Entrevue

L’Observatoire sur les profilages (OSP)Entrevue avec Marie-Ève Sylvestre[Record]

  • Katharine Larose-Hébert

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  • L’entrevue a été réalisée par
    Katharine Larose-Hébert
    Stagiaire postdoctorale et professeure remplaçante à l’École de service social de l’Université d’Ottawa

Entrevue avec Marie-Ève Sylvestre, professeure titulaire et vice-doyenne à la recherche à la Section de droit civil de l’Université d’Ottawa, et membre fondatrice de l’Observatoire sur les profilages (OSP).

Marie-Ève : L’Observatoire sur les profilages (OSP) est un espace de veille et de documentation de différentes formes de profilage, plus particulièrement les profilages social, racial et politique. L’OSP permet d’alimenter les débats et les réflexions sur ces enjeux sociaux en vue de soutenir une amélioration des pratiques et des politiques. Il cherche à produire des données nouvelles et des analyses afin de fournir des connaissances scientifiques, judiciaires et médiatiques récentes sur le phénomène des profilages. L’OSP est fondé sur un partenariat entre le milieu de la recherche, des groupes communautaires actifs dans la défense des droits et des acteurs institutionnels, et il est financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH). Pour le moment, il compte sur la participation et l’engagement de sept chercheures et chercheurs de différentes disciplines (droit, travail social, sociologie et sciences politiques) de trois universités distinctes, soit l’Université de Montréal, l’Université du Québec à Montréal et l’Université d’Ottawa. Nos partenaires institutionnels et actifs dans la défense des droits de la personne sont la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec, le Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), la Ligue des droits et libertés du Québec, le Barreau du Québec et le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM). L’OSP est principalement basé à Montréal et au Québec, mais a des projets et des partenaires dans d’autres régions du Canada. L’OSP a plusieurs axes d’intervention. D’abord, il a développé une bibliographie en ligne sur les profilages, qui regroupe une sélection très intéressante et à jour de documents et d’articles provenant des milieux universitaire et communautaire, et ayant une portée internationale. Ensuite, l’OSP produit et collige des données et des connaissances sur les formes de profilage (au moyen de témoignages qu’il recueille ou dans le cadre de projets de recherche), tout en cherchant à valoriser les travaux réalisés par ses membres, qui créent de telles données. L’OSP organise aussi des événements tels que des forums et des conférences, et intervient sur différentes tribunes pour sensibiliser la population aux situations de profilage et les dénoncer. Marie-Ève : L’OSP est le fruit de collaborations qui se sont établies au fil du temps entre les éventuels membres de l’OSP, qui ont travaillé ensemble dans différents contextes et en réaction à différentes situations de profilage et qui ont été réunis grâce au leadership de sa directrice, la professeure Céline Bellot. En ce qui me concerne, je me suis d’abord intéressée au profilage social, ou plutôt à la pénalisation des personnes en situation d’itinérance, dans le cadre de l’adoption de programmes de lutte aux incivilités, puisqu’à l’époque, le terme « profilage social » n’était pas encore « né » ou utilisé. Ma recherche doctorale a donc porté sur l’adoption d’une politique de lutte aux incivilités dans la ville de Montréal et ses conséquences sur les droits des personnes en situation d’itinérance, et sur les principaux discours utilisés par les services policiers et les actrices et acteurs du système pénal pour légitimer le recours à des mesures répressives dans la résolution des conflits liés à l’itinérance (par exemple, le discours selon lequel il existe un consensus dans la population sur la nécessité d’utiliser la force auprès des personnes itinérantes). C’est dans ce contexte que j’ai rencontré Céline Bellot. Elle venait d’entreprendre sa première étude sur la judiciarisation de l’itinérance et l’émission de constats d’infraction aux personnes en situation d’itinérance à Montréal. Après la soutenance de ma thèse, nous avons décidé de travailler ensemble à la fois sur Montréal, mais également d’étendre notre étude à d’autres villes québécoises et canadiennes …