Le 4 juillet dernier sortait, à l’occasion du Ier Sommet de l’actionnariat salarial , un rapport qui fera date, établi par un expert indépendant, Graeme Nuttall, du cabinet de consultants Field Fisher Waterhouse. Commandité par le vice-Premier ministre britannique, Nick Clegg, ce rapport passe en revue les solutions adoptées au Royaume-Uni, où le secteur encore modeste, mais en croissance, comprend quelque 250 entreprises, avec 110 000 salariés et un chiffre d’affaires cumulé de 30 milliards d’euros . Il propose un ensemble de mesures destinées à permettre un développement beaucoup plus important de ce type d’entreprise, avec notamment la création d’un organisme-centre de ressources chargé de la promotion du concept. On pourrait tenter de le résumer en disant qu’avec un pragmatisme tout anglo-saxon, Graeme Nuttall considère qu’il ne s’agit pas de construire un dispositif entièrement nouveau, mais de faire l’inventaire de l’existant, d’utiliser les solutions adoptées, d’identifier les obstacles et d’apporter les améliorations et les innovations nécessaires. Les entreprises qui souhaitent s’engager dans cette voie disposeront ainsi d’une véritable boîte à outils. Cet événement témoigne de l’importance accordée, au Royaume-Uni, à l’actionnariat salarial, que Nick Clegg veut intégrer pleinement dans le tissu économique de la Grande-Bretagne. Investi dans ce domaine depuis plusieurs décennies, Malcolm Hurlston, président de l’Esop (employee share ownership plans) Center de Londres, y voit une étape tout à fait importante pour le développement du secteur, auquel son organisation a assez largement contribué. L’Esop Center, qui tenait sa conférence annuelle à Paris les 21 et 22 juin dernier sur ce thème, est devenu au fil des ans un véritable centre d’expertise sur les différents aspects (juridique, fiscal, financier) de la participation financière des salariés et des dispositifs variés d’acquisition d’actions des entreprises qui les emploient, notamment par le biais de la participation et de l’intéressement ou de l’exercice d’options d’achat d’actions. Il s’agit le plus souvent, mais pas seulement, d’entreprises d’une certaine taille qui voient dans le développement de l’actionnariat salarial un effet positif tant en ce qui concerne l’attractivité de l’entreprise que sa capacité à retenir ou à attirer des talents, la motivation des salariés bénéficiant ainsi d’un complément de revenu, tous éléments qui ont une traduction concrète pour l’entreprise en termes d’efficacité économique et de climat social. La multinationale française Schneider Electric, qui compte plus de 100 000 salariés répartis dans plus de 130 pays, en fournit une illustration. Elle a mis en place progressivement, à partir de 1995, un plan d’actionnariat qui devrait couvrir à terme 80 % de l’effectif. A l’heure actuelle, ce plan couvre 60 pays représentant 35 % de l’effectif total, avec un taux de détention par les salariés de 5 % du capital et de 7 % des droits de vote. Schneider Electric se situe donc à un très bon rang parmi les entreprises dotées d’un plan d’actionnariat salarial. Cela étant, si le style de management de l’entreprise peut en être affecté positivement, les effets sur la gouvernance et le mode de décision sont plus difficiles à cerner. Autre exemple : chez Essilor, les salariés détiennent aujourd’hui 8,5 % du capital et 15 % des droits de vote, ce qui en fait l’actionnaire numéro un ; leur participation n’est pas que financière . Conforter la stabilité du capital constitue un autre argument en faveur de l’actionnariat salarié. On a pu en mesurer les effets en cas d’OPA hostile. En 1988, les 7 % du capital détenus par les salariés-actionnaires de la Société générale ont ainsi permis de faire échouer la tentative de Georges Pébereau appuyée par le ministre de l’Economie, Pierre Bérégovoy. Dans de nombreuses sociétés cotées en Bourse, …
L’actionnariat salarial : une voie d’avenir ?[Record]
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Marcel Hipszman
Ancien adjoint du délégué à l’Economie sociale, ex-président d'Inaise (réseau international de la finance sociale)
hipszman.marcel@wanadoo.fr