Entrevue

Mesures et indicateurs de la performance en travail social : l’impossible évaluation des pratiques professionnellesEntrevue avec Vincent Meyer[Record]

  • Stéphane Richard

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    Stéphane Richard

Vincent Meyer est professeur à l’Université de Nice Sophia Antipolis en France et membre du laboratoire Information Milieux, Médias, Médiations (I3M). Il siège au Conseil supérieur du travail social (CSTS) où il préside la sous-commission Veille et propositions sur des sujets d’actualité liés aux pratiques, aux enjeux territoriaux et à l’impact des thématiques émergentes sur le travail social.

V. Meyer : D’abord, il importe de préciser que pour moi, les « communications d’action et d’utilité publiques » réfèrent à ce qu’on peut appeler une notion, ce n’est pas un concept. C’est une notion que j’ai stabilisée fin 2004. Au départ, mon travail s’est caractérisé par une étude de la communication dans le social, dans l’intervention sociale; c’est le travail que j’ai réalisé dans le cadre de ma thèse. J’ai étudié un double mouvement. D’un côté, ce qui est médiatisable dans le travail social et de l’autre, la part du social qui revient — dans les années 1980 et 1990 — aux médias. Cet ensemble caractérise ce que j’ai appelé l’« émergence du sociomédiatique ». Après cette réflexion sur le sociomédiatique, j’ai engagé une réflexion sur les usages des équipements médiatiques autour des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Ce qui a donné naissance à une autre notion, celle de « sociotique ». C’est aussi en 2004 que j’ai soutenu mon habilitation à diriger les recherches en sciences de l’information et de la communication sur l’étude de différentes campagnes de prévention, de sensibilisation, des opérations de recueil de dons, mais aussi tout le développement d’une réflexion méthodologique sur la manière dont il faut travailler ces différentes formes de communication publique. En fait, les communications d’action et d’utilité publiques, c’est la notion qui vient, pour le moment, clore toute une réflexion sur la manière dont on communique dans le social, la manière dont les médias et les institutions publiques s’emparent des questions sanitaires et sociales pour communiquer. V. Meyer : Non, c’est davantage du côté des travaux du Groupe national des établissements publics sociaux et médicaux-sociaux (GEPSo) que j’ai abordé ce sujet. En sachant que finalement, ces questions de souffrance au travail peuvent aussi entrer dans des opérations de sensibilisation, des campagnes de prévention liées à différents mondes professionnels. V. Meyer : C’est une question à la fois simple et très complexe parce que dans une période particulièrement douloureuse de ma vie, j’ai dû arrêter mes études et je suis entré par la petite porte dans le monde du travail social. J’ai commencé ma carrière comme moniteur-éducateur, puis j’ai été éducateur spécialisé avant de faire le diplôme supérieur du travail social et de rédiger une thèse de sociologie pour intégrer l’université. V. Meyer : En effet, j’ai commencé à travailler dans un établissement d’accueil pour personnes handicapées mentales, à l’époque, un institut médicoprofessionnel. J’ai commencé ce travail en mars 1981. Je n’avais absolument aucune formation dans le social. Je ne savais pas ce qu’était une personne handicapée. Je ne savais même pas ce qu’était un travailleur social; et la première question que je me suis posée à ce moment-là était : que faut-il comme compétence pour intervenir auprès de ces personnes? Et, croyez-le bien, cette question n’a cessé de structurer mon travail de recherche. J’ai une formation de travailleur social, je suis un travailleur social diplômé, mais pendant toute cette période-là, je n’avais qu’une idée : reprendre mes études que j’avais dû arrêter à un moment de ma vie. Tout en travaillant, je suis retourné à l’université pour y préparer d’abord une maîtrise, ensuite un diplôme d’études approfondies et ensuite un doctorat. J’ai travaillé dans plusieurs établissements. J’ai donc été travailleur social pendant près de quinze ans avec différentes responsabilités sur le terrain. V. Meyer : Bien que dans des stages j’aie eu affaire à des personnes en difficulté sociale, c’est quand même essentiellement le monde du handicap mental et surtout sa prise en charge institutionnelle que j’ai connus. Et, c’est ce qui a aussi guidé l’ouvrage qui …