Lu pour vous

M. Debout, C. Larose, Violences au travail : agressions, harcèlements et plans sociaux, Paris, Les Éditions de l’Atelier/Les Éditions ouvrières, 2003.[Record]

  • Marie-Luce Garceau

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  • Marie-Luce Garceau
    Professeure, École de service social, Université Laurentienne.

Dans ce livre, la collaboration entre un psychiatre, Michel Debout et un syndicaliste, Christian Larose, permet d’illustrer les effets dévastateurs des violences au travail et d’explorer certaines pistes de solutions innovatrices pour les contrer. Dès l’introduction, les auteurs discutent de trois formes de violence : les agressions au travail, les harcèlements et la violence masquée des plans sociaux. Celles-ci s’inscrivent largement dans les processus de déshumanisation du travail qui sont à l’oeuvre dans des entreprises locales, nationales ou internationales. La première partie du livre aborde les agressions survenant dans certains milieux de travail: les transports publics (braquages, vols, bris de véhicules, agressions verbales ou physiques, suicides sur les voies publiques, etc.); le milieu scolaire (violence des élèves, des parents, de collègues ou de personnes extérieures, blessures, vols, etc.); le milieu hospitalier (dégradations de matériels et vol, agressivité des malades et de leurs proches, etc.); le travail social (violence des usagers ou des parents, etc.); les banques (vols à main armée, prise d’otages, séquestrations, etc.); la poste (braquages, agressions verbales et physiques, etc.) et les petits commerces (vols, chantages, atteintes aux biens et aux personnes, etc.). Pour chacun de ces milieux, les auteurs montrent les formes des violences subies par les travailleuses et travailleurs. Ils montrent aussi que la nature et l’origine de ces violences varient en fonction des professions. Tout se joue comme si certains utilisateurs de services prennent pour acquis qu’ils peuvent commettre des incivilités parce que le pouvoir public est diminué par un système qui génère des ayant droit au nom de l’égalité sociale. De plus, les auteurs indiquent que peu importe les secteurs d’activités, les formes d’incivilité et les comportements violents ont des conséquences physiques et psychiques graves. Ces dernières se manifestent avec le plus d’acuité. En ce sens, pour les auteurs, les réactions post-traumatiques (actuelles ou tardives) telles la peur, la honte, l’humiliation, la culpabilité, le sentiment d’abandon, la perte de confiance en soi ou la colère, sont autant d’aspects sur lesquels on doit aider les victimes afin qu’elles dépassent le vécu traumatique. Pour ce faire, les entreprises doivent s’organiser pour offrir un suivi psychologique et les soins nécessaires (immédiats et tardifs). La seconde partie du livre traite du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des autres formes de maltraitance. Davantage connus, suite aux travaux de Marie-France Hirigoyen (1999), les faits violents liés au harcèlement moral se produisent au coeur même des activités de travail, entre collègues, dans une relation de subordination ou dans une relation hiérarchique. Dans ce cadre, les harceleurs (seuls ou en groupes) ont pour but de «pousser la victime à quitter l’entreprise» (p. 88) en utilisant une panoplie de méthodes de harcèlement (propos offensants, humiliations, mise en quarantaine, disqualification, bris de relations, réalisation de travaux dénués de sens, consignes évasives, non reconnaissance du travail accompli, dégradation des conditions matérielles de travail, etc.). Mais, quelque soit la forme utilisée, le harcèlement découle de l’«utilisation abusive du pouvoir qui se transforme alors en un instrument de persécution du salarié mettant en cause ses droits fondamentaux et le respect qui lui est dû» (p. 108). Dans ce processus insidieux, les effets sur les victimes sont importants à court et à long termes (culpabilité, angoisse, sentiment d’abandon, incapacités physiques et psychologiques, manifestations dépressives, atteintes somatiques, etc.). Par conséquent, le repérage est donc une condition de prévention. Cela suppose que les collègues qui connaissent l’existence d’une situation de harcèlement moral, puissent soutenir la victime. Or, les harceleurs réussissent leur entreprise de destruction justement à cause du silence et du non-dit des collègues qui deviennent des complices, souvent innocents, pris dans cet engrenage. Les auteurs pointent donc l’affaiblissement …

Appendices