Comptes rendus

Andrée Lévesque, Éva Circé-Côté : libre-penseuse 1871-1949. Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2010, 478 p.[Record]

  • Bibiane Béland

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  • Bibiane Béland
    Québec

Qui connaît bien Éva Circé-Côté? Moi, comme plusieurs personnes, je ne savais rien d’elle avant d’entendre un chroniqueur à la radio parler de la publication d’Andrée Lévesque portant sur la vie et l’oeuvre de cette femme née durant la seconde partie du XIXe siècle et décédée au milieu des années 1900. Il se trouve que cette femme est l’une de celles qui, par leur fidélité à un idéal de justice pour leurs semblables, a posé, en parallèle avec d’autres qui se battaient peut-être de façon plus consciente et organisée, les jalons de changements déterminants pour le Québec, pour les Québécois et plus particulièrement pour les Québécoises. L’ouvrage consacré à cette libre-penseuse remarquable se divise en deux parties : la première est plus biographique et personnelle; la seconde, plus analytique quant à la contribution d’Éva Circé-Côté à l’avancement des idées progressistes qui ont mené le Québec à ce que l’on a appelé la « Révolution tranquille ». On y apprend qu’elle est née le 31 janvier 1871, le jour même de la mort de Louis-Joseph Papineau, qui peut être qualifié de héros dans la vie de Marie Arzélie Éva Circé, devenue Éva Circé-Côté après son mariage avec le docteur Pierre-Salomon Côté, décédé très jeune à l’âge de 33 ans d’une tuberculose intestinale. Elle a eu une fille prénommée Ève, qu’elle a élevée seule en mère de famille monoparentale avant la lettre, bien que sa propre mère lui ait donné un solide coup de main dans l’organisation de la vie matérielle pendant qu’elle menait de front sa carrière de journaliste et de bibliothécaire. À sa manière, sa fille Ève a fait oeuvre de pionnière puisqu’elle est la première Montréalaise « à revêtir l’uniforme du Corps auxiliaire féminin de l’aviation canadienne, qui devient bientôt la Division féminine de l’Aviation royale » (p. 205). Elle avait d’abord suivi les traces de sa mère en choisissant de faire des études en bibliothéconomie. Quoi qu’il en soit, après la guerre, Ève « devient une des premières femmes courtières en valeurs et ouvre un bureau rue Saint-Jacques » (p. 209). Comme d’autres pionnières du journalisme qui ont vécu à la même époque, pour ne citer que Robertine Barry (Desjardins 2010) dont la première partie d’une biographie a paru récemment, Éva Circé-Côté a publié en utilisant divers pseudonymes, à commencer par Colombine, Musette, Jean Bard, Fantasio, Jean Nay, Jean Ney, Paul S. Bédard, Arthur Maheu, Julien St-Michel et quelques autres encore. Elle a rédigé tout près de 1 800 chroniques, cartes, poèmes et critiques dans plus d’une vingtaine de journaux en français et en anglais. Elle a également publié en 1903 un recueil de chroniques, poèmes et conférences (Bleu, blanc, rouge : Poésie, paysages, causeries) et a été auteure de théâtre : sa pièce Hindelang et De Lorimier a été jouée et acclamée au Théâtre national français la même année. Elle a, de plus, été nommée bibliothécaire et est devenue conservatrice de la Bibliothèque technique de Montréal, première bibliothèque publique et gratuite de cette ville. Elle y a oeuvré fidèlement jusqu’au 15 septembre 1932 où, à l’âge de 61 ans, elle a été remerciée de ses services, après avoir connu de nombreux déboires en matière d’équité salariale, comme on le dirait aujourd’hui, et avoir cumulé différentes fonctions par nécessité économique avant toute chose. L’une des premières manifestations d’intégrité et de courage dont Éva Circé-Côté a fait preuve a sans doute consisté dans le respect des dernières volontés de son époux qui s’est concrétisé par la mise à l’écart des traditions religieuses lors des obsèques et au choix de l’incinération de sa dépouille, dans un Québec …

Appendices