséquence d'aboutir à un arrangement intelligent relativement au rationnement dans les bois; au cours des périodes où l'offre de main-d'oeuvre était supérieure à la demande, elle a réussi à trouver d'autres sources d'emploi; elle a également fourni sa collaboration à la Commission des accidents du travail en établissant une base rationnelle de compensation au cas d'accidents survenant dans les bois; elle a amélioré les conditions de transport aux camps; elle est l'initiatrice de l'idée en vue de règlements interdisant tout feu extérieur en période de grand danger et contribua à faire restreindre le poids des charges de bois pour les camions.
5. ANALYSE DES RÉSULTATS
Une analyse des résultats obtenus par la Commission pourra peut-être permettre de déceler les raisons pour lesquelles cette Commission est reconnue comme « l'un des exemples les plus remarquables de coopération entre patrons et ouvriers ».
Il y a plus de 20,000 membres dans les quatre unions du bois préposés à de multiples opérations et dispersés sur plus de dizaines de mille milles carrés. Même si employeurs et employés de ce secteur ont rencontré de réelles difficultés et se sont tenu tête, jamais ils n'ont rien cassé même s'ils sont venus très près de cette impasse. Pour quelle raison?
Le Woods Labour Board est un exemple peu ordinaire de négociation collective volontaire. Une de ses caractéristiques intéressantes, c'est d'avoir toujours maintenu un président indépendant et impartial qui dirige les discussions et pèse le pour et le contre. A cause de la présence de ce président au cours de toutes les négociations, deux des trois stages des négociations se fondent et le troisième est utilisé de façon officieuse mais effective sous la direction du même président: ce sont, la négociation, la conciliation et l'arbitrage.
En plus de négocier les taux de salaires et les conditions de travail, la Commission a établi une procédure pour le règlement des griefs qui s'est développée au cours des années et qui illustre de façon magnifique l'application de la période de « refroidissement ». La clause prévoyant 1 intervention éventuelle du président entre les réunions est en vigueur depuis plusieurs années et a été utilisée à plusieurs reprises.
Comme la plupart des constitutions, celle du Woods Labour Board a ses défauts. En effet, au sujet de la juridiction territoriale de l'Union, aucune sphère ou territoire défini n'est délimité.
Toutes les cotisations syndicales sont uniformes et sont déduites par la Compagnie pour les unions. L'existence de cette Commission est très utile à la compagnie; elle permet la négociation collective directe à l'échelle de l'industrie. Les quatre unions en existence ont maintenu leur identité individuelle et, en coopérant, elles ont réussi à établir ce genre de négociation à un degré imprévu et avec une facilité insoupçonnée.
Patrons et ouvriers de ce secteur se sont réunis au moins deux fois par année et jusqu'à cinq fois la même année en période de tension. Depuis 1940, il y a eu ni différend, désaccord ou incident qui n'a pas été soumis à cette commission; il n'y a pas eu de grève. Le sort des travailleurs du bois a été énormément amélioré.
Mais de toutes ses réussites, la plus importante est celle-ci: les deux parties ont elles-mêmes réalisé qu'elles ne peuvent contribuer au progrès de l'industrie si elles se considèrent comme adversaires; elles ont appris qu'elles sont mutuellement dépendantes d'une entreprise commune. Chacune réalise que de part et d'autre, l'on a des obligations respectives; les deux sont très bien informées. Il semble exister pour les deux un fort sentiment d'appartenir à quelque chose qui en vaut la peine.
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La mise-à-pied met-elle fin à l'emploi ?
Gaston Cholette
pp. 280–292
AbstractFR:
Voici une étude préparée au sujet d'un cas particulier qui apporte, dans une large mesure, une réponse d'ordre général à une question de grande importance théorique et pratique : la mise-à-pied met-elle fin à l'emploi ? L'auteur, après avoir reconstitué les faits et exposé la position de l'employeur et du syndicat concernés, donne son opinion à la lumière du droit commun, du droit statutaire et de la convention collective particulière.
EN:
Last winter 1955-56, a company considerably reduced its production and personnel because of a scarcity of hydroelectric power. At rehiring time, the employer pretended it was under no obligation to deduct the union dues of the organized workers returning from the lay-off, unless each one signed a new formula of authorization.
The company attitude is based mostly on its interpretation of a clause of the labour agreement which it has signed. The text mentions that such an authorization for check-off shall cease to have any force and effect "from and after the date upon which the employee is separated from the company for any cause whatsoever".
The union, on the other hand, alleges that such a decision by the company constitutes a violation of the labour agreement, those formulas of authorization which have been signed previously being still valid. To prove this, the union refers to the clauses of the Appendix of the labour contract which contains the "Regulations governing the status of employees and the computation of their continuous service". One clause reads : : "After an employee's authorized absence has last one (1) year and extension beyond the year has not been granted in writing, his employment shall be terminated as of the end of such year".
The company asserts that for check-off purposes, "termination of employment" means that the individual involved is no more on the job and that his name does not appear any more on the payroll; it concedes, however, that a laidoff employee is entitled to paid holidays and to unemployment insurance benefits.
The problem is to determine whether, in the case of employees laid off and taken back to their work thereafter, there is employment termination.
The current use of the expression "to be at the employ of" someone means to work for him, to be at his service and to have an individual labour contract with him; this meaning seems to be more enlightening to us than the other classical definitions we can find in any good dictionaries. But does the interruption of work necessarily involve a break of the labour contract? In certain cases, some authors pretend that there is no real break, but simply a suspension of the execution of the contract; this distinction might lead to a solution.
There is only one possible cause for the break of the labour contract and it seems to be one of superior force: an act of God. But to be of superior force, the event would have to be unexpected, irresistible... Now; in the case of this company, it is doubtful that the argument applies; indeed the scarcity of water and of hydro-electric power had been foreseen some months previously. Moreover, the reduction of personnel did not bring the breaking of all relations between the employer and the laid-off employees.
As we seem to find a real and complete solution to the problem neither in the common law, nor in the labour law proper, we shall consider the interpretation of the collective labour agreement. But does this contract anywhere give a definition of the termination of employment? We can find it at the eppendix entitled "Regulations governing the status of employees and the computation of their continuous service", at article 13: "After an employee's authorized absence has lasted one (1) year and extension beyond the year has not been granted in writing, his employment shall be terminated as of the end of such year".
But if we interpret all by itself this other text of the contract, (69) "the Company recognizes that a grievance involving one ( 1 ) or more former employees who have been laid-off or discharged from the works..." we would think that a lay-off or dismissal terminates employment, because we are then dealing with "former employees". But as we have to study the agreement as a whole, we have to take into account the other clause given above and which is more complete and more accurate.
The termination of employment must be considered as the cessation of all employer-employee relations stipulated by contract. Now, the employees which have been laid off here and which came back to work within the twelve subsequent months maintain their status as members of the personnel; they are still related to the enterprise by their seniority rights, the presence of their name on the recall list, and finally the maintenance of their insurance and pension funds.
Besides, the employment office of the company promised all workers who had one year or more of service that they would go back to their former job as soon as the company would become active again. Again, the argument used by the company concerning its past normal policies regarding the deduction of union dues which used to be revocable at any time, is not relevant since the formula of authorization for deductions is irrevocable for the duration of the agreement.
In conclusion, the author is of the opinion that the company should have deducted unions dues from the salary of the re-employed workers who had already signed such formula of authorization before their lay-off.