
Volume 22, 2001
Table of contents (4 articles)
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Recherches théoriques et spéculatives : considérations méthodologiques et épistémologiques
Stéphane Martineau, Denis Simard and Clermont Gauthier
pp. 3–32
AbstractFR:
Ce texte amorce une réflexion sur les aspects méthodologiques liés aux recherches de nature théorique et spéculative en éducation. Plus particulièrement, il vise à démontrer que ce type de recherche commande une méthodologie particulière qui se résume en trois axes fondamentaux : 1) l’interpréter; 2) l’argumenter; 3) le raconter. Dès le départ, une première caractérisation nous amène à proposer que la recherche spéculative vise à produire des énoncés théoriques à partir d’autres énoncés théoriques. À l’inverse de la recherche de type terrain, elle ne travaille pas à partir de données empiriques; l’écrit, le texte, constitue donc la source première de ces énoncés (Van der Maren, 1995). Une seconde remarque nous permet de préciser que ce type de recherche ne consiste pas en une démonstration menée à partir d’un « réel » observable et mesurable; elle vise plutôt à montrer, à mettre en scène, à peser le pour et le contre, à faire des choix et à les soutenir au moyen d’une argumentation. Cette seconde caractérisation nous renvoie à la distinction bien connue de Perelman entre l’argumentatif et le démonstratif (1977). Dans le cadre argumentatif qui est le nôtre, les conclusions correspondent à des choix entre des possibles. Une troisième caractérisation a trait à la construction du « réel ». « L’auteur d’une thèse en Sciences humaines, précise Bernadette Plot, doit donc constituer dans l’écriture son « réel » de manière à ce qu’il apparaisse le plus convaincant possible » (1986, p. 14).
Il s’agit donc de construire un « réel » vraisemblable, acceptable. Finalement, la quatrième caractérisation, plus générale, nous renvoie à ce que Judith Schlanger (1983) nomme « l’oeuvre intellectuelle ». Celle-ci, implique trois dimensions : 1) cognitive, parce qu’elle vise la connaissance; 2) discursive, parce que le désir de connaître s’investit intellectuellement dans un énoncé; 3) inscrite dans une oeuvre, parce que l’invention intellectuelle s’objective dans une construction qui peut survivre à son auteur. Enfin, le texte établit quelques liens entre la production de connaissances en sciences et la production artistique. À cette occasion, en suivant les thèses de Brown (1989), nous proposons une autre manière d’utiliser et de comprendre les notions de « point de vue », de « métaphore » et « d’ironie » dans les écrits en sciences de l’éducation.
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Chercheur, praticien même terrain ?
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Pratiques ethnographiques dans des sociétés lettrées : l’entrée sur le terrain et la recherche impliquée en milieux communautaires
Rachel Bélisle
pp. 55–71
AbstractFR:
L’objectif de cet article est de contribuer aux discussions méthodologiques sur la cohérence interne de pratiques ethnographiques dans des sociétés lettrées et d’ouvrir quelques pistes pour l’entrée sur le terrain et la recherche impliquée en milieux communautaires. Après avoir tracé à grands traits l’histoire de l’ethnographie et rappelé l’origine des recadrages méthodologiques en cours, l’auteure présente quelques-uns de ces recadrages, en les illustrant d’exemples tirés d’une recherche sur la culture de l’écrit d’organismes communautaires québécois oeuvrant en insertion de jeunes adultes peu scolarisés.
Elle présente la référence implicative (Kohn et Nègre, 1991) et s’appuie sur la triade « donner-recevoir-rendre », développée par Marcel Mauss, pour approfondir la compréhension de l’implication. L’auteure porte une attention particulière à l’entrée sur le terrain en lui donnant une interprétation large qui tient compte de l’ethnographie du proche où les ethnographes franchissent régulièrement le seuil de l’extérieur vers l’intérieur et de l’intérieur vers l’extérieur. Elle ouvre quelques pistes de réflexion sur le rôle de l’écrit dans l’entrée sur le terrain et dans l’implication soutenant que dans les sociétés pluriculturelles la culture de l’écrit n’est pas la même pour tous les groupes sociaux.
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Quelques propositions inspirées de la psychanalyse pour augmenter la rigueur en recherche qualitative
Marti Drapeau and Robert Letendre
pp. 73–92
AbstractFR:
Les auteurs s’inspirent de la psychanalyse dans le but d’aider à assurer la rigueur en recherche qualitative en resituant le sujet et le chercheur au centre du processus de recherche. Ils proposent ainsi que le chercheur gagne à s’investir dans la relation avec le sujet. Il est cependant primordial de proposer certaines balises pouvant faire en sorte que cette interaction et les étapes suivantes de la recherche soient crédibles et empreintes de rigueur. Tout en présentant plusieurs concepts méthodologiques, ils suggèrent notamment que le chercheur embrasse le plus pleinement sa subjectivité et qu’il ait recours à un « tiers ».
EN:
The authors explore the advantages of considering psychoanalytic theory when elaborating and pursuing qualitative research. While most study projects tend to exclude the researcher with hope of greater objectivity, the authors suggest that the researcher be fully integrated into his project. However, this can only be done by assuring certain limits. It is therefore proposed that the researcher undergo a personal introspection through therapy or psychoanalytic cure. It is also suggested that the use of a “third party” is an important step towards greater rigor.