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Ce nouveau numéro de la revue Recherches qualitatives propose un assemblage de textes de différentes natures. En effet, deux textes ont été soumis à la revue en continu, hors des appels thématiques, et ont été évalués en double-aveugle comme le spécifie la politique éditoriale. Ce numéro présente aussi deux textes proposés à la revue qui sont publiés dans la rubrique « Note de chercheur », après une évaluation éditoriale du comité de rédaction. Finalement, comme le veut la tradition annuelle, le texte lauréat du Prix de l’ARQ 2024 est publié après recommandation du jury désigné par l’Association pour la recherche qualitative (ARQ).
Le texte de Guillaume Garcia, ingénieur de recherche au Centre de données socio-politiques de Sciences Po Paris, met en lumière deux procédés de conversion des matériaux en données : la condensation et la transposition. À partir des archives de trois enquêtes de science politique ou de sociologie, il discute le potentiel heuristique de telles archives pour explorer des pratiques qui restent habituellement dans l’ombre. Il présente un usage original d’images qui relatent des démarches d’analyses (thématique, structurale et relationnelle) dont il fait une instructive mise en relation.
L’article de Sandrine Gagné-Trudel, Geneviève Rochon, Pierre-Yves Therriault et Noémi Cantin s’inscrit quant à lui dans les travaux de thèse de la première autrice, étudiante au doctorat en sciences biomédicales de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Il part du constat que des défis persistants entravent la participation d’enfants vivant avec une affection à des recherches de type phénoménologique. Pour en savoir plus sur les préoccupations méthodologiques et les stratégies utilisées par les équipes de recherche, les personnes autrices ont mené une revue méthodologique de 13 études phénoménologiques herméneutiques réalisées auprès d’enfants âgés de moins de 18 ans. L’analyse révèle des défis tout autant méthodologiques qu’empiriques qui vont de la phase du recrutement jusqu’à l’analyse des données, en passant par leur collecte. Entre autres choses, ces défis sont liés à la construction d’un lien de confiance et d’un espace communicationnel inclusif entre les chercheurs et les enfants. Ce texte permet de réfléchir à l’inclusion de groupes sociaux pouvant se trouver exclus de certains dispositifs de recherche qualitative.
Notes de chercheurs
Dans la rubrique « Note de chercheur », Marc D. Lachapelle, doctorant en administration à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG-UQAM), propose un compte-rendu réflexif de l’essai journalistique de Frédérick Lavoie intitulé Troubler les eaux en relevant les similitudes entre les chercheurs et les journalistes dans leur rapport au doute. En mettant à l’avant-plan les doutes et le trouble ressentis dans son propre travail de recherche engagé, l’auteur expose sa réflexion en espérant que, peut-être à son tour, elle ouvrira un espace de discussion.
Dans la même rubrique, le texte de Catherine Bélanger Sabourin (École de travail social de l’Université du Québec à Montréal), Joëlle Morrissette (Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal) et Claudine Blanchard-Laville (Sciences de l’éducation et de la formation de l’Université Paris Nanterre) présente une synthèse des propos tenus lors de deux conférences en ouverture du colloque d’automne 2022 de l’Association pour la recherche qualitative. Un des principaux objectifs de ce colloque scientifique était d’enrichir la réflexion sur l’analyse en groupe de la pratique professionnelle en recherche et en formation. Ainsi, cet entretien vise à créer un pont entre la France et le Québec en mettant en perspective les orientations théoriques et méthodologiques des conférencières d’ouverture : Claudine Blanchard-Laville, professeure émérite en sciences de l’éducation et de la formation à l’Université Paris Nanterre, et Joëlle Morrissette, professeure titulaire en sciences de l’éducation à l’Université de Montréal. Bien que distinctes, les perspectives psychanalytique et interactionniste permettent chacune à leur manière de tenir compte de la complexité de la pratique professionnelle dans différents champs professionnels.
Le texte lauréat du Prix de l’ARQ-Concours 2024
Ce numéro publie également le texte du lauréat du Prix de l’Association pour la recherche qualitative pour le concours de 2024. Ce prix constitue un symbole d’excellence en recherche qualitative en récompensant la qualité de la recherche réalisée par des personnes diplômées de troisième cycle. Octroyé annuellement, il se compose d’un certificat, d’une bourse, de la publication d’un manuscrit présentant un condensé de la thèse de doctorat dans la revue Recherches qualitatives ainsi que d’une adhésion d’un an à l’ARQ. Moyennant le processus de révision linguistique offert par la revue, le texte primé est publié tel que soumis dans le cadre du concours.
Le texte de Nicolas Boissière, diplômé du doctorat en sciences des religions de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), expose une enquête ethnographique qui porte sur le néo-druidisme au Québec. L’enquête qu’il a réalisée s’est étalée sur cinq années. Elle permet de documenter et d’analyser la fabrication de la tradition néo-druidique au Québec, à savoir le processus par lequel les néo-druides québécois font revivre le druidisme de l’Antiquité dans leur espace-temps.
La nature hétéroclite de ces textes montre bien l’étendue de la diversité des points de vue en recherche qualitative. Les contributions présentées dans ce numéro proviennent de différents domaines (sciences politiques, sociologie, sciences biomédicales, éducation, communication, sciences des religions) exposant ainsi le fait que la revue permet de transcender les frontières disciplinaires pour se concentrer sur les enjeux méthodologiques. Cette diversité stimule la réflexion et les discussions méthodologiques qui permettent encore une fois de constater la richesse du champ de la recherche qualitative et démontrer encore la pertinence de la revue après 35 ans d’existence.
Appendices
Notes biographiques
Frédéric Deschenaux est le directeur de la revue Recherches qualitatives depuis juin 2018. Il est professeur titulaire à l’unité départementale des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Rimouski où il enseigne la sociologie de l’éducation et les méthodes de recherche depuis 2004. Ses recherches portent sur les parcours scolaires et professionnels auprès de diverses populations. Il travaille aussi sur les méthodologies d’enquête en sciences sociales et les techniques d’analyse des données qualitatives. Il a collaboré aux activités de l’Association pour la recherche qualitative (ARQ) à titre de président (2000 à 2001) et de vice-président (2003 à 2008). Il a réalisé divers mandats pour la revue, dont celui du passage au format électronique en 1999, et il fait partie du comité de rédaction de la revue depuis 2004.
Chantal Royer est professeure au Département d’études en loisir, culture et tourisme de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) où elle enseigne les méthodes de recherche depuis 1997. Elle a été présidente de l’Association pour la recherche qualitative (ARQ) de 2002 à 2006. De 2002 à 2018, elle a dirigé la revue Recherches qualitatives dont elle assure maintenant la codirection aux côtés de Frédéric Deschenaux (UQAR). En 2004, elle a participé à la fondation du Réseau international francophone de recherche qualitative (RIFReQ) avec le professeur Alex Mucchielli (Université Paul Valéry). Sur le plan méthodologique, elle s’intéresse aux différentes stratégies qui fondent la recherche qualitative, au statut de cette dernière dans l’univers de la science, à sa valeur, à son évolution, aux manières de la transmettre et de l’enseigner. Par ailleurs, ses travaux de recherche portent sur les valeurs des jeunes dont elle analyse différentes facettes.